J’attendais huit heures, pour aller réveiller Rude et enfin pouvoir me reposer. Je crois que c’était les dix dernières minutes les plus longues. Je le savais, j’avais le regard plus souvent tourné sur le cadran de ma montre que sur les écrans. Enfin, jusqu’à ce qu’on sonne.
Je soupirais avant de me rapprocher de l’écran. Un facteur qui sonnait à la porte, avec un colis dans la main. C’était… Ça pouvait pas être Pavani, pas avec un subterfuge aussi con. J’ai levé la tête pour appeler Rude par dessus mon épaule, mais rien pas de réponse. Fallait que je gère ça tout seul.
Je me suis levé, avec toute la fatigue d’une nuit blanche qui me pesait sur les épaules, et j’ai trainé des pieds jusque dans le salon. Rude ronflait. Quand c’était comme ça, même la chute d’un piano juste à côté de lui le réveillerait pas. J’ai vite laissé tomber, et j’ai décidé de m’occuper de ça moi même. J’ai enfilé mes chaussures, j’ai pris mon arme que j’ai accrochée à ma ceinture et j’suis sorti. J’ai avancé jusqu’à la grille et puis…
Ouais, c’est pour ?
Reno, c’est moi, Balto. Le Président nous à demandé une livraison pour ce matin.
Putain je l’avais pas reconnu ce con.
Balto ? Ah merde ! J’pensais pas !
T’as l’air tellement dans les vapes.
Pas loin. J’ai passé la nuit à fixer des caméras, c’était long, et chiant.
Je me doute. Tu… comptes déballer le colis ici ?
Ah non, non, merde. Rentre.
Je débloquais la porte et je le laissais rentrer. Il prit ma suite alors que je retournais à l’intérieur.
Ah, ouais… Pas mal !
Ouais la baraque est cool !
Et Rude dort encore. Attends.
Il s’avance vers Rude et lui pince le nez. Quelques secondes plus tard, notre chauve national se redressait en sursaut.
Balto ? Ça va pas ?
C’est plutôt à toi qu’il faut demander. On avait l’impression d’avoir un moteur de V-12 dans le salon.
Il se frotte l’arrière de la tête avant d’attraper ses lunettes posées sur la table et de les mettre.
[color=#ff0000]On est en intérieur, tu sais ?
Juste un grognement comme seule réponse. Je le vois se lever péniblement et se rendre dans la cuisine se préparer un thé. Malgré son air grognon il nous en propose aussi. On accepte tout les deux avant de s’asseoir dans les canapés. Je vois Rude nous apporter nos tasses et continuer sa route jusque dans le local des caméras. Au moins, il est ponctuel, hein.
Je finis par attraper le carton et je commence à le déballer.
Pas mal le coup du facteur, Balto !
On m’a dit qu’il fallait livrer un truc, sans que ça se remarque. J’ai fait au plus simple. Plus c’est gros…
Plus ça passe, ouais.
J’ouvre le carton et je commence à déballer son contenu. Des munitions, des armes de poing, ouais. Rien de nouveau.
Des lunettes à vision nocturne ? Pour quoi faire ?
Demande du Président, j’en sais pas plus.
Ils ont dû en parler hier soir pendant qu’ils discutaient, je sais pas.
Je réfléchis. Il faisait chier le président sur ce coup là, j’aurais bien aimé moi aussi discuter un peu plus avec Odile.
Ils ? Ah oui, j’ai entendu que y’avait Arad. La tristement célèbre. Ça va, ça se passe bien ?
Bah écoute… On a eu sa soeur en renfort, aussi. Et je dirais que oui, ça va. Elles se débrouillent plutôt bien. J’dis pas qu’on a rien à redire mais… ouais !
Arad à une soeur ?
Ouais, on était surpris un peu comme ça la première fois qu’on en a entendu parler. Au début on était pas chaud mais…. Elle est détér la petite. Puis…
Puis ?
Je me penche un peu plus vers lui, et je commence à secouer la main.
Elle est… super bonne, aïe aïe aïe.
Ah, le grand retour du chasseur ?
Son visage… ouah, vraiment pur tu sais. Puis, pas très grande, des jambes fines… on dirait des … aiguilles ? Ouais ? Et surtout, un de ces culs… Rude la trouve pas ouf, j’sais pas comment il fait. Tu la verrais dans son uniforme, quand elle bosse… A s’en mordre le poing.
Je vois, dit-il en croisant les bras. Et… t’as une ouverture au moins ?
Tss… J’en sais rien.
Ouais, je pense. Y’a des petits jeux de regard et tout. Le seul obstacle c’est…
… le Président ?
Exactement. Quoi, il t’en as parlé ?
Absolument pas. Mais si elles bossent bien, ça m’étonnerait pas que tu te sois fait engueuler.
Hm… Ouais je sais, mais bon. On dirait qu’il a des yeux derrière la tête.
Oui, enfin… excuse-moi Reno mais t’es pas très connu pour ta discrétion à ce niveau-là.
Pardon ?
Il a pas le temps de me répondre. Le plancher de l’étage craque un tout petit peu, puis les pas se rapprochent des marches. Je tourne le regard pour tenter d’apercevoir qui descend. Je vois un pied nu se poser sur une marche, complété par une paire de jambes…. Sa paire de jambes.
Je fais mine à Balto de la fermer et je lui indique les escaliers du regard. Odile finit de descendre et nous salue d’un signe de main. Je lui souris, et je regarde Balto lui sourire aussi. Elle ne prend pas la peine de s’approcher et file dans la cuisine directement pour se préparer quelque chose.
Alors ? Dis-je en chuchotant.
Ouais. Oui, mais sans plus. Banale, non ?
Tu te fous de moi ? Elle est… parfaite ! Vas-y, donne moi un exemple. Qui est mieux qu’elle ?
Il regarde sa montre, l’air un peu gêné. Je souris. Je sais que ce gars là cache quelque chose et qu’il veut pas nous le dire. Avec Rude on avait parié sur une des scientifiques avec qui il discutait science, astronomie et tout un tas de conneries du genre et ça, pendant des heures. Phyliss je crois ?
En tout cas, merci pour le thé. Tu fais gaffe avec le colis, tu l’as pas sorti mais y’a un Architecte là-dedans. Le perds pas ou tu vas encore te faire engueuler.
Ouais, ouais.
Je prends enfin ma première gorgée de thé en le voyant partir. Je le salue d’un signe de main, et je pose mon regard sur Odile, toujours dos à nous en train de préparer une cafetière complète. Sûrement pour le président.