Quelqu’un touche à la poignée. Je sens une boule dans mon estomac qui m’empêche limite de respirer. Je reste bien baissée derrière le secrétaire, et j’entends la personne chipoter longuement, puis avec plus de force. Elle… Je sursaute. Un premier gros choc vient frapper la porte. Et puis un deuxième ! La porte s’ouvre en fracas, mais du coup… le bois vient taper l’activateur de la mine. Elle explose directement. « …. » Je suis bouche-bée, accusant le coup de la douleur, essayant de… Purée ma tête ! Je m’attendais zéro à un tel volume ! Un sifflement m’assourdit, j’essaie de me relever. Un mec est à terre, désaturé, couché sur le sol à l’entrée. Et… je regarde la fenêtre juste à côté. Je pointe  mon fusil vers celle-ci. Allez… je sens qu’il y a quelqu’un, je sens… Je sens qu’il est pas tout seul ! Je vois des cheveux et une oreille dépasser. Tête ! Je vois des couleurs disparaître et rien d’autre. Je reste immobile, le canon braqué vers les fenêtres et la porte, en attendant que mon ouïe revienne. Les filles sont toujours à couvert, ne se sont pas révélées. C’est pas plus mal !

Un mec surgit depuis la gauche ! Il a dû éviter de peu l’explosion ! Il passe devant la porte défoncée, vise devant lui de son pompe.
Je me baisse. La chevrotine vient toucher les pieds du piano, qui tombe sur le côté dans un fracas. Mince !! Le mec doit rien voir ! J’avais une vue parce qu’il y a des lumières dans la rue mais… son tir à l’aveugle a peut-être…

« Hengameh ? » Je tente un call. J’entends le type enclencher le pompe de son arme pour mettre de nouvelles cartouches. Fa’ est plus rapide que moi, et pas dans son champ de vision. J’entends un coup partir de sa position. « Mort. » crie-t-elle, sûrement plus fort que ce qu’elle aurait voulu.
Je pousse le secrétaire et je cours vers la porte d’entrée.
« Regarde comment va ta sœur ! » Je braque mon fusil d’assaut vers la ruelle. Rien. Si ce n’est que depuis tantôt, ça a changé de dingue. Il y a des débris métalliques partout, des tuiles rouges sur tous les mètres carré du périmètre. Je lâche mon fusil d’assaut, retenu par la bandoulière, prends une gre’ à mon porte-armes qui sert aussi de ceinture. Je dégoupille et je lance assez haut pour qu’elle vole au-dessus d’une maison et arrive – j’espère – sur la place centrale. Je reviens dans la maison, j’ignore les trois éliminés. Hengameh est sortie du piano. « Je me suis juste cognée… » Elle se masse la tête.

« On doit partir. » dis-je, rassurée. « Il nous reste combien de mines à activer ? » Fa’ regarde dans sa sacoche remplie à ras-bord. « Trois. » Je m’approche d’elle, les prends une par une et les place dans la ruelle, avant qu’on revoie des ennemis. Tant pis si c’est plus flagrant. Je fonce sur n’importe quelle micro-chance de faire des kills.
Je pointe deux doigts vers la salle d’à côté. J’avance en première.
« Sur mes pas. » J’avance, légèrement penchée en avant, pour avoir la plus petit hitbox possible. Je prends une arme de poing bleue, un revolver, et allume mon gummiphone pour avoir assez de lumière pour traverser les pièces sans déclencher mes propres pièges.

Je passe à côté de la mine près du tapis, et pointe de mon arme celle à côté d’une chaise. Et je continue. J’atteins la porte suivante et ne l’ouvre qu’à moitié, pour ne pas venir déranger un autre explosif.
« Essayez de ne pas faire bouger la porte. » J’avance. Sans les mines, nos sacs sont moins énormes. On passe devant un divan. Je soulève quelques coussins. « Deux armes max sur vous. On cache les autres ici, et on espère que personne viendra les prendre. » Je respecte pas ma propre règle… Je garde le revolver, le fusil d’assaut et le sniper violets. Fa’ y va sérieuse, elle comprend ses forces, elle garde ses deux pompes, un doré et l’autre violet. Et Hengameh prend son fusil d’assaut doré et garde mon pistolet laser à l’intérieur d’un des blousons de motarde qu’on a fauchés à Go. En vrai, avec mes deux filles d’Agrabah habillées en loubardes, et moi habillée mi-mignonne, mi-sale, je trouve qu’on a un vrai style !

