Je m’étale à terre, sur le verre cassé, une douleur aigue aux mains. Je me retourne, me couche sur mon dos et je regarde mes bras. J’ai des coupures au mains, et… je saigne, mais surtout au niveau des poignets. C’est la poisse… Je me lève comme je peux et j’enlève mon casque de moto avant de le jeter sur le côté en pure panique. Les mecs sont dans la rue et courent vers ma fenêtre parce que… Purée je sais pas quoi faire, je.. suis juste foutue. Je… Je cours. Je regarde autour de moi, je suis dans une arrière-salle d’un bar, je crois ! Ok euh… Un escalier ! Bien ça ! Je monte pas, je fonce vers la salle principale. Je suis dans un tel état de rush et avec tellement de sang qui dégouline, même pas j’ai une arme en main ! J’arrive au bar… personne. Un peu de chance, enfin ! Je vais derrière le bar, je prends deux bouteilles d’alcool blanc, et je cours vers l’escalier. Je vois une silhouette dans l’arrière-salle. Je n’essaie plus d’être discrète, je gravis les marches comme le ferait une jument dans la même situation, moins de grâce que de bruit… Et je suis au pif. Je… suis complètement paumée. Ma survie se résume à un truc : est-ce qu’il y a un accès au toit ?
Bim ! Deuxième escalier ! J’arrive au deuxième étage, j’ouvre une des deux bouteilles, je réfléchis même pas, j’appréhende même pas. Je déverse l’alcool sur mes poignets et mes mains pour… voir un truc et pour nettoyer. Je soupire pour même pas penser à la douleur, me concentrer sur le positif ! Les plaies sont pas profondes, je crois, et… Et pas le temps. Je jette la bouteille derrière moi dans l’escalier, avec le petit espoir que les mecs glissent et tombent, je sais pas, je suis désespérée. Je… Ok je cherche un dernier escalier, une trappe… Rien. Je vais vers une des fenêtres. Les mecs approchent derrière moi, ils montent l’escalier que je viens de salir ! « Elle saigne ! »
La chambre à coucher donne sur un escalier de secours en extérieur ! Je… J’hésite, je prends à la volette un coussin. J’ouvre la fenêtre, je la referme derr… Trop tard. Eye contact. Ils m’ont vue. Je me jette sur le côté, sur l’armature métallique de l’escalier. Les tirs me manquent de peu… avant de ramper jusqu’à la première marche et de me relever pour courir. Toit Toit Toit Toit ! J’ai les mains prises, je peux même pas prendre une arme !
Il me suffirait d’un briquet et… j’ai mon cocktail molotov ! Et quelle tuile, quoi ! J’ai de l’alcool pur, j’ai un bout de tissu à mettre dans la bouteille, mais je vais CERTAINEMENT pas m’afficher dans la rue en train de fumer une bonne clope, non ! Pourquoi j’aurais besoin d’un briquet ! Tant pis. Je vois la tête d’un mec, je calcule même pas, je balance la bouteille qui s’éclate contre la rampe. Et j’atteins le toit, enfin. Je m’approche du bord, pour voir la rue. D’autres hommes. Beaucoup ! Je… À la Nakada. Comme quand on s’est rencontrés, j’ai juste pas le choix. Comme disaient nos parents : Parkour.
Je transpire. Mon blouson noir me fait crever de chaud et… la sensation du sang sur mes bras est horrible, et je te parle de ça… je me sens pas encore mal par rapport à ça.
Je cours vers le toit le plus atteignable. Je saute et j’atterris sans problème, sur mes deux pieds. Je guette un autre toit accessible. Je sprinte. Des tirs fusent. « Ah ! » Je trébuche. Je regarde mon mollet. La balle a juste effleuré. Je soupire de soulagement et j’hyperventile de stress, je me relève et je continue. Moins d’élan. Je saute et j’atterris ; Tout va bien.
Réfléchis progameuse, réfléchis tactical, réfléchis comme une 1ère Classe du corps des Soldats ! Je regarde autour de moi, sans ralentir. Y a un seul truc potentiellement utile… Une table en plastique entourée de chaises, posée là à côté d’un brasero éteint. Je pèse même pas le pour et le contre, j’atteins mon salut, je flipdesk la table avant de sauter et de me cacher derrière. Ca me sauvera pas, au contraire, j’ai juste… un tout petit peu de temps. Je chipote à ma montre, je la dégueulasse de mon sang.
