VeldAllume la télé, ou regarde sur internet. La chaîne locale.
Installé dans le canapé de la location, je suivis les consignes de Veld et allumai la télévision du salon. Je cherchais la chaîne correspondante, et finis par tomber dessus. Mes yeux s’écarquillèrent devant le spectacle qu’il m’était montré. Je voyais les caméras braquées sur l’Estrella dont la façade était noire de suie. La porte principale avait été détruite, des corps jonchaient le sol et l’espace d’un instant, je crus voir Schultz lors d’un mouvement de caméra hasardeux.
Je me levai et me rapprochai de la télé, lisant le bandeau défilant en bas de l’écran. Cela parlait d’une attaque sur l’Estrella, récente. Une explosion avait retenti, suivie de coups de feu. Les responsables avaient pris la fuite. Je resserrais ma poigne autour de la télécommande. Les premiers chiffres annonçaient une dizaine de morts, aucune information quant aux blessés. Je repris mon gummiphone et répondis à Veld.
MoiRejoins-moi au plus tôt devant l’Estrella.
Au même moment l’appareil vibra de plus belle.
ScarlettJe viens d’apprendre pour l’Estrella.
ScarlettVous allez bien ?
ScarlettVous êtes blessé ?
ScarlettRépondez-moi au plus vite
MoiJe vais bien, ne vous en faites pas. Je n’y étais pas.
Je reposais mon gummiphone sur la table puis montais à l’étage pour revêtir une tenue plus officielle. Je redescendis, allumais un cigare que je fumerais sur la route, pris le restant de mes affaires et enfilais ma veste avant de sortir.
Je marchais à vive allure, pressé d’arriver. Le trajet ne me pris que quelques minutes. Presque arrivé devant la foule de gens s’étant attroupés devant le lieu du massacre, je jetai mon cigare et me frayai un chemin. Veld était déjà présent, je le rejoignis.
T’as vu ça ? C’est quoi ce délire ? Me dit-il la voix basse, évitant que quiconque nous entende. De nombreux corps inertes parsemaient l’entrée, je soupirais. Impossible de faire évacuer la foule, il était déjà trop tard. Les forces locales ainsi que les ambulanciers faisaient de leur mieux pour fouiller les décombres. Schultz nous ayant vus, il nous rejoignit.
Vous avez vu ça, Monsieur ? Impensable. Moi qui pensais que ce serait un peu plus calme que le SOLDAT.
Ce le sera. Lorsque nous aurons fait chuter le commanditaire de tout ceci.
Vous pensez que c’est Pavani ?
Vous voyez quelqu’un d’autre peut-être ? Votre rapport ?
J’ai pas plus d’infos que ce que vous avez dû entendre à la télé. Vingt-trois heures, une explosion, des hommes armés qui entrent et qui arrosent un peu tout ce qu’ils peuvent avant de s’enfuir en fourgon. J’étais chez moi, je suis descendu quand ça a commencé à tirer, je n’ai pas eu le temps de relever la plaque. A vrai dire, je n’y ai même pas pensé.
Ça devait bien arriver à un moment. Tu vas faire quoi ?
Je crois bien que je ne vais pas avoir le choix, dis-je le regard tourné vers une femme s’approchant de nous, un micro à la main.
Monsieur Shinra, quel bonheur de vous voir ici. Avez-vous une idée de qui-
Reculez, c’est un périmètre délimité. Je répondrais à vos questions, mais je vous prie de retourner derrière la banderole.
Elle s’éxecuta. Je descendis les quelques marches pour rejoindre la limite, les autres journalistes en profitèrent pour me harceler de questions toutes plus intéressantes les unes que les autres. Bien que la situation semblait me peser, je conservais mon calme et décidais de répondre uniquement à celle étant venue me chercher.
Monsieur Shinra, avez-vous une idée de qui pourrait être derrière tout ça ?
Elle me tendit le micro.
Je pense avoir une idée quant à l’identité du commanditaire, mais je ne peux rien vous dire pour le moment.
Je tournais le regard vers la caméra.
Tout ce que je peux vous dire, c’est que je prends cette attaque personnellement. Je conseillerais à cette personne de rester chez elle et de verrouiller sa porte à double tour. Je me fiche complètement des raisons qui l’ont poussé à commettre cet acte d’une barbarie sans nom. Tout ce que je vois aujourd’hui, ce sont ces corps sans vie, ici, sur le sol. Ce sont des personnes qui ont perdu la vie ici, à l’Estrella. Des familles ont été brisées, consciemment. Quel genre d’homme faut-il être pour s’adonner à de telles pratiques ?
Oui, Pavani. Continuez vos petites combines, bientôt elles ne vous seront plus d’aucune utilité. Un autre journaliste prit la parole, me tendant son micro.
Que va t-il se passer pour l’Estrella ? Allez vous fermer le temps des travaux ?
L’Estrella ne fermera pas complètement, mais n’accueillera pas de nouveaux clients. Ceux déjà présents sur place pourront continuer de jouir de leur séjour. L’établissement ne rouvrira qu’une fois sa devanture réparée, et le coupable arrêté.
Votre secrétaire est-elle avec vous ici ?
Je vous remercie pour la pertinence de votre question. Des gens sont morts, peut-être pourriez-vous vous indigner comme tout le monde plutôt que de chercher à générer de l’audimat, mademoiselle. Si vous n’avez rien de plus intelligent à me demander, vous pouvez toujours faire une minute de silence.
Je me retournais pour m’éloigner, ce qui poussa les journalistes à hurler leurs questions. Je les ignorais complètement avant de retourner auprès de Veld. Schultz, lui, étant déjà reparti remplir ses fonctions.
Que comptes-tu faire ?
D’abord Scarlett, puis l’Estrella. Je pense que l’Estrella était une sorte d’avertissement. C’est une sacrée coïncidence que cet assaut survienne le lendemain de la prise de poste de Schultz, tu ne crois pas ?
Une façon de te dire de te mêler de tes affaires ?
Et je compte bien faire tout le contraire, dis-je en regardant en direction de l’Hôtel Marques dont le dernier étage semblait particulièrement animé. Retourne auprès de Withred, ça va aller. Je vais entrer et constater les dégâts.
Fais attention à toi, me dit-il tapant mon épaule.