• Si le phénomène était le même que celui du déluge, il n'avait d'autre choix que d'avancer. Où qu'il aille, peu importe, il finirait par sortir du blizzard qui se levait dangereusement. Sans chercher à comprendre plus qu'il ne pouvait, il s'enfonça dans les vents glacés jusqu'à apercevoir une fleur qui a traversé l'épaisse couche de neige. Une fée arriva bien vite et d'un simple toucher, elle illumina la fleur, lui donnant un souffle de vie. C'était littéralement magique, beau et totalement effrayant de voir tout changer si vite sans pouvoir y faire quoi que ce soit. Les idées de peintures se bousculaient dans la tête du jeune peintre, il ne saurait par quoi commencer ni même s'il était capable de retranscrire le charme et le prestige de ce spectacle.

    Il avança encore et toujours pour voir apparaître de plus en plus de fleurs et par extension de fées pour les allumer. Le songe restait aux aguets et cette fois il pu saisir la transformation du monde. Il voyait très bien que la neige diminuait et que des touffes d'herbes apparaissaient. Comme il a pensé, le blizzard n'était que temporaire. Il avait hâte que ça se finisse, qu'il puisse se réchauffer et apprécier encore plus ce qui se produisait ici. Ses membres engourdis par le froid ne regagnaient pas leur vitalité avec le printemps, il avait beaucoup trop marché pour être frais comme un gardon. Il était certes endurant mais visiblement pas assez. Il s'est assis sans préavis et en réagissant plus tard qu'il était sur un banc.

    « Bah retourne-toi, profite avec nous ! » c'est ce qu'il fit brusquement en entendant cette voix. Il était à une table avec de succulents repas, du vin et des créatures étranges pour ne pas changer. Il y avait ds chevaux au buste humain, des bêtes comme le célèbre entraîneur du Colisée de l'Olympe, des nombreuses féés et bien d'autres choses. Ukiyo se rendit compte en regardant autour de lui que c'était ainsi partout, il se demandait même s'il ne rêvait pas depuis le début. « Vas-y, prends ce verre ! » Le peintre a de suite obéit et bu une gorgée, enfin un véritable moment de répit. Il continua à boire, un verre, puis deux et même trois.

    Il était maintenant en train de danser avec les chérubins bien que leur apparence le répugne. Il s'en fichait, il dansait, s'amusait sans penser un seul instant au Consulat, aux Songes et quoi que ce soit d'autre. Il se resservit un verre de vin, il était anesthésié contre la douleur et oublia toutes les folles aventures qui l'avaient amené ici. Plus tard, il se retrouva à dos de licorne avec dans ses bras, une magnifique nymphe. Il était même certain d'en être tombé amoureux avant de réellement tomber à terre et elle sur lui. S'il était mort, c'était au paradis qu'il se trouvait sans l'ombre d'un doute.

    Sans regarder, il lui suffisait de tendre le bras pour trouver une grappe de raison et assouvir sa faim. Il cédait à la moindre tentation qui s'offrait à lui sans chercher à savoir s'il pouvait y avoir des conséquences. On pouvait le dire, c'était un nouvel Ukiyo qui naissait à cet instant, lui qui ne buvait pourtant jamais, qui restait le plus sérieux possible. Il se disait simplement que se lâcher pour une fois ne pouvait pas lui faire de mal. Sans réfléchir, il embrassa la nymphe qui se laissa faire. Tous deux saouls, ils se mirent à rire deux secondes après. Le peintre finit par se relever en titubant, se frottant grossièrement le visage. Il resta scotché, sans raison comme ça, à observer sans observer, à penser sans penser.

    Comme lors de l'attaque des dinosaures, la terre se mit à trembler mais bien plus violemment. Au loin, un volcan entrait en éruption. Tous sans exception se mirent à courir, Ukiyo y compris, mais le malheureux tomba, non à cause des secousses mais à cause de l'alcool. Il s'écroula donc lamentablement comme un pilier de bar de Port Royal pour s'évanouir dans son propre vomi...


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