Avertissement : Déconseillé aux mineurs et personnes sensibles :


Huayan était à bord de son grand vaisseau, se déplaçant en vitesse de croisière à travers l’univers pendant que sur chaque monde, tout le monde s’entretuait pour désigner le grand vainqueur de ce concours des plus… Longs.

Il fallait être honnête, l’Impératrice s’ennuyait terriblement et ce n’était pas le doux rêve que son mari lui avait procuré la veille qui allait changer quelque chose. Non, il fallait s’occuper pendant les heures creuses de la journée.

D’autant plus que cela devenait vite monotone : le cycle du jour et de la nuit se vivait un peu différemment à bord. Certes, Francis appelait régulièrement mais cela ne suffisait pas vraiment. Sans compter que l’amiral Linghun n’était pas un très grand bavard.

C’est ainsi que la jeune femme s’était tournée vers le gummiphone pour se divertir. Bien sûr, les enregistrements en direct des combats étaient passionnants, mais il n’y avait pas que cela sur ce merveilleux outil, invention du Consulat. Il y avait aussi des gens qui se confiaient sur leur vie, leurs aventures, leurs banalités du quotidien… C’était très intéressant.

C’était clairement du voyeurisme parfois, mais Huayan ne pouvait s’empêcher de lire ces histoires qui ne feraient pas parties des grands livres de l’univers. Non, cela l’amusait de lire les mésaventures, les désaveux, les coups de gueule et les joies d’autrui.

Si bien qu’elle avait trouvé de quoi agrémenter sa pause thé de l’après-midi. Une jeune femme racontait une histoire d’amour éphémère qui s’est finie par une vengeance des plus redoutables. Le cœur habituellement calme de Huayan en palpitait déjà.

La jeune femme annonçait qu’elle avait pris des noms d’emprunt pour éviter que ses proches, elle ou l’homme dont il serait question dans cette histoire ne soit pas reconnus. Le récit commençait donc à San Fransokyo. Marilyne, jeune fille récemment devenue célibataire, cherchait un nouveau petit ami. Peu intéressée par les rendez-vous nocturnes sans lendemain, elle voulait rencontrer de bonnes personnes.

Sur une application de rencontres connue à San Fransokyo, un jeune homme la démarcha. La conversation s’engagea alors entre les deux célibataires. Marilyne, étudiante à l’Université de la ville, fut surprise de croiser quelqu’un d’aussi cultivé et bien éduqué sur le gummiphone. Il faut dire qu’elle en avait vu passé des lourdauds et des porcs.

Bien vite, le premier rendez-vous fut pris. Un restaurant du centre-ville, pas trop cher tout de même. L’homme était récemment diplômé et il n’avait pas encore trouvé. Ils s’étonnèrent même de ne pas s’être déjà croisés sur le campus universitaire. Le courant passait bien. Très vite, les discussions s’amplifiaient. Ils se disaient bonjour le matin, parlaient dans la journée et se souhaitaient une bonne nuit le soir venu.

Après quelques jours, une semaine pour être exacte, le premier rendez-vous chez lui fut pris. Elle allait chez lui, le cœur emballé. Elle avait commencé à développer des sentiments pour lui. Elle s’était faite belle. Elle arriva chez lui, ils prirent le dîner.

Très vite, Marilyne n’en pouvait plus : elle devait l’embrasser. Après le dessert, c’était devenu sa mignardise. Le jeune homme était beau : cheveux longs, typé asiatique, grand et mince. La jeune femme avait plus chaud que Francis un jour de raclette. Elle caressa ses cheveux, puis l’embrassa encore et encore. « Akihiko » répondait positivement à ses avances, la prenant fermement dans ses bras en retour.

Bien vite, ils furent dans le lit du bel homme et la nuit se poursuivit avec gaieté. Cependant, une première chose vint troubler la jeune Marilyne. En effet, peu après la fin de leur relation, disons-le clairement, sexuelle elle vit le guumiphone de son date s’illuminer dans le noir. Et ce à plusieurs reprises. Curieuse, elle s’approcha profitant d’un instant d’inattention de son partenaire de chambre.

Plusieurs notifications. Et apparemment, ce n’était pas pour la météo du lendemain. Bon, elle se dit qu’ils étaient en début de relation, qu’elle pourrait en parler avec lui plus tard. Après tout, ce n’était que leur première fois. De plus, Akihiko avait l’air sérieux : il se protégeait et semblait être très attentif à sa santé.

