Je suis assise dans une chambre blanche, la lumière de fin de journée illumine les lieux dans une atmosphère orange, le silence règne si l’on oublie le bruit calme de la respiration de Scarlett et le bruit que font ses monitorings à certains instants. Mon gummiphone est posé juste à côté de moi sur une petite table. A tout moment, je m’attends à ce que quelqu’un m’appelle. Reno m’a dit que le Président l’envoyait avec trois autres Turks, qu’ils seraient là dès que possible. Je ne sais pas trop ce qui m’attend mais jusqu’à nouvel ordre, qu’on m’affecte à autre chose ou qu’on décide de m’enfermer, je suis affectée à la protection de Scarlett.
Je lève les yeux du fascicule dans mes mains qui retenait plus ou moins mon attention et je pose les yeux sur elle. Son visage est paisible, c’est sûrement la morphine. Et dire que quelques heures plus tôt, je priais pratiquement pour qu’elle vive. D’épais bandage encercle son ventre jusqu’à la taille. Des infirmières viennent régulièrement lever sa chemise de patiente pour vérifier s’il n’y a pas d’hémorragie. A force de vérifier les chiffres sur l’écran, je connais même par coeur les constantes normales pour un être humain.
Elle est revenue du bloc il y a déjà environ deux heures et ses paupières commencent à clignoter. J’appuie sur le bouton qu’on m’a indiqué pour appeler quelqu’un. Je n’y connais rien, et je veux être certaine d’assumer ma mission pleinement.
La porte s’ouvre, une dame entre.
-Vous avez sonné madame ?
-Oui, ses paupières… elles bougent. C’est un problème ?
L’infirmière sourit, approche de Scarlett et vérifie son monitoring ainsi que ses perfusions, pose la main sur son front pour estimer sa température, puis lève la couverture et inspecte à nouveau ses bandages. Tout semble dans l’ordre de ce que je comprends.
-Pas du tout, c’est normal, elle commence à se réveiller.
-D’accord. Merci.
Elle sort de la chambre et tout redevient calme, trop calme, et lent. Au bout de quelques minutes, j’entends Scarlett gémir puis marmonner quelque chose. J’approche pour essayer de comprendre.
-St..k, t’mat, fff…rt.
Bon, je suppose qu’elle délire. Ça ressemble à une commande au restaurant. Je prends mon gummiphone histoire de vérifier une énième fois si je n’ai pas reçu de message. En désespoir de cause, je me promène sur Gumminow tout en regardant de temps à autre la vue depuis la fenêtre.
Au bout de quelques temps, j’entends encore Scarlett gémir. Je jette un nouveau regard vers elle et me rend compte qu’elle a les yeux entre-ouverts. Je reste debout là où je suis et attend de voir si elle est consciente.
-Ni…na ? C’est vous ?
Elle semble se concentrer pour essayer de reconnaître ma silhouette.
-Oui, c’est ça. Vous ne reconnaissez pas la robe que vous m’avez forcée à acheter ?
Elle rit légèrement puis se crispe sous la douleur que la contraction génère chez elle au niveau du ventre.
-Comment vous sentez-vous ?
-Je commence à sentir la douleur. Qu’est-ce qui s’est passé ?
-De quoi vous souvenez-vous ?
Elle regarde dans le vide et semble se concentrer pour se rappeler des événements dans le bon ordre.
-Je me souviens avoir été dans la voiture avec les deux hommes. Et puis… c’est le trou noir. Je crois avoir vu quelque chose devant la voiture et…
Je la stoppe dans sa réflexion, j’aimerais autant qu’elle ne se rappelle pas les rondouillards.
-Vous avez eu un accident, la voiture s’est retournée.
-D’accord, et les deux hommes ?
Je croise les bras et m’approche de son lit, lui faisant face.
-L’un était déjà mort, l’autre je m’en suis chargée, puis je vous ai sortie de là et j’ai réalisé que vous étiez blessée.
-Très bien, merci Nina.
-C’est mon travail. Même si on ne peut pas dire que le résultat soit ce à quoi je m’attendais ce matin.
Je fais un signe de tête vers sa blessure. Ce n’est pas de la fausse modestie, cela me met dans une situation assez délicate.
-Peut-être, mais je suis en vie, et les deux hommes sont morts. Quelle est la suite ?
-Vous vous reposez, vous vous remettez de vos blessures.
-Et le Président ? Qu’a-t-il dit ?
Nos instincts respectifs reprennent leurs places. Elle veut savoir si le Président s’inquiète pour elle, et cette question réveille quelque chose en moi qui s’était endormi ces dernières heures.
