Une... Une keyblade ?!

À l’heure où les éoliennes brillaient aux côtés des nuages, lorsque la nuit nimbait le monde que la rêveuse s’inquiétait à quitter, cette dernière appréciait la position de son lieu d’observation avant d’avoir à l’abandonner.

L’aplat à ses épaules, semblable au linceul de la lune, s’immobilisait en une fresque en harmonie avec sa respiration.

Un calme, doux, pareil à la brise guidant les mélodies dans les ruelles de San Fransokyo. Elle ignorait celle-ci pour se connecter sur ce que sa paire d’écouteurs avait à lui offrir. Un spectacle nocturne, entendu par ceux exprimant le désir à le suivre, combien étaient-ils à fixer les écrans s’animant au plus haut des cieux.

« A votre avis, ils ont volé quoi ? Indice : c’était pas un percolateur… »
Irelia invitait l’amusement à son visage, brièvement, guidant ensuite celui-ci dans l’expression solennelle dans laquelle elle s’était enfermée. Aujourd’hui, à l’écouter déblatérer sans cesse, l’adolescente comprenait ce que les gens de la ville pouvaient bien lui trouver. D.Va jouait de ce jeu, orchestrant sa chorégraphie à la perfection, la rêveuse n’avait aucune illusion face la popularité d’une telle femme.

À mesure des heures défilant, la danseuse doutait quant à la liste des attraits de l’ambassadrice. Cesserait-elle un jour de grandir.

« Allez. Petite pause pour… Une énorme annonce. »
Arquant jusqu’à son sourcil, Irelia ramenait sa couverture aux épaules et balançait ses pieds dans le vide. Piquée de curiosité. Les iris de la danseuse se rangeaient à observer le reflet de D.Va que son ballon offrait au plus grand nombre.

« Allez, dites-moi ce que vous en pensez, le chat ! »
Elle dégageait son portable des mains, impassible devant le message que l’ambassadrice venait de lui offrir, ignorant ce qu’elle devait y penser. Elles avaient le point commun de frotter les mêmes rampes et elles se guidaient vers le même spectacle. Ce qui faisait germer l’idée que tout ceci n’était qu’une supercherie servant à gonfler le chiffre grossissant à son écran. Le chat défilait à son écran, multipliant les questions et réaction devant cette annonce dont la rêveuse en comprenait qu’une faible portion.

De quoi parlait-elle donc. L’esprit embrumé par la fatigue et l’incompréhension, elle en tirait la conclusion que porteur et maître n’avait que peu d’intérêt à ses yeux. Elle l’imaginait semblable à une mode, un instant oublié et délaissé une fois qu’une saison sera passée.

— D.Va avec une keyblade ?! Ce serait trop cool et c’est certain que son porte-clé sera un lapin !
— Avec ça, plus besoin du gros trousseau qui traîne dans la poche #idea #flemme
— J’te jure, Di, j’vais devenir fou à te voir raconter ça. Tu partages les photos ?!
— Roxas ! Pourquoi tu contacts pas Roxas ! C’est ton sponsor, il te l’offre avec une seconde paire.
Une pointe perça les traits d’Irelia, rien que le calme de cette nuit ne pouvait troubler à la différence qu’un agacement se profilait.

D.Va ne parlait plus, pour le moment, patientant avant de récolter ses réponses.

Dégageant la seconde main de sa couverture, la rêveuse agrippait son téléphone et orchestrait le ballet de ses doigts. Il ne lui manquait qu’une excuse et une idée se profilait dans les coulisses de ses pensées. Concluant le message, elle connecta son profil et valida son pseudo pour poster son message.

IrAli17 : C’est quoi le délire ? Pourquoi accorder vingt minutes à un gars de la keyblade alors que nous n’avons aucune rencontre abonné. L’université est pas pour tout le monde et j’dois pas être la seule à vouloir te défier à l’arcade du centre-ville. #gaming #duel #privilégié
L’iris vers le dirigeable, elle attendait une réaction, que ce message ne s’évanouisse pas dans les nuages.

Un regard se perdait et s’envolait au plus près des cieux, bordant les nuages et la nébuleuse de l’infini. Irelia abandonna le chat de D.Va, laissant les écouteurs à ses oreilles et l’effet que ce message venait de perpétrer. Agacée, épuisée, laissant s’échapper son empathie dans un soupire. La rêveuse entama une seconde phrase, allant à s’en mordre les lèvres en lisant et analysant sa seconde intervention.

IrAli17 : C’est juste pour ceux qui n’ont pas le moyen de se rendre jusqu’à l’université, peut-être ?
L’écran de son téléphone s’illumina de blanc, éclairant les traits de la Danseuse avant que l’application confirme l’envoi de sa participation. Suite à cela, d’un bond, elle quittait son poste d’observation en trainant sa couverture jusqu’au moelleux de son lit. Après cette démonstration de la part de D.Va, le son et les paroles du chat l’accompagneront jusqu’aux songes du lendemain.

