Je ne sentais plus mon cœur, il émettait des bruits mécaniques que je ne lui connaissais pas. Ou bien si, je les avais constatés un jour, et ainsi avais-je tué par plaisir pour la première fois ; ainsi avais-je fonctionné pendant plusieurs mois sans ressortir de cet état sinon pour dormir et survivre. Ce coeur n’était plus mon cœur. Ce n'était plus mon sang, même plus mon corps.
Ce coeur mécanique me conduisit loin du Jardin Radieux. Il m’interdisait également de retourner au Château, où toute vision ne serait qu’un rappel douloureux de mon échec à sauver la seule chose qui comptait encore. Un risque pour cette instance de coeur de perdre le contrôle sur cette machine à détruire que je pouvais devenir.
Il fallait éviter toute confrontation avec un souvenir qui me ramènerait à cette clémente et redondante humanité. Quelle ville me procurait plus d’indifférence que celle-ci.
La Cité du Crépuscule. Qui je croiserais serait mon ennemi, qui j’aurais à portée de main serait cible bienvenue. Collègues, innocents, rebelles ? Quelle importance.
Dès l’atterrissage en plein milieu de la place de la gare, je m’éjectai du vaisseau sans idée ou but précis sinon « où peuvent-ils se cacher tous ? ». Je ne pris pas le temps de remarquer les ravages que les conflits avaient laissé. Je descendis la rue vers la place principale, guettant le moindre bruit alentour.
Justement, un grincement de porte m’alerta à quelques mètres, je me ruai vers l’ouverture et la possibilité de commencer à laisser aller ce que je ne pouvais extérioriser que dans la violence et dans l’acharnement. La pointe de mon épée s’arrêta net à environ quelques centimètres de son visage, qui ne devait pas dépasser le mètre vingt. C’était une petite fille, pâle et par les règles du jeu rendue intouchable.
-Tes parents sont là ?
Ma voix était méconnaissable, las mais étrangement douce.
Je n’y prêtai pas plus longtemps attention et la bousculant négligemment, ouvris la porte plus grand pour regarder à l’intérieur s’il y avait encore âme à atteindre en ces lieux. Je ne trouvai que des gens insignifiants et déjà désaturés.
Je poursuivis alors encore ma course dans rue jusqu’à atteindre le circuit du tram. Le transport était justement renversé et devait servir de rempart à l’envahisseur eu vu du nombre d’impact de balles. Je me glissai rapidement derrière à la recherche d’un semblant de combattant. Toujours personne.
J’entendis alors derrière moi quelqu’un m’appeler ou en tout cas faire mention de mon nom.
-Mais attends, c’est pas la Maréchale du Château de la Bête ?
Je croisai le regard de deux gardes noires —ils en avaient l’habit en tout cas. Ils semblèrent
hésiter quelques instants avant de prendre la seule décision qui s’imposait dans ce climat. Quelle qu’ait été la nature de leurs scrupules : hiérarchie ou manque de force, je ne leur laissai pas le temps de tergiverser. J’étais prête à distribuer les éliminations à qui voudrait.
En quelques fractions de secondes, ils étaient à ma portée. Je tranchai la gorge du premier sous le regard effaré du deuxième. L’entaille ne fut volontairement pas assez importante pour l’éliminer immédiatement. Il dut attendre quelques dix secondes pour voir son calvaire prendre fin.
L’autre reçut par la grâce de mon revers le pommeau de mon épée dans le ventre. J’entendis son souffle se couper puis son grognement, comme s’il s’apprêtait à vomir. Il se plia de douleur. Je donnai un coup de pied dans sa jambe. Il tomba à terre. J’écrasai son genou avec véhémence ; il hurla, me suppliant de l’achever aussitôt, arguant que ce n’était pas nécessaire, que seule l’élimination importait.
-Ton élimination ne m’apportera rien qui compte vraiment.
Il attrapa son fusil tombé non loin, je le saisis à temps et forçai le canon pour qu’il se dirige ailleurs que dans mon sens.. Je poussai si fort sur l’arme que j’entendis ses articulations craquer. Au bout d’un moment j’envoyai l’arme voler à plusieurs mètres de là. N’importe qui assistant à cette scène se serait demandé à quoi je perdais mon temps.
Je lui infligeai alors un coup, puis un autre, assise sur son torse, jusqu’à ce qu’il perde conscience. Les coups s’enchainaient, il devint méconnaissable, jusqu’à ce que le jeu détermine que j’en avais assez fait, trop fait. C’était pourtant loin d’être assez. Je ne me sentais pas mieux. Les seuls instants supportables avaient été quand j’avais senti les propres limites de mon corps et que mes poings s’endolorissaient au contact d’une fracture d’os ou de dents, lentement mais sûrement. Je fixai mes mains contusionnées, cela pouvait m’apaiser un instant.