Je lève mes yeux. La nacelle libère un méka qui s’approche. Et là c’est le carnaval. Je vois plusieurs tirs de lance-roquette tirés de plusieurs endroits différents sur la cible volante, y a des tirs de fusil d’assaut, ce que tu veux. J’attends même pas. Je demande un deuxième méka, puis un troisième. Ils tombent tous les trois les uns à la suite des autres. C’est plus mon problème. Mon sponsor va se remplir les fouilles si j’emporte ce battle royale. J’enlève la taie d’oreiller, je la déchire en deux en émettant un son d’effort super ridicule qui ressemble à « Hééé ! » , et un à un, je les serre autour de mes poignets pour diminuer le flux de litre de sang qui se déverse à la seconde. Je prends… une seconde. Même pas. Deux mékas sont déjà explosés dans le ciel. Le troisième est à dix mètres du sol, troué de balles. Tant pis. Je quitte ma cachette, les mekas ont bait, et j’ai survécu une vingtaine de secondes en plus. Je prends une inspiration, je m’essuie les mains sur mon pantalon et je saisis mon fusil d’assaut que je recharge. Un dernier saut d’immeubles à tenter. Je bondis, j’atterris plus gauchement, mon genou vient se cogner à terre… Je.. suis essoufflée. Je cherche mon D.Rigeable. Je vois mon immeuble. Super loin, ça sert à rien de le tenter, je dois tempo.
Je me retourne, m’agenouille devant la petite marche qui sépare le toit du vide… Je pose mon fusil sur ce dernier, et je vise l’immeuble un peu plus haut que je viens de quitter. Je murmure : « Allez… venez me chercher. » Je reprends ma respiration, je profite de chaque seconde. Une première tête approche, visant là où il m’estime être. Mais voilà. Juste une estimation. Je tire une salve de balles. Tss. J’appuie sur le levier d’armement, sur le cul de mon arme, pour basculer en semi-auto. J’ai plus assez de munitions pour gaspiller et… je suis trop bonne tireuse pour jouer à la terroriste. Un deuxième mec apparait et un troisième. Tête. Tête. Je me lève, je trottine à reculons. « Elle va vers le penthouse. » Bonne idée, mon reuf. Quelques têtes apparaissent mais ils avancent plus trop quand je tire, avant tout en full tir de suppression, rappuyant rapidement sur la détente. Ils ripostent, je me jette sur le côté, je me relève en titubant, je lâche mon fusil qui reste suspendu à moi grâce à la lanière et je saisis mon arme de poing, tirant quelques coups derrière mon épaule… tout en recommençant à courir normalement. Je m’éloigne d’eux, ça affecte leur pr… « Ahhhh ! » Je crie de douleur, sans m’arrêter. Mais… Avale ta langue, espèce de peste ! Arrête de faire ta maligne ! Je tire sans attendre sur le verrou de la porte de l’appartement sur le toit, et je l’ouvre comme une bourrine.
Deux ados avec des fusils de chasse sont juste devant moi. C’est perdu. « Entre entre ! » Je soupire. « Merci !! »
« On va les fumer, D.Va ! » Une troisième ado arrive, avec une arme de poing, un vieux truc… genre Port Royal, tu vois, trop bizarre, genre à silex. « Va à la fenêtre du salon ! » lui crie son frangin, je suppose, puis à l’autre, qui est black donc a priori, juste un pote. « La fenêtre ! Je couvre la porte. »
J’avance dans l’appartement. Et je fais comme chez Oim, à partir de ce moment. Je vais vers la salle de bain alors qu’une personne éliminée, sûrement la mère, vient vers moi. « Vous saignez. » Je hoche la tête en douillant à 1000%. J’attends même pas l’évier, j’enlève mon blouson en cuir et je soulève mon t-shirt imbibé de sang jusqu’en-dessous de mon soutien-gorge. « La trousse de secours ? »
Elle me la tend. Et dès lors je dois me débrouiller. Je tâte la blessure au ventre des deux côtés. C’est pas l’estomac, ou je pourrais plus bouger… La balle est sortie. Je me vois deux secondes dans la glace. Mon visage est couvert de sang, j’ai dû me toucher trois cent fois la tête avec mes mains crades, je sais même pas comment les fans m’ont reconnue. Et je… sue. Je suis juste immonde. Je désinfecte en gun cata, entendant les tirs qui se multiplient. C’est l’horreur. C’est encore pire. J’aurais préféré ne pas trouver le penthouse, ne pas être sauvée par les ados, ne pas avoir la trousse de secours. Je mets deux compresses, une devant et une derrière et je relaisse tomber mon t-shirt avant de sourire gauchement à la maman. Je remets mon blouson et je le ferme pour tenter de mettre un peu de pression sur les plaies. Et je reprends mon arme en main. « Il faut partir ! » Je crie dans l’appartement en me dirigeant vers la première pièce que je vois, le salon. La fille au pistolet de mercenaire tire… le recul est pas possible, elle finit littéralement par terre mais la balle vient ex-plo-ser la dalle qu’elle touche. « On doit partir, je vous dis ! » Je crie tout en tirant quelques coups. Je vois… cinq mecs ? Trois sur notre toit, deux sur le précédent, davantage couverts par la hauteur, franchement chauds à atteindre. Si j’avais l’un des fusils de chasse, je dis pas mais… Une voix traverse l’appartement. « Fais-nous confiance D.Va ! On a un plein d’armes, on a des vivres ! On est uniquement accessibles par l’ascenseur ! »
On s’en fiche, on s’en fiche, on s’en fiche. Je vise un des mecs en hauteur avec mon fusil d’assaut et je tire à plusieurs reprises, coup par coup. Une étincelle, je… j’ai dû toucher son arme. « Ils sont que six et mal couverts ! On l’emporte facile, on est quatre ! »
Et là je hurle et c’est trop chaud de m’emporter comme ça sur des gosses qui m’ont sauvé la game. « L’immeuble est juste encerclé ! Ils sont bien une trentaine, ils veulent du gros gibier et même si je pars, vous êtes les nouvelles target, là. »
Quelques secondes… « On va t « On se barre, je vous dis ! Madame, vous remplissez le plus de sacs de nourriture et de munitions ! » Elle m’obéit pas. Tu m’étonnes, elle doit même pas savoir qui je suis. « Ils ont je sais pas combien de lance-roquettes ! Le penthouse, il va sauter dans genre cinq minutes ! »
Et là ça commence à crier, de plus en plus fort. Limite leurs cris couvrent les coups de feu. Je parle même plus, ils s’engueulent entre eux, savoir s’il faut m’écouter ou pas. Et c’est là qu’y a le souci de l’influenceuse copine du monde entier d’un côté, et Soldat 1ère classe de l’autre. Les mecs, ils me voient comme une championne, peut-être, comme la meuf aux mékas mais ils oublient que je suis pas juste ça, je suis une meuf formée par la vie, les jeux vidéos et la Shinra à des situations tactiques comme ça et que… j’ai juste mené les ennemis à eux !
