D'un geste à la grimace un peu appuyé, Jack fait signe à ses deux gardes noirs de rester dehors.

Nous voici donc dans les appartements étonnement feutrés de Neith, la Rose du Désert. Etonnement puisque vu de l'extérieur, son salon de thé ne dénote pas du reste des bâtiments d'Agrabah : de la pierre ensablée qui semble cimenter à la poussière où chaque brise parait en éroder des pans entiers pour mieux la recouvrir à nouveau. Pas si étonnant que ça lorsque l'on sait, au moins un peu, d'où vient la propriétaire et où elle en est. Ce fut, autrefois, une pauvre enfant des rues, née miséreuse dans une famille pauvre. On ignore les détails, forcément, sinon ce que Death a bien voulu en dire à l'époque où lui et Jack parlait encore. Qu'elle a volé, rusé et, d'une manière générale, fait ce qu'elle avait à faire pour s'en sortir... sans s'encombrer de morale, ce qui convainquit le Boss de la Coalition Noire de poser les yeux sur elle. Jusqu'à la prendre sous son aile, durant un temps, elle a joué sa part dans la libération d'Agrabah et les machinations des Coalisés en ce monde. Tout ça pour, main dans la main avec les quarante voleurs et ses habitants, occuper ici une place de premier rang. Durant le chemin, particulièrement long, du transport jusqu'à ici, il apparu de manière évidente que Neith connaissait tout le monde, que tout le monde la connaissant en retour ; qu'on la saluait dans les rues comme une princesse s'y attendrait. La Smalah, dont Neith a elle-même parlé, voudrait dire "famille" par ici... qu'il s'agisse d'une langue morte de la région ou d'un patois local reste à déterminer.
L'Intendant de la Coalition Noire a l'oreille cynique et entend Smalah comme une famille synonyme de mafia. Une "famillia" dont Neith a tout l'air d'être la parraine. Ou marraine. Peu importe.

Sur ses gardes, Jack sait se jeter dans la gueule du loup et le fait sciemment, pariant sur le fait que ce loup ne cherchera pas à le dévorer. Ou que ses crocs se briseront sur sa peau de pierre. Le visage fermé avec un regard accusateur, le Chien Noir grimace dès l'entrée. L'intérieur est à l'ombre et au frais, ce qui fait un bien fou comparé à l'infernale éblouissant de l'extérieur : se sentiment d'être un peu plus à l'aise ne doit pas lui faire baisser sa garde. Et les accueils chaleureux des gens en présence -tous des hommes athlétiques et quelques danseuses érotiques- ne peuvent qu'attiser sa méfiance. Ces autochtones le poignarderaient ou le voleraient si l'envie leur en disant. Cette attitude amicale... ou même aguicheuse... ne sert qu'à le mettre à l'aise et endormir sa méfiance.
On se croirait dans un autre monde... c'est toujours orientale, tout ce qu'on attends de la belle Agrabah. Mais.

La lumière du désert se fait tamisé mille fois par des jeux de toiles colorés, de l'encens s'élèvent en fine brume et des poufs, des tapis, des tissus nobles côtoient des décorations dorés, jusqu'aux poteries et terres cuites paraissent brillés. Le confort, le faste et le luxe mélangé ; quelque part, cet endroit est à l'image de Neith. Elle-même dont les bijoux et tissus dansent à chaque pas de ses pieds nus. Et lui, aux aguets, détaille l'endroit comme au temps de l'inquisition pour le démystifier. Habillé de chaussures de sécurités et d'un treillis noirs, avec une chemise blanche, il ne cherche pas à dissimuler qu'ici, c'est lui l'étranger. Ici, bien loin de la Citée du Crépuscule, son habituelle tanière.

