La Chute de Nottingham Szp8La Chute de Nottingham 4kdkLa Chute de Nottingham 4kdk
Kingdom Hearts RPGConnexion
Kingdom Hearts Rpg
Nous sommes quatorze ans après les évènements de Kingdom Hearts 2. En tant d’années, les choses ont considérablement changé. Les dangers d’hier sont des soucis bénins aujourd’hui, et au fil du temps, les héros ont surgi de là où on ne les attendait pas. Ce sont les membres de la lumière qui combattent jour après jour contre les ténèbres.

Ce n’est plus une quête solitaire qui ne concerne que certains élus. C’est une guerre de factions. Chaque groupe est terré dans son quartier général, se fait des ennemis comme des alliés. Vivre dehors est devenu trop dangereux. Être seul est suicidaire. A vous de choisir.

La guerre est imminente... chaque camp s'organise avec cette même certitude pour la bataille.

Le Deal du moment : -14%
Apple MacBook Air (2020) 13,3″ Puce Apple M1 ...
Voir le deal
799 €

La Chute de Nottingham

more_horiz

Le soleil s’était levé, comme chaque matin depuis bientôt plus d’une année. À la différence qu’aujourd’hui, la rate ne mimait pas le sommeil quand les rayons de l’astre transperçaient la toile de la tente. Avait-elle réussi à fermer l’oeil de la nuit ? Elle l’ignorait, elle avait passé son temps à se retourner dans sa couche et à osciller entre songe et réalité. Ses compagnons de chambrer n’étaient pas encore réveillés, du moins, c’est ce qu’elle pensait. Elle ignorait depuis combien de temps elle s’était assise sur le rebord de son lit, le menton baissé alors qu’elle fixait ses pattes comme elle l’avait fait il y a moins de quelques jours avec Sora. À différence qu’aujourd’hui, elle ne baignait pas dans un doux mensonge loin de ce qui l’horrifiait, tout allait se décider aujourd’hui.

Avec tout cela, sa jambe droite était tendue et son genou ne cessa pas de sauter de bas en haut dans un rythme soutenu alors que son regard se perdait sur sa lance posée dans un coin. Elle était terrifiée de ce qui pouvait se passer aujourd’hui, la guerre allait se jouer avec ou sans elle. Cependant, un seul et unique sentiment la poussait de l’avant pour prendre part à cette bataille. Et cela, depuis le jour où elle posa de nouveau son pied sur les terres l’ayant vu naître.

Un seul et unique désir l’animait ardemment, faire face à cet homme une seconde fois avant que tout ne se termine pour elle.

— Freyja…?
Elle sursauta légèrement, perdant sa concentration alors qu’elle tourna la tête pour apercevoir un raton-laveur dans l’encadrement de l’ouverture de la tente. Elle savait pourquoi il était là, c’était le moment pour eux de partir en direction de Nottingham. Hochant doucement la tête, elle se leva pour attraper la hampe de son arme et quitter, probablement pour la dernière fois, la sécurité des toiles de cette tente dans lesquelles elle n’avait aucun souvenir.

Ils étaient cinq à marcher silencieusement dans la rangée de tentes, cinq rebelles envoyés par le shérif afin de remplir une simple mission avant que l’armée de Primus ne se jette sur les murailles de la ville. Les choses se passèrent simplement. Avant qu’ils ne partent ensemble dans la forêt, l’ours avait rejoint l’escouade pour un dernier briefing et souhaiter à ceux-ci la bonne chance. Une mission de grande importance, sur le papier du moins, à ne pas comprendre pourquoi la rate en faisait partie. Une fois les instructions entendues et répétées, les rebelles attrapèrent une toile en lin ainsi qu’une paire de corde et vérifièrent une dernière fois leurs biens et leurs armes avant de s’en aller dans les bois.

D’un pas lent, Freyja ferma la marche et observa les autres rebelles dont elle allait avoir la chance de côtoyer pour les trois prochaines heures. Un lièvre, deux ratons-laveurs, une marmotte et une rate. Voici de quoi était composée la troupe chargée de franchir en premier l’enceinte de Nottingham, cela faisait faussement sourire la rebelle, cela sonnait comme une mauvaise blague contée par Petit-Jean. Toutefois, elle avait déjà été en mission avec le lièvre et les ratons-laveurs, elle avait au moins la certitude de ne pas se jeter dans la gueule du loup sans la moindre chance de vaincre.

Le soleil continuait sa course alors que les cinq rebelles sortirent enfin de la lisière de la forêt. Immobile, comme frappé par la grandeur de l’espace séparent les bois de la ville, il fallut que le lièvre pousse chacun à avancer en direction de l’est. Loin de la route royale et des chemins pouvant mener aux herses de la ville. Ce n’est qu’au bout d’une heure de marche, rythmée par les paroles des frères ratons-laveurs et des rires aigus de la marmotte, qu’ils arrivèrent à leur point de chute décrit par le shérif. Le fleuve traversant la ville, le Trent, accueillait les rebelles sur ses rivages en ce début de matinée. Son éclat invitait à la baignade alors que le lièvre étala la toile sur l’herbe encore humide de la rosée du matin.

— Bien, vous savez ce qui vous reste à faire.
— Damien, trouve une branche d’arbre assez solide pour servir de radeau.

Les deux rebelles hochèrent la tête avant de déposer leurs arcs ainsi que leurs flèches sur le drap, se dirigeant ensuite vers un arbre risquant de chuter dans le bleu de l’eau.

— Nous allons passer un certain temps dans l’eau…
Freyja avait parlé avant de déposer sa lance sur le drap, en même temps que Denise rangea ses masses d’arme ainsi que son épée courte à proximité de l’arme de la rate. Le lièvre se contenta de sifflet en défaisant sa ceinture pour ensuite la poser à son tour sur le drap.

— Il fallait bien ça pour éviter la surveillance des hommes du régent.
— Nous allons nous fatiguer plus que de raison, et notre contact ?
— Le fils d’Amy nous rejoindra sous le premier pont en amont du fleuve, et nous pourrons nous reposer chez elle.
— Le carrosse est prêt !

Les deux frères arrivèrent à ce moment, accrochés à la moitié d’un tronc flottant sur les eaux du Trent. Ensemble, le lièvre et Freyja refermèrent le drap avec les cordes avant de s’avancer ensemble dans l’eau afin d’accrocher les armes au bout du tronc. Les corps émergés, les cinq rebelles finirent par quitter le rivage et se laissèrent porter par le courant en direction des murailles de Nottingham. La tête hors de l’eau, ils ne pouvaient rien faire d’autre que d’attendre en battant des pattes qu’ils arrivent à destination.

— Les gars, ça va être à nous…
La tête à moitié immerger, Freyja leva les yeux en direction des hauteurs des murailles à l’instant ou l’ombre créer par celle-ci vienne s’abattre sur le fleuve. Plissant les yeux, elle distingua deux silhouettes de loup et elle avertit les quatre rebelles en levant sa main trempée et frappa deux coups sur le tronc. C’était le signal pour qu’il continue le chemin sans le tronc d’arbre et leurs armes. À tour de rôle, ils prirent une grande respiration avant d’enfoncer leurs têtes dans les profondeurs du Trent, la rate étant la dernière à plonger avant de donner une impulsion sur le tronc.

Les joues gonflées, Freyja ouvrit les yeux dans l’eau et laissa quelques secondes se passer pour s’habituer à la teinte sombre obscurcissant sa vue. Elle pouvait voir à sa gauche la marmotte avancer dans l’eau avec facilité alors que le lièvre faisait battre ses pattes à toute allure, les ratons-laveurs étaient en avance par rapport au groupe quand la rate décide enfin de se propulser de ses bras. Battant la mesure, les cinq rebelles avancèrent dans l’eau et laissèrent l’arbre continuer sa route seule alors que la pénombre se faisait de plus en plus oppressante aux rythmes qu’ils approchèrent de la muraille. Elle ignorant combien de mètres ils avaient parcouru, mais à chacune de ses impulsions, de mince bulle d’air s’échappèrent du bout de son museau pour remonter calmement à la surface. Rejoignant ainsi celle que les autres rebelles laissaient derrière eux.

Elle se surprit à appréciée de nager dans le courant de Trent, guidé par la force du fleuve pour rejoindre la muraille. D’ici, comme quand elle sautait dans les airs, tout était calme et silencieux. Comme si, l’espace d’un instant, rien d’autre ne comptait.

Finalement, elle distinguait au loin une masse sombre s’approcher en même temps que la fraternité remontait vers la surface. D’un coup d’oeil sur la gauche, Freyja remarquait aussi le lièvre et la marmotte rejoindre les deux autres rebelles. Laissant échapper de nouvelles bulles, elle se décida à les rejoindre pour trouver ses compagnons reprenant leurs inspirations, ils étaient tous accrochés à la grille de fer empêchant le fleuve de déverser ses déchets dans la ville. Émergeant, passant sa main sur son visage pour y voir claire, Freyja battait des jambes pour s’accrocher à proximité de la marmotte. Rabattant sa chevelure en arrière, soufflant l’eau s’accumulant sur son nez, elle laissa son regard se perdre de l’autre côté à la recherche d’un garde en pleine patrouille.

— Nous avons le champ libre, Damien et moi détacherons les armes et les ferons passer de l’autre côté de la grille dés que l’arbre sera arrivé.
— Je passe déjà de l’autre côté, pour vérifier si le fils d’Amy est présent.

Une fois sa phrase finie, la marmotte replongea pour apparaitre de l’autre côté de la grille avant de faire un signe de plonger de nouveau, le pont étant à une centaine de mètres de la grille présente sous la muraille. Silencieusement, les rebelles attendirent un peu moins de cinq minutes pour que le tronc de l’arbre vienne percuter la grille et doucement prendre la largeur de l’ouverture. Ensemble, l’un des ratons-laveurs et la rate plongèrent dans l’eau à plusieurs mètres pour attraper la toile enroulée dans laquelle se trouvait les armes. De son côté, le lièvre coupa la corde, ce qui laissa peu de temps pour que les deux rebelles attrapent la lourde cache d’armes et fassent passer cette dernière entre les barreaux de la grille de fer.

La rate passa sans difficulté dans les ouvertures, tournant sur elle-même afin d’attraper le bout du pack et tirer celui-ci dans l’eau alors qu’un raton-laveur l’avait rejoint. De l’autre côté, le lièvre et Damien poussèrent de toutes leurs forces, faisant échapper un épais nuage de bulle avant que les armes ne tombent lourdement au sol. Epuisé, ils remontèrent à la surface avant de continuer leur manoeuvre aquatique.

— Où est Damien…?
Le rebelle au côté de Freyja blêmit un instant avant de reprendre sa respiration et plonger de nouveau. Il fut rapidement suivi de la rate et le lièvre qui atteignirent le bas de la grille. Et sous leurs yeux médusés, les rebelles purent voir Damien bloqué entre les grilles de fer. Rapidement, Freyja remarqua que celui-ci avait une patte de prise dans l’une des cordes sensées maintenant le drap en place, et que celui-ci plongeait le raton-laveur par le fond. Le lièvre était de l’autre côté et tenta de le tirer vers le haut alors que les bulles se firent de moins en moins nombreuses. Poussant sur ses jambes, la rate se propulsa à toute allure vers le pack et ouvrit la gueule pour tenter de ronger la corde alors que les deux autres tentèrent de le remonter désespérément le rebelle piégé par les flots.

Elle sentait la corde contre sa langue, ses crocs tentant frénétiquement de défaire les liens, mais rien à faire. Elle tourna la tête rapidement pour voir le corps flotter de lui-même alors qu’elle finit par défaire le noeud de ses longs doigts avant de remonter reprendre de l’air à son tour. Ils étaient tous les quatre à la surface désormais.

— Damien… Damien…
— Ferme là, bon sang !

Le raton-laveur tentait désespérément de ternir la tête de son frère hors de l’eau alors que son corps restait immobile et que son visage était figé dans cette expression de peur.

— C’est trop tard…
Souffla Freyja, posant sa patte sur l’épaule du survivant alors que le lièvre plongea pour aller de l’autre côté de la grille.

— Il savait dans quoi il s’embarquait, maintenant, vient ou sa mort sera inutile.
Les traits du raton-laveur étaient déformés alors qu’il lâcha le corps de son frère qui s’enfonça lentement dans l’eau. Il resta seul un instant avant de plonger à son tour, suivit de la rate et ils allèrent récupérer les armes tombées au fond du fleuve. Finalement, après une dizaine de minutes, le lièvre, le raton-laveur et la rate arrivèrent sous le pont est de la ville et se firent aider par un lapereau et la marmotte pour remonter le paquet sur le rivage. Ils avaient posé pied dans la ville deux heures avant l’assaut de Primus, tout se déroulait selon le plan de bataille. Enfin, presque comme cela était prévu par le commandement.

Ils évitèrent d’en dire trop sur le coup, la marmotte comprenant rapidement ce qu’il en retournait alors que le fils d’Amy indiqua la direction à suivre aux rebelles. Les vêtements trempés, ils longèrent le fleuve sur deux cents mètres avant de remonter dans la rue principale et rentrer dans une petite chaumière dans laquelle un feu ainsi que les tenues des rebelles les attendait.

— Vous ne deviez pas être cinq…?
Amy avait sur elle des draps pour permettre aux rebelles de se sécher en attendant l'heure de l’assaut, elle resta de longues secondes avec la serviette sèche dans les mains avant de la jeter dans un coin de la pièce et amener un bol de soupe à chacun.

— Je… Prenez ça, vous allez en avoir besoin… Vos affaires sont à l’étage, mon fils à été les récupérer à l’entrée de la ville.
Remerciant la lapine, les rebelles restèrent silencieux un instant, observant une minute de recueillement à la première victime de la bataille avant de monter tour à tour pour se revêtir de leurs tenues. Freyja était monté la première et redescendit rapidement avec son chapeau sur la tête ainsi que son long manteau couleur cramoisi avant de soulever la toile sur la table pour ouvrir cette dernière et récupérer son arme. Elle profita de l’hospitalité un instant avant d’aller se poser devant la fenêtre. Dans moins de deux heures, ils allaient devoir se préparer pour la suite de leur mission. Dans moins de deux heures, la bataille allait commencer aux portes de la ville.


more_horiz
Une voix vint briser le silence oppressant qui avait abattu le moral de chacun des hommes présents. La guerrière leva légèrement son menton, cherchant du regard la haute silhouette de l’ancien shérif, l’ours qu’elle avait côtoyé ces trois dernières années, devant les troupes, entre les arbres de la lisière de la forêt.

« Depuis que je me suis levé ce matin... » commença-t-il d’une voix forte, douloureuse. Son visage était sombre et elle y lisait de la souffrance, comme toujours. « j’ai vu plus de visages abattus que toute ma vie durant. Je vis dans le pays qui a le plus souffert ces dernières années, mais c’est aujourd’hui que je le remarque vraiment. »

Ravness détourna les yeux de l’hybride, cherchant entre les ramures des arbres la ville de Nottingham, essayant de chasser la pression qui contractait son ventre. Elle n’était pas faite pour les discours… ni pour les réciter, ni pour les écouter. Seul un la touchait : celui du prêtre. Et les paroles de Frère Tuck résonnaient dans sa tête, semblaient plus réelles que celles du shérif.

« Et je me sens coupable, mes frères. », dit-il, marquant une longue pause. « Coupable car aujourd’hui est le plus beau jour de ma vie. Je n’ai jamais été aussi heureux… Nous avons vécu toutes ces années dans la forêt, nous avons supporté cette guerre. Et pour certains, nous nous sommes convaincus que cette situation n’était pas si mal, que cachés comme nous l’étions, nous ne craignions rien. Mais tout rebelle que nous sommes, nous ne sommes pas libres. Et elle est là, la liberté ! »

Le shérif souleva son bras presque totalement paralysé, pour désigner d’un doigt tremblant le château. « Ce n’est pas Kefka, non. C’est à la honte que nous aliénons notre liberté depuis bientôt quatre ans ! La honte de ne pouvoir renverser l’oppresseur, de laisser des centaines d’âmes dans la misère. »
Le bras de l’ours retomba lourdement tout contre son corps. Elle le fixait, à présent. S’il survivait à la guerre et si celle-ci se soldait par une réussite, elle serait tentée, du moins songea-t-elle, de considérer enfin avoir un ami. Depuis toutes ces années…
Et tout allait se finir en ce jour.


« Je serai heureux si je meurs. Je serai heureux au paradis, je serai heureux en enfer. Je serai heureux, victorieux, si je revois mon épouse. Je serai heureux si nous devons tous mourir pour permettre la paix à notre peuple. Il n’y a qu’une chose qui pourrait entacher mon bonheur ! Un jour de plus avec Kefka au pouvoir ! Un jour de plus en sachant la Forêt de Sherwood oppressé ! »

« Facile à dire… Il restera en dernière ligne jusqu’à la dernière minute de... »

Général Primus regarda par-dessus son épaule le brigand murmurant cette horreur. Il se tut lorsqu’il croisa son regard de glace. Un instant plus tard, elle regarda à nouveau devant elle, les sourcils froncés. Les hommes semblaient avoir récupéré la vigueur, voire une certaine joie. Qui aurait pu croire, dix secondes auparavant, que des rires s’élèveraient encore de cette armée. Les voilà discutant, plaisantant entre eux… Enfin…

« Générale. »

Ravness hocha la tête et se fraya un chemin jusqu’au shérif qui rejoignit les rangs. Elle balaya l’armée d’un regard… Une armée de capes grises. Elle tendit une main devant elle, faisant apparaître une hampe contre sa paume. D’un mouvement sec, elle fit volte-face, laissant son étendard, un drapeau blanc, flotter au vent.

« On attaque. »
La générale sortit de la forêt et avança à pas rapide et lourd vers les murailles de la ville de Nottingham. Un boucan important suivit sa suite, des centaines de brigands désorganisés, armés d’arcs, d’épées et de fureur. Elle commença à trottiner, donnant le rythme. Cette bataille, elle la dirigeait, mais pas seule. Chacun des généraux de cette rébellion avait un commandement très précis. Et pas un homme ne la dépassa alors qu’elle avançait à bon rythme le long de la grande plaine qui la séparait encore de la ville.

Les murailles se rapprochaient bel et bien et avec elles, l’impression de toucher au but. Si elle ne pouvait récupérer tout ce qu’elle avait perdu au terme de cette guerre, elle pourrait au moins reconstruire quelque chose, enfin.

Les trois kilomètres séparant la porte nord de la forêt de sherwood furent bientôt derrière les brigands. Arrivés à quatre centaines de mètres des remparts, elle s’immobilisa, cria à l’armée de s’arrêter et planta violemment son drapeau blanc dans le sol. Elle pouvait déjà voir les dizaines de loup, archers félons, se positionner sur le chemin de ronde de la muraille en pierre, menaçant les brigands de leur tir. Ils n’étaient guère assez bons archers pour les abattre d’aussi loin… mais ils étaient bien commandés. Aussi la suite avait-elle été réfléchie avec prudence.

Prudence mais raison. Nulle guerre ne se faisait sans sacrifice. La première chose que la rébellion devait faire était d’ouvrir la porte nord. Freyja avait été envoyée dans ce but… Et la plupart des généraux allaient s’y investir.

Son épée apparût dans sa main. Elle la brandit une seconde avant de la baisser, à l’intention d’un premier détachement. Une cinquantaine de capes grises se détachèrent du bloc et s’avancèrent vers les remparts. Ravness n’eut le temps de chercher ceux qu’elle devait protéger davantage durant toute cette guerre, ceux qui n’avaient pas le droit de mourir. Elle sentit la présence, ou plutôt le parfum de l’officier Ambre, à ses côtés et savait que Sang-Bleu n’était pas loin. Ils avaient entraîné avec elle, ces derniers mois, tous les brigands, jour après jour mais celui-là, ils étaient avec elle, la couvraient. En fin de compte, elle voulait bien se sacrifier mais refusait de forcer ses deux officiers à faire de même durant cette guerre-ci. Ils avaient encore des batailles plus importantes à mener. Elle aussi.

