Avant même d’ouvrir les yeux, la douleur était bien là. Mon endurance, ma résistance aux effets psychiques n’y avaient rien changé. J’allais payer pour mes erreurs. En clignant des yeux pour m’habituer à la lumière agressive d’une matinée déjà bien avancée, je découvris une pièce autour de moi qui m’était parfaitement inconnue. Je ne me rappelais pas, ou alors pas précisément comment nous étions arrivés jusque là. J’eus alors une vive inquiétude : est-ce que l’un de nous avait été éliminé durant cette journée de laisser-aller complet ? J’inspectai la peau de Maxence, puis la mienne, nous étions toujours aussi coloré que cela était possible ; nous étions toujours dans le jeu.
Je m’appuyai sur les coudes, toujours allongée, pour regarder à travers la porte-fenêtre qui était grande ouverte. C’était une belle et grande chambre avec vue sur mer. J’ignorais si elle avait été dévastée par nos soins ou par quelqu’un passé avant mais les meubles étaient renversés, certains coussins avaient été éventrés et de petites plumes se promenaient innocemment dans la chambre.
Je frottai mes lèvres l’une contre l’autre et les trouvai sèches. J’avais soif. Je me penchai vers mon voisin et embrassai le milieu de sa nuque, juste à la naissance des cheveux. Il réagit timidement mais ne se réveilla pas vraiment.
-Hm..?
Je parvins enfin à me lever, ressentant le contrecoup et ma tête remuer plus qu’elle ne l’aurait dû. Je rejoignis la salle de bain et me servis un verre d’eau que je vidai d’une traite. Cette salle de bain ne me rappelait rien non plus, même si elle aurait dû étant donné son aspect plus que luxueux. Il y avait une très grande douche italienne en en marbre blanc ainsi qu’une grande baignoire-spa de l’autre côté de la pièce, de quoi y entrer —très facilement— à deux. Qui pouvait se payer ce genre de chambre en temps normal ? Je me rendis devant la porte et regardai les tarifs affichés.
« Chambre pour 2, tarif basse-saison pour une nuit : 1200 munnies, tarif haute-saison : 1500 munies »
C’était presque le prix d’un vaisseau. Je restai plusieurs secondes scandalisée par les prix proposés et songeai ironiquement à ouvrir un jour des chambres d’hôtes au Château.
« Pour votre Saint-Valentin, venez passer une soirée au Château de la Bête, encore marqué par la malédiction de son ancien maître. Dormez dans une chambre et soyez observés par votre penderie pendant que vous vous endormez dans les bras de votre cher et tendre. »
Heureusement à la Coalition —et en dépit de l’état de Death— nous n’étions pas encore suffisamment désespérés pour en arriver là.
J’entendis les couettes remuer et le matelas bouger quelques mètres plus loin.
-Qu’est-ce que tu fais ?
-Je réfléchis à une reconversion.
-Quoi ?
Il eut l’air de prendre ma réponse au premier degré alors je réapparus devant lui, un sourire encore fatigué sur le visage. Il était plutôt pâle lui aussi et me regardait un oeil mi-clos.
-Je plaisante. Ça va ?
-Euh…Ou-ais ?
Je me retins de rire, me pinçant les lèvres, à nouveau essayant de réaliser, voire même de deviner, ce que nous avions pu faire la veille.
-Tu crois vraiment que c’était la meilleure façon d’affronter cet événement ?
-Bah… pour le moment, je dois dire que je suis plutôt satisfaite de mon choix. Pas toi ?
-Et dire que tu m’as fait rater un véritable champ de bataille au Château. Tu crois qu’ils se débrouillent comment, là-bas ?
-Je suppose que Big-Ben a enfin réglé son compte à Lumière. Mais que Madame Samovar a fini par s’imposer… après un paquet d’année à les écouter se disputer le pouvoir, et ils vivent désormais sous un régime matriarcal fait de goûter et de dix-heures.
-Oh mais…moi je vivais déjà sous un régime matriarcal bien avant cela.
Je pris un air offusqué puis interloqué et m’assis sur lui à califourchon.
-Quoi ? Qu’as-tu osé dire ?
-Qu’est-ce que je disais ? Une vraie amazone.
Je me penchai vers lui et l’embrassai tendrement. Je sentais encore les effluves d’alcool émaner de sa peau mais ça ne me dérange pas, curieusement.
-Par contre, si tu dois vomir, dis-le moi tout de suite.
-Ouais, euh, prenons pas de risque.
Je me relevai et lui laissai de l’espace pour respirer… ou dieu sait quoi d’autre. Il se leva pour aller à la salle de bain mais continua la discussion la porte ouverte.
-Par contre, j’étais sérieux.