Après avoir traversé quelques enchevêtrements de pièces labyrinthiques, Neith s'assoit sur un canapé, jambes croisés et bras étalés sur la banquette, bien à l'aise. Elle fait venir à elle quelques belles femmes et hommes qui, de saltos en pirouettes, viennent agilement recouvrir la table de boissons et de nourritures. Tout à l'air si incroyablement exquis mais l'intendant, bras croisés de l'autre côté sur un fauteuil somptueux, refuse obstinément de se laisser impressionner ou même tenté. Plusieurs fois, la maitresse de maison invite son invité à se servir... à faire comme chez lui et lui fait savoir qu'ils peuvent discuter en toute libertée.
A mots pesés, le Chien Noir dédaigne obstinément touts ses dires et propositions... alors elle insiste, potentiellement agacée sans perdre contenance... ce petit jeu doit bien durer cinq minutes avant que l'Intendant ne se décide à y mettre fin.

« On peut vraiment parler ? » Demande-t-il, raide et plus que sceptique.

« Bien sûr, puisque je te le dis. » Elle rajoute, non sans une pointe d'agacement. « Pour la quinzième fois. »

« Tu me le dis... mais peux-tu me le garantir aussi ? »

« Tout à fait Jack, on peut parler de nos affaires sans soucis ici. » Elle rajoute, avec un soupir discret d'impatience. « Si ça peut te rassurer, je veux bien allez jusqu'à te le jurer. »

« Ah bon ? Parce que les murs ont des oreilles... et qu'il n'y a qu'un rideau entre nous et une foule de gens. »

« Rassure-toi, il n'y a que des amis ici. »

« Même pour quelqu'un d'aussi charmant que toi... ca fait beaucoup d'amis, je trouve. »

« Des amis, ici, j'en ai quarante... si tu vois ce que je veux dire. »

« J'en ai compté vingt-sept. » Neith lève un sourcil et lui lance un regard équivoque. "Vraiment ? T'es sérieux là ?" peut être entendu depuis ses iris brunes avec un dédain sans fin. Et puisque Jack veut bien admettre s'être rendu ridicule à l'instant, il répond de manière relativement humble. « Mais oui, je vois très bien ce que tu veux dire. »

« Si je peux me permettre... j'ai entendu des rumeurs au sujet de la Garde Noire. Nottament une, au sujet d'une tradition qui dit que si l'on parvient à tuer un garde noir, on prend sa place. C'est comme ça que tu es devenu Intendant, non ? »

« Il y a... un certain cadre, à respecter... mais oui, en effet, on peut résumer ça comme ça. »

« Dis m'en plus, ça m'intérèsse. »

« Et pourquoi ça ? »

« L'une de mes connaissances voudrait rejoindre la Garde Noire. »

Et pourquoi ça ? Jack se retient de lui demander tant la réponse lui parait évidente. La véritable réponse, pas celle que Neith lui offrirait. Elle veut un informateur à la Citée du Crépuscule et quoi de mieux pour cela que d'y placer l'un des siens. Après tout, il n'ait rien à la Garde Noire que son oncle ne pourrait pas obtenir ici-même. Par éthique, dirons-nous, l'Intendant n'est pas tout à fait en position de refuser l'opportunité à quelqu'un de rejoindre ses rangs. C'est... le principe fondamentale de la Coalition Noire, ce sur quoi elle repose et ce sans quoi elle s'effondrerait : l'ambition y est récompensé, la puissance aussi. Si quelqu'un est digne d'être Garde Noire, alors, vaincre ce quelqu'un est la preuve indéniable qu'on en est digne aussi.
Si Jack se permet de refuser... en sachant que lui-même a accédé à ce poste par ce biais... de quoi aurait-il l'air ?

Cette tradition, comme l'appelle Neith, doit perdurer à tout prix. Elle permet une sélèction "naturelle" immédiate tout en laissant savoir aux gardes noirs qu'à tout moment, ils peuvent se faire prendre leur place.