Les dizaines d’hommes couraient sous ses yeux vers les murailles quand un cri l’alerta. Elle vit un… non, deux rochers voler dans la direction de son armée. Bien qu’incertaine quant à leur chance de toucher au but, elle ne prit aucun risque. À quelques mètres de ses hommes, les projectiles catapultés depuis l’enceinte de la ville furent arrêtés l’un après l’autre dans les airs par la seule force de sa pensée. Elle ne bougea pas d’un pouce, même lorsqu’elle les envoya un peu plus loin, sans effort, du moins apparemment.
more_horiz
Sous le soleil d'avant-midi, cinquante hommes avaient été envoyés vers le mur d'enceinte de Nottingham par le Général Primus. Ils portaient de lourdes barricades. Parmi eux, un homme-tortue s'arrêta de courir pour regarder passer les rochers qui menaçaient le gros de l'armée. En les voyant projetés à l'écart par la simple volonté du Général, il soupira de soulagement.

"Fiou. C'est pas passé loin."
"Timor ! Qu'est-ce que tu fous ?" lui lança un lapin du détachement.
"J'arrive, j'arrive !"

Il reprit sa course, et au prix d'un certain effort, rejoignit ses camarades. Devant eux, pour les guider, il y avait Robin des Bois. Ils l'auraient probablement suivi en enfer. C'était d'ailleurs ce qu'ils faisaient. "Hardi, compagnons. Le vent est avec nous", leur lançait le renard avec enthousiasme. Il avait raison : le vent les poussait vers le mur d'enceinte de la ville, il les galvanisait comme les mots du shérif deux minutes plus tôt. Même sa carapace lui paraissait plus légère. Il aurait presque pu voler comme un des vautours qui les accompagnaient. C'était excitant, il n'avait jamais été aussi rapide. La muraille se rapprochait vite, il pouvait voir la porte d'entrée de la ville, avec sa herse. Et en haut des remparts de pierre, des... des loups qui bandaient leurs arcs.

Il tomba à terre et se cogna la tête. Par réflexe, il rentra tous ses membres dans sa carapace. Recouverte par sa cape grise, elle passerait inaperçue
"Peut-être que je vais rester là", se dit-il d'une voix tremblante. "Oui, c'est plus sage." Les autres ne l'attendraient pas de toute façon. Ils étaient sûrement déjà trop loin, inutile d'essayer de les rattraper.

Par acquis de conscience, il sortit sa tête pour vérifier, et vit deux chaussures noires. Remontant le long du corps de l'humain accroupi en face de lui, il finit par croiser son regard assuré, son sourire encourageant et la main gantée qu'il lui tendait.
"On ne peut plus reculer maintenant. Et on a besoin de tout le monde. Viens." Une flèche tomba à dix mètres d'eux et se planta dans la terre. L'homme-tortue sortit une main pour attraper celle de l'homme-hérisson et se hissa de nouveau sur ses jambes. De toute manière, c'était cuit. Impossible de revenir en arrière. Et même si la peur lui prenait au ventre, il pouvait, il devait la surpasser. Il hocha la tête à l'intention de celui qui était revenu le chercher et courut à ses côtés pour rejoindre les autres. Une autre flèche tombait sur eux. L'homme-hérisson poussa l'homme-tortue sur la droite et fit une roulade pour esquiver le trait mortel. La flèche ne trouva que de l'herbe et de la terre.

"Fiou. Merci...
-Sora.
-Timor."

Ils se remirent à courir. Les autres avaient déjà posé leurs barricades, faites de paille et de bois. Elles étaient à distance du mur d'enceinte de Nottingham, mais à portée de tir. La paille et le bois protégeaient les attaquants des flèches qui fusaient d'en haut, et dans leur détachement, les archers et arbalétriers commençaient déjà à rétorquer. Ceux qui ne pouvaient pas tirer à distance tenaient les barrières. Robin et Petit-Jean étaient sur la droite. L'ours maintenait la barricade en place avec son dos robuste, le renard tirait flèche sur flèche, se mettant à couvert juste le temps de les encocher. Sora les rejoignit et s'adossa pour soutenir lui aussi la barricade.

"Tu sais, Robin..."
- Oui, Petit-Jean ?" Une flèche ennemie se ficha dans la paille, juste entre eux.
"Nos promenades au bois me manquent un peu." L'ours semblait nonchalant, comme s'ils n'étaient pas en pleine bataille.
"Je te comprends, mon ami." Le renard se releva, ajusta rapidement son tir, et sa flèche fila jusqu'en haut du mur d'enceinte, transperçant la poitrine d'un loup qui s'effondra sur le champ.
"D'accord, le Prince Jean était un sordide personnage. Mais souviens-toi comme on pouvait le duper ! Et ses soldats ne savaient vraiment pas viser.
- Petit-Jean, j'essaie de me concentrer." Robin s'était arrêté de tirer pour tourner brièvement la tête vers son compère.
"Oh. Pardon." L'ours se racla la gorge, mais sa gêne ne dura qu'un instant. "Enfin, ce clown est quand même beaucoup moins drôle.
- Tu dis vrai ! Seul son trépas nous mettra en joie.
- Prions que ce soit pour tout à l'heure.
- Je parie mon chapeau."

Sora écoutait l'échange entre les deux amis, appréciant le lien presque tangible qui les unissait, dans leurs souvenirs et dans leur détermination. Il n'était pas de ceux qui plombaient l'ambiance, et pourtant... Kefka n'était pas le nœud du problème. Quelque chose lui disait, l'expérience peut-être, qu'il y aurait toujours quelqu'un, quelque chose pour prendre sa place. Quelque-chose de différent, de plus insidieux encore.

Des éclats de voix coupèrent court à ses pensées.
"Bon sang, la barrière !" "Merde !" "Relevez moi ça, on est à découvert là !" Sans attendre, il se précipita le long des défenses pour rejoindre l'endroit où elles étaient tombées. Il vit un vautour, un des leurs, à découvert. Le courageux encocha un carreau d'arbalète mais n'eut pas le temps de viser, une flèche malvenue lui perça la gorge. Un simple râle, court, et il tomba inerte au sol. Personne n'avait le temps de s'apitoyer, d'autres risquaient leur peau pour redresser la barricade. Il leur fallait juste un peu de temps.

Alors Sora bondit devant leurs défenses et tendit le bras vers le loup le plus proche, là haut.
"Feu". Une petite nuée de flammes quitta ses doigts et se dirigea vers la cible. C'était lent, bien plus lent qu'une flèche et l'ennemi eut le temps de se mettre à couvert. Sora en cibla un autre sur la droite, "Feu", avec la même conséquence. Au moins, il avait attiré l'attention sur lui. Il sourit aux arcs bandés dans sa direction, poussa même l'affront jusqu'à les saluer de la main. "Il est fêlé, celui-là", entendit-il derrière lui, ce qui élargit son sourire. Les yeux rivés et concentrés sur le, non, les projectiles, il esquiva le premier d'une glissade sur la droite, le deuxième d'une roulade en avant et le troisième d'une parade précise avec son arme.

"C'est bon, Sora ! Reviens !" C'était la voix de Timor. Prenant appui sur ses genoux, Sora fit un salto arrière pour retomber à l'abri de la barrière. Les flèches se plantèrent à l'endroit où il se tenait deux secondes plus tôt. Il sourit à l'homme-tortue qui bloquait la lourde barricade avec sa solide carapace. Mine de rien, il était plutôt heureux de son petit manège. Ça faisait si longtemps qu'il n'avait pas ressenti ce petit frisson sur la nuque et les épaules. Rien de tel que prendre des risques inconsidérés et réussir !

"Bon sang, on va pas tenir longtemps ! On sert à rien là", se plaignait un lapin dont le carquois était presque vide. "Si. On les occupe, comme prévu !" répondit Sora en tournant la tête vers la porte de la ville, toujours fermée par cette lourde herse. "Freyja va nous ouvrir la porte. Bientôt." Si tout allait bien. Tout irait bien. "Et Will..." "Il est là !" le coupa Timor avec entrain. Il pointa du menton l'escouade qui dévalait la plaine, avec à sa tête, à la tunique teintée de rouge, épéiste renommé, brigand sans peur, le joyeux Will l'Ecarlate. Le loup et sa petite horde les dépassèrent sans ralentir, certains d'entre eux lancèrent des grappins vers le haut de la muraille.

"Très bien, compagnons !" criait Robin. "Voici notre moment. Ils doivent arriver en haut sans encombre, alors tout le monde, tir de couverture !" L'autorité du renard, la détermination et la chaleur dans sa voix forcèrent le courage de ceux qui commençaient à flancher. Comme un seul homme, les archers derrière les barrières se redressèrent pour tirer. Sora avait bien envie de refaire un tour à découvert, mais il n'était pas certain de pouvoir réitérer sa petite performance. Il se contenta d'aider Timor à maintenir leur protection en place.

Les échanges de flèches firent des morts. Quelques-uns sur les remparts, et plus en bas. Sora ne voulait pas les regarder, mais il entendait leurs cris étouffés. Il préférait se concentrer sur l'équipe qui assaillait la muraille. Deux grappins étaient tendus, deux autres avaient manqué leur cible. Déjà des téméraires escaladaient les cordes, et Will l'Ecarlate était le premier.
more_horiz

Le corps sans vie de Damien avait été retrouvé dans le Trent, flottant sur le ventre et transporté par le courant au sein même de la ville, du moins, c’est ce que c’était imaginé son frère. Toujours dans la maison d’Amy, la troupe de rebelles attendait son heure jusqu’à ce que la rate distingue de l’autre côté de la fenêtre les hommes du régent fouillant chaque coin de rue. Ça ne pouvait pas être une coïncidence. À moins que l’un des vautours ait trahi la confiance de Robin pour venir rapporter l’attaque éminente de la rébellion, ou simplement qu’un éclaireur ait été aperçu du haut de la muraille extérieur. Aucun des quatre rebelles déjà présent dans la ville ne savait à quelle version s’accrocher, l’attente se faisait de plus en plus longue et la tension grimpait sous le toit de chaume.

Collé contre le mur, penchant légèrement la tête vers le bas pour avoir une bonne vision sur la ruelle, elle écoutait d’une oreille distraite ce qui se disait dans la pièce. Comme souvent, elle avait tendance à laisser ses sentiments prendre le pas et ses yeux ne traquaient plus les patrouilles de loup, ils étaient à la recherche de ses traits familiers. Instinctivement, elle amena sa main libre à hauteur de son coeur et posa cette dernière contre son manteau.

— C’est forcément elle…
Extraite de ses songes, Freyja porta son attention sur le raton-laveur qui la pointa d’un doigt accusateur. Soufflant des narines, elle détacha son regard et pencha de nouveau la tête pour continuer de regarder au travers de la fenêtre.

— Le shérif lui fait confiance, elle ne serait pas ici dans le cas contraire. Réfléchi un peu, et concentre-toi !
— Et la générale ne lui confirait pas la moindre tâche, il y a une raison à cela ! La dernière s’est soldé par un échec et une trahison. Ouvrez les yeux bon sang, mon frère est mort pour rien parce qu’elle a déjà tout balancé à Kefka.

Il y a une année de cela, elle aurait été blessée d’entendre ce genre de chose de la part de quiconque. Toutefois, cela faisait de nombreux mois qu’elle vivait avec des brimades et des reproches faites à son encontre. Au point où elle en était, cela ne lui faisait plus rien d’être le catalyseur de la colère du raton-laveur. Si cela lui faisait du bien, soit, elle n’en avait que faire à cet instant précis.

— L’attaque est lancée.
Freyja se redressa, laissant son regard perdu de l’autre côté de la fenêtre. Les cors de la ville résonnaient déjà dans l’air et les gardes affluaient dans la rue pour rejoindre l’entrée nord de la ville. Laissant tomber la pointe de sa lance au sol, agrippant la hampe de son arme en son centre, elle s’avança dans la pièce avant de s’arrêter devant le raton-laveur et baisser son regard pour que leurs yeux se croisent. Elle ne disait rien, elle n’avait rien à dire et lui non-plus. Ensuite, elle redressa son regard et regarda la mère du lapereau et dessina un mince sourire sur son visage.

— Merci pour votre hospitalité et votre soupe, elle était délicieuse.
— C’est vrai, merci Amy.

La marmotte acquiesça à son tour, et finalement le raton-laveur. Alors que le martèlement des pas se faisait entendre de l’autre côté de la porte, les rebelles s’équipèrent chacun a leur tour et finalement, ils revêtirent tous la cape caractérisant les hommes de Robin avant de saluer leur hôte et quitter le toit de chaume pour accomplir leur objectif. Paradoxalement, ils étaient arrivés dans la ville en premier, mais ils n’allaient combattre que maintenant.

Le lièvre prenait la tête de la troupe, ses couteaux à la ceinture et brandissant l’arc du défunt frère. Le raton-laveur était à sa suite, une flèche déjà encochée alors que Denise restait au côté de Freyja, l’épée au clair et pointant du doigt la direction de la herse. Fermant la porte, la rate soupira un instant avant de regarder le prolongement de la rue et vérifier qu’aucun garde ne les prennent par surprise, donnant le signal que la voie était libre, la troupe amorça sa course dans les rues de la ville de Nottingham. Ils étaient tous les quatre les épaules basses, cherchant à se faire le plus discret possible en sachant pertinemment que l’attention des hommes de Kefka était contre le détachement au pied de la muraille. Dans le cas où, la stratégie mise en place par le commandement avait fonctionné jusqu’à présent. Toutefois, à l’instant où ils seront découverts, ils ne pourront plus que compter sur eux-mêmes.

— La herse est devant nous !
Le lièvre prévenait les rebelles quand il arriva à une bifurcation, l’instant d’après, il se plaqua contre le mur et invita les autres à faire de même. Rapidement, il passa sa tête et revint en soufflant avant de reculer de quelques pas et faire face à la marmotte.

— Cerbère est là, à une trentaine de mètres de la herse et il envoie ses loups sur les murailles, le mécanisme est protégé par des rhinocéros.
— Haut les coeurs compagnon, nous sommes là pour ça et ils attendent de l’autre côté !

La rate hocha la tête, comme pour répondre à la marmotte qui tentait de motiver les troupes après les paroles du lièvre. D’un coup d’oeil en arrière pour vérifier s’ils n’étaient pas suivi, Freyja décida ensuite de pousser sur ses jambes assez fort pour d’accrocher au rebord d’un toit de chaume et se hisser discrètement. Elle observa à son tour les soldats de Kefka grimper le long des chemins pour atteindre le sommet des remparts, et il y avait déjà des loups occupés à décocher leurs flèches. Se redressant légèrement, elle regarda sur la droite de la herse et distingua un chemin menant directement au pied de la muraille et traçant une voie directe jusqu’au système d’ouverture de la herse. Ne se faisant plus attendre, elle descendit de son perchoir et rejoint les rebelles, expliquant ce qu’elle estimait être la meilleure marche à suivre.

— Nous devrions longer la muraille et éviter le conflit autant que possible. L’instant ou Cerbère nous aura remarqués, nous aurons peu de temps avant qu’il n’envoie des hommes sur nous et donc ouvrir la herse.
— Elle a raison, ne perdons pas de temps !

Le lièvre avait parlé et commença déjà à revenir sur ses pas, le reste de la troupe de rebelles le suivit rapidement pour passer entre deux maisons et rejoindre au pas de course l’ombre qu’offrait la muraille de pierre.

Soufflant sous l’effort, la troupe bifurqua au croisement sans vérifier au préalable s’il y avait des hommes du régent pour les accueillir. Seul le raton-laveur, qui fermait la marche, prit le temps de tourner son regard, et ainsi, décocher une flèche qui alla se planter dans le torse d’un loup qui tomba mollement au sol. Mort. Ils reprenaient aussitôt la marche et observèrent devant eux le mur de pierre se dresser. Freyja partit en éclaireur en sautant afin d’atteindre le toit d’une maison et poussa sur ses jambes pour atteindre plus rapidement le croisement. Alors que les trois rebelles avancèrent dans la ruelle menant au pied de leur objectif, elle pouvait distinguer un soldat du régent chuter du haut des remparts et s’écraser au pied de ceux-ci, un couteau planté dans la gorge.

Freinant sa course, glissant légèrement sur le chaume, elle leva le regard et fronça les sourcilles pour réussir à distinguer le sommet des remparts malgré le soleil qui était déjà haut dans le ciel. Semblable à une tache sur l’astre, l’hybride à la tunique carmin était déjà arrivé sur les remparts et brandissait son épée face à deux archers, prêt à en découdre alors que deux capes grises firent leur apparition derrière lui et empruntèrent le chemin de pierre pour rejoindre la position de la troupe dans laquelle Freyja se trouvait.

— C’est Will, nous avons notre fenêtre !
La rate avait attiré l’attention de ses compagnons avant de sauter du haut du toit en brandissant sa lance afin d’embrocher un loup arrivant au pied de la muraille pour contrer l’avancé des rebelles. Rapidement, elle fut rejointe du lièvre et de la marmotte alors que le raton-laveur décocha une nouvelle flèche en direction de la herse. D’un seul homme, la troupe de rebelles s’avança en direction de la herse et comme le présentait le commandement, les armées du régent commençaient à se regrouper à l’instant où la troupe infiltrée faisait son apparition.

Le raton-laveur et le lièvre profitèrent de la surprise pour tirer avec leurs arcs, laissant trois hommes à terre alors qu’un rhinocéros chargeait déjà sur la troupe. Fonçant elle aussi sur le mastodonte, Freyja passa son arme dans son dos et se rua à sa rencontre avant d’esquiver la charge d’une glissade et profita de la fenêtre pour causer une entaille peu profonde sur la cuisse du rhinocéros, le faisant chuter dans sa course et donnant le temps nécessaire à Denise et au lièvre pour attaquer ce dernier au sol. De nouveau sur ses jambes, Freyja poussa sur ses pattes afin de se donner l’impulsion nécessaire à un long saut et frapper à son tour de toutes ses forces sur l’ennemi à terre pour l’achever à son tour. Une flèche passa à côté de la rate et alla se planter dans la tête d’un loup cherchant à prendre le groupe en traitre alors que le raton-laveur poussa un cri de soulagement devant son exploit en même temps que l’épée tomba au sol.

— Compagnon, ça ne va pas aller en s’arrangeant si nous restons ici !
Les rebelles hochèrent la tête par l’affirmative avant de reprendre leur course, il n’était plus qu’à une trentaine de mètres du mécanisme de la herse et il n’avait plus une seconde à perdre.


more_horiz
Elle leva la main, arrêtant dans les airs trois nouveaux rochers qu’elle expédia avec moins de contrôle une dizaine de mètres à l’écart de l’armée des rebelles. Elle n’osait à vrai dire en laisser tomber le moindre, quand bien même il n’était pas prêt de toucher le moindre brigand. Une telle masse pouvait soulever suffisamment de poussière et de terre pour effrayer un homme en première ligne, quoique les seuls à encourir des risques à cette heure étaient le détachement des cinquante archers et barricades, l’escouade de Will l’écarlate et l’unité en infiltration de Freyja. S’il en était qui pouvaient songer à s’enfuir à raison ou tort, c’était ceux-là.

Système avait, lors de sa mission de reconnaissance, situé quatre catapultes près des murailles nord et deux trébuchets un peu plus loin, toutes susceptibles d’atteindre les rebelles, aussi loin soient-ils des murailles. Cette information donnait un précieux avantage à la générale. Pour avoir appris à manipuler ce genre d’objets de siège, quoique légèrement plus évolués dans son monde, elle savait comme beaucoup le temps que reprenait une catapulte pour être à même de tirer. Sa concentration ne devait être maximale qu’à la minute des tirs.

Malgré tout, en première ligne, toute l’armée derrière elle, la jeune femme essayait de garder une vision d’ensemble sur la situation. Elle avait suivi des yeux l’Ecarlate durant son ascension habile des murailles, à l’aide d’un grappin, et pouvait le deviner, entre les créneaux du rempart, se battre et abattre de nombreux loups. Il n’était guère seul, bien sûr. À vrai dire, selon l’enthousiasme, l’ardeur de ces hommes derrière elle, tous les brigands étaient avec lui et son escouade.


« Officier Sang-Bleu. » prononça-t-elle d’une voix forte sans lâcher des yeux les hauteurs des murailles, prête à arrêter le moindre rocher. Elle devina une cape grise s’approcher d’elle.

« Général Primus. »

« Votre analyse de la situation sur les murailles. »

Elle le regarda brièvement. L’indien sembla se concentrer plus que de raison, mettant une main au-dessus de l’arcade de ses sourcils. Il était non seulement proche de la nature, ce qui lui avait valu sa place aux côtés de la générale, mais avait aussi une excellente vue que certains soldats de la lumière jugeaient presque « ridicule ».