-Par rapport à ?
-Bah, j’ai raté une sacrée bataille et je crois bien que tu m’as promis de m’apprendre à me battre. Hier je crois me souvenir que tu as blessé mon orgueil de mâle viril en te débarrassant toute seule de Pierre-Pol-Jack.
Je fronçai les sourcils ne me souvenant pas de ce à quoi il faisait référence.
-Pierre-Pol-Jack ?
-Regarde le carnet, sur ma table de nuit.
Je l’attrapai et l’ouvris. Les premières pages étaient pleines de noms de boissons et de pats écrits de façon illisibles. Au bout de quelques pages, je découvris les noms de Pierre, Pol et Jack, écrits de façon très irrégulière.
-C’est les gars qui sont venus hier à la piscine, t’as oublié ça aussi ? T’as dit qu’on devait inscrire les noms de tes proies sur un carnet pour établir un score, mais vu qu’on avait pas leurs noms, bah on a improvisé.
Une très vague image me revient en tête. Je ne devais pas être si alcoolisée à ce moment là mais il semblerait que le reste de la soirée m’ait fait oublié cet événement.
-Ah… Oui. Et donc ? Tu voudrais apprendre à te battre et faire ton propre carnet ?
Il réapparut devant moi, un peu rafraichi.
-C’est surtout que j’aimerais passer un peu moins souvent pour "le" mec inutile. Puis c’est surtout pour « l’après ». Tu sais ? Quand on pourra plus mourir pour de faux.
J’avais toujours essayé de le préserver de tout cela. Je m’étais déjà dit une multitude de fois qu’il n’en avait pas besoin mais à l’évidence, les choses n’allaient pas aller en s’améliorant. Le pouvoir de Death s’amenuisait, une tension permanente grandissait dans l’ombre, des forces dont nous n’avions tout simplement pas idée. Nous, nous étions les ténèbres ? Nous, le boss final d’un jeu à la salle d’arcade ? J’en doutais parfois sérieusement.
En le liant à moi, et en dépit de ma « protection », je l’avais justement exposé à des menaces bien plus grandes que celles qu’il aurait dû affronter en tant que simple messager du Consulat. Pour n’importe quelle personne voulant me nuire, Maxence était une cible de choix, la seule véritable cible en vérité pour peu qu’on ait enquêté un tant soit peu. Alors oui, j’avais gardé la plus grande discrétion sur notre relation, seuls les gardes et le personnel connaissait Maxence. Mais un jour peut-être… des gens finiraient par apprendre. Et cette idée me semblait tout simplement insupportable.
Je levai les yeux vers le fusil couché sur le divan près de la fenêtre.
-Ouais, on n’a qu’à commencer par ça.
Je m’appuyai sur les coudes, toujours allongée, pour regarder à travers la porte-fenêtre qui était grande ouverte. C’était une belle et grande chambre avec vue sur mer. J’ignorais si elle avait été dévastée par nos soins ou par quelqu’un passé avant mais les meubles étaient renversés, certains coussins avaient été éventrés et de petites plumes se promenaient innocemment dans la chambre.
Je frottai mes lèvres l’une contre l’autre et les trouvai sèches. J’avais soif. Je me penchai vers mon voisin et embrassai le milieu de sa nuque, juste à la naissance des cheveux. Il réagit timidement mais ne se réveilla pas vraiment.
-Hm..?
Je parvins enfin à me lever, ressentant le contrecoup et ma tête remuer plus qu’elle ne l’aurait dû. Je rejoignis la salle de bain et me servis un verre d’eau que je vidai d’une traite. Cette salle de bain ne me rappelait rien non plus, même si elle aurait dû étant donné son aspect plus que luxueux. Il y avait une très grande douche italienne en en marbre blanc ainsi qu’une grande baignoire-spa de l’autre côté de la pièce, de quoi y entrer —très facilement— à deux. Qui pouvait se payer ce genre de chambre en temps normal ? Je me rendis devant la porte et regardai les tarifs affichés.
« Chambre pour 2, tarif basse-saison pour une nuit : 1200 munnies, tarif haute-saison : 1500 munies »
C’était presque le prix d’un vaisseau. Je restai plusieurs secondes scandalisée par les prix proposés et songeai ironiquement à ouvrir un jour des chambres d’hôtes au Château.
« Pour votre Saint-Valentin, venez passer une soirée au Château de la Bête, encore marqué par la malédiction de son ancien maître. Dormez dans une chambre et soyez observés par votre penderie pendant que vous vous endormez dans les bras de votre cher et tendre. »
Heureusement à la Coalition —et en dépit de l’état de Death— nous n’étions pas encore suffisamment désespérés pour en arriver là.