« En effet, si ton ami bat un de mes gardes noirs, il pourra en devenir un. Et dans certains cas autre que cette tradition, celui qui tue un garde noir se voit forcer de le remplacer sous peine d'être exécuté. »

« Et comment ça peut se faire, concrètement ? Quel est le cadre à respecter si on veut faire ça bien, au juste ? »

« Ton oncle n'a qu'à défier un garde noir... j'apprécierais qu'ils évitent de s'entretuer mais c'est potentiellement inévitable... s'il le bat, il obtient immédiatement son grade et avec, ses droits ainsi que ses devoirs. A part ça, c'est bien de le faire de manière... franche et publique. On ne peut pas arriver par dérrière, poignarder un de mes larbins dans le dos et prendre sa place sans me prévenir. »

Poignarder dans le dos est aussi une méthode très éfficace pour se faire promouvoir à la Garde Noire ou même dans la Coalition Noire en général mais c'est... une toute autre méthode et façon de faire. Si on emprunte ce chemin là, il faut à tout prix ne pas se faire prendre. On grimpe ainsi les échelons par les complots, les machinations, la manipulation et les sournoiseries malignes d'une manière générale, depuis l'ombre... ou alors, l'on fait la preuve irréfutable de sa domination aux yeux de tous.

« Si le garde noir refuse ? »

« Il ne refusera pas. »

« J'ai des projets concernant Three mais on en reparlera... et s'il défie une Skinner, ses amis se riront de lui parce que c'est une femme. »

Neith dit ça, l'air un peu las... d'avoir vaincu Skinner serait un sacré fait d'armes à la Citée du Crépuscule et le sexe d'un garde noir, d'un coalisé en général, importe peu là-bas. Chez lui, ca remet potentiellement sa légitimitée en cause... du machisme de bas-étage mais soit, ca a court ici comme sur pleins d'autres mondes.

« A moins qu'il ne fasse le chemin jusqu'à la Citée du Crépuscule, ça ne lui laisse pas beaucoup de choix. »

Actuellement, il y a Skinner, une femme... Three... et Jack lui-même.

« C'est peut-être un peu ambitieux. » Confesse-t-elle. « Ce sera Three, donc. »

« C'est à dire que... je suis venu ici... essayer d'être diplomate. Repartir en laissant quelqu'un mort ? Ca me gênerait un peu, quand même. »

« Sans en arriver jusque là... tu recrutes l'un des miens et en échange, je recrute l'un des tiens. Ou un arrangement du même genre, je suis ouverte à la discussion. »

« J'ai plutôt tendance à penser de la sorte : chacun chez soit et les vaches seront bien gardés. »

Neith n'apprécie pas la réponse, en témoigne ses yeux plissés et l'ombre qui passe sur son visage. Rien n'a changé, pas un trait, pas un pli... aussi simplement que ça, elle était ouverte et désormais, fermé. Mal à l'aise, Jack se met à bredouiller.

« Les vaches c'est... heu... co-comment t'expliquer... ? Chacun chez soit et... et... les... heu... les chameaux seront bien gardés, si tu pré- »

« Je sais c'est quoi une vache, merci. » Cinglante, elle détourne le regard et désigne, d'un geste dédaigneux de la main, les boissons sur la table. « C'est malpoli de refuser le thé quand on est invité. »

« Je ne suis pas venu ici prendre du thé... et de toute façon, je préfère le café... »

« Je t'ai déjà dit que j'avais aussi du café. Bref. » Pour clore le sujet, elle clos ses bras avec classe.

« Y a un moment... je... je ne vais quand même pas m'excuser de ne pas vouloir de tes espions chez moi... » Explique Jack qui commence à reprendre un peu d'aplomb au milieu de sa phrase et va jusqu'à ouvrir les bras, paumes ouvertes, mimant ainsi maladroitement les façons d'un orateur passable.