« Soldats de Kefka moins nombreux sur les remparts. »

« Abattus ? »

« De plus en plus rejoignent grande porte. »

Elle soupira. Ses sourcils, à force d’être froncés, en arrivaient à tendre chaque muscle de son visage. La jeune femme acquiesça. Le timing n’avait pas été parfaitement respecté, visiblement. Elle chercha Robin des yeux dans le détachement proche de la porte, restant principalement à couvert, tirant de temps à autres quelques flèches. Lorsqu’elle le trouva, elle se concentra immédiatement sur lui, atteignant son esprit du sien et lui transmettant un ordre par télépathie.

* Il faut impérativement infliger un tir nourri sur les murailles ! Nous devons les forcer à rappeler des archers en renfort là-haut ! Prenez plus de risques. Transmettez. *

Quelques secondes plus tard, Robin cria à son détachement « Feu à volonté, compagnons ! » ainsi que d’autres choses qu’elle ne comprit pas avec la distance qui les séparait. Elle vit davantage d’archers quitter leur couverture pour infliger une pression supplémentaire sur les remparts. C’était vital. Si le commandement adverse rassemblait plus de troupes au niveau de la herse, l’unité de Freyja n’aurait plus aucune chance d’ouvrir la porte et la rébellion perdrait l’initiative.

« Attention ! »

Son regard fut suffisamment vif pour voir un autre rocher bien avant qu’il ne s’écrase. Elle se concentra brièvement pour l’arrêter mais… Le rocher allait trop vite, avait été envoyé avec bien trop de puissance. Elle guida sa main dans la direction du projectile, canalisant la moindre bribe de sa puissance psychique sur lui mais ne parvint à rien. Elle le comprit vite, l’énergie cinétique du rocher était insurmontable à son niveau de télékinésie.

Elle se baissa, par réflexe, comme beaucoup de brigands, alors que le rocher s’écrasa et roula dans la plaine, atteignant l’armée. Des hurlements l’alertèrent et la panique gagna rapidement l’armée. Elle réagit instantanément, commandant d’un cri :


« Restez en formation ! Ne bougez pas ! »

Pour le reste…

« Système ! » cria-t-elle derrière son épaule. Elle n’aurait jamais cru ne pas pouvoir arrêter un tir comme celui-là à priori. « On doit se débarrasser des trébuchets ! Partez détruire le deuxième avant qu’un tir nous atteigne à nouveau ! »

Elle entendit le Shérif hurler quelques injonctions à l’encontre de l’arrière de l’armée ainsi qu’aux unités médicales.
more_horiz


more_horiz

La troupe de rebelles était au pas de course, Freyja et la marmotte en tête alors que les deux archers tentaient de couvrir leurs avancées de leurs armes. Encochant et tirant à intervalle régulier entre deux sprints pour ne pas se faire isoler. La précédente charge du rhinocéros avait attiré les regards vers le pied de la muraille, ne laissant d’autre choix aux infiltrés que d’atteindre le plus rapidement possible le mécanisme de la herse. Parcourir une centaine de mètres n’était pas un problème pour les personnes formées par le Générale Primus, ils avaient passé des mois à se préparer pour ce jour. Cependant, l’attroupement de loup et d’infanterie lourde devant l’entrée de la ville laissait le doute s’immiscer dans leurs esprits.

— Hardi, compagnon ! Pensez à tout ce que veux dire cette journée pour nous, pour la rébellion !
Ramenant sa lance devant-elle d’un mouvement circulaire, Freyja parvint à contrer le tir d’une flèche par le fer de son arme alors que le lièvre tentait tant bien que mal à surmonter sa peur et celle de ses amis. Tout comme la rate, ils n’étaient rien d’autre que des fermiers ou des travailleurs confrontés à la réalité et devant prendre les armes. Ils avaient le désir ardent d’être enfin libres, toutefois, l’entraînement qu’ils avaient reçus n’était peut-être pas suffisant pour avancer au coeur de la bataille.

Ils étaient seuls de ce côté du mur. La discipline du général, les chants d’Adam ou le visage aux traits doux de Robin n’étaient pas là pour faire sortir le meilleur d’eux-mêmes.

Un éléphant et un rhinocéros tournèrent la tête sur leur droite avant de fixer de nouveau l’attroupement de rebelles et prendre position devant le mécanisme alors qu’une partie des loups abaissèrent leurs arcs pour leur tourner le dos et grimper sur les remparts. L’armée aux portes de la ville donnait tout ce qu’ils pouvaient afin de Freyja et sa troupe parviennent à lever la herse, ils avaient pour devoir de réussir coûte que coûte.

Deux traits passèrent entre la ligne de front qu’étaient la rate et la marmotte, l’un fit mouche à la jambe d’un ennemi et le second ne toucha personne. Et en réponse, une volée de flèches fut tirée à leur encontre. D’une roulade, la rate parvint à éviter les tirs et celle-ci se redressait déjà pour continuer sa course. Elle tourna légèrement son regard afin de distinguer une seule et unique chose : Denise n’avait pas eu les mêmes réflexes qu’elle et roulait déjà sur le sol, emportée par sa propre course, divulguant deux flèches plantées dans son torse. Il ne restait que vingt mètres à parcourir pour atteindre la herse.

Fermant ses paupières, cherchant à occulter l’image de la marmotte au sol, Freyja stoppa légèrement sa course avant de prendre appui sur ses jambes et bondir.

Faisant une pirouette dans les airs, attirant l’attention sur elle, la rate amena ses mains au bout de la hampe de son arme et en même temps qu’elle chuta, elle abaissa son arme dans une frappe verticale sur l’un des loups en première ligne. Le fer de lance s’enfonça dans la chair au niveau de son épaule, le faisant chuter au sol de douleur alors que Freyja tira sur son arme pour la ramener à elle et se mettre en garde. Au même moment que sa victime tomba au sol, deux flèches sifflèrent et vinrent se loger dans le torse de deux autres ennemis.

L’infanterie lourde de Kefka gardait férocement le mécanisme qui était dorénavant en vue de la rate, et entre elle et ce dernier, se trouvait encore cinq loups ayant déjà dégainé leurs épées et s’avançant en direction de Freyja.

Elle parvint à parer une attaque lui étant portée grâce à l’allonge de son arme, cependant, une fois sa garde percée, elle n’eut d’autre choix que de rouler sur le côté pour éviter une autre lame. Un genou au sol, lâchant son emprise sur son arme de la main gauche et passant son avant-bras par-dessous, elle profita de la position pour pousser son arme et piquer sa lance dans le ventre d’un loup. Celui-ci se fit vite envoyer de l’autre côté alors qu’un autre flèche vient se planter dans son cou et que le lièvre fit son apparition à ses côtés, parant une attaque horizontale prête à frapper la rate à la tête.

— Reste concentrée, ça ne fait que commencer…
Ramenant son arme au corps, tournant autour du rebelle pour finir par une attaque circulaire qu’un loup arriva à parer sans difficulté, la rate laissa la place au lièvre pour que celui-ci lance deux dagues rangées à sa ceinture et achève un ennemi face à eux. Le raton-laveur, maintenant avec le reste des rebelles, encochait et tirait aussi vite qu’il lui était permis afin d’éclaircir les rangs des archers grimpant sur la muraille. Durant un combat qui semblait s’éterniser, les deux rebelles parvinrent à se débarrasser des loups avant que Cerbère n’en envoie d’autre à leur encontre. Sans temps de pause, l’éléphant s’approcha finalement du lièvre par son angle mort en dressant au-dessus de sa tête une immense Morgenstern.

Freyja cria à l’encontre de son allié avant de lancer son arme afin de contrer l’attaque. La lance alla se planter dans le poignet du pachyderme et permit au lièvre d’esquiver l’attaque d’un pas en arrière. Courant à l’encontre de l’infanterie lourde, elle glissa brièvement sur le sol et passa sous ses jambes en empoignant une épée trainant au sol pour ensuite l’enfoncer dans le dos de son ennemi. Cependant, elle ne s’attendait pas à ce que l’éléphant se retourne aussi brusquement et frappe de son arme les côtes de la rate, envoyant cette dernière valdinguer contre la muraille de pierre.

Retenant de crier sous la douleur, Freyja maintenait ses côtes de ses bras avant de se relever difficilement. Un bruit sourd lui parvint à ses oreilles quand elle distingua le rhinocéros charger le lapin et l’emporter dans son élan et l’écraser contre un mur.

Le raton-laveur était à court de flèche alors que l’éléphant blessé s’avançait vers lui, il n’avait rien d’autre pour se défendre qu’une dague et le rhinocéros se dégageaient du mur suite à sa charge. Le lièvre gisait au sol, un filet de sang perlait sur son crâne. Haletante, la rate tourna son regard vers le dernier-survivant de l’escouade pour ensuite fixer la roue du mécanisme de la herse, elle devait le faire. Pour la seconde fois en moins de cinq minutes, elle détourna son regard pour s’avancer vers le mécanisme et empoigner la roue servant d’enrouleur pour l’ouverture de la grille. Tirant sur cette dernière de toutes ses forces, la poulie fit son œuvre alors que le câble se tendait et que la grille s’ouvrait lentement.

Il fallut du temps à Freyja pour qu’elle se rende compte que des rebelles, probablement de l’escouade de l’Écarlate, étaient arrivé et contenait les hommes de Kefka alors qu’elle forçait sur ses bras pour ouvrir le seul point d’entrée pour l’armée rebelle. Ajoutant son poids pour clôturer l’effort, elle passa la sécurité dans le mécanisme et bloqua ce dernier quand la grille fut assez élevée pour qu’un homme à cheval puisse passer.


more_horiz
« La porte est ouverte ! » cria l’une des capes grises derrière elle. Il y eut une brève acclamation qui n’ôta pas de l’esprit de chacun que venait le moment de se mêler au combat. Tous les généraux de cette bataille, sinon l’ancien shérif, étaient déjà sur le champ. À son tour de mener à bien son opération.
D’un geste, elle saisit l’étendard planté au sol et le souleva au-dessus de sa tête avant de crier à son tour.


« Chargez ! »

Comme des eaux, les rangs de l’armée rebelle se déferlèrent sur la plaine, avançant sans garder un semblant d’organisation. Elle-même courut, escortée par ses deux officiers qui dégainèrent leur propre équipement : deux haches de guerre pour Sang-Bleu et une lance et un bouclier pour Ambre. Contrairement aux troupes ennemies, les brigands étaient de l’infanterie légère, à peine protégée, si ce n’est parfois par des tenues en cuir… Ils étaient rapides, libres de leur mouvement. Aussi, les trois gardes de la lumière furent vite distancés par une bonne partie de l’armée.

À l’horizon, devant les murailles, elle pouvait voir une bonne moitié des survivants traîner le corps de brigands blessés jusqu’à la retraite, pour qu’ils soient soignés par les unités médicales. L’autre moitié des hommes, soit une grosse quinzaine, abandonnèrent les barrières pour approcher de la porte avec pour mission de maintenir une certaine pression, une fois la herse ouverte, sur l’ouverture. Ils ne craignaient alors qu’à peine les archers sur le chemin de ronde, ceux-ci ayant été malmenés ces cinq dernières minutes.


« Ambre ! »

La générale tourna légèrement la tête vers sa droite, en pleine course, où elle vit son officier, rejointe par deux hybrides, un écureuil et un phacochère… ou un sanglier. Elle ne connaissait pas la différence. Elle savait simplement qu’elle ne les avait plus vus lors de ses entraînement depuis des mois déjà, peut-être un an. Sans doute faisaient-ils partie des nombreuses personnes ayant le chic pour ne jamais être dans son groupe d’entraînement matinal. Elle décida de se concentrer sur la bataille, comprenant juste que ces deux-là resteraient aux côtés d’Ambre.

Plusieurs lignes arrivèrent au rempart et comme prévu, toutes les unités ne se ruèrent pas à travers l’entrée de la ville. Une vingtaine de brigands essayaient, lorsqu’elle arriva à proximité des murailles, d’entrer dans la ville. Maintenant la porte ouverte, la priorité était de passer la défense qui les attendait devant celle-ci. L’entrée n’était pas assez large pour permettre à dix hommes d’entrer de front, aussi la supériorité numérique n’était plus un avantage. Elle devait y aller avec ses officiers, précisément pour percer cette défense. En marchant, elle s’y dirigea, alors que plusieurs personnes venaient près d’elle à son approche.
Elle fit disparaître son étendard et fit apparaître son épée et le bouclier de lumière, tout en distribuant des ordres avant de partir à l’assaut.


« Vingt hommes de plus sur les remparts. Utilisez les grappins, on doit les forcer à se replier. » Elle changea brusquement d’interlocuteur, pointant un grand lièvre d’un doigt. « Prévenez Petit Jean  Dès lors qu’ils battent en retraite, il y retourne. Secteur nord-ouest. Il me nettoie tout ça. Et... » Le lièvre s’éloignait déjà lorsqu’elle finit sa phrase « Robin, secteur nord-est ! Que dix minutes de repos pour eux ! »

Plus que cinq mètres avant de rejoindre les hommes sur la brèche. Elle interpella une grenouille. « Vous avez réuni l’escouade de Freyja ? Faites-le, elle repart dès qu’on en a fini avec la défense de la porte. »
Elle s’engouffra à travers la porte, passant entre quelques hommes en arrière, forçant son passage alors qu’elle entendit « Générale ! Robin est déjà sur les murailles ! »
Dès lors qu’elle et ses officiers furent entrés, des dizaines de brigands la suivirent, occupant le moindre espace à ses arrières. Elle n’avait jamais aimé la proximité avec d’autres personnes mais durant une bataille, elle n’y pensait même pas. Cela ne la dérangeait pas plus que d’être là et toutes ses pensées étaient dorénavant tournées vers son tour à venir. Devant elle, les hommes se retenaient à peine pour ne pas pousser les premiers. À petits pas comme dans une longue file d’attente devant le confessionnal, les hybrides progressaient rapidement sous l’arche couvrant l’entrée de la ville. Dès lors qu’ils passaient les portes intérieures, ils se déployaient et s’écrasaient, occupaient du mieux qu’ils le pouvaient les dizaines de lances et de hallebardes tendues. L’important était moins de créer une brèche que de ne pas être repoussé, de toujours un peu avancer. Gagner quelques mètres dans la ville permettrait au plus grand nombre d’entrer dans la ville prêter du renfort à la générale et ses hommes.

Elle sentit la main d’un hybride craquer sous sa botte alors qu’elle avançait. Résistant à l’envie de regarder à ses pieds, découvrir s’il s’agissait d’un allié ou d’un ennemi, la jeune femme se rappela : Son objectif à présent n’était pas seulement de passer cette porte. Elle devait avant tout le faire sans trop de pertes humaines. Pour la suite de la bataille, durant laquelle ils n’auraient plus l’initiative, elle avait besoin d’un grand nombre de soldats.
Ravness continua de piétiner quelques hommes morts ou grièvement blessés et… vit l’homme devant elle, un homme-chat aux oreilles tombantes, se ruer sur un rhinocéros, lui sauter à la gorge et le poignarder à plusieurs reprises avant de lui-même être transpercé, tout cela en quelques secondes.  A moitié mort, le félin s’accrochait encore à sa proie et occupait au moins trois mastodontes.

Général Primus baissa son bouclier au niveau de sa hanche et courut quelques mètres vers l’un des rhinocéros retirant une troisième fois la pointe de sa hallebarde du dos de l’hybride. Elle ne pouvait rien pour ce dernier, ne tenterait d’ailleurs rien. Il était mort comme elle le devait, lui donnait la chance de se prendre un coup de moins. La grande taille du rhinocéros ne le protégea pas de la lame qui vint transpercer sa gorge d’un coup d’estoc ascendant, juste au-dessus de son plastron. Elle retira d’un geste sec son épée et ramena son bouclier devant sa poitrine, guettant l’ennemi suivant. Elle vit le rhinocéros déjà à moitié mort, sauvagement attaqué par le félin à présent gisant, être achevé par la lance impitoyable d’Ambre alors que Sang-Bleu couvrait son flanc gauche. Les hommes en face d’elle, beaucoup trop grands, l’empêchaient de voir l’avancée de la bataille, le déplacement des troupes ennemies, aussi n’avait-elle que le droit de se battre et de repousser la défense.
Pas question de reculer pour aider d’autres brigands en difficulté. Elle attendit seulement quelques secondes tranquillité de ses confrères, pour avancer vers une ligne de rhinocéros et d’éléphants, serrés les uns contre les autres, brandissant devant eux leur arme d’hast. Elle s’approcha lentement, rejointe par d’autres rebelles, bien sûr.

Un coup d’estoc fut porté. Elle fit un pas en arrière et bloqua ce dernier de son bouclier avant d’avancer un peu, très vite menacée par un autre ennemi, forçant son recul. Enchaînant les petites avancées et reculées, elle surveillait maladroitement les hommes à ses côtés, plus prudents encore. Ils n’avaient pas de bouclier, pas de réelle armure. Elle vit même l’un d’eux échapper de peu à un coup, seulement sauvé par Ambre qui l’avait tiré vers elle d’une main avant de le remplacer. Ravness se permit de faire quelques pas en arrière, rassurée par le bouclier et la lance de l’officier, pour faire disparaître ses armes et les remplacer par sa hallebarde. Elle se fit de suite plus présente, voire oppressante. Elle attendit le premier coup d’estoc de son opposant pour le dévier de sa hallebarde. D’un geste coordonné de ses poignets, elle força la lame de l’ennemi à toucher le sol, appuyant sa hampe contre la sienne. Ambre réagit parfaitement, posant sa lance sur le sommet de son bouclier et frappant l’ennemi de la générale d’un coup d’estoc.
Il ne suffit pas à le perforer, non. Ravness vit le pique de la lance seulement toucher de son bout la peau dure de l’ongulé, mais ce fut suffisant pour le faire reculer, relâcher un peu son emprise sur son arme. D’un geste sec de sa hallebarde, elle tira celle de son adversaire vers ses pieds, le désarmant habilement.


« Couvrez-moi, officier. »

Elle feinta de vouloir faire un coup d’estoc, se rapprochant brusquement et brandissant au-dessus de sa tête sa hallebarde. Aussitôt, un éléphant voulut l’embrocher de sa lance mais fut bien sûr bloqué par Ambre qui se tenait juste à ses côtés, essayant de progresser en même temps qu’elle. Elle interrompit son estoc pour, une fois avancée d’un mètre, frapper ce dernier d’un coup descendant de la hampe. Cela ne le fit que reculer. Dans l’élan de son coup, elle réussit à frapper d’un même coup descendant, mais cette fois-ci du fer hache de sa hallebarde, non pas le rhinocéros désarmé mais l’éléphant à sa gauche qui les menaçait, Ambre et elle. Très proche de ses ennemis, toujours couverte par une Ambre parfaitement sur la défensive, elle éclata la rotule du rhinocéros en face d’elle d’un impitoyable coup de talon.

Quelques secondes plus tard, à force d’avancer, elle se retrouva avec Ambre à sa droite et une tortue, peut-être celle qu’elle avait martyrisée, derrière elle… devant deux rhinocéros et deux hippopotames, ces derniers jonglant avec d’importantes morgensterns.
Avant que cela ne commence, elle se permit de regarder jusqu’où elles avaient progressé. Huit mètres les séparaient à présent de la porte et les troupes s’engouffraient de plus en plus chaque seconde grâce à tous ceux qui avaient forcé la défense.


« Prenez le plus à gauche, Générale. Je peux facilement m’en faire deux. »

Elle hocha la tête. En garde, elle fit quelques mètres sur la gauche pour légèrement s’éloigner de la garde, laissant à la tortue l’espace pour se glisser entre elles deux. Ambre passa la première à l’offensive, forçant le rhinocéros et l’hippopotame les plus à droites à légèrement reculer pour ne pas se faire embrocher, les isolant déjà un peu des deux autres unités lourdes. Dès lors, de manière assez synchrone, la générale et la tortue avancèrent vers leur propre ennemi. D’un regard en-dehors de son propre combat, elle distingua autour d’elle des brigands déjà combattre quelques loups servant Kefka… en somme, des unités plus légères. Ce qui signifiait, en conclut-elle, que les lignes les plus lourdes de la défense de la porte étaient déjà toutes employées au combat, du moins dans cette partie de la ville.

