Les premiers moments où je refais surface, les événements sont flous. Je vois le soleil baigner de lumière la chambre, mais en flou, puis je sens mes paupières se refermer d’elles-mêmes.
Sans doute un peu plus tard, j’aperçois une chevelure noire dépasser du cadre de la porte puis disparaître un peu après. Odile, sans l’ombre d’un doute. Je voudrais comprendre ce qui se passe ici, ce qui m’est arrivé, voir s’il est l’heure d’aller travailler mais la force me manque, tout simplement. Je tente d’attraper mon gummiphone mais ne parviens pas à tendre le bras vers la table de nuit. La fin de journée s’annonce, je crois, l’ambiance se fait plus chaude, la maison est calme.
Je dois me montrer patiente. Je vais bien finir par…
J’ouvre les yeux à nouveau, il fait noir à présent, quelqu’un est là, dans la chambre. C’était une vibration qui m’a réveillée, comme si on avait traîné quelque chose dans la chambre. Je finis par comprendre de qui il s’agit même si je ne m’explique pas sa présence. Je tente de dire un mot alors qu’il semble prêt à sortir. Je n’y parviens pas, ou plutôt, je bute sur les mots mais il entend mes remuements.
-Oh merde, je t’ai réveillée.
Il s’est retourné vers moi, il semble désolé. Je pose ma main à plat sur ma couverture et me concentre pour essayer de parler.
-Non, c’est… b…n
Je saisis ma gorge de ma main droite et la masse.
-Ah, tu dois avoir soif, je t’apporte un verre.
Il disparait dans le couloir et me ramène quelques secondes plus tard un gobelet issu de la salle de bain. Je le saisis et me rafraichis la gorge. Ma survie ne dépend pas de ce genre de ressources, mais en cet instant, je dois reconnaître que cela me soulage.
-Merci.
Je souris légèrement, je ne me sens pas non plus capable de simuler un excès d’émotion. Ma voix est basse et grave.
-Ca va ? Comment tu te sens ?
-Bien… Enfin, je crois. Où… où est Odile ?
-Partie bosser. Il est déjà 22h, en fait. Moi je viens de rentrer… de mon truc.
Ce que je craignais est arrivé. Nous sommes bien le lendemain, et j’ai bien raté un jour à gratter des informations auprès de Pavani. J’ai abandonné Odile à cette tâche, comment la chose aura-t-elle été prise là-bas ? Je me le demande. Une chose est sûre, ils ne doivent pas être ravis. Ces visions floues, incohérentes et douloureuses, m’ont donc possédée… pratiquement une journée entière ?
-Tu nous as fait un peu peur, j’dois dire. Enfin, surtout à ta soeur, hein. Mais ouais, t’étais dans un sale état, et… ta cuisse. C’était pas franchement beau à voir.
Il grimace puis attrape une chaise et s’assied dessus à l’envers, le ventre contre le dossier, appuyant son menton au sommet de celui-ci.
Je ne peux deviner que ce qu’il a vu, je n’ose même pas regarder en ce moment de quoi ça a l’air de peur d’insister sur l’anomalie dont je « souffre ». Une question reste pourtant en suspens, j’y pense sans oser la poser, la contournant à chaque fois que je me prépare à ouvrir la bouche. La maison est calme, Odile est au travail, et Reno est là. La première question c’est : est-il là pour prendre de mes nouvelles ou pour rendre visite au Président. La deuxième évidemment en découle : pourquoi ai-je l’impression que nous sommes seuls dans cette maison ?
-Et le… Président ?
Dans un premier temps, il ne réagit pas, ou plutôt, il ne semble pas comprendre. Il m’interroge du regard. Puis il réalise et s’exclame.
-Ah oui c’est vrai ! T’es pas au courant du coup ?
Cette question idiote que ces humains se plaisent à poser de façon réthorique, créant un suspens inutile et cruel, insistant au passage sur l’ignorance de leur interlocuteur. Qu’est-ce que cela veut dire ? Qu’y a-t-il à savoir ? Serait-ce grave ? Lui est-il arrivé quelque chose ? Des tas de scénarios fusent en moi, presque trop vite étant donné mon état, au point que cela me donne mal à la tête.
-Bah, en fait, juste après ton départ hier, il est reparti pour le vaisseau-mère.
-Reparti ?
-Ouais.
Un silence étrange règne alors quelques instants dans la chambre.
-Enfin, il va revenir hein, ou du moins c’est le plan !
-Il est reparti…seul ?
J’ai hésité avant d’en parler, cela s’est senti. Il ne peut s’empêcher de sourire en coin, ayant manifestement une idée d’où je veux en venir.