« Qui te dit que je n'en ai pas ? Tu as beau refuser toute personne qui vient d'Agrabah... et je l'admet, c'est difficile à dissimuler... » Dit-elle en balayant de sa main manucurée, décorés à l'or fin et peinte, devant son visage. « ...j'ai des amis dans d'autres mondes, tu sais. »

En effet, Jack a strictement interdit à toute personne d'origine Agrabienne d'intégrer la garde noire... bafouant les principes qu'il prétend défendre, de peur que l'un d'eux soit le cousin, l'oncle, le frère ou l'ami de Neith, si influente ici. Aucun d'eux n'a tenté le défi "traditionnel" mais on peut rejoindre la Garde Noire par des moyens plus classiques, en postulant à la caserne et en passant des tests. Et se faisant, à sa longue liste de crime, l'Intendant peut rajouter la discrimination. Ce point là... le dérange, vaguement... le principe de la Garde Noire étant, à l'origine, une impitoyable méritocratie.
Pour se consoler, le Chien Noir se dit qu'après sa carrière, il a peut-être mériter de dire qui qui rentre et qui qui rentre pas ? Ce n'est certainement pas ça qui l'empêchera de dormir.

Néanmoins, refuser à quelqu'un d'Agrabah d'accéder à la Garde Noire après en avoir vaincu un membre... ça, il ne le pourrait juste pas. Parce que ses larbins ne le tolèreraient et que, lui-même, n'oserait pas renier à ce point là les valeurs de son groupe.

« Où tu veux en venir ? »

Enfin, la Rose du Désert daigne reposer les yeux sur le Chien Noir qui... hélas... voit très bien où elle veut en venir.

« J'ai déjà des espions sur place, Jack. »

Sa franchise, pour le coup, le désarme totalement. Non pas que ça le surprenne. Pas avec tout le temps qu'elle a passé à la Citée du Crépuscule, sous la tutelle de Death en personne... qui ne se douterait pas qu'elle ait des yeux et des oreilles là-bas ? Ce qui laisse l'Intendant pantois, c'est que par habitude, il dément toutes les personnes qui se prétendent digne de confiance à ne pas être en train de chercher à le doubler ou le trahir.
Alors quand Neith lui annonce cash qu'elle l'espionne, il... il ne se rapelle juste pas comment on réagit face à une faute aussi franchement avouée. Et se rapelle surtout qu'il n'y peut pas grand-chose, qu'il est impuissant face à son influence en ses terres.

« Ce que je veux, vraiment, c'est que les habitants d'Agrabah puissent rejoindre la Garde Noire s'ils le souhaitent. Qu'ils puissent tout simplement se rendre à la Citée du Crépuscule sans être traité comme des espions par leurs propres alliés et mis à l'écart. »

« Les leçons de morales, ca va bien cinq minutes ! Tout le monde est présumé coupable à la Citée du Crépuscule, tout le monde est suspect, tout le monde risque de se faire malmener ou tuer parce qu'un coalisé s'est levé du mauvais pied ou parce qu'il y a du grabuge ce jour-là. Faut arrêter de jouer les victimes. Si vous n'êtes pas content, vous n'avez qu'à vous imposez. »

« La Citée du Crépuscule est fauchée Jack. C'est bien pour ça que tu es là, non ? Si tu veux que la richesse d'Agrabah profite à la Citée du Crépuscule, il va falloir... être un peu plus accueillant que ça, tu vois. »

« Je peux pas juste te donner des esclaves, plutôt ? »

« Contrairement à certains, nous ne pratiquons pas l'esclavage ici. »

« Je vais faire me juger à chaque phrase, c'est ça l'idée... ? »

« ... » Neith prend une inspiration et boit, avec volupté, une gorgée de thé. D'un procédé si délicat, elle semble reprendre ce brin de calme qui commençait doucement à lui échapper. Beaucoup plus posé, mains jointes sur son genou, elle reprend en se penchant légèrement. « Jusqu'ici, les différents mondes de la Coalition Noire font chacun bande à part. Tu m'as appelé en me disant que tu voulais qu'on soit un peu plus soudé que ça. Et j'était d'accords vu comme les choses se tendent dans l'univers. Sauf que là... tu ne me fais pas du tout l'impression de vouloir te rapprocher. »