L’hippopotame en face d’elle s’approcha assez vivement, pénétrant sans mal à travers sa garde. Il brandit assez haut sa morgenstern. Ses yeux rivés sur l’arme contondante, elle leva son fer de hache et vint cogner la masse de sa lame, avortant l’attaque. Et pour reprendre l’initiative, elle frappa d’un coup de talon le lourd plastron de son adversaire, le faisant reculer et tituber sur quelques mètres. Un pas en avant, elle enchaîna quelques coups d’estoc, frappant à chaque fois l’armure sans la transpercer, elle se baissa pour éviter un coup horizontal. Elle se rapprocha encore, asséna un nouveau coup de pied sur son ennemi avant de frapper de sa hampe le mollet de l’énorme hybride. Il cessa soudainement de reculer, repassant à l’offensive. D’un revers de sa main libre, il repoussa sur le côté un coup d’estoc de la générale, s’approcha et saisit celle-ci par le col de la cape avant de la soulever à un bon mètre du sol.
L’hippopotame allait abattre sa masse sur son crane mais elle eut le bon réflexe d’attraper la hampe de l’arme avant qu’elle ne s’écrase sur elle.
Dans sa main droite, sa hallebarde disparut pour laisser place à son épée. Voilà un coup impossible à rater. Transperçant la cuirasse, elle planta sa lame dans le ventre du soldat, la retira et la planta à nouveau.

L’étonnante force de l’hippopotame n’en perdit rien pour autant. Elle se retrouva écrasée au sol, jetée comme une misérable aux pieds de son adversaire. Son épée s’échappa des mains et avant même qu’elle ne réussisse à la ressaisir, la gargantuesque patte de l’hybride écrasa son dos et la maintint immobilisée sur le ventre. Incapable de voir son ennemi, elle pouvait juste sentir des gouttes de sang de l’hippopotame atterrir sur son visage et voir la tortue se démener pour parer le moindre des coups de son propre adversaire.
Malgré la peur qu’aurait du lui infliger la situation… elle prit une inspiration difficile, fixa son épée à quelques centimètres de sa main, et sans voir sa cible, projeta la lame de la force de son esprit sur cette dernière.
Le poids sur son dos disparut en même temps que l’hippopotame s’effondra sur le côté, transpercé. Un brigand fondit sur elle pour l’aider à se relever alors que de plus en plus, les capes grises gagnaient l’entrée de la ville.


« Ils se replient ! » cria derrière elle, sur les remparts, un rebelle. Péniblement, elle prêta attention au cor de l’armée adverse avant de retirer son épée du corps de l’adversaire et de la nettoyer sur le pantalon de ce dernier.
L’Officier Ambre arriva vers elle l’instant d’après avec comme notable différence une balafre assez large sur son front. Le sang coulait le long de son visage et la forçait d’ailleurs à fermer un œil. Bien qu’elle ne s’en souciât pas pour elle-même, Ravness ressentit une pointe de tristesse. L’Officier Ambre faisait tout pour rester belle, même avec le confort de ce monde et… ne méritait pas une telle cicatrice.


« L’un des deux m’a échappé mais... »

« Ce n’est pas grave. Allez vite soigner ça, l’officier Sang-Bleu restera à mes côtés jusqu’à ce que vous reveniez. » dit-elle sans réfléchir en désignant d’un geste de la tête l’extérieur de la ville d’où ils venaient. Elle regarda Ambre partir avant de chercher le château dans la ville. Au sud-ouest, elle le vit, trônant en hauteur sur Nottingham. C’était évidemment l’objectif de la rébellion, là où se cachait Kefka.

Pour autant… Jusque-là, il y avait d’autres priorités. L’armée rebelle était entrée par l’entrée nord. Les unités médicales et de communication étaient bloqués en-dehors de la ville, donc loin du front, tant que le nord de la ville n’était pas nettoyé. Celle-ci était divisée en deux, la partie sud et la partie nord, par le fleuve la traversant, ce même fleuve ayant infiltré l’unité de Freyja.

Ils ne pouvaient prendre le risque de traverser le fleuve tant que tous les soldats du régent présents dans la partie nord n’étaient pas neutralisés.

Cinq minutes plus tard, Ravness rassembla son commandement et avança le long de la rue principale de la ville vers le pont principal. Les trois autres commandements dirigés respectivement par Will l’Écarlate, Robin des Bois et Petit Jean ainsi que l’escouade de Freyja étaient chargés de nettoyer les quartiers nord de la ville pendant qu’elle progressait pour installer le centre de commandement des troupes.
more_horiz

Dame Gertrude venait de finir d’appliquer l’onguent et de nouer un bandage autour du torse de Freyja quand celle-ci empoignait de nouveau sa lance pour retourner au coeur de la bataille. Elle avait eu de la chance en comparaison avec les autres membres de la troupe ayant eu pour mission de lever les grilles de la herse, deux côtes de fêlées, pas de quoi arrêter le combat selon les critères du Générale. Elle reçut l’ordre d’aller nettoyer les toits de la partie nord-ouest de la ville, et elle allait rejoindre une autre troupe pour mener cette opération à bien. La rate, son arme à la main, s’avançait vers le blaireau et l’écureuil avant de s’immiscer dans les rues de la ville.

— On monte sur les toits, ça ira pour la demoiselle ?
— Ça devrait, personne n’a vu sa frimousse autour des portes…

C’était le blaireau, capuche rabattue et une paire de dagues à la ceinture, qui avait prit la parole en premier. Il observait la rate de haut en bas d’un regard dédaigneux alors que l’autre rebelle grimpait déjà sur l’un des toits de chaume. Passant à côté de cet homme sans dire mot, la rate fléchit ses pattes un court instant avant de bondir et atterrir sur la toiture pour lâcher un dernier regard à l’homme avant de continuer sa route tout en conservant sa main libre sur son torse.

Elle aurait pu réagir, peut-être. À quoi bon ? Pour la fierté, ou pour quoi que ce soit d’autre. Cela était bien inutile, elle au moins savait ce qu’elle avait fait et ce qui lui restait à faire. Rien n’importait vraiment en ce moment, elle agissait tel un automate.

Les alentours de la herse étaient dorénavant sécurisés, et plus aucun homme du régent ne se trouvait sur les murailles du côté nord de Nottingham. Dorénavant, la bataille se déroulait dans les rues alors que l’armée rebelle emplissait la ville tels les flots. Des éclats de voix et le choc du métal résonnaient en tout sens, pendant ce temps, Freyja et le reste de la troupe passaient de toit en toit dans de grande enjambée. La pointe de sa lance en arrière, la rate glissa le long de la paille avant de s’élancer dans un bond afin de planter son arme dans le dos d’un archer.

Agrippant la hampe de ses deux mains, elle donna un coup sec alors qu’une tache de sang fit son apparition dans le dos de son ennemi, prenait de plus en plus d’ampleur. Elle termina son exécution en jetant le corps du loup dans la ruelle en contrebas, dorénavant, c’était eux ou elle.

La guerre, ils étaient en plein dedans. Elle ne ressemblait en rien aux discours du shérif, de Robin des bois ou encore de l’envoyée de la Lumière. Ils étaient des soldats, obéissant aux ordres et devenant des êtres de mort afin de répondre à un idéal. Freyja ne rejoignait pas celui-ci alors que sa lance tranchait la gorge d’un loup pour qu’ensuite, il tombe à ses pieds, mort. Un blaireau, un écureuil et une rate. Ils étaient devenue ce qu’ils détestaient pour que la rébellion gagne, des assassins sans honneur et abattant l’ennemi sans la moindre forme de procès. Valaient-ils mieux que l’ennemi qu’ils combattaient, impossible de répondre à cette question alors que l’odeur de sang montait aux moustaches de la rebelle.

— On continue…
Elle se détestait d’avoir prononcé ces mots, tournant légèrement la tête avant de reprendre de l’élan pour sauter vers un autre toit. La troupe dans laquelle la rate se trouvait remplissait son rôle à merveille, distribuant la mort depuis les hauteurs dans l’unique but de gagner l’avantage.

Est-ce que cela pouvait excuser leurs actes ? Ils étaient les rebelles dans cette bataille et combattaient le régent de ce monde, par définition, ils étaient le mal qui s’abattait sur cette ville. Aucun ne prendrait Robin pour le méchant, Kefka répondait bien mieux à ce terme et l’avait démontré de longues années durant. Néanmoins, elle revêtait l’uniforme d’un sauveur et enfonçait une fois de plus le fer de sa lance dans un corps avant de passer au suivant. Méritait-elle plus que le meurtrier de ses parents, la réponse était non.

Renvoyant d’abord une flèche, parant ensuite une attaque, Freyja glissa sur la paille d’un toit en chaume afin de gagner l’avantage dans ce combat et finalement planter son arme dans le ventre d’un énième loup.

Était-ce le bon moment pour avoir un cas de conscience ? Elle se questionnait entre deux échauffourées sur les toits des maisons, entre deux morts, entre deux victimes d’une guerre que personnes ne désiraient. Finalement, qu’est-ce qu’ils étaient réellement. Freyja était un soldat répondant aux ordres des rebelles alors que le corps à ses pieds n’avait rien d’autre comme faute que de répondre aux ordres du régent. Deux camps différents, les mêmes lois. Toutefois, ils avaient un autre point commun, le besoin de gagner cette bataille et brandir sa bannière vers les cieux de la Forêt de Sherwood.

Elle refusait d’être perdante, du moins, en ce jour. Des années qu’elle traînait ce titre, qu’il lui collait à la peau, il allait bien falloir que cela change un jour.

Une volée de flèches perça les cieux et vint à l’encontre de Freyja et de sa troupe. Instinctivement, la rate plongea en direction du sol, trop tard, une flèche des hommes du régent vint se planter dans son épaule gauche. Glissant sous le choc, tombant dans la ruelle en contrebas, elle atterrit sur un tonneau au milieu d’une mêlée entre Petit Jean et un éléphant. Soupirant, elle continua son mouvement dans un saut et passa au-dessus du pachyderme tout en donnant une frappe rapide dans la nuque pour atterrir derrière lui et donner une attaque coordonnée avec l’ami de Robin. Ainsi, faisant chuter le soldat du régent, laissant le temps à la rate de casser la branche de la flèche pour qu’elle puisse remonter sur le toit d’une chaumière proche.

— Merci, l’amie. Nous nous retrouvons devant le château !
Petit-Jean enleva son couvre-chef dans une pirouette, remerciant la rate à sa façon. Celle-ci le regarda un instant, ignorant quoi répondre avant de hocher brièvement de la tête et retourner auprès de ses deux hommes dans un bond.

Il faisait cela par politesse, comme il l’avait toujours fait. Elle n’était pas spéciale et ne méritait pas plus d’attention qu’un autre, il le démontrait bien en rejoignant les hommes de sa troupe pour ensuite continuer dans les rues de la ville. Qui pourrait réellement se soucier d’elle ? Réellement ? De toute façon, elle avait une tâche à terminer, rejoindre les toits et débarrasser ceux-ci des archers. Voilà sa tâche.


more_horiz
Voilà que le premier trébuchet était neutralisé, mais il fallait maintenant venir à bout du second. Cela n’était pas une tâche des plus difficiles pour Système. Elle se stabilisa dans les airs et analysa son environnement afin de déterminer l’emplacement de sa seconde cible. Cela ne prit qu’un court instant. En moins de temps qu’il n’en fallait pour dire « escarmouche », on pouvait apercevoir la machine fendre l’air en direction de l’engin de siège restant.

Elle regardait les hommes qui rechargeaient l’arme qui venait d’envoyer un nouveau boulet mortel vers l’espace où se trouvaient les alliés de l’androïde. Il ne fallait pas leur laisser une dernière chance de faire de nouvelle victime du côté de la rébellion.

Le robot arma alors son canon plasma qui accumula la puissance nécessaire afin de venir à bout de ces huit soldats. À l’aide de son casque, elle verrouilla ses cibles et déchaîna, un à un, les foudres de son arme.  Ils gisaient alors tous aux pieds de l’engin de mort. Il ne restait donc plus qu’à détruire cette chose grotesque. Elle fit apparaître une bombe mécanique dans sa main gauche et la lança de toutes ses forces. L’explosif atterrit pile au centre de la construction et, une fois qu’elle arriva au terme de son minuteur interne, la fit éclater en mille et un morceaux.

La machine contempla un rien fière de son œuvre. Mais d’où pouvait bien provenir ce sentiment ? Et à quoi faisait-il référence ? Elle n’avait jamais rien vu de tel pendant les deux jours où elle avait été activée.  Elle avait beau se creuser les méninges cybernétiques, elle ne trouva aucune réponse satisfaisante.

Il fallut que l’alarme de sa combinaison retentisse pour qu’elle prenne pleinement conscience du danger qui l’entourait. Elle dut faire une esquive aérienne sur sa droite afin d’éviter la boule de feu qui venait dans sa direction. L’androïde rechercha la provenance de ses orbes incandescents à l’aide de son système d’analyse intégré à la visière de son casque. Après quelques instants, elle repéra un nouveau brasier provenant du château de Nottingham. Mais le plus étrange pour la demoiselle mécanique, c’est que celles qui suivirent n’avaient aucune réelle cohérence. Le mage ou l’adepte de la magie qui était à l’origine de toute cette catastrophe envoyait ses attaques aléatoirement dans le paysage.

Plusieurs bâtiments avaient déjà commencé à prendre feu et on pouvait entendre les voix des piégés crier à l’aide sans vraiment espoir de sauvetage par les rebelles ou les hommes de la cité. D’ailleurs en parlant d’eux, où en étaient-ils ? Système regarda sous ses pieds et constata que l’armée alliée avait pénétré dans la ville et acculait leurs ennemis contraints à reculer. Bien sûr, on n’avait pas vraiment avancé de beaucoup en ce début de bataille, mais qu’importe, c’était déjà une belle progression vers la victoire.
more_horiz
« Déployez-vous dans les rues parallèles ! Une trentaine d’hommes reste ici avec moi ! » cria-t-elle à l’intention de son commandement. Ajoutant l’acte à la parole, Sang-Bleu quitta ses arrières et s’arrêta pour désigner d’un geste aux soldats qui irait où. C’était une épreuve de vitesse : ils avaient l’occasion d’éliminer les retardataires de la retraite et d’éliminer quelques soldats supplémentaires sans perdre un seul homme, aussi ne pouvait-elle permettre aux rebelles de se regarder les uns les autres en attendant que l’initiative vienne de certains.

Les rebelles couraient depuis la porte nord de la ville vers le pont, depuis déjà quelques minutes, essayant de ne pas se projeter en compagnie de leurs alliés éparpillés dans la partie nord de la ville. Certains amis s’étaient sans doute vus pour la dernière fois, il y a quelques instants, avant que les commandements se dispersent.

Des instants de course qui avaient pu fatiguer certains hommes, oui. Mais aucun parmi les dizaines qui l’accompagnaient n’avait cessé de se ruer à travers la rue principale de la ville… Parce qu’ils avaient peur d’elle ? Non, cette fois, c’était différent des entraînements. En effet, sans répit, les boules de feu pleuvaient sur la ville, expédiées depuis une tour du château de Nothingham, leur objectif. Voilà la première intervention dans cette bataille du régent… Il ne visait rien, si ce n’est le chaos. Quelques bâtiments à proximité étaient déjà en flammes et… de la ville s’étaient élevés quelques cris trop puissants, trop affreux pour être produits par des hommes seulement poignardés. Kefka aurait pu utiliser la foudre, mais non… Il avait choisi de faire pleuvoir le feu, plus douloureux, et beaucoup plus à son image. C’était le feu qui avait commencé cette guerre… Kefka était un fou, ça n’avait pas du lui échapper.

Ravness regardait le château tout en courant comme, elle le supposait, les citoyens de la cité du crépuscule regardaient le soleil noir : comme s’il avait sa propre conscience et qu’il orchestrait le malheur du monde entier… Comme un ennemi. Elle ne s’étonnait plus de connaître si bien Kefka. Elle et lui, les deux étrangers, s’étaient combattu durant cette guerre plus que les rebelles entre eux et pourtant, en n’étant jamais l’un devant l’autre. Ils avaient manipulé les troupes de ce champ de bataille et… elle avait désormais la prétention de comprendre toutes les motivations de son ennemi, toutes ses pensées, tout comme lui connaissait tout d’elle, son passé comme ses pensées.


« Nous ne sommes plus qu’à deux-cents mètres du pont ! » cria un rebelle devant elle, un pic-vert dont le long bec pointait le ciel. Elle s’arrêta brusquement. « Halte !! »

Les hommes s’arrêtèrent après quelques secondes. Le fleuve n’était pas encore visible, masqué par une série de bâtiments… Il était important qu’ils restent hors de vue tant que la bataille ne reprenait pas. « Tous les hommes derrière moi. Je ne veux personne plus en av… » Elle fut interrompue par un cri horrible, peut-être plus glaçant que de marcher sur les visages de ses alliés tombés… Depuis le sud, depuis le pont, un nouveau cri de douleur résonna dans toute la ville. Des suppliques suivirent, de longues secondes, infinies.

« C’est un ennemi ? » demanda une femme-chèvre d’une voix tremblotante. « Un ennemi qui brûle ? » La rumeur se répandit en quelques secondes et il y eut moult protestations, sans que jamais elle ne les entende distinctement tant elles étaient étouffées par la peur de ceux qui les prononçait. Comme les Juïfs craignaient un Dieu sévère et punisseur, ils avaient peur d’être entendus par le démiurge faisant rougir le ciel. 

« Kefka anéantit ses hommes comme les nôtres... » ajouta plus clairement un petit homme doublé d’un bichon maltais, et d’une voix qui signifiait que ce n’était pas une bonne nouvelle, loin de là. Savoir que l’ennemi tue ses ennemis a tout d’évident… Savoir qu’il tue ses alliés est effroyable.
Il aurait fallu, peut-être, un discours. Mais elle savait donner des ordres, pas exhorter. Aussi décida-t-elle, à raison, de ne pas aggraver les choses.


« Restez éloignés de deux mètres les uns des autres… »
Elle décida d’ignorer les flammes pour se concentrer sur le terrain. Général Primus leva donc les yeux sur les plus hauts bâtiments à proximité, avant de parler d’une voix forte.

« Officier Sang-Bleu, je veux deux archers en haut de cette tour de garde… Et deux sur les cheminées de l’auberge sur la rive. Tant qu’on n’a pas un rapport aérien de notre situation, je veux être informée de la situation sur le pont et dans les environs régulièrement. J’exige un premier rapport dans les dix minutes. »

L’officier Ambre arriva devant elle, déjà raccommodée par quelques bandages et points de suture, et le visage encore rougi par du sang essuyé rapidement.

« Au rapp... »

« Je veux une table ici, trouvez ça rapidement. On pose notre point de commandement. Prévenez les hommes : les civils ne peuvent pas être évacués tant qu’on ne tient pas le nord. Aucun civil au point de commandement… Quinze soldats pour évacuer les habitants des maisons en flammes immédiatement. Nous sonnerons un cor pour ordonner leur retour dans vingt minutes, donc qu’ils fassent le plus possible. »

« Ca marche, Général Primus ! » dit Ambre avant de soupirer et de s’en aller, relayant les ordres et s’activant à sélectionner les pompiers. Ravness n’attendit pas de récupérer un de ses seconds et parla d’une voix forte.  Avec tous les hommes de son commandement partis en grand nombre chasser les rebelles dans les rues parallèles à la rue principale, il ne lui restait plus qu’une petite dizaine d’hommes autour d’elle. Dans quelques minutes, ils seraient une soixantaine.

« Allégez-vous, mangez et buvez. Quand tout le monde sera là, vous partirez inspecter les environs. »

Elle s’éloigna légèrement de ses hommes pour regarder le sud, essayant de distinguer le pont au loin, mais l’horizon était déjà bouché à quelques dizaines de mètres. Les autres généraux et elles avaient déterminé que Kefka essaierait certainement de tenir le pont central… Lorsque les trois autres commandements auraient fini de nettoyer le nord, elle saurait si le pont à l’est et celui à l’ouest sont protégés et si oui, comment. Là enfin, elle ferait venir là où elle se trouvait une grande partie de l’armée ainsi que l’unité de premiers secours et celle chargée de la communication, encore en arrière.
Quelques minutes plus tard, deux éclaireurs vinrent à elle et encore un peu plus tard une dizaine d’hommes arrivèrent d’une rue adjacente. Les éclaireurs l’informèrent que le pont était lourdement défendu et de ceux partis nettoyer les rues parallèles, elle apprit qu’ils avaient fait cinq prisonniers. Au début contrariée, car ordre avait été fait de ne pas faire de prisonniers, elle accepta finalement l’utilité que cela pouvait représenter.