Sam 13 Fév 2021 - 23:10Ce coeur mécanique me conduisit loin du Jardin Radieux. Il m’interdisait également de retourner au Château, où toute vision ne serait qu’un rappel douloureux de mon échec à sauver la seule chose qui comptait encore. Un risque pour cette instance de coeur de perdre le contrôle sur cette machine à détruire que je pouvais devenir.
Il fallait éviter toute confrontation avec un souvenir qui me ramènerait à cette clémente et redondante humanité. Quelle ville me procurait plus d’indifférence que celle-ci.
La Cité du Crépuscule. Qui je croiserais serait mon ennemi, qui j’aurais à portée de main serait cible bienvenue. Collègues, innocents, rebelles ? Quelle importance.
Dès l’atterrissage en plein milieu de la place de la gare, je m’éjectai du vaisseau sans idée ou but précis sinon « où peuvent-ils se cacher tous ? ». Je ne pris pas le temps de remarquer les ravages que les conflits avaient laissé. Je descendis la rue vers la place principale, guettant le moindre bruit alentour.
Justement, un grincement de porte m’alerta à quelques mètres, je me ruai vers l’ouverture et la possibilité de commencer à laisser aller ce que je ne pouvais extérioriser que dans la violence et dans l’acharnement. La pointe de mon épée s’arrêta net à environ quelques centimètres de son visage, qui ne devait pas dépasser le mètre vingt. C’était une petite fille, pâle et par les règles du jeu rendue intouchable.
-Tes parents sont là ?
Ma voix était méconnaissable, las mais étrangement douce.
Je n’y prêtai pas plus longtemps attention et la bousculant négligemment, ouvris la porte plus grand pour regarder à l’intérieur s’il y avait encore âme à atteindre en ces lieux. Je ne trouvai que des gens insignifiants et déjà désaturés.
Je poursuivis alors encore ma course dans rue jusqu’à atteindre le circuit du tram. Le transport était justement renversé et devait servir de rempart à l’envahisseur eu vu du nombre d’impact de balles. Je me glissai rapidement derrière à la recherche d’un semblant de combattant. Toujours personne.
J’entendis alors derrière moi quelqu’un m’appeler ou en tout cas faire mention de mon nom.
-Mais attends, c’est pas la Maréchale du Château de la Bête ?
Je croisai le regard de deux gardes noires —ils en avaient l’habit en tout cas. Ils semblèrent
hésiter quelques instants avant de prendre la seule décision qui s’imposait dans ce climat. Quelle qu’ait été la nature de leurs scrupules : hiérarchie ou manque de force, je ne leur laissai pas le temps de tergiverser. J’étais prête à distribuer les éliminations à qui voudrait.
En quelques fractions de secondes, ils étaient à ma portée. Je tranchai la gorge du premier sous le regard effaré du deuxième. L’entaille ne fut volontairement pas assez importante pour l’éliminer immédiatement. Il dut attendre quelques dix secondes pour voir son calvaire prendre fin.
L’autre reçut par la grâce de mon revers le pommeau de mon épée dans le ventre. J’entendis son souffle se couper puis son grognement, comme s’il s’apprêtait à vomir. Il se plia de douleur. Je donnai un coup de pied dans sa jambe. Il tomba à terre. J’écrasai son genou avec véhémence ; il hurla, me suppliant de l’achever aussitôt, arguant que ce n’était pas nécessaire, que seule l’élimination importait.
-Ton élimination ne m’apportera rien qui compte vraiment.
Il attrapa son fusil tombé non loin, je le saisis à temps et forçai le canon pour qu’il se dirige ailleurs que dans mon sens.. Je poussai si fort sur l’arme que j’entendis ses articulations craquer. Au bout d’un moment j’envoyai l’arme voler à plusieurs mètres de là. N’importe qui assistant à cette scène se serait demandé à quoi je perdais mon temps.
Je lui infligeai alors un coup, puis un autre, assise sur son torse, jusqu’à ce qu’il perde conscience. Les coups s’enchainaient, il devint méconnaissable, jusqu’à ce que le jeu détermine que j’en avais assez fait, trop fait. C’était pourtant loin d’être assez. Je ne me sentais pas mieux. Les seuls instants supportables avaient été quand j’avais senti les propres limites de mon corps et que mes poings s’endolorissaient au contact d’une fracture d’os ou de dents, lentement mais sûrement. Je fixai mes mains contusionnées, cela pouvait m’apaiser un instant.