« De toute façon, tu me confirmes la présence d'Agrabah chez moi, alors... »

« Chez toi ? » Jack soutient son regard surpris et accusateur au moment de se faire interrompre. Soudain, c'est Neith qui est la plus mal à l'aise des deux. La formule est, supposément, déplacé puisque le terme correct serait "chez Death". Or... l'Intendant ne s'excuse pas, ne se corrige pas. De toute façon, elle devra bien être mise au courant tôt ou tard. La possibilité que le Faucheur et la Rose communique encore est... improbable... pas impossible. Le fait est que ça lui a échappé... et que maintenant, après quelques secondes d'un silence coupable, il ne peut plus qu'assumer. « Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire ? »

« Oh. Tes espions ne t'ont pas parlé de ça ? Des espions à la Citée du Crépuscule, je n'en doute pas. Dans la garde noire, et bien, pourquoi tu me demanderais d'y intégrer quelqu'un de chez toi après tout ? »

Dans un premier temps, Jack se dit qu'elle n'a personne à la Garde Noire... ce qui le laisse avec un sourire pleins de prétentions et de mépris ! Juste après, il se dit qu'elle est potentiellement bonne actrice et l'idée suffit à le faire pâlir.

« De quoi tu es venu me parler, exactement ? »

De façon très maladroite, l'Intendant change immédiatement de sujet.

« Comme je disais, puisqu'il y a de toute façon des espions à toi chez moi... qu'est-ce que j'ai à perdre à une ambassade officielle... ? »

« Par pitié, pas de ça avec la Smalah. Nous ne sommes pas des Consuls. »

Pourtant dépité, puisqu'elle marque un point et même deux, Jack se sent absoluement détruit... sur le moment, son idée lui paraissait génial mais Neith le ramène à la réalité, non sans froisser son égo au passage. En effet, il doit bien l'avouer, la Coalition Noire n'a pas vocation à donner dans l'officiel, l'administratif et ce genre de bêtises diplomatiques dont les Consuls peuvent raffoler.
Son groupe se base sur du concret.

« Concernant Death. Je suis venu te dire que... quoiqu'il arrive, la place d'Agrabah et son indépendance au sein de la Coalition Noire ne sont pas remises en cause. »

« J'espère bien... » Neith se mordille la phalange et met quelques temps avant de poursuivre. « ...la seule chose qui m'importe, c'est Agrabah. Pour le reste, je ne veux rien à voir à faire avec ça. »

« Bon. Concernant Three, tu hésites entre le faire tuer ton ami et marier ta cousine, c'est ça ? »

« J'explore les options pour me rapprocher de la Garde Noire. Il peut pourquoi pas faire les deux. »

« L'esclavage, c'est non... mais les mariages arrangés, c'est pas pareil... » Rumine Jack, pris d'une impulsion et désireux de cracher son venin.

« Tout de suite les grands mots. Moi, je me contente de se faire se rencontrer un garçon et une fille qui ont de quoi s'entendre. » Répond-elle en s'inspectant les ongles, l'air de ne pas y toucher.

« Qu'est-ce qui te fait dire qu'ils ont de quoi s'entendre au juste ? »

« Ma cousine est excellente pâtissière et Three a... l'allure... de quelqu'un qui aime les pâtisseries. »

Le pire c'est que ça peut suffire, se dit Jack en levant les yeux au ciel. Quand on rajoute à ça qu'il peut être assez simplet, et qu'il est costaud quoiqu'on en dise, en effet, Three peut être un gendre idéal.

« Donc. » Lance-t-elle à la façon d'une dague avec une voix de reine.

« Bien... je vais faire un effort... »

« Trop généreux de ta part ! » Lâche Neith, pleine d'un sarcasme sans fond.

« ...on peut, pourquoi pas, parler d'être plus accueillant à votre égard... » A contrecœur et ça s'entend, ça se sent à la façon dont il crache péniblement ses mots. Pourtant, en réponse, la Rose du Désert affiche un fin sourire victorieux.