-Ouais, il l’a ramenée « à la maison ».
J’imagine qu’il sous-entend quelque chose par-là. Je ne sais pas à quel point c’est vrai, mais oui, j’imagine que notre petite colocation ne pouvait pas durer éternellement. Tant qu’elle sera là dans le coin…
Remontant ma couverture jusqu’à la nuque, je remue et essaie de trouver une position un peu plus confortable, je suis à présent couchée sur le flanc, « du bon côté », celui qui n’est pas blessé. Je croise à nouveau son regard, il parait songeur.
-Quoi ?
-Rien, j’étais juste… en train de me demander comment tu fonctionnes.
-Hein ?
Est-ce une question à propos de ma nature, de mes pouvoirs ?
-Tu… bosses pour la Shinra depuis déjà quelques années, tu gravis les échelons, tu commences à te rapprocher des plus hautes responsabilités… Et tu claques tout pendant le BR.
-Je n’ai pas tout claqué, j’ai…joué le jeu. Même toi, tu l’as fait d’une certaine manière, même lui.
-Ouais, parce que lui, c’est le boss, ma jolie, sauf que toi, t’es son employée, et que t’es supposé faire ce qu’il veut pour qu’il soit satisfait. A moins que tu veuilles te retrouver à bosser au guichet de la station Shinra à la Forêt de Sherwood. Donc voilà, même en cas de jeu, l’idée c’est que tu obéis, même si un connard te dit à la télé que tu peux tuer n’importe qui. C’est comme ça qu’on gagne sa confiance et qu’on accède à de meilleurs postes.
De meilleurs postes, qu’insinue-t-il par là ? Que je serais là pour obtenir un poste important ?
-Je t’avais proposé mon aide, au début, et tu ne m’as jamais appelée. J’ai fini par… forcer le passage.
-Le coup d’Elena c’était… bien joué si tu voulais te faire remarquer, mais beaucoup moins si tu veux être en bons termes avec le patron.
-Et que faudrait-il faire pour être en bons termes avec lui ?
Il se caresse le menton, méditant à la question.
-Du temps déjà, et des résultats. N’empêche, c’est marrant…
-De ?
-J’ sais pas. T’as l’air de lui vouer un culte au Président, par moment.
Je hausse les sourcils, feignant l’incrédulité pour ne pas trahir mes idées.
-Ne dis pas n’importe quoi.
-Mouuais. Et les postes gumminow ?
-De quoi ?
-Bah ta petite provocation là.
-C’est juste… comme ça. Ce n’est rien de sérieux.
-Et le délire de l’interphone, il y a un an pour la Saint-Valentin ? J’ai vérifié mes sources t’sais, après la remarque de Rude l’autr’ jour. J’ai fait ça bien !
Je ne réponds plus. Evidemment, ce poste en question était déjà… une provocation en soi. Mais je ne pensais pas qu’elle me rattraperait seulement un an plus tard.
-Bref, c’est marrant ! Et si tu dis rien c’est parce que tu sais que j’ai raison et que t’es gêné.
-Ca t’arrive souvent de jouer les agences matrimoniales comme ça ?
Mon expression est assez sérieuse, presque agacée. Il reprend un air plus concerné.
-Non, mais par contre, j’te mets en garde vite fait. Fais gaffe. Si c’est ce que je crois, je ne peux que te recommander de… de bien y réfléchir avant d’essayer plus encore.
-Qu’est-ce que ça veut dire ?
-Que tu vas aux devants des plus grandes emmerdes, je dirais. Au fait, ta soeur a un mec ?
-Hein ?
-Ouais.
-Non, je crois pas.
Je ne sais pas ce qu’il a en tête mais mon attention est rapidement accaparée par un souvenir qui vient de me revenir.
-Attends, où il est ?
-Où il est quoi ?
-Le casse-tête.
-En bas, on l’a un peu inspecté la nuit passée. Je vais te le chercher.
Quelques instants plus tard, il réapparait avec la boite, elle semble intacte.
-Qu’est ce que tu penses trouver là-dedans ?
-Des preuves des marchés entre Abramo et les marchands d’esclave pour le compte de son grand ami Pavani. Des reconnaissances de dette, ce genre de choses.
Il hésite quelques instants.
-J’imagine que si t’es revenue comme ça, c’est que ça s’est mal passé.
Je quitte l’objet des yeux quelques secondes, pour le regarder. Devrais-je lui mentir ? Evidemment, je peux difficilement lui expliquer comment j’ai fait disparaître en une demi-heure un campement entier en dépit de mes aptitudes au combat acceptables mais… sans plus.
