Nous entrons sans doute en ce moment dans le château et de l’ogre et pourtant l’atmosphère est ici beaucoup plus tranquille. Le couloir qui borde son appartement, faisant toute la surface de l’étage, est pratiquement silencieux. C’est à croire que les murs ont été calfeutrés pour qu’on entende rien depuis l’extérieur ou à un autre niveau. Un homme est venu nous ouvrir la porte. Ce n’est pas un domestique, plutôt un garde du corps de ce que je comprends d’après son costume. Il nous toise de bas en haut.
-Vous êtes les nouvelles c’est ça ?
-Oui, Monsieur Pavani nous a invitées.
Il hoche la tête et se recule, tirant la porte avec lui. Puis il referme derrière nous. Il me rappelle un peu les Turks avec son allure à moitié distinguée, costume cher, et à moitié décontracté, dernier bouton ouvert. Monsieur Pavani se serait-il donc inspiré du Président et de son unité d’élite ?
Quand nous entrons dans l’immense salon, force est de constater qu’il y a là quelques complexes d’infériorité à compenser. Tout est très… chargé, il y a tout un tas d’oeuvres d’art posées, accrochées, çà et là. Nous sommes accueillies par les exclamations ravies du propriétaire qui s’approche de nous pour nous offrir le verre en personne, verres qu’il a récupéré auprès d’un du bars et d’un membre du personnel attelé au service.
-Parfait, vous êtes venues. Champagne ?
Nous prenons notre verre toutes les deux, puis nous nous laissons conduire du côté des sofas et méridiennes qui ornent en quantité la salle, de quoi asseoir une quinzaine de convives sans problème. Il nous invite à nous asseoir. Par chance, nous ne sommes pas seules, cela aurait été… plutôt préoccupant. Non, il y a un couple assis à ma gauche, ou en tout cas deux personnes qui se connaissent suffisamment bien pour que l’homme ait la main posée sur la cuisse dénudée de la femme. Je ne l’ai pas vue travailler en bas, mais il se pourrait qu’elle soit affectée à des tâches plus… dissimulées.
Il y a aussi deux autres hommes seuls assis de de part et d’autre de l’espace. Ils vident leurs verres en discutant d’un pari sportif, non sans oublier de jeter un regard dans notre direction.
-Tu ne nous présentes pas…?
-Bien sûr que si ! Mesdemoiselles, Carlton, ici à ma gauche, mon banquier.
C’est un homme d’une quarantaine d’années, présentant assez bien, et l’air avenant. Sans l’ombre d’un doute, d’autant plus dangereux.
-Et Hick, homme d’affaire, il a notamment des parts assez importantes dans l’Eclaireur.
-Ne l’écoutez pas, mesdemoiselles, personne ne m’écoute là-bas, et je n’ai aucune influence sur les actualités.
Pavani ricane. Hick est plus âgé, environ soixante ans, il semble assez indifférent à tout ce qui l’entoure.
-Tu parles. Suffisamment, d’après ce que je sais.
-Oui, pour t’aider quand tu en as besoin. Mais ça s’arrête là.
-Et ici présentes, Alix et Elise. Nos deux nouvelles employées, elles sont soeurs, comme vous auriez pu vous en douter. Pas jumelle, n’est-ce pas ?
Il connait nos noms je suis surprise. J’imagine qu’il doit faire souhaiter connaître l’identité des personnes qu’il accueille chez lui.
-Fausses, à vrai dire, mais bien joué Monsieur.
Je la remercie intérieurement d’avoir pris les devants avant que nous nous contredisions.
-Je vous en prie, asseyez-vous.
A vrai dire, nous avons à peine eu le temps d’en discuter. Entre le moment où nous avons fini notre service et l’instant où on nous a pratiquement jetées dans l’ascenseur, très peu de temps s’est écoulé. Pas de quoi se briefer l’une l’autre. Mais Odile a été très claire, hors de question de se faire toucher par qui que ce soit de façon indécente. Et à vrai dire, cette idée pourrait presque me faire quitter mon calme apparent, j’ai déjà assez donné à ce petit jeu. Et Pavani n’est définitivement pas… de taille en comparaison avec…
-Monsieur, un appel pour vous. Dans votre bureau.
L’homme de main vient de réapparaître.
-Ca attendra demain.
-C’est urgent, Monsieur. En rapport avec l’intervention de ce soir.
Sans le laisser paraître j’écoute attentivement cette conversation. Cela aurait-il un rapport avec les autres membres de la Shinra, présents à Costa del Sol ? Pavani bronche, se lève difficilement et se dirige vers une pièce longeant celle-ci.