-Il a envoyé plusieurs Turks. Ils devraient être là bientôt. Maintenant, essayez de dormir.
Au bout de quelques minutes, elle s’assoupit à nouveau. Puis, peu de temps après, la porte s’ouvre à nouveau. Je m’attends à voir une infirmière mais je reconnais les costumes noirs. Ils sont quatre. La jeune femme entre dans la pièce, tandis que Reno me murmure de les rejoindre à l’extérieur.
Nous sortons et regardons autour pour voir s’il n’y a personne autour pour épier notre conversation. Je connais les trois hommes mais ignore le nom de la jeune femme qui est entrée et celui de l’homme aux cheveux noirs et au sidecut. Il se poste devant la porte.
Rude, Reno et moi nous mettons à part.
-Tu as pris les affaires de rechange pour Scarlett ?
Je lui avais envoyé un message pour lui demander de passer prendre des affaires. Il soulève le petit sac qu’il a dans les mains et me le montre avec fierté, puis le tend à l’homme qui monte la garde.
-Bon, maintenant, donne-moi des détails. T’as dit que ça s’était passé dans un magasin de lingerie, c’est ça ?
-Ouais. C’était le deuxième magasin qu’on faisait de la journée. On était arrivées à Costa environ… deux heures trente plus tôt.
-Donc des informateurs ont pu vous voir arriver.
-C’est possible. On ne s’est pas particulièrement montrées discrètes.
-Oui, puis vous êtes arrivée avec un vaisseau privé du Président. Ça n’aide pas.
C’est vrai, je n’y avais pas réfléchi.
-Et donc ces hommes, ils ressemblaient à quoi ?
-Je ne sais pas. Ils avaient des cagoules, ils étaient blancs, des habits classiques mais c’est tout ce qu’il y a de notable. J’ai pas eu le temps de regarder après l’accident.
-Et ils ont parlé du Président et du fait d’humilier ses partenaires, c’est ce que t’as dit au gummi.
-C’est ça. Ah et…
-Quoi ?
-Ils ont réagi quand j’ai joué sur la corde sensible de l’honneur et du respect des femmes.
Le vieux truc pour amadouer le connard paternaliste, c’est quitte ou double. On ne sait jamais, puis ça ne correspond pas aux valeurs de tout le monde.
-Ouais, je vois. Ca correspond à notre première intuition, ce serait logique mais… D’ailleurs t’as dit que t’avais buté un des deux hommes, quelqu’un t’a vu ?
Je réfléchis. J’ai dit aux gens de garder leurs distances mais il n’est pas exclu que quelqu’un m’ait vue. Puis, il a quand même un morceau de métal coincé dans la trachée, mais là encore, on pourrait croire aux conséquences de l’accident.
-Je ne sais pas, je ne vais pas te mentir. A priori, je dirais que non.
-Dommage que tu l’aies buté d’ailleurs, ça aurait pu nous aider de pouvoir l’interroger.
-J’ai préféré mettre Scarlett en sécurité en priorité, c’était ma mission.
-Ouais. C’est pas faux. Bon.
Reno tourne sur lui même et nous fait dos, se grattant le menton, pour réfléchir. Quand il nous fait face il a remis ses lunettes.
-Rude, t’en penses quoi ?
-On vérifie les lieux de l’accident avant la nuit. On essaie d’en savoir un peu plus sur ces hommes.
-J’ai noté la plaque aussi.
-Ok, on sait jamais, ça peut servir. Ensuite ?
-On voit ce qu’on peut apprendre sur les gars auprès de ces flics. Il va forcément y avoir une enquête, d’autant plus qu’ils étaient armés.
-Bon, ils vont rien nous dire mais on peut forcer le passage.
-Ah et j’ai menacé un gars avec mon couteau pour qu’il me file sa voiture. La voiture est restée sur le lieu de l’accident. Ils vont forcément enquêter sur ça aussi. Ils auront interrogé les témoins. Tôt ou tard, ils viendront ici pour m’interroger, ils ont dû apprendre que j’ai accompagné Scarlett ici.
-Ok, donc, tu vas devoir te montrer discrète quelques temps. Genre…
Il me regarde de bas en haut, un peut surpris.
-C’est quoi cette robe ?
-Un vieux délire de Scarlett.
A présent, elle est pleine du sang de ma victime et de celui de Scarlett. Ça rend le tout assez dramatique.
-Va falloir changer de style pour qu’on aille enquêter, t’as qu’à prendre des trucs dans les affaires qu’on a apportées pour Scarlett. Puis fais un truc avec tes cheveux aussi, ils sont trop reconnaissables.