« Si la Citée du Crépuscule est suffisement accueillante, on pourrait, pourquoi pas, y faire un peu de commerce. Mon cousin est prêt à payer trois chameaux pour une épouse. »

« Qu'est-ce qu'on ferait avec des chameaux ? »

« ... »

« ... »

« C'était une blague. »

« Ah... parce qu'on peut vraiment lui trouver une épouse et même plusieurs moyennant fi- »

« Stop. » C'était particulièrement gênant... donc, l'un et l'autre s'accorde à enchainer sans délai. « Puisqu'on ne veut pas d'esclave, qu'est-ce que la Citée du Crépuscule a à nous offrir ? »

« Des armes. »

« De quelle facture ? »

« Moyenne... mais par cargaisons entières. »

« La Shinra nous en vend déjà, de meilleures qualités que les tiennes je présume... mais à prix fort en quantités limités. »

« Vendu sous le manteau, j'imagine. »

Qui ne dit mot consent, surtout si c'est en haussant les épaules et en balayant la remarque d'un geste de main comme on chasse une mouche ennuyeuse.

« La Shinra n'a que des armes à feux à nous vendre, parfois des explosifs mais plus rarement. D'une manière générale, nous préférons les armes blanches si tu en as. »

« J'en ai. Tu es sûr que tu ne veux pas d'armes à feux et d'explosifs non plus ? »

« Seulement à bas prix. »

« Si c'est de moyenne facture, j'entends en obtenir un prix moyen. »

« Si elles sont de moyennes factures, elles nous serviront surtout à la revente et à montrer à la Shinra que nous dépendons pas d'elle pour ça. Pourquoi pas la convaincre de baisser ses prix ? Au pire, ça servira à armer très rapidement beaucoup de gens en cas de besoin. Encore une fois, nous ne sommes pas friand d'armes à feux par ici, ça nous sert à commercer plus qu'autre chose. A prix bas, donc. »

« Très bien, on fera des prix de lots... mais les explosifs, ca mérite mieux. »

« Oui, peut-être. C'est tout ce que vous avez ? »

« J'ai... j'ai des paires de bras à mettre à disposition, aussi. »

« Je n'en manque pas non plus. Salazar, tu n'es pas en très bons termes avec lui, je crois... »

« Personne n'est en bons termes avec lui... mais il se peut que, de temps à autres, mes gardes noirs mettent la main sur quelques potions. »

« Ca, ça m'intérèsse déjà plus. »

« De temps à autres peut devenir "régulièrement" pour quelqu'un qui y mettrait le prix. »

« J'attendrais de voir ce que la Garde Noire me ramène... à Agrabah, on négocie sur du concret. »

« Ca me va... et avant qu'on reparte, tu veux toujours que ton ami défie Three ? Ca ne me dérange pas mais si quelqu'un meurt, il ne faudra pas m'en tenir responsable. »

« C'est toi qui parle d'ami, pas moi. S'il se fait tuer durant le duel, ca ne me dérange pas... au contraire. »

« Tu m'excuseras mais... la Smalah n'est pas capable de se débarrasser de quelqu'un... ? »

« Elle pourrait, oui... mais diriger Agrabah demande un peu plus de subtilité que de simplement tuer ou faire enfermer quiconque nous dérange. »

« J'ai du mal à comprendre. »

« Ca nous arrange que sa mort ne puisse pas nous être imputé. Tu veux vraiment que je rentre dans le détail des négociations qui s'étalent sur des années pour savoir qui fait quoi et qui a quoi à Agrabah ? »

« Ca ira. Puisqu'on parlait de... marchandises à bas prix... n'hésites pas à me dire, si la Garde Noire va visiter des mondes, à l'occasion... elle peut potentiellement vous ramenez des souvenirs. »

« Finalement, nous allons pouvoir nous arranger... » Neith se relâche un peu, moqueuse au travers de ses grands airs. « ...c'était pas gagné, entre nous. »