« Vous les interrogez. Dans dix minutes, s’ils ne nous disent pas ce qui nous attend sur le pont, vous les exécutez ou vous me les amenez pour que je le fasse. »


Dernière édition par Général Primus le Lun 4 Sep 2017 - 21:19, édité 2 fois
more_horiz

Freyja sauta sur le côté, plongeant dans la rue en contrebas avant de rouler quelques mètres sur le sol de la ville pour ensuite diriger son regard vers le ciel. Elle y avait échappé de peu. L’explosion de la boule de feu venait de raser l’un des toits en chaume de la ville, et par la même occasion, l’archer qu’elle s’apprêtait à abattre. Rapidement, elle se redressa et fut obligée de dresser son avant-bras devant son regard. La vague de chaleur lui forçait à plisser les yeux alors que la maison se consumait en un instant, péniblement, elle s’avança en cherchant son arme à tâtons avant de s’écarter.

L’odeur du sang. La rate était persuadée de ne jamais l’oublier, maintenant, c’était celle de la chaire calcinée qui hantera ses nuits.

Détournant son regard, elle passa son arme dans le dos avant de continuer, dans les rues de Nottingham, à avancer en direction de l’ouest. Elle ignorait si le blaireau ou l’écureuil avait réussi à échapper vivant de la déflagration, c’était le cadet de ses soucis, mais elle avait un objectif à accomplir. C’est une fois que l’air lui sembla moins lourd qu’elle poussa sur ses jambes afin d’atteindre le toit d’une habitation, probablement une forge en vue de la cheminée de pierre à sa droite. Freyja y grimpa sans attendre, cherchant un point de vue afin de retrouver la trace des rebelles avec lesquels elle partageait la même mission.

Posant la hampe de son arme sur son épaule, elle ne peut rien faire d’autre que de constater les ravages des flammes sur la ville. Ainsi que l’origine du carnage, se dressant au sommet de l’une des tours du château, le régent devait se plaire à sa tâche.

Du moins, c’est ce qu’imaginait Freyja.

Elle détourna rapidement le visage, concentrant ses recherches sur les toits aux alentours avant de découvrir plus au nord le blaireau en proie avec deux hommes du régent. Retenant sa respiration, elle expira lentement avant de faire un pas en avant et descendre de son perchoir pour rejoindre le rebelle. La journée promettait d’être longue, de plus, elle ne faisait que commencer.

Le rebelle était seul, deux rebelles en face de lui et leur épée au clair. Il parvenait, difficilement, à contrer les attaques à l’aide de ses deux dagues et il n’avait d’autre choix que de reculer sur ce toit de chaume. Lentement, le vide de la rue se précisait derrière lui et aucune de ses attaques ne semblait porter ses fruits. Baissant la tête, évitant de justesse une estafilade, il parvenait enfin à gagner un avantage lorsqu’une silhouette sortie d’un nuage de fumée pour planter le fer de sa lance dans le dos d’un des gardes du régent. Profitant de l’effet de surprise, il donna un coup d’épaule afin de déstabiliser l’adversaire toujours debout et abattre chacune de ses armes dans le corps du loup. Tremblant, il posa un genou à terre pour reprendre sa respiration et lever son regard sur la rate.

— Merci…
— Où est ton compagnon ?

Il n’avait pas été des plus sympathiques à leur encontre, Freyja ne se sentait pas obligée de l’être à son tour. Il baissa son regard, ne parvenant à fixer rien d’autre que ses mains entachés du sang des régents de la ville avant de reprendre dans un sanglot.

— Il est mort, il n’a pas évité la boule de feu et…
La rate resta indifférente, laissant un regard vide se perdre avant de tourner sur elle-même et reprendre sa marche. La peine qu’elle supportait était déjà assez lourde comme ça.

— Arrête de geindre, il nous reste encore tout à faire et je n’ai pas besoin de traîner un boulet.
— Tu… T’es qui pour dire ça ?! Toi, la pleurnicheuse qui…

Freyja arrêta sa marche, laissant tomber la pointe de sa lance sur le chaume du toit avant de tourner son regard, observant le blaireau par-dessus son épaule. Il ricana avant de laisser un sourire sur son visage et courir en direction du rebord du toit et sauter de l’autre côté de la rue. Se laissant guider par le sifflement des flèches, elle plissa les yeux à la recherche d’autre archer embusquer sur les toits.

Une épaisse fumée noire s’élevait en direction des cieux, et lentement, elle perdit l’avantage de la hauteur. Freyja allait continuer son attribution macabre malgré cela, elle n’avait pas le choix.


more_horiz

La guerre avançait à son rythme, mais pour le constater, il fallait que Système aille rechercher l’information pour la relayer aux autres dirigeants de ce conflit armé. Les consignes étaient claires, partir à la recherche de Will l’écarlate afin d’obtenir son rapport sur l’avancée de ses troupes et de la capture de la ville.  Elle consulta donc son planning approximatif des évènements qui lui dit qu'il devait se trouver plus ou moins à la lisière du quartier nord-est de la cité. Elle s’éleva alors un peu plus dans les airs afin de prendre de la hauteur et acquérir une meilleure visibilité du terrain. Il lui fallait cependant faire encore être extrêmement prudente avec les sortilèges que balançait Kefka.

En passant au-dessus du bourg, l’androïde pouvait constater l’étendue de la guerre. Des combats d’une violence sans noms éclataient dans tous les coins, des cadavres mutilés jonchaient le sol.  Vision d’horreur au goût amer, ce n’était pas dur pour Système de visualiser tout cela, car elle ne saisissait pas encore toute l’ampleur de l’importance de la vie humaine, mais quiconque aurait porté le regard sur ce spectacle sanglant aurait pu perdre connaissance.

Le robot essaya de repérer Will, le chef de l’escouade affecter à cette partie de la ville. Elle finit par le localiser donnant des ordres à ses hommes. D’un booste éclaire, elle se propulsa dans sa direction afin de le rejoindre rapidement. Quand il la vit arriver, il fut surpris de la voir voler de la sorte. Il s'y accommoda non sans mal, mais il écouta la requête qu’elle avait  à formuler.

—Will l’écarlat, comme convenu avec le Général Primus, je viens quémander votre rapport sur la situation. Qu’en est-il de votre côté ?
— Nous avons pris le quartier Nord-Est, euh…
 
Il avait l’air de chercher l’appellation de la jeune blonde. Bien qu’elle ne soit pas très friande de son nom, pour une obscure raison, elle le lui donna.

— Système. Appelez-moi Système.
— Nous avons  donc repris ce quartier, Système, dit-il dans un râle de douleur en se tenant le flanc droit.
— Cela ne va pas, Will ? demanda-t-elle, en essayant de comprendre ce qu’il se passait et en constatant qu’il avait une plaie profonde sur le côté. Est-ce grave ? Laissez-moi vous aider.
— Ce n’est rien, j’y survivrai. C’est Aiden qui m’a fait ça… Il est parti en direction du pont est. Mes hommes, dont certains ont trouvé la mort, l’ont suivi, mais ils m’ont rapporté que le passage était couvert de nuages chargés électriquement plutôt menaçant. Nous nous rassemblons afin de regrouper nos forces tactiques et d’avoir une meilleure stratégie pour libérer le pont est.

L’androïde remercia l’hybride pour ses précieuses informations, mais ce dernier lui rendit sa gratitude quand Système eut fini de bander sa plaie. Elle lui fit un signe de tête et repartit en direction du prochain bataillon. Elle analysa les quelques émotions qu’elle avait captées pendant sa conversation avec Will. La tristesse d’avoir perdu des hommes, la colère également, mais aussi l’espoir d’une perspective meilleur. C’était d’autres sentiments qu’elle peinait encore à comprendre leur essence profonde, mais un jour cela aussi naturel pour toi que n’importe qui d’autre.

Il lui fallait désormais rejoindre Petit-Jean et son commando au pont ouest. Elle apercevait des catapultes balancer encore de leur boulet meurtrier, mais aussi d’autres êtres misent à l’arrêt par des hommes de la rébellion. Le vol fut un peu plus rude, d’autant plus que certains archers essayaient de l’abattre sans grande réussite. L’ours brun fut moins difficile à trouver que son homologue, sa stature imposante y est quand même pour quelque chose.

Plusieurs soldats rebelles étaient étendus à terre, essayant de reprendre contenance après le combat acharner qu’ils venaient de subir. Plusieurs haletaient, d’autres épaulaient des compagnons blessés. Jean lui-même paraissait mal en point. Mais on ne pouvait pas s’arrêter à cela, la guerre devait continuer.

—Jean, je viens mander votre rapport de votre côté de la capture de Nottingham. Comme se passe votre avancée ?
—Nous avons sus repoussé la menace dans la partie Nord-Est de la ville. Cependant les sortilèges de l’ennemi ne nous permettent pas d’avancer plus loin que le pont est. Je pense qu’il nous faudrait des renforts pour y venir à bout.
— Bien, j’aviserai le commandement qu’il vous faut des soldats supplémentaires.

Elle repartit de plus belle dans l’air non sans aviser de l’ours de la venue d’un détachement d’hommes en provenance de l'est de leur position. Elle les aida un brin en envoyant une décharge plasmique dans la première rangée de soldats.

Il lui fallait donc dès à présent repartir pour le pont central au poste de commandement qui devait s’être formé. Elle survola plus lentement ce dernier afin d’avoir une analyse sur ce qu’il se passe. Des hommes étaient afférer à consolider des barrières pour tenir le ponceau fort et contre tout. Système remarqua également que trois personnes de plus grandes importances étaient en train d’aboyer des ordres à leur soldats. Elle amorce donc sa décente afin de prendre contacte avec Ravness.

— Général Primus, j’ai les informations que vous m’aviez demandé de vous ramener, ainsi qu’un relever de la situation sur le pont central.

more_horiz
La générale hocha la tête quand Système eut fini de faire son rapport. Kefka n'était pas si insouciant que ça, en fin de compte. Il ne voulait pas simplement des morts mais des batailles. Et quel meilleur moyen d'arriver à son but qu'en forçant les rebelles et ses soldats à se battre sur le pont central. Ce qui était certain, c'est que s'il avait voulu défendre son château, il aurait menacé les rebelles de détruire les trois ponts, et non deux seulement.

Ravness se pencha sur le plan de la ville, disposé sur la fameuse table qu'elle avait fait venir. Le pont est et ouest étaient impraticables. Et le pont à quelques centaines de mètres d'elle était... bien sûr fortifié. Ses éclaireurs lui avaient déjà révélé cette information.


« Générale ! Le commandement de Robin des Bois être de retour. » l'alerta Sang-Bleu à une petite dizaine de mètres de là.

« Faites-le venir immédiatement, soldat. »

Même si c'était une trentaine de secondes, elle ne pouvait attendre avant de donner son nouvel ordre à Système, qui devait partir immédiatement. De plus, quitte à ne pas avoir tout l'état-major pour prendre cette décision, elle préférait n'avoir personne, vu la délicatesse de l'injonction.
La générale de la lumière se redressa, fit quelques pas vers Système, leva la tête pour tenter de discerner son visage à travers sa visière opaque et lui donna sa nouvelle mission, veillant à n'être entendue de personne.
Elle vit la machine s'envoler ensuite et se retourna pour accueillir Robin, près de la table de commandement. Avec lui et son commandement, les soldats devaient être à peu près...


« Beaucoup de victimes parmi vos hommes, Robin ? »

« Pas particulièrement depuis que nous sommes entrés dans la ville, Générale. Mais y a eu des pertes lors de l'assaut de la porte. On doit être un peu plus d'une soixantaine. »

« D'accord. C'est aussi ce qu'il me reste. Donc aux dernières nouvelles, tout le nord de la ville est nettoyé. Le commandement de Will et celui de Petit Jean sont bloqués aux pont est et ouest. Kefka menace la zone d'un sort, racontent-ils. Donc pour moi, la situation est relativement tranquille... »

Comme pour la contredire, une boule de feu produite par le bouffon tomba du ciel à deux pâtés de maison et produisit ce qui ressemblait à la destruction immédiate d'une maison, les faisant sursauter tous les deux.

« Navrée de le dire mais ça ne s'améliorera pas. Êtes-vous d'accord pour qu'on mobilise ici les unités de secours et de communication ? »

Il hocha la tête, peu convaincu. Il n'en fallait pas plus à la générale, ordonnant aussitôt à un rebelle d'alerter Frère Tuck et l'ancien Shérif, toujours immobilisés à l'extérieur de la ville, attendant de pouvoir venir.
Elle s'éloigna de la table pour regarder la rue principale, sur laquelle tous les bandits de la compagnie de Robin et de la sienne stationnaient en attendant les ordres. Plus d'une centaine de capes grises tentaient de reprendre des forces, de soigner leurs blessures ou de garder leur calme... et pour l'instant, elle préférait ne pas les accabler. La suite risquait d'être plus violente encore. Elle-même avait déjà pris quelques coups, avait sali sa cape, son armure et ses vêtements du sang de ses ennemis. Son visage lui-même témoignait de sa première bataille en ce jour. Pour leur intérêt, la prochaine confrontation avait grand intérêt à être un franc succès. Pour l'instant, ils pouvaient se reposer

Elle décida de retourner auprès de Robin, mangeant des fruits secs et du pain non loin de la table de commandement.


« Puis-je vous demander de mobiliser une trentaine de volontaires immédiatement ? Il faut évacuer le plus de civils possibles, à présent que le nord nous appartient... »

Ravness fut appelée par quelques autres hommes. Elle quitta Robin, certaine qu'il y aurait bien plus de 30 personnes  pour se proposer. Cette mission était une chance de ne pas participer à la prochaine bataille, car bien sûr, elle ne mobiliserait pas toutes ses ressources pour prendre le pont.

« Générale. On a interrogé les prisonniers. Ils ont parlé. »

« Je vous écoute. »

« Cerbère est seul dans la ville, ils le jurent. Et ils doutent que les hommes stationnés au pont reçoivent des renforts. La suite se passera au château, où sont rassemblées les forces de Kefka. »

« Entendu. »

Elle retourna près de la carte aussitôt et à l'aide d'un morceau de charbon, écrivit « C3 » au niveau du pont. Non seulement le Shérif lui avait parlé de ce trio de dalmatiens, mais elle les avait combattus et connaissait désormais bien son affaire. De la meute, les triplés représentaient peut-être la plus grande menace, menace qu'elle n'était pas sûre de pouvoir écraser. Mais Ravness n'avait pas grand choix. Elle s'en occuperait durant la bataille.
more_horiz

Système lui avait fait son rapport sur la situation qu’elle avait pu observer et collecter auprès des généraux. En retour Ravness Loxaerion l’avait pris apparié afin de lui donner ses ordres dans la discrétion la plus totale. Elle lui somma, ensuite, de partir sur le champ, ce que l’androïde fit de suite. Elle prit une distance de sécurité par rapport à sa détentrice provisoire et activa son jet pack.

Il lui fallait, dès à présent, trouver une certaine personne afin de lui délivrer les précieuses informations.  Cependant, cette quête allait être compromise dès le départ. À peine avait-elle quitté le sol qu'une énorme boule de feu vint la percuter et l’emmena, séant, s’écraser sur une maison plus loin.

La machine fut atteinte d’une perte de conscience plutôt brève. Quand ses instruments se réinitialisèrent, lui permettant à nouveau de revoir le monde qui l’entour, elle constata qu’elle était lovée dans les débris de la maison qu’elle avait explosé avec la sphère enflammée. Son armure était trouée par certains endroits à cause de brûlures, laissant apparents des fils électriques d’alimentation, de plus son casque n’affichait plus aucune indication utile à Système comme l’analyse brève de son environnement ou alors l’intégrité de son armure, ainsi que son armement. Il lui faudrait donc redoubler d’attention pour trouver la personne qu’elle recherchait.

Elle essaya de se relever, mais ses jambes eurent du mal à la supporter et s’affaissèrent sous son poids. Elle trouva une poutre à moitié rongée pour se soutenir et essaya de reprendre contenance. Elle voulut repartir une fois que cela fut fait, mais son réacteur dorsal eut des ratés avant de bien vouloir redémarrer correctement. Il lui faudrait surveiller cela sinon elle se retrouvera rapidement six pieds sous terre.

Elle survola la ville avec la plus grande prudence et la plus grande attention. Une autre boule de feu de plein fouet lui serait sûrement fatale. Il lui fallut un petit quart d’heure afin de repérer le groupe sur lequel elle fondit. S’arrêtant à un mètre d’eux dans les airs, elle interpella le chef du groupe.

—Capitaine Freyja, j’ai des ordres qui viennent du Général Primus. Il vous faut réunir une petite équipe de quatre ou cinq personnes. Dame Ravness vous conseil de piocher dans les meilleurs rebelles du commando de Petit Jean si nécessaire. Ce groupe restreint vous servira à prendre à revers les hommes qui gardent le pont central. Pour cela, il vous faudra passer par le pont ouest. Cependant prenez garde, d'après mes informations, il est recouvert de nuage électrique. Une fois sur place, attendez que l’attaque débute pour lancer votre offensive. Des questions ?  

more_horiz

La pointe de son arme ensanglantée, le souffle court, Freyja fixait de longues secondes cette armure d’or en piteux état. Elle semblait prête à rompre, comment parvenait-elle à tenir debout ? Bien vite, elle balaya ses questions avant de faire dos au messager de Primus et prendre la direction de l’ouest en compagnie du blaireau.

— Aucunes, nous tâcherons d’accomplir les ordres de la générale. En avant.
Faisant glisser la hampe de son arme, amenant sa patte au niveau du fer de lance, la rate se courba en avant pour s’élancer dans un nouveau saut et atterrir sur un toit. Elle trébuchait légèrement à son atterrissage, passant sa main sur son ventre, masquant une entaille de celle-ci avant de refermer sa veste et apercevoir le blaireau finir son ascension.

L’armure était encore présente, le regard vers les cieux avant de s’envoler et retourner vers le centre de la ville. Le rebelle passait devant-elle, prêt à passer dans la rue en contrebas, ouvrant finalement sa gueule après cet échange.

— Tu te sens obligée d’agir comme une connasse, ou c’est naturel chez toi. Elle ne faisait rien d’autre que d’obéir aux ordres.
— N’est-ce pas notre rôle à tous…
— Qu’est-ce que tu racontes encore ?! Et puis merde, j’ai pas à écouter une personne comme toi.

Elle soupirait en regardant le rebelle descendre dans la rue en contrebas. Voilà l’une des raisons pour lesquelles elle avait perdu toute empathie à l’instant où les cors avaient résonné dans la ville. Qu’importent ses actes, sa bravoure ou encore la folie de ses agissements, elle se retrouverait affublée par la même étiquette héritée lors de son arrivée.

Traverser un pont désert afin de se faufiler dans le dos de l’ennemi, attaquer en traître, voilà ce à quoi se résumaient les missions dont elle avait la charge. La dirigeante des armées avait bien compris la nature et l’utilité de la rate, elle n’allait pas se priver d’un tel avantage ou bien d’une occasion de se débarrasser d’elle. Freyja préférait conserver cette idée, l’utiliser comme moteur. Ainsi, s’il advenait qu’elle ressorte vivant de cette nouvelle affectation, elle pourrait offrir son plus beau sourire à la générale et lui faire comprendre que ce ne serait pas aussi facile de se débarrasser d’elle.

Avançant sur le toit, elle finit par plonger et rejoindre le blaireau dans les artères de la ville. Avant cela, ils allaient devoir retrouver Petit Jean et trouver des volontaires pour cette nouvelle folie.

Ce fut les cris de joie qui permirent aux deux rebelles de retrouver les troupes dirigées par l’ami de Robin, malgré les déflagrations de flamme et les corps jonchés au sol, ils prirent le temps de fêter cette première victoire de la journée. Passant le croisement des rues, Freyja distinguait l’importante troupe, ainsi que la fatiguer se lisant sur leurs visages. Même s’ils semblaient heureux, ils n’étaient pas encore prêt à retourner sur le champ de bataille.

— Il semblerait que nos routes se croisent avant de nous mener à celle du château, madame.
Freyja dessina un mince sourire à l’intention de l’ours tout en s’approchant, celui-ci rangeant son épée à la ceinture avant d’écarter les bras, désignant les maisons autour d’eux.

— C’est une réussite, le nord de la ville est à nous ! Venez donc prendre un morceau de pain, avant que de nouvelles instructions ne nous tombent dessus.
— Navrés, nous devons déjà repartir et…
— Tu mérites de souffler un moment, prend à boire et à manger en m’expliquant ce qui se passe. Promis, rien ne sera dit au Général Primus.