-Mal ? Le mot est faible.
Sans doute un peu plus tard, j’aperçois une chevelure noire dépasser du cadre de la porte puis disparaître un peu après. Odile, sans l’ombre d’un doute. Je voudrais comprendre ce qui se passe ici, ce qui m’est arrivé, voir s’il est l’heure d’aller travailler mais la force me manque, tout simplement. Je tente d’attraper mon gummiphone mais ne parviens pas à tendre le bras vers la table de nuit. La fin de journée s’annonce, je crois, l’ambiance se fait plus chaude, la maison est calme.
Je dois me montrer patiente. Je vais bien finir par…
J’ouvre les yeux à nouveau, il fait noir à présent, quelqu’un est là, dans la chambre. C’était une vibration qui m’a réveillée, comme si on avait traîné quelque chose dans la chambre. Je finis par comprendre de qui il s’agit même si je ne m’explique pas sa présence. Je tente de dire un mot alors qu’il semble prêt à sortir. Je n’y parviens pas, ou plutôt, je bute sur les mots mais il entend mes remuements.
-Oh merde, je t’ai réveillée.
Il s’est retourné vers moi, il semble désolé. Je pose ma main à plat sur ma couverture et me concentre pour essayer de parler.
-Non, c’est… b…n
Je saisis ma gorge de ma main droite et la masse.
-Ah, tu dois avoir soif, je t’apporte un verre.
Il disparait dans le couloir et me ramène quelques secondes plus tard un gobelet issu de la salle de bain. Je le saisis et me rafraichis la gorge. Ma survie ne dépend pas de ce genre de ressources, mais en cet instant, je dois reconnaître que cela me soulage.
-Merci.
Je souris légèrement, je ne me sens pas non plus capable de simuler un excès d’émotion. Ma voix est basse et grave.
-Ca va ? Comment tu te sens ?
-Bien… Enfin, je crois. Où… où est Odile ?
-Partie bosser. Il est déjà 22h, en fait. Moi je viens de rentrer… de mon truc.
Ce que je craignais est arrivé. Nous sommes bien le lendemain, et j’ai bien raté un jour à gratter des informations auprès de Pavani. J’ai abandonné Odile à cette tâche, comment la chose aura-t-elle été prise là-bas ? Je me le demande. Une chose est sûre, ils ne doivent pas être ravis. Ces visions floues, incohérentes et douloureuses, m’ont donc possédée… pratiquement une journée entière ?
-Tu nous as fait un peu peur, j’dois dire. Enfin, surtout à ta soeur, hein. Mais ouais, t’étais dans un sale état, et… ta cuisse. C’était pas franchement beau à voir.
Il grimace puis attrape une chaise et s’assied dessus à l’envers, le ventre contre le dossier, appuyant son menton au sommet de celui-ci.
Je ne peux deviner que ce qu’il a vu, je n’ose même pas regarder en ce moment de quoi ça a l’air de peur d’insister sur l’anomalie dont je « souffre ». Une question reste pourtant en suspens, j’y pense sans oser la poser, la contournant à chaque fois que je me prépare à ouvrir la bouche. La maison est calme, Odile est au travail, et Reno est là. La première question c’est : est-il là pour prendre de mes nouvelles ou pour rendre visite au Président. La deuxième évidemment en découle : pourquoi ai-je l’impression que nous sommes seuls dans cette maison ?
-Et le… Président ?
Dans un premier temps, il ne réagit pas, ou plutôt, il ne semble pas comprendre. Il m’interroge du regard. Puis il réalise et s’exclame.
-Ah oui c’est vrai ! T’es pas au courant du coup ?
Cette question idiote que ces humains se plaisent à poser de façon réthorique, créant un suspens inutile et cruel, insistant au passage sur l’ignorance de leur interlocuteur. Qu’est-ce que cela veut dire ? Qu’y a-t-il à savoir ? Serait-ce grave ? Lui est-il arrivé quelque chose ? Des tas de scénarios fusent en moi, presque trop vite étant donné mon état, au point que cela me donne mal à la tête.
-Bah, en fait, juste après ton départ hier, il est reparti pour le vaisseau-mère.
-Reparti ?
-Ouais.
Un silence étrange règne alors quelques instants dans la chambre.
-Enfin, il va revenir hein, ou du moins c’est le plan !
-Il est reparti…seul ?
J’ai hésité avant d’en parler, cela s’est senti. Il ne peut s’empêcher de sourire en coin, ayant manifestement une idée d’où je veux en venir.
-Ouais, il l’a ramenée « à la maison ».