Allez. Focus.
« Restez derrière moi. » Si je dois me prendre un tir, je les couvrirai de mon corps ! Comme les pros ! Et elles pourront flinguer l’ennemi. On arrive devant la porte qui donne sur la ruelle. Je me mets à genoux, viens désactiver la mine avant de la déplacer, trente centimètres sur la gauche, et de la réactiver. Je me lève prudemment, prends une grande inspiration, avant d’ouvrir légèrement la porte. Je regarde par l’entrebâillement s’il y a du mouvement dans la ruelle. Franchement, autant la ville est jolie, autant là, c’est le fond de la poubelle. J’ai juste vu que ça donnait sur un genre d’égout dégueu. « Allez. » chuchoté-je. On avance. Personne. Juste une énorme caisse en bois, aucune idée de ce qu’elle fait là. On avance, on avance.

« Baissez-vous ! » Deux types sortent de nulle part, de la… bouche d’égoût ? Et ils courent dans la ruelle perpendiculaire à la nôtre, vers notre gauche. On se met contre la grosse boite en bois, on s’apprête à … Une balle est tirée depuis la bouche d’égoût et transperce le premier type qui s’effondre dans l’eau. Le deuxième fait dix pas de plus, sort de l’eau, et est touché à son tour. Éliminés tous les deux. Ok. Au lieu d’être juste à couvert, on se baisse assez pour ne pas être trop visibles. Je reste attentive au moindre bruit. Mon call a peut-être été couvert par tout ce bruit, genre les mecs qui couraient dans l’eau ! Je pense pas que le tireur ait pu m’entendre avec tout ce vacarme. Des pas s’approchent, remuent l’eau. J’avale ma salive. Dès qu’il pointe son nez, dès qu’il sort de sa cachette, je le flingue avec le revolver. Je regarde vers la gauche, cherche les deux gars, essayant d’analyser leur regard. Je les vois super bien, malgré la nuit et le manque de lumière dans cette ruelle paumée.

Et pour cause. Je réagis pas trop, j’analyse pas plus, mais à côté d’eux, on peut voir un début d’incendie prendre une partie d’un bâtiment. Je me concentre sur les pas. Et je le vois sortir de son trou, les godasses sûrement pleines d’eau. Il avance jusqu’à regarder les flammes. Il a un snipe dans les mains, et un katana à la ceinture. Et un costard. Il touche à son oreillette.
« J’ai retrouvé le drône à proximité de la grotte. Il a été détruit. J’ai eu les deux vandales. » Il fait une petite pause. « Un incendie s’est déclenché. Aucune menace a priori. »
Je prends une inspiration. Bien sûr, je peux le descendre d’une balle dans le dos. D’ailleurs, Fahimeh doit se dire la même chose. J’entends le cuir de sa veste frotter, et je vois son canon levé vers la cible. Je le baisse. « Monsieur, ne bougez pas ! Soldat 1ère Classe D.Va ! » hurlé-je en toute précipitation ! L’homme se retourne vers moi, nous menace de son arme. Je lève mon révolver en l’air. « Soldat 1ère Classe D.Va ! » répété-je. Je vois son visage, ou une partie de son visage, éclairé par les flammes. Un assez bel homme, avec un style un peu intello. Je sais pas pourquoi je dis ça. Il a des lunettes, des traits vaguement asiatiques et une coiffure impeccable mais pleine de gel, je dois… l’associer à Kotetsu. « Pas un geste. » dit-il d’une voix claire.

« Je ne vais pas vous tirer dessus. » Je reste accroupie. Je ne souris pas, je suis… franchement sérieuse, décidée. Je vais pas faire un numéro de charme, ici. Le mec, je lui laisse une chance. « Je ne veux pas me mettre dans le chemin du Président. Si vous êtes avec lui… » Je plisse légèrement les yeux. « Je vais de mon côté. » Je pointe d’un doigt la ruelle dans laquelle il est. Le bâtiment en flammes, commençant à s’enflammer doucement, m’intéresse un peu.
Il a l’air de réfléchir. Il ne lâche pas son arme lourde pour tenter un message dans son oreillette. Ok… Il est méfiant.
« Vous… » Je lâche un léger rire ironique. « ne me reconnaissez pas ? » J’ai les cheveux courts, je suis habillée comme une baroudeuse. Bon, on va dire… « Je prends mon gummiphone. Gardez votre arme baissée, les filles. » Je pose mon revolver sur la caisse en bois. « Doucement, mademoiselle. » dit-il. Je hoche la tête. Je prends mon gummiphone dans ma poche, lance l’appli de la Shinra, clique sur l’onglet identité, et je mets mon code, avant de lui montrer mon badge numérisé, avec mon beau visage et quelques informations. Il plisse les yeux pour voir, s’approche. Oui à nouveau, j’ai trente-six occasions de le tuer maintenant. « Alors ? » Une autre voix. Je sursaute. Elle vient de l’égoût ou je sais pas quoi. Ils ont dû… C’est malin. Si je trahis, un deuxième m’exécute dans le dos. « Ca m’a l’air bon. Ne nous sabotons pas au sein de la Compagnie. » Il baisse son fusil, je souris. Allez. On se lève toutes les trois et on va vers la ruelle, passant à côté du bonhomme. Je jette un œil par-dessus mon épaule et vois l’autre mec, désaturé. Ok bon, je me suis fait des films. Mais l’autre a pu communiquer quand l’autre ne le pouvait pas.