-Tu veux que je vienne en tailleur rouge et en escarpins ?
-Non, j’ai pris des trucs un peu plus confortables. Ça la fera chier mais tant pis. T’as qu’à mettre un survet’ et on va t’acheter une casquette.
Je lève les yeux du fascicule dans mes mains qui retenait plus ou moins mon attention et je pose les yeux sur elle. Son visage est paisible, c’est sûrement la morphine. Et dire que quelques heures plus tôt, je priais pratiquement pour qu’elle vive. D’épais bandage encercle son ventre jusqu’à la taille. Des infirmières viennent régulièrement lever sa chemise de patiente pour vérifier s’il n’y a pas d’hémorragie. A force de vérifier les chiffres sur l’écran, je connais même par coeur les constantes normales pour un être humain.
Elle est revenue du bloc il y a déjà environ deux heures et ses paupières commencent à clignoter. J’appuie sur le bouton qu’on m’a indiqué pour appeler quelqu’un. Je n’y connais rien, et je veux être certaine d’assumer ma mission pleinement.
La porte s’ouvre, une dame entre.
-Vous avez sonné madame ?
-Oui, ses paupières… elles bougent. C’est un problème ?
L’infirmière sourit, approche de Scarlett et vérifie son monitoring ainsi que ses perfusions, pose la main sur son front pour estimer sa température, puis lève la couverture et inspecte à nouveau ses bandages. Tout semble dans l’ordre de ce que je comprends.
-Pas du tout, c’est normal, elle commence à se réveiller.
-D’accord. Merci.
Elle sort de la chambre et tout redevient calme, trop calme, et lent. Au bout de quelques minutes, j’entends Scarlett gémir puis marmonner quelque chose. J’approche pour essayer de comprendre.
-St..k, t’mat, fff…rt.
Bon, je suppose qu’elle délire. Ça ressemble à une commande au restaurant. Je prends mon gummiphone histoire de vérifier une énième fois si je n’ai pas reçu de message. En désespoir de cause, je me promène sur Gumminow tout en regardant de temps à autre la vue depuis la fenêtre.
Au bout de quelques temps, j’entends encore Scarlett gémir. Je jette un nouveau regard vers elle et me rend compte qu’elle a les yeux entre-ouverts. Je reste debout là où je suis et attend de voir si elle est consciente.
-Ni…na ? C’est vous ?
Elle semble se concentrer pour essayer de reconnaître ma silhouette.
-Oui, c’est ça. Vous ne reconnaissez pas la robe que vous m’avez forcée à acheter ?
Elle rit légèrement puis se crispe sous la douleur que la contraction génère chez elle au niveau du ventre.
-Comment vous sentez-vous ?
-Je commence à sentir la douleur. Qu’est-ce qui s’est passé ?
-De quoi vous souvenez-vous ?
Elle regarde dans le vide et semble se concentrer pour se rappeler des événements dans le bon ordre.
-Je me souviens avoir été dans la voiture avec les deux hommes. Et puis… c’est le trou noir. Je crois avoir vu quelque chose devant la voiture et…
Je la stoppe dans sa réflexion, j’aimerais autant qu’elle ne se rappelle pas les rondouillards.
-Vous avez eu un accident, la voiture s’est retournée.
-D’accord, et les deux hommes ?
Je croise les bras et m’approche de son lit, lui faisant face.
-L’un était déjà mort, l’autre je m’en suis chargée, puis je vous ai sortie de là et j’ai réalisé que vous étiez blessée.
-Très bien, merci Nina.
-C’est mon travail. Même si on ne peut pas dire que le résultat soit ce à quoi je m’attendais ce matin.
Je fais un signe de tête vers sa blessure. Ce n’est pas de la fausse modestie, cela me met dans une situation assez délicate.
-Peut-être, mais je suis en vie, et les deux hommes sont morts. Quelle est la suite ?
-Vous vous reposez, vous vous remettez de vos blessures.
-Et le Président ? Qu’a-t-il dit ?
Nos instincts respectifs reprennent leurs places. Elle veut savoir si le Président s’inquiète pour elle, et cette question réveille quelque chose en moi qui s’était endormi ces dernières heures.
-Il a envoyé plusieurs Turks. Ils devraient être là bientôt. Maintenant, essayez de dormir.
Au bout de quelques minutes, elle s’assoupit à nouveau. Puis, peu de temps après, la porte s’ouvre à nouveau. Je m’attends à voir une infirmière mais je reconnais les costumes noirs. Ils sont quatre. La jeune femme entre dans la pièce, tandis que Reno me murmure de les rejoindre à l’extérieur.