-Je le prends dans ma chambre.
-Pav’, qu’est-ce que tu fais ? Tu nous laisses le dessert ?
J’espère qu’il ne parle pas de nous. Au bout de quelques secondes, la conversation prend un autre tournant. Les hommes veulent absolument savoir d’où nous venons. Odile, qui est une grande voyageuse invente une histoire plutôt convaincante sur une enfance assez modeste dans les rues de Port Royal, tandis que j’essaie de me concentrer sur les quelques bruits qui proviennent de la chambre.
Au départ ce ne sont que quelques paroles, bientôt ce sont des haussements de voix et protestations. En quelques secondes nous l’entendons presque hurler.
-….ILS ETAIENT TROIS…. BANDE DE CRETINS….
A présent, je suis à peu près certaine de mon coup, nous pensons bien aux mêmes personnes, ça ne peut pas être une coïncidence. Cela veut certainement dire que la situation ne nous est pas trop défavorable.
Les deux hommes présents près de nous essaient de faire diversion tandis que le « couple » est trop occupé à se chauffer énergiquement, les mains dangereusement baladeuses. Je détourne les yeux pour ne pas assister à ce spectacle indécent qui me rappelle inévitablement les prostituées en plein Whitechapel en train de faire leurs besognes en pleine rue.
Quelques minutes plus tard, la porte de la chambre s’ouvre violemment, et nous voyons revenir un Pavani tendu et nerveux. Il est agité, il marche aussi rapidement qu’il le peut. Puis il s’arrête devant nous.
-Mes amis, je crains de devoir reporter notre petite soirée.
-Quoi ? Pav, t’es pas sérieux.
-Je crains bien que si… Un petit contretemps. Plutôt fâcheux.
Aussitôt, peut-être avec trop d’empressement, Odile et moi, nous nous levons du canapé en souhaitant bonne soirée à tout le monde. Nous nous forçons même à venir faire la bise à Pavani puisqu’il semble insister. Son odeur est… dérangeante. Mais puisqu’il le faut…
Avant d’avoir rattrapé la porte de sortie, nous sommes arrêtées par son homme de main.
-Attendez. Monsieur Pavani souhaiterait vous revoir, toutes les deux, en entretien privé.
-Ah ?
-Oui, demain, 14h, ici.
Je ne sais pas si ça m’enchante ou si cela m’inquiète, mais nous avons définitivement retenu son attention.
-Vous êtes les nouvelles c’est ça ?
-Oui, Monsieur Pavani nous a invitées.
Il hoche la tête et se recule, tirant la porte avec lui. Puis il referme derrière nous. Il me rappelle un peu les Turks avec son allure à moitié distinguée, costume cher, et à moitié décontracté, dernier bouton ouvert. Monsieur Pavani se serait-il donc inspiré du Président et de son unité d’élite ?
Quand nous entrons dans l’immense salon, force est de constater qu’il y a là quelques complexes d’infériorité à compenser. Tout est très… chargé, il y a tout un tas d’oeuvres d’art posées, accrochées, çà et là. Nous sommes accueillies par les exclamations ravies du propriétaire qui s’approche de nous pour nous offrir le verre en personne, verres qu’il a récupéré auprès d’un du bars et d’un membre du personnel attelé au service.
-Parfait, vous êtes venues. Champagne ?
Nous prenons notre verre toutes les deux, puis nous nous laissons conduire du côté des sofas et méridiennes qui ornent en quantité la salle, de quoi asseoir une quinzaine de convives sans problème. Il nous invite à nous asseoir. Par chance, nous ne sommes pas seules, cela aurait été… plutôt préoccupant. Non, il y a un couple assis à ma gauche, ou en tout cas deux personnes qui se connaissent suffisamment bien pour que l’homme ait la main posée sur la cuisse dénudée de la femme. Je ne l’ai pas vue travailler en bas, mais il se pourrait qu’elle soit affectée à des tâches plus… dissimulées.
Il y a aussi deux autres hommes seuls assis de de part et d’autre de l’espace. Ils vident leurs verres en discutant d’un pari sportif, non sans oublier de jeter un regard dans notre direction.
-Tu ne nous présentes pas…?
-Bien sûr que si ! Mesdemoiselles, Carlton, ici à ma gauche, mon banquier.
C’est un homme d’une quarantaine d’années, présentant assez bien, et l’air avenant. Sans l’ombre d’un doute, d’autant plus dangereux.