J’imagine qu’il sous-entend quelque chose par-là. Je ne sais pas à quel point c’est vrai, mais oui, j’imagine que notre petite colocation ne pouvait pas durer éternellement. Tant qu’elle sera là dans le coin…
Remontant ma couverture jusqu’à la nuque, je remue et essaie de trouver une position un peu plus confortable, je suis à présent couchée sur le flanc, « du bon côté », celui qui n’est pas blessé. Je croise à nouveau son regard, il parait songeur.
-Quoi ?
-Rien, j’étais juste… en train de me demander comment tu fonctionnes.
-Hein ?
Est-ce une question à propos de ma nature, de mes pouvoirs ?
-Tu… bosses pour la Shinra depuis déjà quelques années, tu gravis les échelons, tu commences à te rapprocher des plus hautes responsabilités… Et tu claques tout pendant le BR.
-Je n’ai pas tout claqué, j’ai…joué le jeu. Même toi, tu l’as fait d’une certaine manière, même lui.
-Ouais, parce que lui, c’est le boss, ma jolie, sauf que toi, t’es son employée, et que t’es supposé faire ce qu’il veut pour qu’il soit satisfait. A moins que tu veuilles te retrouver à bosser au guichet de la station Shinra à la Forêt de Sherwood. Donc voilà, même en cas de jeu, l’idée c’est que tu obéis, même si un connard te dit à la télé que tu peux tuer n’importe qui. C’est comme ça qu’on gagne sa confiance et qu’on accède à de meilleurs postes.
De meilleurs postes, qu’insinue-t-il par là ? Que je serais là pour obtenir un poste important ?
-Je t’avais proposé mon aide, au début, et tu ne m’as jamais appelée. J’ai fini par… forcer le passage.
-Le coup d’Elena c’était… bien joué si tu voulais te faire remarquer, mais beaucoup moins si tu veux être en bons termes avec le patron.
-Et que faudrait-il faire pour être en bons termes avec lui ?
Il se caresse le menton, méditant à la question.
-Du temps déjà, et des résultats. N’empêche, c’est marrant…
-De ?
-J’ sais pas. T’as l’air de lui vouer un culte au Président, par moment.
Je hausse les sourcils, feignant l’incrédulité pour ne pas trahir mes idées.
-Ne dis pas n’importe quoi.
-Mouuais. Et les postes gumminow ?
-De quoi ?
-Bah ta petite provocation là.
-C’est juste… comme ça. Ce n’est rien de sérieux.
-Et le délire de l’interphone, il y a un an pour la Saint-Valentin ? J’ai vérifié mes sources t’sais, après la remarque de Rude l’autr’ jour. J’ai fait ça bien !
Je ne réponds plus. Evidemment, ce poste en question était déjà… une provocation en soi. Mais je ne pensais pas qu’elle me rattraperait seulement un an plus tard.
-Bref, c’est marrant ! Et si tu dis rien c’est parce que tu sais que j’ai raison et que t’es gêné.
-Ca t’arrive souvent de jouer les agences matrimoniales comme ça ?
Mon expression est assez sérieuse, presque agacée. Il reprend un air plus concerné.
-Non, mais par contre, j’te mets en garde vite fait. Fais gaffe. Si c’est ce que je crois, je ne peux que te recommander de… de bien y réfléchir avant d’essayer plus encore.
-Qu’est-ce que ça veut dire ?
-Que tu vas aux devants des plus grandes emmerdes, je dirais. Au fait, ta soeur a un mec ?
-Hein ?
-Ouais.
-Non, je crois pas.
Je ne sais pas ce qu’il a en tête mais mon attention est rapidement accaparée par un souvenir qui vient de me revenir.
-Attends, où il est ?
-Où il est quoi ?
-Le casse-tête.
-En bas, on l’a un peu inspecté la nuit passée. Je vais te le chercher.
Quelques instants plus tard, il réapparait avec la boite, elle semble intacte.
-Qu’est ce que tu penses trouver là-dedans ?
-Des preuves des marchés entre Abramo et les marchands d’esclave pour le compte de son grand ami Pavani. Des reconnaissances de dette, ce genre de choses.
Il hésite quelques instants.
-J’imagine que si t’es revenue comme ça, c’est que ça s’est mal passé.
Je quitte l’objet des yeux quelques secondes, pour le regarder. Devrais-je lui mentir ? Evidemment, je peux difficilement lui expliquer comment j’ai fait disparaître en une demi-heure un campement entier en dépit de mes aptitudes au combat acceptables mais… sans plus.
-Mal ? Le mot est faible.