C’est… un peu de la triche, je trouve, mais sincèrement, venant du Président, on va pas parler d’une énorme surprise. On s’éloigne
. « On va y aller. » dis-je, en pointant le bâtiment en flammes. « Euh… Di, je suis pas sûre. » Je cherche un accès, je… « Di ! » Hengameh se décale d’un pas et tire une salve de balles sur quatre personnes qui arrivent de l’autre côté de la rue ! Un tombe, un garçon, pantalon noir, chemise rouge, je… J’ai déjà vu ce genre de.
On fonce se couvrir contre la façade d’un bâtiment, Fahimeh prend une grenade, la dégoupille comme je lui ai montré et la lance vers le groupe. Un autre tombe. Ils ne tirent pas… Je… Je regarde les autres. Je tente quelques tirs de mon revolver et le remets à ma ceinture quand il est à sec. J’ai vu… une ado en jupe un peu écossaise, rouge, et une chemise blanche.
« Attention ! » Derrière nous, une énorme vague vient nous frapper contre le mur contre lequel on se cache, avant de nous emporter dans son flot et nous projeter à terre, plus proche des deux jeunes qui restent. On essaie de nous relever mais la vague se redresse et nous fouette à terre une nouvelle fois. « Urr… » Je crache de l’eau entre deux coups et réussis à regarder les attaquants. Des étudiants à l’académie du Consulat. Purée de… Le torrent nous saisit, Fahimeh. Je vois Hengameh, à terre, inerte, avant que la petite et moi soyons projeter une nouvelle fois contre un mur… Je… j’essaie de me relever. J’ai pas d’armes en mains, et le temps de prendre celui en bandoulière. Purée…

« Ah ! » crie un des étudiants. L’eau nous relâche complètement. Je crache encore l’eau dans mes poumons en essayant de voir quelque chose devant moi. Le garçon hydromancien a un couteau dans la poitrine et hurle de douleur. La fille a l’air super flippée en voyant Hengameh, debout, près d’eux, complètement trempée et avec un air de tueuse. À côté de moi, Fahimeh lève son canon et tire une fois, deux fois, trois fois… Bref, elle les ultra-fume, plus que nécessaire.
Je me lève, titube.
« C’est quoi ces fous ?! » Et j’ai genre rien fait ! Je soulève légèrement mon top, qui laisse une grosse partie de mon ventre à l’air, et je… vois des taches violettes sur mes côtes. Mince. C’est pas bon. C’est… Bon tant pis ! Tant pis pour la douleur !
Je vais vers l’hôtel. Une des fenêtres s’est brisée dans l’affrontement. Le feu n’a pris que l’extrémité de l’hôtel la plus proche de la cathédrale. Et l’autre extrémité, où nous sommes, est… tellement humide, avec tout ce combat aquatique, que ça devrait pas prendre feu tout de suite. Avec la crosse de mon fusil d’assaut, je secure la fenêtre, alors que Fa’ ramasse toutes les armes laissées tomber. Et on entre au rez-de-chaussée de l’hôtel, dans une petite pièce. Je traîne même pas sur la beauté de la pièce ou quoi, j’essaie de voir si y a de la fumée. Rien. On est tranquilles. Je ferme les rideaux pour donner l’illusion qu’on n’est pas passées. Les sourcils froncés, franchement atteinte dans mon moral, je regarde les filles.
« On ne peut pas rester trempées comme ça. » On met de l’eau partout, nos cheveux dégoulinent, et perso, j’ai plus d’eau dans mes chaussures que de cuir ou de caoutchouc. Si on était en été, je t’aurais dit yolo. Mais là, on va juste mourir de froid, et nos mouvements seront affectés par des tissus aussi imbibés. Je vais vers la salle de bain et en sors plusieurs essuis. Je les répartis. « On se déshabille une par une pour essorer nos vêtements. » Je fais une grimace en retirant mon top, me retrouvant en soutien-gorge devant Hengameh et Fahimeh. « Une qui monte la garde, une qui se repose sur le lit, une qui se sèche. »

Purée, je déguste. J’enlève mon pantalon et mes bottines et vais vers la salle de bain pour essayer de sécher mes vêtements à la force de mes mains. On peut rester ici tant que l’air est respirable. Je pense pas que tant de gens que ça vont contest un bâtiment qui s’enflamme doucement.