-Et Hick, homme d’affaire, il a notamment des parts assez importantes dans l’Eclaireur.
-Ne l’écoutez pas, mesdemoiselles, personne ne m’écoute là-bas, et je n’ai aucune influence sur les actualités.
Pavani ricane. Hick est plus âgé, environ soixante ans, il semble assez indifférent à tout ce qui l’entoure.
-Tu parles. Suffisamment, d’après ce que je sais.
-Oui, pour t’aider quand tu en as besoin. Mais ça s’arrête là.
-Et ici présentes, Alix et Elise. Nos deux nouvelles employées, elles sont soeurs, comme vous auriez pu vous en douter. Pas jumelle, n’est-ce pas ?
Il connait nos noms je suis surprise. J’imagine qu’il doit faire souhaiter connaître l’identité des personnes qu’il accueille chez lui.
-Fausses, à vrai dire, mais bien joué Monsieur.
Je la remercie intérieurement d’avoir pris les devants avant que nous nous contredisions.
-Je vous en prie, asseyez-vous.
A vrai dire, nous avons à peine eu le temps d’en discuter. Entre le moment où nous avons fini notre service et l’instant où on nous a pratiquement jetées dans l’ascenseur, très peu de temps s’est écoulé. Pas de quoi se briefer l’une l’autre. Mais Odile a été très claire, hors de question de se faire toucher par qui que ce soit de façon indécente. Et à vrai dire, cette idée pourrait presque me faire quitter mon calme apparent, j’ai déjà assez donné à ce petit jeu. Et Pavani n’est définitivement pas… de taille en comparaison avec…
-Monsieur, un appel pour vous. Dans votre bureau.
L’homme de main vient de réapparaître.
-Ca attendra demain.
-C’est urgent, Monsieur. En rapport avec l’intervention de ce soir.
Sans le laisser paraître j’écoute attentivement cette conversation. Cela aurait-il un rapport avec les autres membres de la Shinra, présents à Costa del Sol ? Pavani bronche, se lève difficilement et se dirige vers une pièce longeant celle-ci.
-Je le prends dans ma chambre.
-Pav’, qu’est-ce que tu fais ? Tu nous laisses le dessert ?
J’espère qu’il ne parle pas de nous. Au bout de quelques secondes, la conversation prend un autre tournant. Les hommes veulent absolument savoir d’où nous venons. Odile, qui est une grande voyageuse invente une histoire plutôt convaincante sur une enfance assez modeste dans les rues de Port Royal, tandis que j’essaie de me concentrer sur les quelques bruits qui proviennent de la chambre.
Au départ ce ne sont que quelques paroles, bientôt ce sont des haussements de voix et protestations. En quelques secondes nous l’entendons presque hurler.
-….ILS ETAIENT TROIS…. BANDE DE CRETINS….
A présent, je suis à peu près certaine de mon coup, nous pensons bien aux mêmes personnes, ça ne peut pas être une coïncidence. Cela veut certainement dire que la situation ne nous est pas trop défavorable.
Les deux hommes présents près de nous essaient de faire diversion tandis que le « couple » est trop occupé à se chauffer énergiquement, les mains dangereusement baladeuses. Je détourne les yeux pour ne pas assister à ce spectacle indécent qui me rappelle inévitablement les prostituées en plein Whitechapel en train de faire leurs besognes en pleine rue.
Quelques minutes plus tard, la porte de la chambre s’ouvre violemment, et nous voyons revenir un Pavani tendu et nerveux. Il est agité, il marche aussi rapidement qu’il le peut. Puis il s’arrête devant nous.
-Mes amis, je crains de devoir reporter notre petite soirée.
-Quoi ? Pav, t’es pas sérieux.
-Je crains bien que si… Un petit contretemps. Plutôt fâcheux.
Aussitôt, peut-être avec trop d’empressement, Odile et moi, nous nous levons du canapé en souhaitant bonne soirée à tout le monde. Nous nous forçons même à venir faire la bise à Pavani puisqu’il semble insister. Son odeur est… dérangeante. Mais puisqu’il le faut…
Avant d’avoir rattrapé la porte de sortie, nous sommes arrêtées par son homme de main.
-Attendez. Monsieur Pavani souhaiterait vous revoir, toutes les deux, en entretien privé.
-Ah ?
-Oui, demain, 14h, ici.
Je ne sais pas si ça m’enchante ou si cela m’inquiète, mais nous avons définitivement retenu son attention.