Ils bourdonnaient et fusaient, s’activaient et s’excitaient. Trop de bruit. De sons. De phrases et d’attentions. Il ne savait toutes les attraper. Elles couraient. Couraient et s’échappaient — et lui n’avait que deux jambes, et un seul souffle. Il s’en sentait profondément désavantagé.
Mais où étaient-ils, ceux qui parlaient de s’en aller loin, faire le tour des mondes aux lumières ? Ceux qui s’entretenaient de mille festivals à lanternes ? Ioan avait voulu les suivre, afin de voir ces rues parsemées d’étoiles que l’on pouvait toucher. Il aurait tant aimé en laisser une s’envoler — la guider jusqu’à la Lune et lui tenir compagnie.
C’eut été une agréable attention.
Mais il devait les avoir égaré. Quand ? Il ne le savait trop. L’enfant ralentit le pas. Il oubliait ceux qui criaient, riaient et pleuraient. Il ne pouvait tous les entendre. Aucun ne l’appelait plus qu’un autre. Pourquoi, alors, ferait-il un favori ?
Il laissait ces bruits glisser sur lui, les entendait sans les écouter.
Comme il était plus tranquille de les laisser aller.
Il se sentait plus serein, presque.
Comme si ceux qui s’égosillaient à côté de lui n’étaient plus là. Ce silence, imaginé, l’apaisait.
Alors seulement, il put voir les murs blancs, et les grandes colonnades à la régularité impeccable. Il put marcher le long des lignes des tapis rouges, et saluer les buissons si propres sur eux — si nets, taillés avec une perfection toute aimante. Il y avait de l’agitation ici, une vie fourmillante dans les angles morts de laquelle Ioan vagabondait.
Un enfant sans parent à une journée qui les appelait pourtant, quoiqu’il en fut bien ignorant.
Il finit par s’intéresser à ceux qui marchaient à ses côtés ; aux petites gens et aux grandes, aux créatures bienveillantes à la fourrure fournie et aux dames d’honneur au regard inflexibles, ainsi qu’aux enfants qui suivaient leur sillage, ou précédaient leur marche. Il s’amusait de leur ballet si commun et si décousu. Chaque ensemble avait sa dynamique : sa démarche, son pas, son rythme — une avancée lancinante ou un sautillement inlassable.
Lui, copiait distraitement la chorégraphie des uns avant d’aller à celle des autres, l’œil curieux.
Il changeait de sujet d’attention, une fois encore. Le garçon avait remarqué son pas esseulé, frôlant d’une douceur habituée le dallage d’un couloir jusqu’à ce matin immaculé. Il n’y avait aucun cortège bruyant l’annonçant ou pleurant son départ. Délicate. Elle dégageait la délicatesse d’une fleur, protégée par un sous-bois où nul ne s’aventurait.
L’enfant détaillait son allure. La coordination de ses bras l’occupa bien quelques instants, étonnamment précise et maîtrisée. Quelque chose l’intriguait, dans l’étoffe qui pendait à sa taille et dans les arabesques de ses bottes. Quelque chose de commun, de familier.
Son regard remonta le long de sa nuque, de ses cheveux bleus.
Oh, voilà.
Celle que les poupées essayaient d’imiter.
Il pressa sa main sur la sienne.
Une urgence. Il devait voir son regard.
Mais où étaient-ils, ceux qui parlaient de s’en aller loin, faire le tour des mondes aux lumières ? Ceux qui s’entretenaient de mille festivals à lanternes ? Ioan avait voulu les suivre, afin de voir ces rues parsemées d’étoiles que l’on pouvait toucher. Il aurait tant aimé en laisser une s’envoler — la guider jusqu’à la Lune et lui tenir compagnie.
C’eut été une agréable attention.
Mais il devait les avoir égaré. Quand ? Il ne le savait trop. L’enfant ralentit le pas. Il oubliait ceux qui criaient, riaient et pleuraient. Il ne pouvait tous les entendre. Aucun ne l’appelait plus qu’un autre. Pourquoi, alors, ferait-il un favori ?
Il laissait ces bruits glisser sur lui, les entendait sans les écouter.
Comme il était plus tranquille de les laisser aller.
Il se sentait plus serein, presque.
Comme si ceux qui s’égosillaient à côté de lui n’étaient plus là. Ce silence, imaginé, l’apaisait.
Alors seulement, il put voir les murs blancs, et les grandes colonnades à la régularité impeccable. Il put marcher le long des lignes des tapis rouges, et saluer les buissons si propres sur eux — si nets, taillés avec une perfection toute aimante. Il y avait de l’agitation ici, une vie fourmillante dans les angles morts de laquelle Ioan vagabondait.
Un enfant sans parent à une journée qui les appelait pourtant, quoiqu’il en fut bien ignorant.
Il finit par s’intéresser à ceux qui marchaient à ses côtés ; aux petites gens et aux grandes, aux créatures bienveillantes à la fourrure fournie et aux dames d’honneur au regard inflexibles, ainsi qu’aux enfants qui suivaient leur sillage, ou précédaient leur marche. Il s’amusait de leur ballet si commun et si décousu. Chaque ensemble avait sa dynamique : sa démarche, son pas, son rythme — une avancée lancinante ou un sautillement inlassable.
Lui, copiait distraitement la chorégraphie des uns avant d’aller à celle des autres, l’œil curieux.
Il changeait de sujet d’attention, une fois encore. Le garçon avait remarqué son pas esseulé, frôlant d’une douceur habituée le dallage d’un couloir jusqu’à ce matin immaculé. Il n’y avait aucun cortège bruyant l’annonçant ou pleurant son départ. Délicate. Elle dégageait la délicatesse d’une fleur, protégée par un sous-bois où nul ne s’aventurait.
L’enfant détaillait son allure. La coordination de ses bras l’occupa bien quelques instants, étonnamment précise et maîtrisée. Quelque chose l’intriguait, dans l’étoffe qui pendait à sa taille et dans les arabesques de ses bottes. Quelque chose de commun, de familier.
Son regard remonta le long de sa nuque, de ses cheveux bleus.
Oh, voilà.
Celle que les poupées essayaient d’imiter.
Il pressa sa main sur la sienne.
Une urgence. Il devait voir son regard.