Un lapin arriva près de Freyja et lui tendit une outre d’eau ainsi qu’un morceau de pain qu’il rompit en deux. La moitié pour la rate et le reste pour le blaireau. Celui-ci prenant alors la parole.

— Petit Jean, nous allons devoir traverser le pont pour prendre les troupes de Kefka à revers.
— T’es au courant qu’il y a un nuage prêt à détruire le pont ? Jamais nous ne pourrons passer par là, sans risquer de lourde perte.
— J’irai avec quelques rebelles, une petite troupe à plus de chance de passer.

Elle croqua dans le morceau de pain, profitant de la bouchée avant de passer la manche de sa veste sur son museau.

— Il nous faut deux personnes encore capables de se battre pour se rendre de l’autre côté de la ville, nous ne devons pas perdre de temps
L’ours se massait les tempes un instant avant de se retourner et appeler deux soldats, un sanglier cachant une épée bâtarde dans son dos et une loutre attrapant un carquois rempli pour se diriger vers la rate. Ils firent un semblant de salut militaire à Petit Jean avant de fixer la rate et le blaireau, terminant d’engloutir leur morceau de pain.

— Brett, Diana. Vous allez partir avec Freyja en direction du pont, vous avez pour ordre de le traverser et vous infiltrer dans la ville. Ça ira ?
— Déjà ?! On commençait seulement à souffler.
— Parle pour toi, vieux sanglier. À vos ordres, chef.

Les deux soldats saluèrent la rate et le blaireau à leur tour avant de s’approcher et terminer de s’équiper. Bien vite, après à une dernière salutation de l’ours, la nouvelle escouade quittait le gros des troupes pour se diriger au pas de course vers le pont à l’ouest de la ville. Prenant juste le temps de se présenter, Freyja prit déjà en tête de l’escouade et ils débouchèrent rapidement devant le fleuve, donnant le loisir aux rebelles d’observer l’épais nuage situé au-dessus du pont de pierre.

L’air était électrique, presque malsain alors que le sanglier posait une patte sur le garde-fou en pierre, remuant sa truffe.

— Z’êtes sûr que c’est une bonne idée…
— Tu penses en avoir une meilleure ?

Freyja s’avançait à son tour, posant déjà un pied sur le pont et observant ce qui se profilait devant elle. Il ne s’agissait de rien de plus qu’un long bras de pierre enjambant la rivière. Aucun homme du régent, une simple charrette abandonnée et cet énorme nuage noir flottant au-dessus de celui-ci. Cela était comparable à un ciel d’orage, grondant et lourd, abattant d’imposante goutte d’eau sur la pierre et illuminé par endroits.

— Sauter à l’eau et traverser la rivière à la nage est une meilleure idée !
— Brett, nous serions des cibles faciles.
— Bien plus facile que quatre personnes franchissant le pont sous le couvert du garde-fou, ton amie à raison.
— Ne perdons pas de temps, nous aurons à redoubler de vigilance de l’autre côté de la rive.

Une main sur le mur de pierre, la rate s’avançant déjà au centre de l’orage. La tête baissée, les jambes fléchies, elle courait aussi vite que sa position lui permettait tout en gardant son arme la main. La loutre et le blaireau suivirent alors que le sanglier clôturait la marche.

— J’aime pas ça…
D’une glissade sur le sol, trempée, la rate rejoint l’arrière de la carriole et sortait la tête de son couvert pour fixer l’autre rive. La pluie avait déjà trempé les rebelles, ceux-ci profitant de ce léger couvert pour avancer tout en évitant de glisser sur la pierre humide. Un éclair de lumière jaillies soudainement, éclairant la zone et crispant les rebelles un instant. La foudre était tombée non-loin d’eux.

— Dit, ma grande, tu comptes t’éterniser ici ? Si l’orage pète, nous allons sombrer dans les eaux avec le reste du pont.
— Attends…

Malgré son chapeau, la pluie infiltrait son pelage et de lourde mèche tombait déjà sur son visage. Elle ne distinguait rien de l’autre côté, il ne restait qu’une cinquantaine de mètres à franchir pour quitter le pont et il lui faudrait ensuite un saut pour atteindre les bâtiments d’en face.

— Préparer-vous à courir, si nous sommes repérés de l’autre côté, il n’y aura personne pour nous porter secours.
— Qui ouvre la marche ?!

Le blaireau fixait Freyja alors que le sanglier avait posé la question. Roulant des yeux, elle soupira avant de quitter le premier abri et longer le muret. Faisant un signe de la main, elle invitait les rebelles à la suivre alors qu’elle entamait déjà sa course sous la pluie.

La magie de Kefka devait animer ce nuage, pensait-elle en courant le long du mur. Un oeil sur sa destination et le second dans les airs, observant les éclairs striés l’air au-dessus de sa tête. Les poils de sa moustache s’irisèrent un instant avant qu’un coup de tonnerre résonne et n’illumine la scène. Surprise, elle plongea en avant, cherchant à éviter un coup alors qu’elle arriva finalement à destination. La pluie s’était calmée. Rapidement, elle se colla contre le muret de pierres et vérifiait les ruelles adjacentes alors que le reste de la troupe arrivait.

— Alors ?!
— Il n’ a rien… Je ne vois rien…

À peine la rate eut à peine le temps de finir sa phrase que le blaireau se relevait et s’avançait dans la rue avant de stopper net sa course. Il se crispa un moment avant de se retourner pour faire face à la troupe, trois flèches plantées dans son abdomen, et s’écrouler sans un bruit devant les regards médusés du reste de la troupe. Attrapant le sanglier par le col et le plaquant contre le mur, Freyja se colla ensuite d’autant plus à la pierre, voyant une flèche se planter dans l’angle du muret.

— J’savais que c’était une idée de merde !
— Brett, calme toi !
— C’était stupide de croire qu’il n’était pas gardé, nous avons couru jusqu’à notre mort.

La rate levait de nouveau la tête, une autre flèche vint se planter, la forçant à reprendre son couvert et tourner son regard vers les deux rebelles paniqués. Quant à elle, elle n’était pas pour autant rassurée.

— Ils nous empêchent d’avancer et risquent d’appeler une troupe pour nous cueillir, nous ne pouvons pas rester ici.
— Brillant Diana, merci d’énoncer notre mort proche ! C’est très productif !
— Silence !

Freyja cria presque, emportée par la peur alors qu’elle tentait une nouvelle fois de trouver la position des archers embusqués. Elle entendu le bruit d’une pointe frappant le sol comme seule réponse en se mettant de nouveau à couvert.

— Nous n’avons pas une seconde à perde, vous deux, courez droit vers le mur ! Soyez le plus discret possible, je vais tenter de faire diversion. Fixer les toits, ils doivent être là.
— Attends, t’es complètement conne ou…

Arrangeant sa prise sur son arme, la rate donnait alors une impulsion dans ses jambes et bondit en avant, entendant le sifflement de deux flèches sur son passage avant de tourner sur la gauche pour rejoindre le coin de la rue. Une troisième flèche se fit entendre et allait se planter dans l’omoplate de la rate, l’interrompant dans sa course et la faisant lourdement chuter au sol.

Amenant sa main à l’endroit de la douleur, elle gémit un moment avant de se relever en trombe et plonger derrière un tonneau, serrant les dents alors que d’autres impacts de flèche se firent entendre.

Rageant, elle attrapait la tige de la flèche et l’arrachait pour fixer la pointe. Un coup de chance, seule le bout en fer avait pénétré, son manteau ayant limité l’impact de la flèche. Elle tourna subitement la tête pour observer les deux autres rebelles collés contre le mur, indemne, pour ensuite fléchir les genoux et se propulser d’un saut sur un appui de fenêtre et ensuite continuer dans sa lancée pour atterrir sur l’un des toits. Un loup, un arc à la main, se trouvait juste devant-elle.

Il bandit son arc et tourna celui-ci en direction de Freyja avant de tirer, la flèche filait à toute allure et se plantait dans le casque de la jeune femme, lui laissant ensuite le loisir de réagir en attrapant sa lance et planter celle-ci dans le ventre du loup. Il lâchait son arc sous le choc, attrapant la lance et tentant de se débattre avant que la rate n’empoigne sa hampe et donne un violent coup, faisant tomber le premier archer en contrebas. Elle tournait alors le regard, un second loup venait de faire son apparition et s’apprêtait à tirer à son tour. Jusqu’à ce que son corps soit transpercé d’une lourde lame, dévoilant le sanglier.

Elle criait à l’intention de Brett, le prévenant qu’un troisième loup devait être sur les toits alors que la loutre terminait de grimper. Elle tournait alors son regard aussi et dégainait son arc pour tirer une seule et unique flèche, abattant le dernier tireur embusqué derrière la rate.

— C’était juste… Diana…
— Comme tu dis… Brett…

Freyja se retournait, cherchant une quatrième personne sous les ordres du régent. Sans succès.

— Soyez prêt, nous devons fouiller les environs, personne ne doit connaître notre présence de ce côté de la rive.


more_horiz
Vint enfin le moment où le nord de la ville leur appartenait, vraisemblablement du moins. Ravness était devant la table de commandement, isolée dans la rue principale de la ville, avec à ses côtés les quelques généraux de cette bataille. Ils regardaient le plan de la ville annoté ici et là, déjà avant la bataille, grâce à la reconnaissance faite par Système, et actualisé par les quelques informations qu'elle avait recueillies cette dernière heure.

En partant de sa gauche, autour de la table, il y avait Will l'Écarlate, blessé au flanc et essuyant négligemment ses couteaux contre sa cape rougeoyante, seule exception parmi l'armée de capes grises... Petit Jean qui avait lui aussi assuré un commandement, Robin des Bois qui avait combattu justement avec Sora et le précédent Shérif de la ville. Ne manquait à cet état-major que le Frère Tuck qui, à la tête des unités médicales, était occupé tout entier au soin des troupes. Et bien sûr, chaque homme et femme autour de cette table reconnaissaient tacitement qu'un homme d'église ne pouvait plus être à sa place parmi eux une fois la bataille commencée.

L'ensemble des quatre commandements, des unités de communication et des unités de soin se trouvaient à présent dans les environs, attendant les ordres. Ne restaient dans les rues que quelques rares brigands affectés à des missions de patrouille à des endroits clés, et bien sûr...


« Vous avez envoyé Freyja donc. », prononça Petit Jean d'une voix moins hardie qu'à ses habitudes.

La générale hocha la tête et posa son doigt sur le pont ouest que Freyja était chargée de traverser, malgré les cumulonimbus qui le menaçaient. Elle décrivit le parcours que devait emprunter la rate dans la partie sud de la ville, toujours sous occupation : Contourner les adversaires se trouvant au pont et les attaquer par le sud lorsque le gros de l'armée engagera la bataille.


« Elle a ses chances. Et nous attirerons toute l'attention. Si elle atteint le pont pour l'attaque, ses chances ne sont pas plus maigres que celles des hommes. » affirma le shérif plutôt catégoriquement.

« Après l'ouverture de la herse, je trouve que... » commença Petit Jean.

La générale l'interrompit, passant à autre chose. Parler ici de Freyja ne la dérangeait pas, mais ils avaient beaucoup d'autres choses à voir et peu de temps... Et plus ils en perdaient, plus les chances de Freyja de s'en sortir s'évanouissaient. « Le nord est à nous. Nous sommes ici. » Ravness posa un pion d'échec, un roi ayant perdu sa couronne, un peu au nord du pont central. « Le pont ouest et le pont est ne peuvent être traversés par un commandement. Kefka a fixé les limites. Donc nous les laissons tomber. »

« Le nouveau shérif, Aiden, m'a attaqué sur le pont est. Donc... Je dis qu'on doit envoyer dix gars surveiller chacun des deux ponts. On ne risquera pas de se faire contourner. Dix arbalétriers pour chaque pont, ça suffira. Ils tireront assez précisément pour le job. » décida Will tout en rangeant ses couteaux à sa ceinture.

Robin le rejoignit bien vite.
« Oui, on peut. Et je suis d'accord pour les arbalétriers. Le job est assez simple pour les vautours et trop pour nos archers. »

« Ca va. » La générale leva son menton et regarda le shérif avant de hocher la tête. Ce dernier se retourna vers un jeune rebelle, d'à peine treize ans sans doute, un hérisson dépassant de peu la table de commandement. C'était uniquement d'unités petites et légères qu'était composée l'unité de communication. L'ours répéta les consignes au jeune brigand et l'envoya les répéter à d'autres.

« Bon, le pont central est notre objectif. » prononça la générale en reposant ses yeux sur la carte. «  C3, donc Cerbère, le tient avec plusieurs dizaines d'hommes. Quatre, selon les vigiles. Donc relativement peu. Il l'a fortifié, barricadé, de façon à nous empêcher de passer. »

« Donc nous devons traverser sans passer par le pont, en quelque sorte. Will ? Une idée ? »

« Sans problème, Robin... On grimpe au sommet des bâtiments sur la rive, on tire une flèche sur la rive en face, sur un toit par exemple, et on glisse en tyrolienne. Donne-moi tes meilleurs compagnons et je fais ça sans te laisser le temps de m'admirer. »

« Non, vous êtes blessé, Will. »

« Je... » Will s'arrêta un instant pour se tourner vers la générale. « Ne crois pas que la bataille est finie là pour moi pour si peu. »

« Je compte sur vous pour prendre le château... donc d'ici là, vous restez en retrait. Sora ira avec les meilleurs acrobates parmi les brigands. Et Robin... couvrira leur traversée avec les archers les plus habiles, depuis les toits des bâtiments de notre rive. »

« Sora pour diriger l'unité tyrolienne donc ? »

« Il me semble que les hommes ont besoin de nous voir et de voir l'élu de la keyblade se battre en première ligne. Il n'aura pas besoin de diriger. Ils essaient de traverser et s'ils y arrivent, ils attaquent les flancs de l'ennemi. Quarante brigands pour franchir à la tyrolienne... Vingt-cinq archers pour les couvrir sur les toits. Cessez le feu quand tous les tyroliens sont passés. »

« Le pont est barricadé, Générale. Les soldats du régent seront à couvert et abattront nos acrobates comme des moineaux. »

« Oui. L'unité des tyroliennes ne franchira la rive que lorsque nous, à terre, aurons mené la charge. Je prendrai cinquante hommes dont cinq ou six mastodontes. »

« Je vous accompagnerai, mademoiselle Primus. Robin, je te laisse surveiller ce bon vieux Dolce.» répondit chaleureusement Petit Jean.

« Et... Système survolera le pont, fera des tirs de barrage pour permettre aux tyroliens de passer. Donc quarante tyroliens dont Sora, vingt archers dont toi, Robin et quarante lances sur le pont menée par Petit Jean et moi. Je devrais pouvoir nous donner l'avantage en forçant leur barrage. Et à ce moment-là, mais pour cela nous devons compter sur le Seigneur... Freyja et son escouade devraient elles aussi attaquer. »

« La supériorité numérique ne nous aidera pas à combattre sur un pont étroit... Il faudra au moins tous ces hommes pour nous débarrasser de Cerbère et de ses soldats. Et d'ailleurs, que fait-on pour lui ? »

« Je m'en occuperai avec l'officier Ambre. Sang-Bleu restera avec le reste de l'armée et me remplacera, si je suis tuée. »

« Bien. Nous avons un plan. » maugréa le shérif dans ses poils, alors qu'il observait la course d'une boule de feu dans le ciel. « Je fais transmettre. »
more_horiz

Un croisement de rue, une nouvelle direction, aucun garde dans les rues de Nottingham. Sortant de son couvert, la rate courait à petites foulées pour se cacher dans l’embrasure de la porte d’une maisonnette. Le dos plaqué contre le bois, elle respirait un instant avant de laisser sa tête dépasser afin d’analyser le prolongement des maisons.

D’un signe de main, elle invitait le Brett et Diana à la rejoindre, quittant elle-même cette cachette pour un rejoindre une autre.

Ils avaient à saut de puce, cherchant à se faire discret dans cette partie de la ville. Heureusement pour eux, ils n’avaient croisé que quelques hommes du régent. Ceux-ci ne prêtèrent pas attention aux zones d’ombre, trop occupées à rejoindre leur nouvelle position. Rassurant l’escouade de rebelle en infiltration dans le sud de la ville. Fléchissant les jambes, Freyja bondissait jusqu’au sommet d’un toit en chaume pour s’allonger sur celui-ci. Rampant ensuite sur la paille pour observer l’autre coté de la rue, la sueur perlait sur son pelage, elle était terrorisée par cette absence de résistance.

L’adrénaline de la bataille était tombé depuis longtemps, laissant place aux questionnements, aux doutes. Des questions qu’elle avait tourné dans tous les sens, des jours durant, sans jamais trouver la moindre réponse. Elle ne voulait pas mourir sans découvrir ces secrets. Cependant, chaque pas qu’elle faisait venait nouer cette boule dans son ventre avec plus d’ardeur. Elle voulait vomir, abandonner, se terrer et oublier.

— Freyja…? Tu vois quelque chose ?
La voix de la belette ramenait la rebelle à la raison. Passant sa main sur sa gueule, se massant les paupières, elle glissait lentement en arrière pour se laisser tomber et atterrir devant les deux membres de son escouade.

— Quelques loups, ils se dirigent vers la herse sud.
— C’est tout ?
— Brett !
— Quoi ?! V’là dix minutes qu’nous avons traversé le pont, et rien… C’est louche.

Ajustant son chapeau, la rate se glissait le long du mur pour vérifier une nouvelle intersection,  s’assurant de ne voir personne.

— Ils doivent garder le pont central, ou le pont est.
— Ou nous tendre une embuscade.

L’une des oreilles de la rate tressaillait à cette mention, la faisant se coller un peu plus au mur et réaffirmant la prise sur son arme. Elle reculait alors lentement, alors que la belette se faisait aider du sanglier pour grimper sur un autre toit.

— J’aperçois le pont central ! Ils sont tous là…
— Sommes-nous proche ?
— C’est ici que j’vivais avant l’début d’la guerre, il doit y avoir trois ou quatre pâtés de maisons à traverser.
— Brett…
— Oh ça va, pas la peine d’faire la pleureuse avec moi. On devrait se dépêcher.

Freyja savait qu’ils avaient raison. Néanmoins, les pattes de la rate restèrent collées aux pavés de longues secondes alors que les deux autres rebelles s’avançaient déjà dans les rues. Cette boule au ventre la paralysait, alors que son regard se perdait sur le château de la ville, ses meurtrières dominant Nottingham. Est-ce qu’il était là ? Allait-elle le voir ?

— Freyja… Est-ce que ça va ?
La belette s’était retournée, attendant au croisement de la rue qu’elle fasse quelque chose. Fermant les yeux un instant, elle se décidait à bouger, ravalant ce qu’elle contenait avant de répondre.

— Oui… Oui, j’ai cru voir quelqu’un…
— Ou ça ?! Brett, attends !
— Non… Non… Ce n’est rien. Allons-y.

Le sanglier prenait la tête de l’escouade, répétant les actions de la rate jusqu’à arriver devant une étale abandonnée. La troupe s’arrêtait devant celle-ci, regardant au travers de la vitrine avant de continuer et rejoindre un croisement afin de s’enfoncer plus profondément dans les lignes ennemies. La ville était comme déserté par ses habitants. Il semblerait que les trois rebelles se retrouvaient seuls au milieu de cette guerre. Loin des combats, n’entendant rien d’autre que les boules de feu projeté par Kefka.

Ce silence, cette atmosphère, ils étaient à mille lieues de tout ce qu’ils avaient vécu jusqu’à maintenant. L’impression constante que le danger pouvait surgir de n’importe où.

Un carrefour, large. La troupe s’arrêtait, se cachant derrière une pile de caisse en bois. Brett confirmait que le pont n’était plus très loin, Freyja le comprenait en tendant l’oreille. Des cris, des ordres, le bruit d’objet que l’on déplace. Il ne pouvait pas aller plus loin, du moins, pour l’instant. Les rebelles reculèrent lentement, s’approchant de la porte avant de l’ouvrir et rentrer dans l’une des maisons de la ville. Il devait attendre, rester discret, éviter de mourir inutilement et tendre l’oreille pour savoir quand réagir.

Diana s’avançait pour s’asseoir sur une chaise alors que Brett se dirigeait à la fenêtre, observant à travers celle-ci. Quant à la rate, elle se rangeait dans un coin de la pièce, fermant les yeux. Ce silence, elle voulait qu’il soit brisé.


more_horiz
"Ton baton me guide et me rassure. Tu prépares la table pour moi devant mes ennemis. Tu répands le parfum sur ma tête, ma coupe est débordante."