Elle repartit chez elle, et la farandole de messages continuait. Elle l’appréciait de plus en plus, puis il était tellement beau et intelligent. C’était l’homme presque parfait se disait-elle. Huayan sourit à cette mention : l’homme parfait, tout comme la femme parfaite, n’existaient pas. C’étaient nos sentiments qui dominaient la danse du cœur.

Cependant Marilyne ne voulait pas précipiter les choses. Elle avait eu des mésaventures avec son précédent copain et ne voulait pas foncer tête baissée dans une nouvelle relation, elle voulait en savoir plus tout en « avançant ». Malgré tout, elle céda bien vite aux avances du jeune Akihiko : elle devenait sa copine.

S’ensuivirent plusieurs dates qui se passèrent plutôt bien, Akihiko était toujours charmant et tout semblait aller bien. Marilyne lui avait parlé de ses notifications et il s’était défendu en disant qu’il avait bien entendu supprimé tous ses comptes en ligne.


« Je sens que c’est trop beau pour être vrai. » murmura l’Impératrice devant son gummiphone, lisant avidement les lignes écrites par la jeune femme.

Marilyne cependant était suspicieuse. Tout comme Huayan, elle pensait que c’était trop beau. Elle trouvait qu’il avait facilement désavoué ses comptes, lui qui semblait être présent sur plusieurs applications gummiphoniques. Ne pouvant s’empêcher de satisfaire sa curiosité, elle créa un faux compte puis chercha à retrouver le jeune homme…

Qu’elle finit par retrouver.


« Bravo Marilyne. » souffla Huayan en buvant un peu de thé.

Elle alla donc confondre le jeune Akihiko qui se défendit par un argument des plus convaincants : « c’était juste pour voir les gens autour de moi ». Même Huayan derrière son écran était très dubitative face à cette explication. Cependant, le jeune homme fit mine encore une fois de supprimer ses comptes controversés par la désormais copine Marilyne.

Les rendez-vous et les discussions se poursuivirent mais la jeune femme avait perdu un peu confiance. L’explication était difficile à avaler après tout. Alors, elle fit ce qu’elle n’avait jamais fait auparavant. Elle créa un nouveau compte, une nouvelle fois, mais cette fois-ci avec de fausses photos. Marilyne n’était pas confiante, mais elle voulait en avoir le cœur net.
Elle déploya tout son jeu d’actrice. Elle s’était créé un personnage : Nathalie, une jeune femme assez séduisante et surtout à la limite de la vulgarité. Autrement dit, la pire (ou meilleure selon le point de vue) chaudière que San Fransokyo avait connue. Et bien entendu, cette fois-ci c’est elle qui se mis en quête de sa cible.

Au début, elle était agréablement surprise. Elle ne trouvait pas le profil de son copain nouvellement acquis. Si bien qu’elle n’allait peut-être pas chercher aussi loin après tout. Jusqu’au moment où elle fit le lien entre un profil avec une photo de hérisson et le déplacement de son copain chez un ami dont il lui avait parlé.

Autant dire qu’elle avait envie de rouler sur le hérisson avec sa voiture avec une certaine vigueur. Quitte à faire une marche arrière le moment venu. Cependant, Marilyne devait contenir sa colère soudaine : elle devait voir s’il avait été honnête avec elle ou non sur son explication douteuse. Mais au point où elle en était, elle devait en être sûre. Sa curiosité la dévorait. Après tout, la curiosité est un vilain défaut autant qu’être un bel enfoiré selon elle.

Huayan de son côté était tellement captivée par cette histoire que son thé était entrain de refroidir. C’était plus passionnant que prévu.

Marilyne, en tant que Nathalie la Chaudière, aborda donc le profil de hérisson de la personne qu’elle pensait être Akihiko : après tout, il fallait vérifier pour être sûr, les coïncidences peuvent arriver. Bien entendu, les photos -volées- de la jeune Nathalie aguichai le petit animal épineux.

En bonne séductrice habituée des réseaux, Nathalie demanda une photo de son visage. Après tout, elle, la belle femme coquine, n’allait pas rencontrer un homme qui ne se dévoile pas un minimum. Et là, la sentence tomba ; c’était bien lui. Le sang de Nathalie ne fit qu’un tour. Elle avait envie de pleurer autant que d’enfoncer son poing dans le mur de son petit appartement.


Elle enrageait.

Mais elle se maintint dans la discussion et déchaîna Nathalie. Clairement, c’était tellement différent d’elle. Séductrice, très, très coquine et à la limite du vulgaire et de l’indécence. Elle lui posa la question pour connaître la raison de cette photo de profil animalière : son ex le surveillait sur les applications du gummiphone. Marilyne était donc une stalkeuse et son ex copine aussi accessoirement.

