Le fauve halète, sa fourrure en fume presque sous ses efforts. Ça ne s’arrête donc jamais ?

Le ronso commence à sérieusement reconsidérer sa décision. Il c’était dit que rester au château serait une solution plus adéquat vis-à-vis de son titre. Quel apprentis serait-il s’il n’essayait pas un minimum de remettre de l’ordre dans ce château ?

Et pourtant, du début de la nuit jusqu’à aujourd’hui, il n’avait que très peu put se reposer. Les combats c’étaient enchaîné dans la salle du trône, et aspirants, templiers, et paladin ne semble pas décider à abandonner.

Est-ce là les conséquences des derniers entraînements de l’infanterie ? Les autres groupes galèrent-ils aussi ? Cette simple pensée le terrorise. Il se revoit à la Costa Del Sol, lorsque l’une de ses priorités était l’image du Sanctum, et des croyants de la dame.

Et si, et si seul le domaine enchanté est dans un état aussi déplorable de chaos ? Terrifiant. Sont-ils plus ordonnés ailleurs ? Si c’est le cas, mais à quoi est-ce qu’ils ressemblent au juste ? Cette armée, ce Sanctum, qui n’est pas capable de tenir en rangs ses soldats dès qu’un homme jaune plastique se prononce ? Ridicule, tout sobrement ridicule.

L’œil unique du fauve se pose sur ses alentours. Il est dans une des rares salles d’études du château, au troisième étage côté aile est. Quelques pupitres ornent encore le centre, tandis que des liasses de papiers font office de tapis improvisé. Les traces du conflit sont présentes jusqu’ici, en témoigne les quelques traces de brûlures sur les murs. Quelle idée de donner des cours de magie aux aspirants… Bryke ne peut s’empêcher un grognement. La magie est quelque chose de sacré, divin même. L’user ici, contre des frères d’armes ? Révoltant !

Le fauve, toujours démuni de son armure, redresse sa lame plus près de son champ de vision. Elle commence déjà à montrer des signes d’usures. Par la dame de la montagne, elle n’est clairement pas faite pour enchaîner les escarmouches.

Que faire…

La situation au château ne semble pas s’améliorer, et Bryke ne pourra pas se battre éternellement. Plus encore, il a bien noté qu’en ce deuxième jour, l’abondance de soldats ternes et dénués de couleur c’est laissé entrevoir. Tôt ou tard, la situation va revenir dans l’ordre.

Un bout d’instinct du fauve lui souffle de laisser tomber. Cela n’en vaut pas la peine, c’est futile, et plus il restera au château, plus vite tout redeviendra à la normal. Mais autre chose s’immisce dans ses pensées. Quelque chose de bien plus orgueilleux, de plus… humain en quelque sorte.

Cela fait quelques années désormais qu’il est au Sanctum. Et il est toujours aspirant. N’est-ce pas le moment de faire sa preuve une bonne fois pour toute. Après tout, s’il parvient à se hisser à la première place, il ne pourra que faire parler de lui. L’importance de faire ses preuves lorsqu’on est un fauve… Non, mieux. Montrer combien lui, fier représentant du peuple ronso, est un atout que le Sanctum ne semble pas comprendre.

L’orgueil réveille en lui des pulsions, des souvenirs. Ce combat contre Cassandra, ce cours de magie devant Fiathen. Ce besoin de se prouver, de montrer qu’il fait partie de la race supérieure. Celle qu’on lui répète toujours depuis enfant, avoir été créée pour protéger Etro, la dame de la montagne.

Le ronso se dirige d’un pas lent vers l’une des fenêtres. Les vitraux brisés laissent entrevoir par-delà leurs dessins. La bataille semble continuer dans le cloître du château. L’œil unique du fauve se plisse un instant devant le chaos ambiant, perdu dans ses pensées.

Il commence à envisager la récompense. Ce que le bonhomme jaune prétend, les récompenses qu’il offre ? Il s’en fiche. Seul lui intéresse une seule chose désormais. Réussir, et annoncer à tous que Bryke Ronso, prêtre-guerrier de Rai, a réussi à tenir. Voilà que lui vient le goût du jeu, tandis que ses babines commencent à s’entrouvrir brièvement.

Réussir à tenir oui, en voilà un défi. Il ne pourra pas affronter éternellement, c’est une évidence. Et tôt ou tard, surement que les combattants les plus puissants partiront à la recherche des autres. Fabrizio, Cassandra...

Il est un fauve, un prédateur. Et il est hors de question qu’il ne soit une proie. Si des combattants doivent venir le défier. Ce sera sur son terrain de chasse, sur son domaine.

Son œil se concentre un instant sur les montagnes au loin, bien au loin. Elles sont encore enneigées depuis l’épisode hivernale, l’attitude est insuffisante mais ça fera l'affaire. Et bien que ce ne soit pas le mont Gagazet, il s’y sentira comme tel.

Le plan commence à s’établir, à mesure que son regard remonte. D’abord, traverser le château, puis la ville, puis la campagne. Atteindre les montagnes, grimper, construire sa tanière. Faire du repérage, prendre connaissance de son territoire.

Et après…

Quiconque viendra sur son territoire… En garde.

Le visage pourtant d'habitude inexpressif du fauve se tord dans un rictus de crocs.

Ce soir, Bryke Ronso prépare la chasse...