Elle, les yeux fermés et les mains jointes, au front d'une troupe, se concentra sur la voix grave et fébrile du Frère Tuck, imaginant les objets de la prière tout autour d'elle au moment de sa mort.

"Grâce et bonheur m'accompagnent tous les jours de ma vie. J'habiterai la maison du Seigneur pour le reste de mes jours."

La jeune femme hocha la tête, ouvrit les yeux et se tourna vers les dizaines d'hommes derrière elle, qu'elle ne pouvait voir, pour la plupart, puisque de nombreux therianthropes se trouvaient en première ligne et la surpassaient de nombreuses têtes, un ours, un taureau, deux hippopotames et  un phacochère.  
Elle brandit sa main ouverte vers le ciel alors qu'apparut son bouclier nordique, produisant une douloureuse lumière blanche pour tous ses suivants, imposant un silence religieux. Elle n'ajouta pas un mot, regarda vers les toits ici et là... Au bout d'une trentaine de secondes, elle aperçut Robin, couché sur le sommet d'un bâtiment, lui faire un signe de main. Elle répondit par le même signe.
Une nouvelle fois, Ravness se tourna, cette fois-ci vers la rue montante qui les mènerait au pont, et commença à courir en faisant apparaître son épée dans sa main droite. Les cinq mastodontes se mirent à courir en hurlant gravement, suivis par la troupe de quarante brigands. Ils montèrent ensemble la rue avant d'enfin voir, au sommet de celle-ci et alors qu'ils couraient, le pont fortifié par Cerbère et ses hommes. En son centre et jusqu'à l'autre rive avaient été empilés des objets de bois mais aussi des briques, des morceaux de mur, des monticules de paille. Rien qu'ils ne pouvaient traverser en chargeant simplement... Un immense rocher aurait été plus facile  à déplacer que cela. Mais elle ne ralentit pas, donnant le rythme à ses hommes.


"Des archers sur les rives !" cria un des mastodontes. Elle les vit aussitôt, une petite dizaine de loups disposés ici et là sur la rive, sans grande couverture sinon peut-être une charrette, une table renversée.
Alors que les capes grises descendaient la petite colline pour arriver au cours d'eau, la générale en tête hurla le plus fort qu'elle le put "Archers !!". Et des toits des maisons de la rive nord, au bout de quelques secondes, les meilleurs archers parmi les capes grises tirèrent, se dévoilant aussitôt. Elle espérait que cette digression dans le plan ne perturberait pas Robin et ses hommes... mais pour couvrir les tyroliens, quelques tirs de barrage des archers de Robin ne suffiraient pas.

Sa charge arrivait à sa fin. Elle commençait à courir sur le pont quand l'énorme barricade devint un problème à régler sur le champ. Si elle avait essayé de le renverser de sa force, la troupe rebelle l'aurait écrasée contre les parois de cette montagne. Elle décida de suivre son plan... de concentrer toute la puissance que lui avait donnée le ciel et de libérer sur cette fortification de fortune toute son énergie psychique, comme un bélier sur les portes d'un château.

Elle put presque voir l'air se déformer sous la puissance de cette charge d'énergie et... renverser, expulser, dégager sur les soldats du régent toute la création. Elle fit voler chaises, portes, tables, ballots de paille et sacs de gravier sur la rive sud, brisant la défense de celle-ci, forcée de se mettre à couvert pour ne pas être frappée.

Ravness n'eut en tête que son acte, jusqu'au moment où elle se surprit à être immobilisée sur le pont, les yeux figés, alors que les cinq unités lourdes de sa troupe la dépassaient pour briser la première ligne des hommes de Cerbère. Elle reprit sa course avec véhémence, seulement exhortée par l'acclamation bestiale des brigands. Les cinq têtes d'armée s'arrêtèrent devant l'ennemi, commençant le combat, agitant leur énorme arme devant eux pour faucher l'adversaire et... malheureusement, bloquant l'avancée des brigands sur le pont, en occupant l'entièreté de la sortie de celui-ci.
C'était l'intérêt de les faire combattre sur un pont...


"Allez-y !"

Ambre, qui s'était tenue derrière la première ligne durant la charge, la dépassa, se mit juste derrière le phacochère, qui était du groupe des cinq le plus petit, à genoux, les deux mains jointes. La manoeuvre était risquée et... elle n'était pas sûre de savoir le faire dans une situation de combat. Mais elle avait demandé à ses hommes de faire des centaines de fois ce mouvement durant les entrainements. Le faire devant eux avait tout son intérêt pour débloquer la situation.

" Ritos ! La générale arrive !"

Ravness prit une inspiration, vit les jambes du phacochère fléchir un peu alors qu'il était en plein combat, et courut vers lui. Elle posa une botte sur les mains d'Ambre avant que celle-ci ne les levât. S'aidant de l'impulsion, elle sauta jusqu'à l'épaule du rhinocéros à laquelle elle se hissa et sur laquelle elle parvint à poser un talon. La générale n'y resta pas longtemps, trop déséquilibrée. Elle se jeta en avant, fit une roulade en tombant au sol et se releva brusquement devant un loup. Son épée apparut à nouveau dans sa main et le transperça par surprise.

La générale se releva en regardant autour d'elle ses ennemis. Deux lances voulurent la frapper. Elle dévia la première d'un violent geste de son épée et bloqua la deuxième de son bouclier. Avec ce dernier, elle força contre la pointe de la lance avant d'en sectionner la hampe d'un coup d'épée. À quelques mètres d'elle, l'hippopotame rebelle attira l'attention de la bataille, assénant autour de lui de larges coups de hache et avançant avec énergie dans les lignes ennemies, sans prudence. Elle le vit être touché plusieurs fois en trois secondes à peine, le temps qu'elle s'accorda pour regarder la situation. Profitant de son sacrifice, de nombreux brigands entrèrent dans la brèche.

Les lanciers qui la combattaient se retrouvèrent, en quelques instants, attaqués par Ritos et Ambre, et les aider les aurait gênés. Elle n'eut à chercher qui combattre. Jusqu'à elle courut un loup muni d'une longue épée. Mais avant même qu'il ne l'atteignît, un autre soldat la frappa au dos, mais heureusement pour elle, sur le dos de son plastron. Elle engagea le combat, soucieuse de l'avancée de son armée, pour l'instant bloquée sur le pont, pour une grande partie.

Enfin, d'un coup d'oeil, elle aperçut, des toits de la rive nord, de nombreuses cordes filer river sud et des tyroliens en descendre. Les archers du régent ne traîneraient pas longtemps pour abattre ces cibles faciles...


Dernière édition par General Primus le Lun 25 Déc 2017 - 22:40, édité 1 fois
more_horiz

Après avoir prit un peu de repos au campement de commandement, Système se sentait de nouveau un peu plus d'attaque à se lancer dans la bataille. Ravness Loxaerion lui donna les directives qui la guideront pour la prochaine escarmouche. Quand l'heure vint, l’androïde s'élança dans les cieux. Son vol était stabilisé comparer à après la boule de feu prise en plein fouet, mais il restait beaucoup moins gracieux qu’avant. Mais, quand bien même, elle tiendrait du mieux qu’elle pouvait. Cependant, elle ignorait combien de temps cela durerait encore. La guerre, bien qu’elle soit capable de se battre, était un concept qu’il lui échappait encore que trop. Pour quelles raisons fallait-il réellement la faire ? N’y avait-il pas d’autres moyens de parvenir à ses fins ou bien il s’agit là que de l’unique moyen d’obtenir justice ? Et le coût en vie des deux côtés n’était qu’un prix dérisoire pour tout le monde ? Le sens de la vie lui filait entre les doigts également, mais c’était une chose bien précieuse. Après tout, elle ne serait pas là sans la vie de son créateur.

 Il lui fallait désormais rejoindre le quartier du pont central pour protéger la horde de tyroliens qui allaient passer de l’autre côté de la berge. C’était une stratégie risquée, mais si elle réussissait à être exécutée parfaitement, cela donnerait sûrement un avantage tactique aux forces de la rébellion. Elle arriva en vue de la passerelle en bois pile au moment où les cordes étaient tirées pour accéder aux toits d’en face.  La bataille faisait rage. Les forces du Générale Primus chargeaient face aux guerriers de Kefka.

Elle se reconcentra sur ce qu’elle avait à faire et commença à canarder les archers qui tiraient en direction des personnes fendant le vent à l’aide des tyroliennes. La majorité des ennemies qu’elle visait étaient pour la plupart à couvert par une cheminée ou un abri formé sur le tas. Mais pour le reste, il lui était facile de les toucher.  Son but n’était clairement pas de tuer froidement pour protéger ses compagnons, mais bien d'effrayer l'archerie en entière. Elle espérait que ses tirs de suppressions seraient suffisants.

more_horiz
Un bruit sourd de tonnerre tout autour.

"Timor, j'en reviens pas que tu sois encore vivant."

"Hé hé hé. Je m'étonne moi-même."

Un vacarme assourdissant à droite. Le bruit de la chaume qui brûle.

"Bon sang, ça aurait pu être nous."
"Si seulement il pouvait pleuvoir, ça brulerait moins."
"Ça sert à quoi de se battre pour Nottingham si Kefka détruit tout ?"
"Tu l'as dit. Hé, regarde !"

Un bruit ténu de réacteur juste au dessus.

"C'est la fille, là. La super blonde."
"T'emballes pas. Paraît que c'est un robot."
"Je m'disais bien. Trop parfaite. Ah, si seulement..."
"Compagnons. Bandeeeez vos arcs. Et... Tirez !"

La voix de Robin, un peu plus loin. Le bruit de flèches fendant l'air. Sora ouvrit les yeux. Il était allongé sur le toit pentu d'une maison en bordure de la rivière qui coupait Nottingham. L'air était lourd et humide. La maison voisine brûlait.

"Bon, ça va être à nous, je crois."
"Ou.. ouais."
"Tyroliens, en avant ! Nous vous couvrons, les amis. Faites au plus vite."
"Ouais, c'est à nous. Bon..."

Timor et son ami lapin n'avaient pas l'air rassurés. Pas étonnant. La mort avait déjà emporté plusieurs de leurs camarades à la porte d'entrée de la ville. Heureusement, la troupe de Robin n'avait pas subi davantage de pertes depuis. Quelques affrontements tout au plus avec des adversaires bien moins nombreux qu'eux. Sora avait suivi les ordres et serré les poings. Ils auraient déjà dû être au château, se disait-il. Pourtant, son corps même lui indiquait que ce ne serait pas si facile. Même après cette pause bienvenue, il se sentait encore fatigué.

"Vas-y d'abord, t'es plus rapide. Je te ralentirai."
"Non, vas-y toi, j'ai jamais fait ça, comme ça j'imite tes mouvements."

Une silhouette passa rapidement en contrebas dans la petite ruelle. Elle portait le même chapeau que Robin.  Sora ouvrit la bouche pour interpeller Bobby, le courageux garçon lapin qui avait été assigné au corps des messagers, mais le laissa finalement filer sans rien dire. Inutile de le retarder. Au moins, il n'était pas en première ligne.

WooooooooooshPRRRGGGRRR

La maison devant laquelle passait maintenant Bobby trembla et commença à se consumer sous le coup d'une nouvelle boule de feu. Sora sentit le souffle chaud sur son visage. Il monta tout en haut du toit et plissa les yeux, cherchant Bobby à travers les flammes. Le lapin courait encore, il ne s'était pas arrêté. Sora le regarda faire encore quelques instants, le sourire aux lèvres.

"Bon, tu sais quoi ? On à qu'à tirer à la courte paille. Je prends un bout de chaume et..."
"Tu plaisantes, là. Les autres sont déjà partis sur leur corde, je te signale. Et si on reste là, tu vois pas qu'on va rôtir ?"
"Ben vas-y alors, si t'es si pressé de te prendre une flèche ! On atteindra jamais l'autre rive."

Sora rangea son épée dans le fourreau qu'il avait attaché à son dos, puis s'approcha des deux soldats incertains et mit une main sur l'épaule de Timor, l'autre sur la tête du lapin. "Vous embêtez pas", leur dit-il simplement en les regardant tour à tour. Alors il tendit le bras droit en avant et ferma un court instant les yeux, pensant à Bobby. Le poids exact de Chaîne Royale dans sa main. Il rouvrit les yeux, fléchit les genoux et bondit du toit en direction de la corde tendue droit devant. Au moment ou, dans sa chute, ses pieds passèrent juste à droite de la corde, il tendit sa keyblade à l'horizontale par dessus sa tête et attrapa le bout de l'arme avec son autre main.

Lorsque le milieu de la hampe entra en contact avec la corde, il y eut un rapide flash blanc. Ses bras en l'air toujours accrochés à Chaîne Royale et ses jambes dans le vide, Sora se laissa glisser le long de la corde, criant joyeusement "OUDELALIIIIII !" aux autres cordées qui s'arrêtèrent un instant pour le regarder. Le vent lui fouettait le visage, c'était vivifiant ! Une flèche le ramena à la raison : elle avait sifflé bien trop près de son oreille gauche. Heureusement, la couverture des archers de Robin et le tir de barrage de Samus firent leur effet, empêchant les archers ennemis sur l'autre rive de continuer à le canarder. Il leva la tête en l'air et sourit à Samus, puis regarda par dessus son épaule. Timor et le lapin avaient commencé leur traversée.

L'autre rive approchait à grande vitesse. Une autre corde sur sa gauche venait de lâcher, faisant plonger dans la rivière tous ceux qui étaient dessus. Il n'eut pas le temps de les plaindre, il y avait un toit droit devant et un archer dessus, il fallait sauter... maintenant ! Détachant sa main gauche de sa keyblade, il se laissa choir au sol et se réceptionna dans une roulade pour amortir le choc. En se redressant, il constata qu'il ne fallait pas forcément partir à point, avec sa technique il était arrivé avant les autres tyroliens.

En haut du toit pointèrent un arc et un museau de loup. Sora les vit juste à temps pour glisser à gauche, évitant la flèche. Les sourcils froncés, il bondit sur le toit et se rua vers l'archer pour lui assener trois coups de keyblade. Le loup, sonné, tomba du toit. Les dents serrées, Sora sauta à sa suite pour atterrir les pieds sur l'ennemi. Le souffle coupé, le loup ne put que gémir un maigre "Pit..." avant qu'un ultime coup de Chaîne Royale sur le crâne ne le fasse taire pour toujours. Sora observa le corps inanimé, les yeux-mi clos. Il soupira en faisant disparaître sa keyblade.

Deux tyroliens qui avaient réussi leur traversée couraient vers lui, un chien et un renard. Ce n'était pas Robin. "Faut qu'on... faut qu'on attende les autres", dit le chien dont la truffe tremblait. Sora regardait vers le pont central où le gros du combat faisait rage. Les troupes de ce clown de Kefka perdaient un peu de terrain mais elles tenaient bon, causant la mort de nombreux rebelles. Heureusement, les soldats ennemis étaient trop bêtes ou trop occupés ou trop disciplinés pour songer à aller cueillir ceux qui les contournaient.

"D'accord. Attendez les autres." Sora sortit l'épée que lui avait offert Primus de son fourreau et courut en direction du pont d'où provenaient en pagaille cris, ordres et râles. Il n'allait pas rester là alors que chaque minute faisait des morts. Pourtant, se dit-il en sentant son cœur s'accélérer, tout seul, dans son état, il n'arriverait pas à grand chose. Une boule de frustration dans le ventre, il ralentit sa course. Il n'était plus qu'à une trentaine de mètres des troupes ennemies, et personne ne l'avait encore repéré. Quelle bande d'imbéciles.

Un coup de tonerre retentit et un mouvement sur sa gauche le fit tourner la tête. Un sanglier, un rat et une belette avançaient eux aussi vers le pont, dans le dos des ennemis. Des renforts ? Non. Le rat avait un heaume reconnaissable en tous, c'était une rate, c'était Freyja. Lorsqu'il la reconnut, la frustration de Sora s'envola. Elle avait survécu malgré ses doutes, malgré les chances. Il accéléra le pas pour les rejoindre et, une fois à la hauteur de la rate, lui empoigna doucement l'avant bras. "Ça, c'est pour toi." Avec un sourire, il se détourna et fonça vers le pont, vers la mêlée.

Son épée embrocha le premier loup venu. Il dut appuyer du pied sur le dos de sa victime pour en extraire son arme. Sans attendre, il enfonça la lame pointue et aiguisée dans les côtes du voisin qui se retournait. L'animal couina de douleur et lâcha son arme.
more_horiz

Prise par surprise, la rate stoppait lentement sa course avant de comprendre ce qui en retournait. Il était là, à ses côtés, comme il l’avait promis. Freyja lui souriait en retour, elle sentait une douce chaleur lui emplir le coeur alors qu’il s’avançait déjà vers le pont.

Elle détournait brièvement son regard, fixant Diana et Brett avant de les inviter d’un geste de la main à prendre la suite de Sora.

Passant son arme dans le dos, pressant le pas, la rate arrivait derrière son ami et sautait au-dessus de celui-ci pour atterrir sur les épaules du loup qu’il venait d’attaquer. Dans un équilibre instable, elle s’affaissait sur elle-même avant de se propulser dans les airs d’une acrobatie. En suspension durant une seconde qui semblait éternelle, elle souriait une fois encore, elle se sentait libre jusqu’à ce que la gravité la rappelle à la dure réalité de cette guerre.

La pointe de sa lance vers le sol, s’enroulant autour de la hampe, la rate se laissait tomber et embrochait un épéiste avant de se dégager. Prenant de nouveau ses appuis, elle fixait la belette bander son arc et Brett en avant, non loin du garçon aux cheveux hirsutes à frapper de sa lourde épée. N’étaient-ils véritablement que quatre pour prendre les troupes du régent à revers ?

Pourtant, Freyja voyait les cordes tendues entre les deux bords de la rivière. Bloquant une attaque avec le fer de sa lance, forçant sur le bout de sa hampe pour diriger la lame ennemie au sol, la rate tournait sur elle-même afin de donner coup de pied et ensuite exécuter son adversaire dont la garde était brisée. Les pavés du pont commençaient à être gorgée de sang. Elle bondit en arrière, fléchissant ses jambes avant de s’élancer dans les airs, accordant un regard à la rive sud. C’est ainsi qu’elle comprenait la raison du manque de résistance sur ce côté-ci du pont.

Les troupes du régent étaient bloquées dans une mêlée qui semblait interminable. Il tenait le centre du pont alors qu’une cohorte composée de géant empêchait quiconque d’avancer, que ce soit dans un sens comme dans l’autre. Cependant, une chose retenait l’attention de la rate, la Générale était entre le mur de mastodonte et les forces du régent, dans une sorte de baroud d’honneur alors que les rebelles arrivaient au compte-gouttes. Freyja soupirait, regardant de nouveau le sol afin de retomber sur celui-ci, manquant de trébucher et ayant besoin de se rattraper à l’aide de l’une de ses mains. Elle redressait son regard, roulant sur la gauche afin d’éviter un marteau s’abattant à l’endroit où elle se trouvait l’instant précédent. Assenant un coup rapide et s’écartant ensuite pour éviter un nouvel assaut, elle fit sauver de justesse par un chien s’interposant entre elle et son opposant.

Primus est devant nous, à cent mètres, elle a besoin que nous avancions.
Qu’est-ce que tu veux que nous fassions de plus ?! Nous-mêmes somme acculé…

Elle se redressait, ayant adressé ses paroles à Diana et Sora avant de brandir sa lance en avant, propulsant du sang contre le pavé avant de se mettre en garde. Du coin de l’oeil, elle remarquait d’autres rebelle arriver des côtés, il prenait les troupes du régent en tenaille. C’était leur chance.

Il faut pourtant que nous avancions…
Freyja murmurait cela à elle-même. Tel était son mantra, elle connaissait la destination et devait y parvenir coûte que coûte. Elle avait déjà damné plusieurs fois son âme, ne serait-ce qu’aujourd’hui, il refusait de croire que tant de sacrifice était inutile. Elle voulait le revoir, même si cela lui couterait la vie et ce qui lui restait d’humanité

Vivait-elle à cet instant…

Gagnant en ardeur, les rebelles profitaient de cet effet de surprise en s’avançant dans les lignes. Dorénavant, ce n’était plus une bataille rangée et quelques loups se retournaient déjà pour tenter de réfréner cette vague. Il était déjà trop tard.