Nous sortons et regardons autour pour voir s’il n’y a personne autour pour épier notre conversation. Je connais les trois hommes mais ignore le nom de la jeune femme qui est entrée et celui de l’homme aux cheveux noirs et au sidecut. Il se poste devant la porte.
Rude, Reno et moi nous mettons à part.
-Tu as pris les affaires de rechange pour Scarlett ?
Je lui avais envoyé un message pour lui demander de passer prendre des affaires. Il soulève le petit sac qu’il a dans les mains et me le montre avec fierté, puis le tend à l’homme qui monte la garde.
-Bon, maintenant, donne-moi des détails. T’as dit que ça s’était passé dans un magasin de lingerie, c’est ça ?
-Ouais. C’était le deuxième magasin qu’on faisait de la journée. On était arrivées à Costa environ… deux heures trente plus tôt.
-Donc des informateurs ont pu vous voir arriver.
-C’est possible. On ne s’est pas particulièrement montrées discrètes.
-Oui, puis vous êtes arrivée avec un vaisseau privé du Président. Ça n’aide pas.
C’est vrai, je n’y avais pas réfléchi.
-Et donc ces hommes, ils ressemblaient à quoi ?
-Je ne sais pas. Ils avaient des cagoules, ils étaient blancs, des habits classiques mais c’est tout ce qu’il y a de notable. J’ai pas eu le temps de regarder après l’accident.
-Et ils ont parlé du Président et du fait d’humilier ses partenaires, c’est ce que t’as dit au gummi.
-C’est ça. Ah et…
-Quoi ?
-Ils ont réagi quand j’ai joué sur la corde sensible de l’honneur et du respect des femmes.
Le vieux truc pour amadouer le connard paternaliste, c’est quitte ou double. On ne sait jamais, puis ça ne correspond pas aux valeurs de tout le monde.
-Ouais, je vois. Ca correspond à notre première intuition, ce serait logique mais… D’ailleurs t’as dit que t’avais buté un des deux hommes, quelqu’un t’a vu ?
Je réfléchis. J’ai dit aux gens de garder leurs distances mais il n’est pas exclu que quelqu’un m’ait vue. Puis, il a quand même un morceau de métal coincé dans la trachée, mais là encore, on pourrait croire aux conséquences de l’accident.
-Je ne sais pas, je ne vais pas te mentir. A priori, je dirais que non.
-Dommage que tu l’aies buté d’ailleurs, ça aurait pu nous aider de pouvoir l’interroger.
-J’ai préféré mettre Scarlett en sécurité en priorité, c’était ma mission.
-Ouais. C’est pas faux. Bon.
Reno tourne sur lui même et nous fait dos, se grattant le menton, pour réfléchir. Quand il nous fait face il a remis ses lunettes.
-Rude, t’en penses quoi ?
-On vérifie les lieux de l’accident avant la nuit. On essaie d’en savoir un peu plus sur ces hommes.
-J’ai noté la plaque aussi.
-Ok, on sait jamais, ça peut servir. Ensuite ?
-On voit ce qu’on peut apprendre sur les gars auprès de ces flics. Il va forcément y avoir une enquête, d’autant plus qu’ils étaient armés.
-Bon, ils vont rien nous dire mais on peut forcer le passage.
-Ah et j’ai menacé un gars avec mon couteau pour qu’il me file sa voiture. La voiture est restée sur le lieu de l’accident. Ils vont forcément enquêter sur ça aussi. Ils auront interrogé les témoins. Tôt ou tard, ils viendront ici pour m’interroger, ils ont dû apprendre que j’ai accompagné Scarlett ici.
-Ok, donc, tu vas devoir te montrer discrète quelques temps. Genre…
Il me regarde de bas en haut, un peut surpris.
-C’est quoi cette robe ?
-Un vieux délire de Scarlett.
A présent, elle est pleine du sang de ma victime et de celui de Scarlett. Ça rend le tout assez dramatique.
-Va falloir changer de style pour qu’on aille enquêter, t’as qu’à prendre des trucs dans les affaires qu’on a apportées pour Scarlett. Puis fais un truc avec tes cheveux aussi, ils sont trop reconnaissables.
-Tu veux que je vienne en tailleur rouge et en escarpins ?
-Non, j’ai pris des trucs un peu plus confortables. Ça la fera chier mais tant pis. T’as qu’à mettre un survet’ et on va t’acheter une casquette.