J’entendis les couettes remuer et le matelas bouger quelques mètres plus loin.
-Qu’est-ce que tu fais ?
-Je réfléchis à une reconversion.
-Quoi ?
Il eut l’air de prendre ma réponse au premier degré alors je réapparus devant lui, un sourire encore fatigué sur le visage. Il était plutôt pâle lui aussi et me regardait un oeil mi-clos.
-Je plaisante. Ça va ?
-Euh…Ou-ais ?
Je me retins de rire, me pinçant les lèvres, à nouveau essayant de réaliser, voire même de deviner, ce que nous avions pu faire la veille.
-Tu crois vraiment que c’était la meilleure façon d’affronter cet événement ?
-Bah… pour le moment, je dois dire que je suis plutôt satisfaite de mon choix. Pas toi ?
-Et dire que tu m’as fait rater un véritable champ de bataille au Château. Tu crois qu’ils se débrouillent comment, là-bas ?
-Je suppose que Big-Ben a enfin réglé son compte à Lumière. Mais que Madame Samovar a fini par s’imposer… après un paquet d’année à les écouter se disputer le pouvoir, et ils vivent désormais sous un régime matriarcal fait de goûter et de dix-heures.
-Oh mais…moi je vivais déjà sous un régime matriarcal bien avant cela.
Je pris un air offusqué puis interloqué et m’assis sur lui à califourchon.
-Quoi ? Qu’as-tu osé dire ?
-Qu’est-ce que je disais ? Une vraie amazone.
Je me penchai vers lui et l’embrassai tendrement. Je sentais encore les effluves d’alcool émaner de sa peau mais ça ne me dérange pas, curieusement.
-Par contre, si tu dois vomir, dis-le moi tout de suite.
-Ouais, euh, prenons pas de risque.
Je me relevai et lui laissai de l’espace pour respirer… ou dieu sait quoi d’autre. Il se leva pour aller à la salle de bain mais continua la discussion la porte ouverte.
-Par contre, j’étais sérieux.
-Par rapport à ?
-Bah, j’ai raté une sacrée bataille et je crois bien que tu m’as promis de m’apprendre à me battre. Hier je crois me souvenir que tu as blessé mon orgueil de mâle viril en te débarrassant toute seule de Pierre-Pol-Jack.
Je fronçai les sourcils ne me souvenant pas de ce à quoi il faisait référence.
-Pierre-Pol-Jack ?
-Regarde le carnet, sur ma table de nuit.
Je l’attrapai et l’ouvris. Les premières pages étaient pleines de noms de boissons et de pats écrits de façon illisibles. Au bout de quelques pages, je découvris les noms de Pierre, Pol et Jack, écrits de façon très irrégulière.
-C’est les gars qui sont venus hier à la piscine, t’as oublié ça aussi ? T’as dit qu’on devait inscrire les noms de tes proies sur un carnet pour établir un score, mais vu qu’on avait pas leurs noms, bah on a improvisé.
Une très vague image me revient en tête. Je ne devais pas être si alcoolisée à ce moment là mais il semblerait que le reste de la soirée m’ait fait oublié cet événement.
-Ah… Oui. Et donc ? Tu voudrais apprendre à te battre et faire ton propre carnet ?
Il réapparut devant moi, un peu rafraichi.
-C’est surtout que j’aimerais passer un peu moins souvent pour "le" mec inutile. Puis c’est surtout pour « l’après ». Tu sais ? Quand on pourra plus mourir pour de faux.
J’avais toujours essayé de le préserver de tout cela. Je m’étais déjà dit une multitude de fois qu’il n’en avait pas besoin mais à l’évidence, les choses n’allaient pas aller en s’améliorant. Le pouvoir de Death s’amenuisait, une tension permanente grandissait dans l’ombre, des forces dont nous n’avions tout simplement pas idée. Nous, nous étions les ténèbres ? Nous, le boss final d’un jeu à la salle d’arcade ? J’en doutais parfois sérieusement.
En le liant à moi, et en dépit de ma « protection », je l’avais justement exposé à des menaces bien plus grandes que celles qu’il aurait dû affronter en tant que simple messager du Consulat. Pour n’importe quelle personne voulant me nuire, Maxence était une cible de choix, la seule véritable cible en vérité pour peu qu’on ait enquêté un tant soit peu. Alors oui, j’avais gardé la plus grande discrétion sur notre relation, seuls les gardes et le personnel connaissait Maxence. Mais un jour peut-être… des gens finiraient par apprendre. Et cette idée me semblait tout simplement insupportable.
Je levai les yeux vers le fusil couché sur le divan près de la fenêtre.
-Ouais, on n’a qu’à commencer par ça.