Nathalie lui demanda alors d’expliquer ce qu’il en avait à faire que son ex sache s’il était ici ou pas. Akihiko répondit simplement que la vie était compliquée et qu’il ne fallait pas insister.

« Il va mal finir ce jeune homme. » pensa Huayan.

Nathalie continua donc de le séduire pendant plusieurs jours, tandis que Marilyne elle, poursuivait sa relation avec lui. Cependant, elle apprit grâce à « Nathalie » que certaines informations qu’il avait communiquées, étaient fausses. Par exemple, la protection semblait bien accessoire en fonction de la femme à qui il s’adressait. De plus, ses habitudes sexuelles laissaient entendre que c’était un sacré chaud lapin qui s’adonnait à de nombreux plaisirs. Plaisirs qu’il ne semblait pas partager avec Marilyne.

Marilyne prit alors une décision : se venger.

Elle n’allait pas le tuer ou quelque chose d’horrible de ce genre. Juste l’humilier. Nathalie donna rendez-vous à Akihiko dans un centre commercial de San Fransokyo, un des plus grands. Il s’était « foutu de sa gueule » d’après les propres mots de la jeune femme et elle voulait en faire autant. Il avait le droit de faire ce qu’il veut dans sa vie sexuelle, mais Marilyne détestait le mensonge. D’autant plus qu’il l’avait fait culpabiliser sur sa curiosité de la dernière fois.

Quelques jours avant le rendez-vous avec Nathalie, Marilyne prévint qu’elle irait certainement faire des courses, du shopping avec sa copine Lola au même centre commercial. Akihiko alerta Nathalie, qui lui répondit qu’elle vivait tout près et qu’il ne resterait pas longtemps sur place. Elle passerait le prendre à une des sorties du centre et ils partiraient aussitôt.

Le piège était fixé. Marilyne ne pleurait plus. Elle souriait. Un sourire machiavélique.

Le jour venu, elle se rendit donc avec son amie, tenue au courant de sa vengeance. Au loin, elles attendirent : elles fixaient le moment où Akihiko arriverait. Secrètement, Marilyne espérait que son copain ne se présenterait pas. Peut-être qu’il avait senti le « fake » et ne se rendrait pas au rendez-vous. Peu importait au final, elle avait perdu la confiance et elle n’imaginait pas poursuivre une relation vu ces circonstances.


« Je l’aime bien cette petite. » confia Huayan.

Akihiko finit par se présenter. Beau de mille feux, habillé à la mode de San Fransokyo, bel homme qui allait faire du « sale » aujourd’hui. Cela sentait le plan cul à plusieurs centaines de mètres à la ronde. Marilyne utilisa Nathalie pour le prévenir de patienter un peu, elle arriverait bientôt. Pendant ce temps-là, elle fit le tour de son point d’observation et pénétra dans le centre commercial par une autre entrée, préparant psychologiquement son jeu d’actrice surprise et étonnée de voir son copain ici alors qu’il avait dit qu’il serait occupé chez lui toute la journée.

L’homme était agité. On pouvait sentir à sa posture qu’il était tendu. Il ne voulait pas patienter ici trop longtemps, il y avait du monde. Du passage… Et surtout sa copine juste à côté. Trop bonne trop conne pensa Marilyne, c’est ce qu’il devait penser d’elle.

La farce débuta sur cette pensée.

L’amie et Marilyne sortirent de centre commercial avec des sacs de courses et tombèrent nez à nez sur le jeune homme qui attendait. Bien sûr, il ne s’enfuit pas et alla saluer sa copine qui elle, commença à lui présenter sa camarade d’université. Akihiko était gêné, mal à l’aise, tendu. Après tout, son plan allait arriver d’une minute à l’autre. Et là, il allait perdre sa copine ET Nathalie la Chaudière.

Marilyne demanda naturellement ce qu’il faisait ici, il lui avait dit qu’il serait chez lui toute la journée. Il ne sut pas trop répondre. C’était limite si on ne pouvait pas voir la goutte de sueur coulée le long de son visage. Marilyne sourit et déclara qu’elle avait compris. Elle fit signe à son amie et elles quittèrent les lieux.

Sans compter que Nathalie n’arriva jamais… Puisqu’elle n’existait pas.

Peu de temps après, Marilyne quitta le jeune homme, qui avait du avoir une bonne frayeur et les boules.


« Quelle belle histoire… Il va falloir que j’inspecte ces réseaux plus souvent que prévu. »