Allez, lui je veux l’avoir. J’oublie les mates, j’oublie le sang et j’oublie le bruit. Un tir. Je dois l’avoir en un tir. J’appuie sur la détente et je vois un des mecs haut perchés tomber en avant. « Va aider ta mère, t’es trop loin pour toucher avec ça, chérie. »
Ils sont plus que deux, pendant trente bonnes secondes, et ils essaient de se cacher, on subit moins de pression, ça semble win, tu vois. Mais rien qu’aux cris, aux coups de feu qui viennent de plus loin, bref, tout… T’as compris que les renforts arrivent. Le coup de l’ascenseur, normalement ça nous donne un avantage ! Doit y avoir plein de types au rez-de-chaussée, qui appellent un ascenseur bloqué ici… qui montent un escalier qui mène à l’étage d’en-dessous, bref. Ca occupe.
« Et m… » On est grillés, tous les quatre, si on reste ici plus longtemps. C’est… évident. Les escaliers vont pas jusqu’au penthouse, très bien. L’ascenseur est bloqué au penthouse, super. Du coup l’escalier va jusqu’au dernier étage de l’immeuble, parfait. Du coup, au moment où on prendra l’ascenseur ? Il s’arrêtera au dernier étage, à 20 000%, sur neuf gars qui ouvriront le feu et referont la déco avec notre sang.
Je… Pense pro-gameuse ! L’immeuble est luxueux mais pas grand. Ca fait six bonnes minutes que je suis ici ? Trop certain qu’y a déjà des excités qui surveillent l’ascenseur. Ok. Ok je l’ai.
« Un Gummiphone ! Filez-moi un Gummiphone et allez vers l’ascenseur ! Quelqu’un reste pour couvrir ! » Je me lève. Le mec qui sort de la cuisine me tend son téléphone. « Je t’en rachète un, je te le dédicace et t’as mon num. » Je lui souris. Je dois être… un cran moins mignonne avec le sang, avec la transpi, avec des yeux qui doivent appeler à l’aide, mais il me le tend quand même. « Tiens, avec plaisir. »
Et en parlant de numéro, je vais vers l’ascenseur, retenu par une chaise laissée là. Je m’auto-appelle avec son Gummiphone, je décroche en facecam des deux côtés. Les coups de feu s’intensifient. Je tiens les deux téléphones d’une main, sors un chewing-gum de ma poche que je mâche en speed, comme Cameron Diaz, t’as capté ?
Je crache mon chewing-gum dans ma main, vais dans l’ascenseur, colle la chique au fond de la cabine et fais tenir le Gummiphone. « J’ai vu ça dans Marvel Agent du Shield… » Je rigole nerveusement. « Allez aider votre frère à tenir le toit, finalement. Madame vous restez près de l’ascenseur et vous appelez tout le monde quand il revient. »
Ok faut pas que je… loupe une étape. Je regarde dans mon propre gummiphone, je vois mon corps tout dégueu sur l’écran, filmée par l’autre gummiphone fixé dans l’ascenseur. Je prends la chaise qui bloque, la mets à l’intérieur de l’ascenseur parce que ? Parce que 1m58, mon gars, ça a pas changé depuis le précédent épisode. Et avec elle, je soulève la plaque de secours, en dévissant avec la puissance de mon flingue, avant de la remettre ultra maladroitement. Je me faufile au-dessus. « Reprenez la chaise, s’il vous plait. » [i]murmuré-je à la maman des deux ados. « Appuyez sur l’avant-dernier étage. » Et je me tiens prête. Dans le noir. Il fait sûrement froid mais on en parle de la chaleur de l’action ? Je sens l’ascenseur qui descend. Je vois l’intérieur de la cabine sur mon gummiphone. Gros trac. Ca prend que quelques secondes. La cabine s’immobilise, arrête de trembler, les portes s’ouvrent. J’entends rien mais… je les vois dans le couloir qui s’approchent, cinq gars habillés avec un style de nul, genre cheveux bleus avec une tonne de gel, tout. Ils se rapprochent de moi – enfin, de ma caméra – ils captent pas. J’entends pas ce qu’ils disent avec le son coupé. Y en a un qui a un eye contact avec le gummiphone. Il se rapproche. Je glisse la plaque sur le côté, je me penche un peu en avant pour avoir une vraie vue sur eux… Et je tire sur celui qui a capté en premier, puis sur un deuxième. Le troisième tire au hasard en se retournant. Tête. Le quatrième sent venir la balle et décampe de l’ascenseur. Le cinquième se retourne vers moi… tire quelques balles qui me ratent. Je le descends.
La tête en bas, les cheveux qui tombent en cascade vers le sol de l’ascenseur, je me redresse pour sauter à l’intérieur. Je braque le couloir avec mon flingue… Le cinquième est pas là.
Je pourraiiiiiis partir, viser le premier étage et vivre ma meilleure vie sans le crew. Et c’est pour ça que j’aurais aimé ne pas les trouver.
J’appuie sur l’étage du penthouse, mon pistolet à la main, respirant… à peine ?
C’est pour ça : J’ai pas le droit d’être une vraie joueuse, de la jouer solo, de viser la victoire toute seule. Si je pars sans la famille, que je gagne ou pas ? Ma carrière est finie, ou en tous cas ça sera un gros bad buzz, personne me pardonnera d’avoir laissé perdre une squad qui m’a sauvée !
La porte d’ascenseur s’ouvre, je lève mon arme de poing. C’est la mère qui crie : « Venez ! » . Elle jette les sacs de provision et de de munitions à l’intérieur, les autres arrivent en courant. Le premier ado est… plus gris.
Les portes de l’ascenseur se ferment. Je n’en peux plus. J’appuie sur le deuxième étage. L’immeuble n’est pas grand mais y a un certain nombre d’étages, ce qui est… super rassurant. « Vos armes vers la porte. Il peut s’ouvrir à tout moment. »
Le compteur de l’ascenseur descend doucement… « Désolée. » dis-je à l’ado éliminé, qui troque à son pote black pour porter des sacs. Je souris gauchement mais il me regarde pas. « J’en ai eu cinq. » dit-il avec un genre de fierté. « Rien qu’aujourd’hui. Depuis le 1er février, j’en avais eu deux, et là… cinq en dix minutes. » Je… fais une moue admiratrice. « T’es le boss. Tu retenteras l’année prochaine. »
La porte s’ouvre. Nos trois armes pointent le couloir. RAS. On avance. « Pas l’escalier. » Je pointe un des appartements. Allez… Te ridiculise pas. J’enfonce la porte d’un coup de pied sur le verrou. Non, on la refait. J’essaie… La fille m’aide et ensemble, la porte cède. Y a que des éliminés devant nous, qui nous regardent genre on est des criminels, ce qui est pas si loin d’être faux. Mais j’ai pas de temps pour regretter, pour avoir des remords de pourrir le mois de février de personnes qui subissent leur défaite tranquillement chez eux. Dans cinq minutes, de toutes façons, des gros bras de gangsters vont arriver pour tout fouiller et démonter tout.
« Le mur mitoyen à celui des voisins ? »
Un des ados va regarder la rue, a l’air de réfléchir et avance vers une des pièces. On arrive devant une commode placée contre un mur. J’essaie de prendre le temps de respirer. « Vous avez… pas une grenade, par hasard ? »
La fille réagit. Faudra que je leur demande leur nom quand j’aurai une seconde. Elle va chercher une grenade dans un des sacs. Je te jure, j’ai l’impression d’être une terroriste. Tout le monde va dans la pièce à côté, je… dégoupille la grenade, la fais rouler jusqu’au mur, et me planque moi-même, les oreilles bouchées.
La grosse explosion nous secoue, mais on n’a même pas le temps de subir ça. Les éliminés avancent d’abord avec les sacs. On va jusqu’au mur troué. Et y a une pièce devant nous, de l’immeuble d’à côté. Le revêtement de Business a… tout rendu un poil plus fragile, en fait ? Soit, on profite de la chance qu’on a, hein. On se faufile dans la pièce. « Pas le temps de souffler. » Alors que je… n’en peux plus, tu vois. Je subis ma race, j’ai mal partout, j’ai perdu quand même pas mal de sang.
On quitte l’appartement vide, sans meubles, et… on arrive dans la cage d’escaliers, une nouvelle. Encore.
« On doit atteindre la rue. On a quelques dizaines de secondes. » On court à perdre le peu d’haleine qu’il nous reste, on arrive devant la porte d’entrée, armes brandies. Personne ne nous attend, ils n’ont pas encore capté. J’ouvre, je regarde à gauche, à droite, voir si y a beaucoup de gars dans la rue. Quatre mecs devant l’immeuble des ados, à… huit mètres de nous, tout au plus. Si… j’avais encore une grenade, j’essaierais d’attirer leur attention ailleurs pour traverser la rue mais…
« Je gère. » Je remets mon arme de poing sous ma ceinture, je prends mon fusil d’assaut. Sous couvert du mur. « Dès que je tire, vous foncez vers l’immeuble d’en face. » Et je le fais. Tête. Tête. Le troisième se planque derrière un bus… mince. Mince mince mince ! Je cours ! Tant qu’on sera vus… on devra courir. Et les mecs qu’on abat sont pas du genre à garder les infos pour eux.
Jeu 4 Fév 2021 - 23:32Bim ! Deuxième escalier ! J’arrive au deuxième étage, j’ouvre une des deux bouteilles, je réfléchis même pas, j’appréhende même pas. Je déverse l’alcool sur mes poignets et mes mains pour… voir un truc et pour nettoyer. Je soupire pour même pas penser à la douleur, me concentrer sur le positif ! Les plaies sont pas profondes, je crois, et… Et pas le temps. Je jette la bouteille derrière moi dans l’escalier, avec le petit espoir que les mecs glissent et tombent, je sais pas, je suis désespérée. Je… Ok je cherche un dernier escalier, une trappe… Rien. Je vais vers une des fenêtres. Les mecs approchent derrière moi, ils montent l’escalier que je viens de salir ! « Elle saigne ! »
La chambre à coucher donne sur un escalier de secours en extérieur ! Je… J’hésite, je prends à la volette un coussin. J’ouvre la fenêtre, je la referme derr… Trop tard. Eye contact. Ils m’ont vue. Je me jette sur le côté, sur l’armature métallique de l’escalier. Les tirs me manquent de peu… avant de ramper jusqu’à la première marche et de me relever pour courir. Toit Toit Toit Toit ! J’ai les mains prises, je peux même pas prendre une arme !
Il me suffirait d’un briquet et… j’ai mon cocktail molotov ! Et quelle tuile, quoi ! J’ai de l’alcool pur, j’ai un bout de tissu à mettre dans la bouteille, mais je vais CERTAINEMENT pas m’afficher dans la rue en train de fumer une bonne clope, non ! Pourquoi j’aurais besoin d’un briquet ! Tant pis. Je vois la tête d’un mec, je calcule même pas, je balance la bouteille qui s’éclate contre la rampe. Et j’atteins le toit, enfin. Je m’approche du bord, pour voir la rue. D’autres hommes. Beaucoup ! Je… À la Nakada. Comme quand on s’est rencontrés, j’ai juste pas le choix. Comme disaient nos parents : Parkour.
Je transpire. Mon blouson noir me fait crever de chaud et… la sensation du sang sur mes bras est horrible, et je te parle de ça… je me sens pas encore mal par rapport à ça.
Je cours vers le toit le plus atteignable. Je saute et j’atterris sans problème, sur mes deux pieds. Je guette un autre toit accessible. Je sprinte. Des tirs fusent. « Ah ! » Je trébuche. Je regarde mon mollet. La balle a juste effleuré. Je soupire de soulagement et j’hyperventile de stress, je me relève et je continue. Moins d’élan. Je saute et j’atterris ; Tout va bien.
Réfléchis progameuse, réfléchis tactical, réfléchis comme une 1ère Classe du corps des Soldats ! Je regarde autour de moi, sans ralentir. Y a un seul truc potentiellement utile… Une table en plastique entourée de chaises, posée là à côté d’un brasero éteint. Je pèse même pas le pour et le contre, j’atteins mon salut, je flipdesk la table avant de sauter et de me cacher derrière. Ca me sauvera pas, au contraire, j’ai juste… un tout petit peu de temps. Je chipote à ma montre, je la dégueulasse de mon sang.
Je lève mes yeux. La nacelle libère un méka qui s’approche. Et là c’est le carnaval. Je vois plusieurs tirs de lance-roquette tirés de plusieurs endroits différents sur la cible volante, y a des tirs de fusil d’assaut, ce que tu veux. J’attends même pas. Je demande un deuxième méka, puis un troisième. Ils tombent tous les trois les uns à la suite des autres. C’est plus mon problème. Mon sponsor va se remplir les fouilles si j’emporte ce battle royale. J’enlève la taie d’oreiller, je la déchire en deux en émettant un son d’effort super ridicule qui ressemble à « Hééé ! » , et un à un, je les serre autour de mes poignets pour diminuer le flux de litre de sang qui se déverse à la seconde. Je prends… une seconde. Même pas. Deux mékas sont déjà explosés dans le ciel. Le troisième est à dix mètres du sol, troué de balles. Tant pis. Je quitte ma cachette, les mekas ont bait, et j’ai survécu une vingtaine de secondes en plus. Je prends une inspiration, je m’essuie les mains sur mon pantalon et je saisis mon fusil d’assaut que je recharge. Un dernier saut d’immeubles à tenter. Je bondis, j’atterris plus gauchement, mon genou vient se cogner à terre… Je.. suis essoufflée. Je cherche mon D.Rigeable. Je vois mon immeuble. Super loin, ça sert à rien de le tenter, je dois tempo.
Je me retourne, m’agenouille devant la petite marche qui sépare le toit du vide… Je pose mon fusil sur ce dernier, et je vise l’immeuble un peu plus haut que je viens de quitter. Je murmure : « Allez… venez me chercher. » Je reprends ma respiration, je profite de chaque seconde. Une première tête approche, visant là où il m’estime être. Mais voilà. Juste une estimation. Je tire une salve de balles. Tss. J’appuie sur le levier d’armement, sur le cul de mon arme, pour basculer en semi-auto. J’ai plus assez de munitions pour gaspiller et… je suis trop bonne tireuse pour jouer à la terroriste. Un deuxième mec apparait et un troisième. Tête. Tête. Je me lève, je trottine à reculons. « Elle va vers le penthouse. » Bonne idée, mon reuf. Quelques têtes apparaissent mais ils avancent plus trop quand je tire, avant tout en full tir de suppression, rappuyant rapidement sur la détente. Ils ripostent, je me jette sur le côté, je me relève en titubant, je lâche mon fusil qui reste suspendu à moi grâce à la lanière et je saisis mon arme de poing, tirant quelques coups derrière mon épaule… tout en recommençant à courir normalement. Je m’éloigne d’eux, ça affecte leur pr… « Ahhhh ! » Je crie de douleur, sans m’arrêter. Mais… Avale ta langue, espèce de peste ! Arrête de faire ta maligne ! Je tire sans attendre sur le verrou de la porte de l’appartement sur le toit, et je l’ouvre comme une bourrine.
Deux ados avec des fusils de chasse sont juste devant moi. C’est perdu. « Entre entre ! » Je soupire. « Merci !! »
« On va les fumer, D.Va ! » Une troisième ado arrive, avec une arme de poing, un vieux truc… genre Port Royal, tu vois, trop bizarre, genre à silex. « Va à la fenêtre du salon ! » lui crie son frangin, je suppose, puis à l’autre, qui est black donc a priori, juste un pote. « La fenêtre ! Je couvre la porte. »
J’avance dans l’appartement. Et je fais comme chez Oim, à partir de ce moment. Je vais vers la salle de bain alors qu’une personne éliminée, sûrement la mère, vient vers moi. « Vous saignez. » Je hoche la tête en douillant à 1000%. J’attends même pas l’évier, j’enlève mon blouson en cuir et je soulève mon t-shirt imbibé de sang jusqu’en-dessous de mon soutien-gorge. « La trousse de secours ? »
Elle me la tend. Et dès lors je dois me débrouiller. Je tâte la blessure au ventre des deux côtés. C’est pas l’estomac, ou je pourrais plus bouger… La balle est sortie. Je me vois deux secondes dans la glace. Mon visage est couvert de sang, j’ai dû me toucher trois cent fois la tête avec mes mains crades, je sais même pas comment les fans m’ont reconnue. Et je… sue. Je suis juste immonde. Je désinfecte en gun cata, entendant les tirs qui se multiplient. C’est l’horreur. C’est encore pire. J’aurais préféré ne pas trouver le penthouse, ne pas être sauvée par les ados, ne pas avoir la trousse de secours. Je mets deux compresses, une devant et une derrière et je relaisse tomber mon t-shirt avant de sourire gauchement à la maman. Je remets mon blouson et je le ferme pour tenter de mettre un peu de pression sur les plaies. Et je reprends mon arme en main. « Il faut partir ! » Je crie dans l’appartement en me dirigeant vers la première pièce que je vois, le salon. La fille au pistolet de mercenaire tire… le recul est pas possible, elle finit littéralement par terre mais la balle vient ex-plo-ser la dalle qu’elle touche. « On doit partir, je vous dis ! » Je crie tout en tirant quelques coups. Je vois… cinq mecs ? Trois sur notre toit, deux sur le précédent, davantage couverts par la hauteur, franchement chauds à atteindre. Si j’avais l’un des fusils de chasse, je dis pas mais… Une voix traverse l’appartement. « Fais-nous confiance D.Va ! On a un plein d’armes, on a des vivres ! On est uniquement accessibles par l’ascenseur ! »
On s’en fiche, on s’en fiche, on s’en fiche. Je vise un des mecs en hauteur avec mon fusil d’assaut et je tire à plusieurs reprises, coup par coup. Une étincelle, je… j’ai dû toucher son arme. « Ils sont que six et mal couverts ! On l’emporte facile, on est quatre ! »
Et là je hurle et c’est trop chaud de m’emporter comme ça sur des gosses qui m’ont sauvé la game. « L’immeuble est juste encerclé ! Ils sont bien une trentaine, ils veulent du gros gibier et même si je pars, vous êtes les nouvelles target, là. »
Quelques secondes… « On va t « On se barre, je vous dis ! Madame, vous remplissez le plus de sacs de nourriture et de munitions ! » Elle m’obéit pas. Tu m’étonnes, elle doit même pas savoir qui je suis. « Ils ont je sais pas combien de lance-roquettes ! Le penthouse, il va sauter dans genre cinq minutes ! »
Et là ça commence à crier, de plus en plus fort. Limite leurs cris couvrent les coups de feu. Je parle même plus, ils s’engueulent entre eux, savoir s’il faut m’écouter ou pas. Et c’est là qu’y a le souci de l’influenceuse copine du monde entier d’un côté, et Soldat 1ère classe de l’autre. Les mecs, ils me voient comme une championne, peut-être, comme la meuf aux mékas mais ils oublient que je suis pas juste ça, je suis une meuf formée par la vie, les jeux vidéos et la Shinra à des situations tactiques comme ça et que… j’ai juste mené les ennemis à eux !
Allez, lui je veux l’avoir. J’oublie les mates, j’oublie le sang et j’oublie le bruit. Un tir. Je dois l’avoir en un tir. J’appuie sur la détente et je vois un des mecs haut perchés tomber en avant. « Va aider ta mère, t’es trop loin pour toucher avec ça, chérie. »
Ils sont plus que deux, pendant trente bonnes secondes, et ils essaient de se cacher, on subit moins de pression, ça semble win, tu vois. Mais rien qu’aux cris, aux coups de feu qui viennent de plus loin, bref, tout… T’as compris que les renforts arrivent. Le coup de l’ascenseur, normalement ça nous donne un avantage ! Doit y avoir plein de types au rez-de-chaussée, qui appellent un ascenseur bloqué ici… qui montent un escalier qui mène à l’étage d’en-dessous, bref. Ca occupe.
« Et m… » On est grillés, tous les quatre, si on reste ici plus longtemps. C’est… évident. Les escaliers vont pas jusqu’au penthouse, très bien. L’ascenseur est bloqué au penthouse, super. Du coup l’escalier va jusqu’au dernier étage de l’immeuble, parfait. Du coup, au moment où on prendra l’ascenseur ? Il s’arrêtera au dernier étage, à 20 000%, sur neuf gars qui ouvriront le feu et referont la déco avec notre sang.
Je… Pense pro-gameuse ! L’immeuble est luxueux mais pas grand. Ca fait six bonnes minutes que je suis ici ? Trop certain qu’y a déjà des excités qui surveillent l’ascenseur. Ok. Ok je l’ai.
« Un Gummiphone ! Filez-moi un Gummiphone et allez vers l’ascenseur ! Quelqu’un reste pour couvrir ! » Je me lève. Le mec qui sort de la cuisine me tend son téléphone. « Je t’en rachète un, je te le dédicace et t’as mon num. » Je lui souris. Je dois être… un cran moins mignonne avec le sang, avec la transpi, avec des yeux qui doivent appeler à l’aide, mais il me le tend quand même. « Tiens, avec plaisir. »
Et en parlant de numéro, je vais vers l’ascenseur, retenu par une chaise laissée là. Je m’auto-appelle avec son Gummiphone, je décroche en facecam des deux côtés. Les coups de feu s’intensifient. Je tiens les deux téléphones d’une main, sors un chewing-gum de ma poche que je mâche en speed, comme Cameron Diaz, t’as capté ?
Je crache mon chewing-gum dans ma main, vais dans l’ascenseur, colle la chique au fond de la cabine et fais tenir le Gummiphone. « J’ai vu ça dans Marvel Agent du Shield… » Je rigole nerveusement. « Allez aider votre frère à tenir le toit, finalement. Madame vous restez près de l’ascenseur et vous appelez tout le monde quand il revient. »
Ok faut pas que je… loupe une étape. Je regarde dans mon propre gummiphone, je vois mon corps tout dégueu sur l’écran, filmée par l’autre gummiphone fixé dans l’ascenseur. Je prends la chaise qui bloque, la mets à l’intérieur de l’ascenseur parce que ? Parce que 1m58, mon gars, ça a pas changé depuis le précédent épisode. Et avec elle, je soulève la plaque de secours, en dévissant avec la puissance de mon flingue, avant de la remettre ultra maladroitement. Je me faufile au-dessus. « Reprenez la chaise, s’il vous plait. » [i]murmuré-je à la maman des deux ados. « Appuyez sur l’avant-dernier étage. » Et je me tiens prête. Dans le noir. Il fait sûrement froid mais on en parle de la chaleur de l’action ? Je sens l’ascenseur qui descend. Je vois l’intérieur de la cabine sur mon gummiphone. Gros trac. Ca prend que quelques secondes. La cabine s’immobilise, arrête de trembler, les portes s’ouvrent. J’entends rien mais… je les vois dans le couloir qui s’approchent, cinq gars habillés avec un style de nul, genre cheveux bleus avec une tonne de gel, tout. Ils se rapprochent de moi – enfin, de ma caméra – ils captent pas. J’entends pas ce qu’ils disent avec le son coupé. Y en a un qui a un eye contact avec le gummiphone. Il se rapproche. Je glisse la plaque sur le côté, je me penche un peu en avant pour avoir une vraie vue sur eux… Et je tire sur celui qui a capté en premier, puis sur un deuxième. Le troisième tire au hasard en se retournant. Tête. Le quatrième sent venir la balle et décampe de l’ascenseur. Le cinquième se retourne vers moi… tire quelques balles qui me ratent. Je le descends.