La rate se propulsait en avant, passant au côté de Sora pour lui dégager un sourire avant de plonger en avant dans une vrille pour planter sa lance dans l’épaule d’un loup. Le choc lui faisait lâcher son arme, néanmoins, et attrapait a hampe en bois et cherchait à s’en débarrasser. Freyja reculait d’un pas avant de poser son pied sur la lance pour ajouter son poids à l’épreuve de force et entaille le torse de son adversaire. Il tombait à genoux, tenant cette plaie béante alors que la rebelle ramenait sa main en avant et décochait une attaque brève, ouvrant la gorge du loup qui s’étalait au sol.

Il n’y avait rien de noble dans tout ce qu’elle avait fait depuis le lever du soleil, que ce soit pour la rébellion ou l’armée du régent. Elle repensait un instant à ce compagnon de Robin noyé dans la rivière dont le corps devait probablement encore flotter, son ventre se contractait alors qu’elle brandissait une nouvelle fois son arme en avant.

Percer, trancher, tuer. Esquiver, parer, reculer. Des pas de danse imprimé, répété, entrainé, assimilé. La représentation importait peu, seul le résultat était important à leurs yeux.

Elle reculait d’un bond, posant sa main gauche au sol et amenant son arme dans la main droite qu’elle passait derrière son épaule avant de lancer celle-ci de toutes ses forces. La lance fallait dans l’air, rencontrant la chair et s’enfonçant profondément, Freyja plongeait alors les pattes en avant, percutant le torse du blessé avant d’attraper la hampe et tourner sa lame dans la plaie, arrachant un cri de douleur et le faisant lourdement tomber en arrière.

Un de moins. Le liquide carmin coulant sur la pierre et tombant dans le Trent, prenant ainsi la teinte que seul le crépuscule pouvait lui donner.

Poussant sur ses pattes, la rate se dégageait de la mêlée d’un bond dans les airs. Une bouffée d’air frais, loin des combats et de la désolation alors qu’elle distinguait l’un des responsables. Ils étaient là, ensemble et aboyant leurs ordres. Cerbère. Aucun des trois frères ne savait ou donner de la tête, retrancher et n’ayant d’autres choix que de combattre ou plonger dans les eaux de la rivière. Tournant sur elle-même, elle retombait lentement au côté de Sora, fuyant le sol du regard.

Il faut que nous continuions, ils ont besoin de nous… Ils ont besoin de te voir, Sora.
Il était là pour elle, pour eux. Il était un guide, à l’image de la Générale qui tenait le front pour permettre aux rebelles d’avancer. Lui, il semblait rayonné et parvenait à faire oublier à la rate l’horreur de la réalité. Elle ne serait même pas ici sans lui, sans sa présence.


more_horiz
Les renforts l’avaient débarrassée de ses ennemis. En un peu plus d’une minute, les soldats qui défendaient le pont se retrouvèrent acculés, encerclés. Mais le combat n’était pas encore fini dans cette partie de la ville, seule son issue était connue. Manquait alors la manière dont les brigands allaient y arriver.
Ravness retira son épée de la poitrine d’un loup, haletant, avant de se diriger vers le coeur du combat qui s’était éloigné d’elle au fil du combat. Tenant son bouclier contre sa poitrine, elle vit un rhinocéros s’approcher d’elle prudemment, visiblement vainqueur d’un précédent duel. Leur taille impressionnante ne cessait d’étonner la générale qui ne parvenait jamais à aborder un combat contre eux sereinement… Mais tous les coups qu’elle avait subis aujourd’hui, et tous les brigands qui étaient tombés, dont les corps jonchaient le champ de bataille, lui faisaient perdre parfois tout sens de la mesure et de la raison. Et il aurait été raisonnable de craindre un mastodonte de la sorte.

Un peu plus loin, d’un oeil, elle vit enfin distinctement la cible de cette opération : Cerbère, les triplés dalmatiens qu’elle avait déjà affrontés. Leur façon de se battre était si caractéristique… Ils maniaient les armes comme les gitans dansaient autour d’un feu, avec un rythme inné, une sensibilité extrême.
Et ils commettaient justement des dégâts irrattrapables. Un à un, les brigands mouraient sous leur lance, ce qui n’était tout simplement pas possible pour la suite de cette guerre. La générale devait s’en occuper au plus vite.
Hélas, pour la débarrasser du rhinocéros, il n’y avait qu’elle. Les autres brigands combattaient ailleurs, sécurisaient des mêlées.

Le rhinocéros souleva sa grande hache et s’avança alors plus prestement avant de l’abattre sur elle. Sans effort, elle para le coup de son bouclier. Elle fit un pas en avant pour être à portée de son ennemi mais ce dernier, d’un joli jeu de jambes, s’éloigna tout en ramenant son arme vers lui et en frappant de nouveau. Elle para à nouveau, immobile, un coup, puis un deuxième. Lui faisait tournoyer sa hache, poursuivant une série de coups, avec une vitesse impressionnante.

Ah ! Elle illumina quelques secondes son bouclier avant de relâcher tout autour d’elle un rayon de lumière. Son ennemi émit un cri et ne put parer la taille qui toucha son genou avec précision.
Elle s’éloigna une petite seconde de son duel pour observer Cerbère du coin de l’oeil, dont les trois lances perforaient l’armure de bois d’un bélier à plusieurs reprises. Ce dernier semblait encore se battre, vaguement aidé par quelques capes grises. Mais voilà la difficulté d’un tel combat. Aucune équipe ne pouvaient être aussi coordonnée que ces trois frères.

Bien… Ravness ne pouvait plus perdre trop de temps. Elle brandit son épée, s’apprêta à attaquer quand une douleur aigue la saisit à la poitrine. Une flèche l’avait touchée juste au-dessus de son plastron, entre le coeur et sa clavicule. Son regard suivit la trajectoire de la flèche alors qu’elle sentit son corps légèrement ployer… Elle vit un archer encocher une flèche, au-dessus d’une maison, et un brigand derrière lui s’apprêtant à l’éliminer discrètement. Freyja, peut-être, pensa-t-elle… Il s’en était fallu de peu que cela ne touche le coeur.
Le goût du sang dans sa bouche, la vue trouble, tout cela ne l’aida pas à réagir à l’attaque de son opposant. Elle para le premier coup de hache de son épée, et le deuxième de son bouclier. Sans trop savoir comment, elle fut projetée à terre mais se releva aussitôt d’une roulade. Il était temps pour elle de conclure l’affaire. Elle se rua sur le rhinocéros, bouclier devant la poitrine. Fléchissant les genoux, elle se baissa pour esquiver l’attaque horizontale de son adversaire avant de percuter ce dernier de son bouclier. Sa targe produisit une lumière blanche qui arracha un grognement au rhinocéros, grognement qu’il ne put finir… déjà, la lame de la générale de la lumière était plantée dans la gorge du rhinocéros.
D’un geste sec, elle la retira et, une flèche dans la poitrine, le souffle court, l’arme ensanglanté, elle se dirigea vers Cerbère, à une dizaine de mètres de là, en courant. Mais bien vite, le combat qui était concentré sur quelques dizaines de mètres l’empêcha de continuer… Une huitaine de soldats combattaient contre les capes grises et l’empêchaient de passer alors qu’elle pouvait voir d’autres de ses alliés tenter leur chance contre la triade canine… tandis qu'’à leurs pieds gisaient un bélier, un cerf, une belette et encore bien d’autres hybrides qui avaient vu en un combat mené le salut de leur pays.
Et voilà… Devant Cerbère, presque seul, se tenait maintenant Petit Jean. Elle devait l’aider.
La jeune femme fondit sur tous ces soldats qui l’empêchaient de conclure cette affrontement.
more_horiz
A vivre par l'épée, périr par la lame.

J'ai été attiré par le conflit, comme un papillon attiré par une flamme, qui l'éclaire et qui le réchauffe mais qui menace de réduire tout son être en cendre. Ici c'est une sorte de magie puissante qui m'indique ma destination, où je dois aller. Le pilote m'avait dit que depuis des années Sherwood était un coin craignos, Kefka avait tiré son épingle du jeu... Et la lumière tentant de lui briser les doigts.

La détermination guidait ma course, je rejoins l'armée rebelle qui, dit-on, venaient renverser le Tyran de Sherwood. Je serais là où je peux fournir un soutien. Je ne connais ni ces gens, mais ils se battent pour ce qui leur semble juste et je me fais un devoir de les aider. La situation m'échappait, j'arrivais depuis la porte sud, il y avait ces gardes, à la main tremblante, au regard habité par la peur... Et pourtant, ils sont des loups.

Je ne m'éternise pas, des arcs et des flèches pointés en ma direction. Je n'ai pas le temps de lâcher un mot, une flèche a été décochée. Quelle idée stupide... Moi je voulais juste parlementer.

Je profitais de cette avancée, ces munitions sont tirées en ma direction, c'est tellement amateur j'en pleurerais de rire. Mais lancer l'hostilité envers ma personne m'a coupé l'envie de rire, j'en ai chopé un et je lui ai collé un coup de poing dans le museau, son pote, bredouille et confus, n'arrivait même plus à encocher une flèche correctement

<< Pourquoi est-ce que j'esquiverais des flèches que je ne crains pas? >>

J'avais besoin d'un peu de violence. Des museaux ont rencontrés mon genou et bien plus d'une fois. Je laissais derrière moi ces deux crétins à terre, dans des râles de douleurs et de regrets.

Mais voilà, la herse est fermée... Et comment franchir ça. Je regardais autour de moi, si je fais le singe... Oui. Le singe. Je me penchais sur un garde que j'avais savaté, y'en a bien un qui doit avoir une corde. Pas celui là... Ah! Parfait. Une corde. Pas des plus solides que j'ai vu mais on peut moyenner une entrée.

Si un jour j'aurais crû avoir autant peur de faire une haute chute, je me suis débrouillé pour trouver un point d'accroche - une pierre imparfaite qui dépassait un peu -, à chaque pas que je prenais, je changeais ma future épitaphe. "Est mort comme un con", un autre pas, "Est tombé comme une brèle", troisième pas "Est-capable de casser la tête à six loups mais ne peut accuser une chute de cinq mètres", allez tout proche... Je change l'épitaphe! "Va se prendre une flèche parce qu'il faisait pas attention".

Une arrivée presque triomphale, feu couvert de flèches, des questions à mon encontre, la porte est pas ouverte eh ben j'en fais une. Il y a un garde avec une lance qui tente de me piquer, il n'est pas habitué à cet angle, ne sait pas utiliser sa lance, je lui colle un gnon, l'attrape par le col et je lui fais découvrir la chute qu'il m'aurait fait faire, et en plus je gagne une arme. Zonk!

Me voilà sur la muraille. Pas un très bon plan en vérité, y'en a trois devant, deux derrières. Mon propos dans cette bataille est bien plus grand que le leur. J'en sortirais vivant.

<< Vous pensez avoir une chance?! Vous pourriez! Si vous aviez grandit au jardin radieux... >>

L'assaut débuta, ces chiens sont animés par la peur! Ils se lancent à deux sur moi, un troisième en retrait, deux autres préparant leurs arbalètes, je maniais cette lance comme une véritable arme, exécutant parades   et moulinet pour déstabiliser mes ennemis, ça impressionne les moins doués... Un coup de droit dans le museau, et le revers pour le faire basculer par dessus la muraille. Je me retourne et je sens une douleur vive sur la joue, mais elle ne m'arrête en rien, ce rire triomphal s'étrangla dans des gémissements plaintif, la chair entaillée par la pointe d'une lance qui n'a plus aucune assurance face à ma détermination.

Ces arbalétriers sont des crétins, ils visent le torse alors que ma tête est à découverte, je montrais à mon adversaire ce que j'ai appris. Ce qui durant toute mon enfance m'a fasciné. Cette arme me permet de ne pas laisser mon adversaire respirer, des attaques d'estoc répétées jusqu'à ce que l'acier transperce la chair. Je tentais de la retirer mais je suis trahi par cette arme qui refuse de quitter son fourreau sanglant.

Alors je lâche la lance et je laisse ce chien s'empaler, prenant ma hache et mon épée à ma ceinture, le troisième était très peu assuré... Ils sont désordonnés, ne communiquent que par des insultes ou des propos plaintifs. Ce rhinocéros peut me poser difficulté : il porte un fléau d'arme et un bouclier. Il éxecute des gestes pour préparer le momentum et lance violemment un coup pour me heurter. Mes sens sont en feu, mes instincts sont à l'affût, j'entends derrière la corde tendue, le clic, mais je préfère encaisser un carreau qu'un coup de fléau.

La douleur m'arrache un avertissement, je ne dois pas perdre le fil, je fis une roulade en arrière pour me désengager contre ce mastodonte. L'arbalétrier responsable lâcha un cri, s'attendant très peu d'avoir une lame dans le ventre, je la retirais d'un geste sec, j'ai touché l'abdomen, le rhinocéros pâli, la guerre est violente... Il ne vivra pas assez longtemps pour cauchemarder de son camarade, tentant de ramener ses tripes dans son corps.

Manque de bol, plus de carreaux sur le cadavre, cet arbalète est donc inutilisable. Passer le rhinocéros serait un risque, compte tenu que j'ai un carreau dans l'épaule et une plaie ouverte au visage. Il reprends ses gestes, il sait comment faire marcher son arme. Heureusement pour moi... Je suis un excellent élève.

J'envoyais un projectile en sa direction, l'écho de mon âme, mais j'usais de mes savoirs pour en faire un coup à retardement. Le gros balourd n'a pas eu le temps de se défendre, mais sa stupeur jubilatoire quand il constate que cela ne lui fait rien, je fonds en sa direction, le voilà animée d'une assurance que j'ai manipulé à ma manière.

Le voilà à genou, se tenant le nez à cause de cette douleur subie et injustifié selon ses mots, je pris appuis sur son dos pour me ruer sur le dernier arbalétrier, il a une mort plus douce, le crâne ouvert en deux, ce crétin n'a pas eu le réflexe de tirer sur la détente... Me voilà, avec un moyen bien plus meurtrier que l'écho de mon âme. Me retournant.

J'ai grandi, seul.

L'art de la guerre, c'est ma vie.

Le rhinocéros se retourne, constatant l'arme dans mes mains, préparée à faire feu... Je fis mine de viser les yeux, un bête réflexe pour se défendre, et un carreau en plein cœur. La maille ne protège en rien de cette pointe d'acier. Je me redressais en gardant cette arme mal acquise, arrachant ce qu'il reste de munition à mes pieds.

<< Vous auriez été témoin d'un vrai lancier à l’œuvre. >>

Je serpentais dans les rues, il y avait des personnes déboussolées qui couraient dans tout les sens. D'ici je pouvais aller au château mais seul contre tous ce serait du suicide et j'aime ma vie où elle est. Le bruit du conflit provient de cet horizon.

J'arrivais devant un pont, une mêlée sans pareille, elle n'a rien de glorieuse, c'est un combat pour la vie, des cadavres tombent dans le fleuve et voguent paisiblement au gré de l'eau. Ces soldats se battent contre des figures portant des capes grises, le niveau entre ces combattants est un véritable gouffre. Cela semble amusant...

Mais je me tournais, bien que ces trois chiens à la lance m'intriguent, je ne m'en occuperais pas. Concentrons nous plutôt sur on autre objectif. Chaque soldat de plus à l'ennemi compte... On va faire un coupage de ravitaillement humain.

Ainsi commence ma contribution. Les trainards ont tâtés de mes poings, y allant avec assez de force pour les briser, ces rhinocéros sont des balourds, ces loups sont des lâches et moi.

Je suis le mec qui colle des gnons.
more_horiz
Ce n'était plus le temps de fanfaronner. En pleine mêlée, Sora restait concentré. Les yeux, les bras, les jambes alertes, il ne pensait à rien d'autre qu'au combat. C'était son habitude : trouver la faille, percer la garde, esquiver, parer, contrer, surprendre, toujours au bon moment. Parfois il s'autorisait un ou deux mouvements pour la frime, on ne se refaisait pas, mais là, ils étaient plus rares. L'enjeu était important. Perdre du temps, c'était des morts en plus du côté des brigands. Et puis il ne s'était pas battu ainsi depuis bien longtemps. Ses sens étaient émoussés, il était plus lent, sa coordination laissait parfois à désirer et il avait choisi de ne pas utiliser sa Keyblade. L'épée était heureusement assez longue pour qu'il la prenne à deux mains, s'en servant tant pour se protéger que pour trancher, taillader, percer, frapper fort.

Ce n'était plus le temps de se poser des questions. Il fallait à tout prix avancer, Freyja l'avait dit. Avancer sur ce pont poisseux de sang et faire leur fête aux trois dalmatiens qui commandaient ce qui restait de la troupe ennemie. Tant pis pour ceux qui se mettaient en travers de leur chemin, ils n'avaient pas choisi le bon camp. La fureur était du côté des brigands et elle était implacable. Sora frappait avec tant d'ardeur qu'autour de lui, les loups commençaient à douter, s'écartaient un peu, se bousculer dans l'espace confiné du pont. Mais très vite, leur instinct de survie et de domination reprenait le dessus et ils fondirent sur lui comme une meute désespérée. Ils n'avaient pas capté que l'alpha, c'était lui. Au dernier moment, le jeune guerrier empoigna fermement son épée et tourna en toupie avec elle, tranchant tout ce qui avait le malheur de s'approcher de trop près.

Ce n'était pas le moment de constater l'horreur : le sang qui giclait sur son visage et sur ses habits, les cris d'agonie, le ciel en flammes, les cadavres à enjamber pour atteindre son objectif. Prendre une pause pour constater, c'était risquer de dévoiler une faille, l'instant de faiblesse, risquer la mort et l'échec final. Tout était devenu si sérieux, il se devait de l'être aussi. Un pauvre hippopotame était à sa merci : le bougre ne faisait que taper sur son tambour pour galvaniser les troupes honnies et l'angoisse de la défaite déréglait sa cadence. En trois pas mesurés, Sora fut face à lui. Il troua le tambour de la pointe de son épée, l'animal recula jusqu'à heurter le bord du pont et leva les bras pour se protéger le visage. Sora leva son arme par dessus sa tête et... leurs regards se croisèrent.

Sora retint son coup. Il baissa son épée et pointa du doigt la rivière en dessous. L'hippo sans défense ne se fit pas prier, il enjamba tremblant le bord du pont et sauta sans un regard en arrière. Le garçon le regarda faire, garde baissée, et le vit disparaître sous l'eau dans un gros splash. Alors qu'il guettait sa réapparition, un choc brutal dans son dos le surprit et, propulsé hors du pont, il eut juste le temps de se retourner pour attraper le bord. Les jambes pendantes dans le vide, il laissa échapper un grognement. Quel idiot. Non, pas le temps de s'en vouloir. Prenant appui sur sa main, il bondit en l'air, le rhinocéros qui l'avait frappé par derrière tenta de le cueillir au vol avec sa hache mais il contra le coup de son épée. La puissance du coup l'envoya quand même au sol, sur le pont et l'imposant rhinocéros levait déjà sa hache pour l'abattre à nouveau sur lui. Roulant à terre, Sora esquiva le coup de justesse,  au grand dam de son adversaire qui gronda de dépit en redressant son arme. Il n'eut pas le temps de l'abattre à nouveau : Sora s'était à peine relevé pour bondir en direction du genou qu'il taillada avec la tranche de son épée. Dans un borborygme plaintif, le gros animal s’affaissa sur le ventre. Sans attendre, Sora sauta sur son dos et y planta férocement son épée, transperçant os et chair. Dans un dernier soubresaut, le rhino expira.

Ils avaient avancé, mais pas assez. De nombreux loups empêchaient encore d'accéder à Cerbère et de mettre un point final à cette bataille. Son dos lui faisait mal. Non loin, Freyja se battait comme une diablesse, sautant, virevoltant, en communion avec sa lance. Il sut en la voyant qu'elle n'abandonnerait pas. Il savait que Primus n'abandonnerait pas de son côté. Système n'était sans doute pas programmée pour fuir. Et lui... ils avaient besoin de le voir, lui disait la rate. D'accord, mais comment ?

Une clameur derrière eux lui fit comprendre que les tyroliens étaient arrivés. Les renforts s'occuperaient des troupes restantes de ce côté du pont, il était temps pour lui d'affronter un plus gros morceau. "Freyja !" cria-t-il en courant vers son alliée, son amie. Il sauta sur le bout de sa lance et, le temps d'une pause, très courte, croisa son regard. Son seul sourire était pour elle. Il n'avait rien à dire, juste à hocher la tête. Elle savait ce qu'elle devait faire.
more_horiz
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum