Oh je comprends ce qu’il se passe. Oui alors bon… Non. Ce n’est pas vraiment …. Enfin si mais d’un point de vue… Si on s’attarde sur les détails, la journaliste s’est trompée. Il vaut mieux que j’explique tout.
Comment m’y prendre. D’abord, je dois commencer par le début. Il se trouve que je suis pris d’une fringale. Un petit creux. Je cherche donc où trouver quelques baies. En ce moment c’est la période des grappes de baie de lierre encore, même si en ce mois-ci elles sont vraiment très mûre et un peu amère. Mais on fait avec ce qu’on peut à cette période, les oiseaux nichent et ils font une razzia sur tout ce qui est comestibles pour leurs petits. Etrangement, les humains n’en font rien et ils aiment cette plante en décoration sur les murs de leurs maisons.
Bref, je m’apprête à sortir faire mes petites emplettes, quand je me retrouve agressée par une odeur nauséabonde ! Beurk ! Ça pue les ténèbres ! Ici même dans les locaux de l’Eclaireur ! Alors je commence… par me boucher le nez. Oui bah c’est un réflexe naturel, vous en feriez autant. J’ai comme une envie de vomir. Ensuite, je m’envole à travers les couloirs pour savoir d’où peut venir cette sensation si désagréable ! Je pense à mes collègues, je pense aux innocents...Bon d’accord. En premier lieu, je pense surtout aux petits chatons orphelins que Théobald à récupérer dans un carton dans la cave de l’imprimerie. Mais ce sont aussi des innocents et quelque part des collègues ?
Donc, je guette la présence de la source de ténèbres lorsque j’arrive dans ce large couloir entre le plateau de tournage et le bureau de la rédaction. La lumière du néon au-dessus de la porte est allumée. Une émission est donc enregistrée, ce qui explique que personne ne fait les cents pas ici contrairement à d’habitude. Une véritable fourmilière ses bureaux ! Il n’y a que dans ces moment-là que je ne dois pas slalomer entre les talons et les talonnettes.
Il n’y a juste qu’un petit tout petit bonhomme en complet veston noir. Je vois qu’il tremble debout devant le distributeur. Il doit être terrorisé ! Il a peut-être vu la source de cette odeur nauséabonde. Il faut que je le rassure. Que je lui fasse comprendre que je suis là pour l’aider, pour trouver ces ténèbres et … et quoi en fait ? Qu’est-ce que je vais bien pouvoir faire moi, toute petite fée hein ? D’accord j’ai pas encore réfléchi au plan. Je le ferai quand je saurai à quoi j’ai à faire, non ?
Je contourne mon petit bonhomme, parceque sinon il ne va pas me repérer et il ne comprendra pas ce que je veux lui expliquer. Et là, je sursaute ! Je dois m’enfuir ! Je me cogne en reculant alors que mes ailes battent plus vite. Une fois, deux fois, trois fois. AH ! La vitre du distributeur ! C’est pour ça que je ne voyais pas ce qui m’empêchait de passer… Je m’envole plus haut, en haut de l’appareil, surplombant le visage horriblement souriant de cette créature sans-cœur, qui me fixe, et qui ricane comme s’il venait d’outretombe… J’en ai le sang glacé. Il aurait pu me gober tout cru ! Est-ce qu’un sourire peut être horriblement… souriant ? Il a un visage de clown. Je n’en ai jamais vu aucun qui me fasse aussi peur. Cette fois c’est moi qui tremble. Comme une feuille séchée devant un ventilateur ! Je dois appeler à l’aide. Mais qui ?
Ses jambes sont comme deux ballons de baudruches qu’il insinue l’une après l’autre par la fente en bas de l’appareil. Oui ! Celle par laquelle on récupère son achat ! Mais … qu’est-ce qu’il fait ? Il fait glisser son torse également, toujours en me scrutant avec son terrible visage rieur. Est-ce qu’il a le droit de faire ça ? Non, bien sûr que non ! C’est un sans-cœur !
Crapaud et poussière de fée ! Sa tête vient de tomber ! Quelle horreur ! Elle s’est détachée alors qu’il essayait de la faire rentrer mais la fente est trop petite ! Par instinct, je me suis rapprochée. J’ai le cœur qui bat la chamade au rythme de celui d’une souris effrayée.
Puis j’entends son rire glaçant, crissant. Juste étouffé par la vitre du distributeur. Je vois son visage souriant là derrière. Le rustre ! Il se moque de moi en plus ! Dire que j’ai failli essayer de l’aider quand je l’ai vu perdre la tête ! Je fronce les sourcils, je gonfle les joues et je mets mes poings sur mes hanches.
Lui ne réagit qu’en riant de plus belle. Il se faufile entre les friandises et les gateaux, les bouteilles et les sandwichs, comme un serpent ballonné, ou un ballon serpentueux. Mais ça ne va pas se passer comme ça ! Il est pris au piège. Et malgré tout… il reste un dangereux être des ténèbres. Et si je ne fais rien et que les humains reviennent dans le couloir ? C’est un sans-cœur… Ils mangent les cœurs et les bébés, et les cœurs des bébés ! Même des chatons orphelins !
Du calme, du calme, rappelle-toi de tes cours Garance. D’accord, j’écoutais pas souvent, mais ils nous ont répété suffisamment souvent que la lumière affaiblissait les ténèbres… Est-ce qu’il en disparaitra ?
J’hésite un peu quand même. Je ne suis pas du genre à me lancer dans un conflit direct. Et puis, où est ma baguette ?! Je ne peux pas l’attaquer sans ! Je cherche, je cherche au-dessus, derrière, devant le distributeur alors qu’il me nargue avec ses rires et ses mouvements sinueux entre les rangées de nourriture. Je le regarde apeurée. J’ai un doute… Est-cequ’il… Non... Il ne pourrait pas la manipuler……………. Si ? J’en ai un frisson dans le dos.
Ah ! Non ! Ce n’était pas un frisson ! Enfin si mais ... Enfin je retrouve ma baguette dans mon dos. Comment a-t-ele fait pour se réfugier là ?! Mystère. Bon maintenant que je suis armée. A nous deux être des ténèbres !
…
…
Je brandis ma baguette.
Je suis sensé charger non ?
Bon allez… pour les chatons orphelins. Enfin et les autres hein bien sur.
Bien sur.
Donc je rentre dans le distributeur, par la fente en bas, tout comme il l’a fait. Pour moi ça reste plus facile. Du moins une fois que je réussis à pousser le rabat. C’est qu’ il est plus lourd qu’il n’en a l’air !
Donc je disais. A nous deux !
…
… Je n’arrive pas à me motiver à charger parceque bon j’ai peur. Je ne veux pas qu’il m’attrape, il va me froisser les ailes. Ou me manger ! Non Non, pis bon… Je suis bien là en bas, il suffit… suffit… que je lui jette un sort de lumière ! Voilà ! Une onde de lumière. Je dresse ma baguette, je mobilise ma magie… L’endroit est exiguë, il ne devrait pas pouvoir y réchapper. La vague de lumière le touche.
Il hurle d’un cri perçant ! Il gigote et se faufile comme un serpent !
Au secours ! J’ai peur ! Lumière ! Lumière ! Va-t-en ! J’essaye de me protéger, je lance encore et encore mon sort de lumière pour l’éloigner de moi ! Une fois, deux fois !
Plus je lance de flashs lumineux, plus il crisse, il hurle, il bouge, il griffe. Et plus j’ai peur. Alors je lance encore des sorts de lumière.
Jusqu’à ce que je sente quelque chose me frôler. Je m’éloigne rapidement en hurlant. C’était… un bonbon ? Je rouvre les yeux. Parceque…. Oui je les ai fermés en cours de l’histoire. Son sourire ne l’a pas quitté mais il semble encore plus crisper qu’au début. Je le vois qui griffe et déchire les paquets de nourriture. Le bas en bas est plein de bonbons dragéifiés coloré comme un arc-en-ciel. Je ….
Je ne comprends plus rien. Je suis perplexe. Pourquoi il n’attaque pas ?
Une fois à cours de bonbons, il porte ses griffes sur les canettes. De soda.
Pcht. Pcht. Il arrive à en ouvrir plusieurs et …….. Il se transforme en petit poisson, encore plus petit que moi glissant, disparaissant dans la rivière de soda qui recouvre les bonbons dragéifié au fond du distributeur…………..
Pssssccchhhhhhhhhh….
Ça mousse
Beaucoup…. Vite ! Trop vite !!!! Au secours !!! Je me recroqueville sur moi-même et forme une sphère de lumière magique autour de moi pour me protéger. Je protège surtout mes ailes, il ne faut AB-SO-LU-MENT pas qu’elles soient mouillées !
Le distributeur est submergé par les eaux noires et mousseuses, collantes comme la mélasse, puis d’un coup… Je me sens tomber, emportée par la pression liquide qui se déverse sur le sol du couloir.
J’entends un hurlement féminin en fond sonore. Moi j’ai la tête qui tourne alors que ma boule glisse au sol dans tous les sens.
Lorsque je reprends un peu composition, j’entends dans un bureau, une discussion passionnée concernant un distributeur automatique possédé.
Comment je vais leur expliquer tout ça moi ?... Je devrais peut-être le dessiner ? En tout cas... D’une certaine façon… J’ai réussi à l’exorciser ce distributeur… non ? Je devrais peut-être me contenter de leur écrire cette version sans plus de détails.