La tête en bas, les cheveux qui tombent en cascade vers le sol de l’ascenseur, je me redresse pour sauter à l’intérieur. Je braque le couloir avec mon flingue… Le cinquième est pas là.
Je pourraiiiiiis partir, viser le premier étage et vivre ma meilleure vie sans le crew. Et c’est pour ça que j’aurais aimé ne pas les trouver.
J’appuie sur l’étage du penthouse, mon pistolet à la main, respirant… à peine ?
C’est pour ça : J’ai pas le droit d’être une vraie joueuse, de la jouer solo, de viser la victoire toute seule. Si je pars sans la famille, que je gagne ou pas ? Ma carrière est finie, ou en tous cas ça sera un gros bad buzz, personne me pardonnera d’avoir laissé perdre une squad qui m’a sauvée !
La porte d’ascenseur s’ouvre, je lève mon arme de poing. C’est la mère qui crie : « Venez ! » . Elle jette les sacs de provision et de de munitions à l’intérieur, les autres arrivent en courant. Le premier ado est… plus gris.
Les portes de l’ascenseur se ferment. Je n’en peux plus. J’appuie sur le deuxième étage. L’immeuble n’est pas grand mais y a un certain nombre d’étages, ce qui est… super rassurant. « Vos armes vers la porte. Il peut s’ouvrir à tout moment. »
Le compteur de l’ascenseur descend doucement… « Désolée. » dis-je à l’ado éliminé, qui troque à son pote black pour porter des sacs. Je souris gauchement mais il me regarde pas. « J’en ai eu cinq. » dit-il avec un genre de fierté. « Rien qu’aujourd’hui. Depuis le 1er février, j’en avais eu deux, et là… cinq en dix minutes. » Je… fais une moue admiratrice. « T’es le boss. Tu retenteras l’année prochaine. »
La porte s’ouvre. Nos trois armes pointent le couloir. RAS. On avance. « Pas l’escalier. » Je pointe un des appartements. Allez… Te ridiculise pas. J’enfonce la porte d’un coup de pied sur le verrou. Non, on la refait. J’essaie… La fille m’aide et ensemble, la porte cède. Y a que des éliminés devant nous, qui nous regardent genre on est des criminels, ce qui est pas si loin d’être faux. Mais j’ai pas de temps pour regretter, pour avoir des remords de pourrir le mois de février de personnes qui subissent leur défaite tranquillement chez eux. Dans cinq minutes, de toutes façons, des gros bras de gangsters vont arriver pour tout fouiller et démonter tout.
« Le mur mitoyen à celui des voisins ? »
Un des ados va regarder la rue, a l’air de réfléchir et avance vers une des pièces. On arrive devant une commode placée contre un mur. J’essaie de prendre le temps de respirer. « Vous avez… pas une grenade, par hasard ? »
La fille réagit. Faudra que je leur demande leur nom quand j’aurai une seconde. Elle va chercher une grenade dans un des sacs. Je te jure, j’ai l’impression d’être une terroriste. Tout le monde va dans la pièce à côté, je… dégoupille la grenade, la fais rouler jusqu’au mur, et me planque moi-même, les oreilles bouchées.
La grosse explosion nous secoue, mais on n’a même pas le temps de subir ça. Les éliminés avancent d’abord avec les sacs. On va jusqu’au mur troué. Et y a une pièce devant nous, de l’immeuble d’à côté. Le revêtement de Business a… tout rendu un poil plus fragile, en fait ? Soit, on profite de la chance qu’on a, hein. On se faufile dans la pièce. « Pas le temps de souffler. » Alors que je… n’en peux plus, tu vois. Je subis ma race, j’ai mal partout, j’ai perdu quand même pas mal de sang.
On quitte l’appartement vide, sans meubles, et… on arrive dans la cage d’escaliers, une nouvelle. Encore.
« On doit atteindre la rue. On a quelques dizaines de secondes. » On court à perdre le peu d’haleine qu’il nous reste, on arrive devant la porte d’entrée, armes brandies. Personne ne nous attend, ils n’ont pas encore capté. J’ouvre, je regarde à gauche, à droite, voir si y a beaucoup de gars dans la rue. Quatre mecs devant l’immeuble des ados, à… huit mètres de nous, tout au plus. Si… j’avais encore une grenade, j’essaierais d’attirer leur attention ailleurs pour traverser la rue mais…
« Je gère. » Je remets mon arme de poing sous ma ceinture, je prends mon fusil d’assaut. Sous couvert du mur. « Dès que je tire, vous foncez vers l’immeuble d’en face. » Et je le fais. Tête. Tête. Le troisième se planque derrière un bus… mince. Mince mince mince ! Je cours ! Tant qu’on sera vus… on devra courir. Et les mecs qu’on abat sont pas du genre à garder les infos pour eux.