D’un coup d’oeil, fixant le cadre de la fenêtre depuis sa nouvelle position, elle se rendait dorénavant compte que l’écran du dirigeable perçait à l’arcade.

Irelia grogna, se tournait pour faire dos à la fenêtre et agripper la couverture à s’en couvrir l’entièreté du corps. À l’abri de son cocon, l’écran comme source unique de lumière, elle augmentait le son de la voix de la diva en attente d’une réponse. L’impatience la guidait déjà, l’amenant à son clavier virtuel et orchestrant une mélopée du bout des doigts.

IrAli17 : Tu veux faire plus ? Pourquoi tu ne proposes pas une rencontre dans la banlieue de la ville. Tu donnes une date, une heure et tu retrouves ceux de ta communauté qui sont incapables de faire le trajet jusqu’à l’université. #simplicité
Elle en venait à prendre une courte inspiration, réfléchissant, pesant le pour et le contre de son dernier message. C’était demain ou jamais, à moins qu’elle tienne à rompre cette promesse tenue.

IrAli17 : Du style, demain. Ainsi, tu prouves aux banlieusards qui est la reine de l’arcade.
Voici que la rêveuse s’imaginait à ne parler qu’à D.Va, ignorant les occupants de la discussion et espérant que sa discussion à sens unique soit perçue par la streameuse. Elle qui avait déjà remarqué son passage, voici qu’elle s’apprêtait à retirer ses messages pour filtrer au travers de la communauté.

Une dernière soirée, prisonnière à son lit à l’attente d’une réaction. La Danseuse ne pouvait imaginer mieux.

Dans un grognement, la rêveuse dégageait sa tête de la couverture et s’asseyait jambes croisées sur son lit. Suivit d’un revers de la main, elle dégageait sa couverture au pied de son lit, cachant difficilement son agacement alors que ses deux iris miroitaient à la vue de son écran de portable.

Inlassablement, elle attrapait et écartait les icônes de discussion à un coin de son écran.

Voici plus d’une paire de minutes que la communauté de D.Va prenait plaisir à la harceler en message privé, imitant les paroles de la streameuse et agrémentant le plus subtil des messages d’une touche bien personnelle. L’histoire la menant jusqu’à l’agacement. Le clavier virtuel étant devenu inaccessible par la seule force de quelques viewers, Irelia ne parvenait pas, avec ou sans son jeu de doigt, à conclure cette discussion par l'ultime provocation.

FemininSingulider : Un vrai gamin, le genre qui se croit malin en venant polluer les streams avec ses idées à la con.
Roboto : T’étais vraiment obligé d’ouvrir ta gueule ? On passait un bon moment avant que tu viennes faire chier avec tes histoires. Si t’es pas content, c’est pas son problème.
MaXpAiN : Si j’étais à ta place, j’irais voir ailleurs à moins que tu veuilles devenir l’ennemi public d’Illusiopolis. Ici, j’connais du beau monde qui saura te retrouver dans ta banlieue de riche.
Xlltro : Prends le vélo de ton grand-père, #simplicité de mes couilles.
Maladivement, elle râla jusqu’à parvenir à compléter son message. La rêveuse soufflait finalement, se jetant dans son lit, bras croisés avec son portable dans le vide.

IrAli17 : Pour une pro-gameuse, t’es plutôt lente à la détente.
Lentement, pareil à un effort insurmontable, ses paupières se fermaient sous la satisfaction d’avoir accompli sa tâche. Cela, jusqu’à ce que le vibreur de son téléphone ne s’agit au creux de sa main. Lasse, elle tournait le regard pour distinguer l’icône l’invitant à décrocher ainsi qu’une photo prise la veille. Fatiguée, elle guidait son pouce jusqu’au vert du combiné pour décrocher.

— Oui.
— Irelia, tu es complètement folle !
— Moi ça va pas trop mal, et toi Yukiiro ?
— Ne commence pas, pourquoi tu fais ça.
La Danseuse se retournait jusqu’à se retrouver sur son côté, fixant l’écran alors que ses jambes se resserraient contre elle.

— Au cas où, je pars demain. Tu penses que j’avais le temps d’aller à l’une de ses permanences sans rater le décollage ? Il a fallut que j’improvise. Tu regardes le stream ?
— Naomi m’a envoyée un message.
— Et ?
— La moitié de la ville va te détester avec ça, tu t’en rends compte.
— Quelle importance, j’serais loin dans deux jours.
Un soupire qu’elle ressentait dans la voix robotisée de son ami. Alors qu’elle, par le bleu de la nuit, ne parvenait simplement pas à s’énerver.

— Tu as eu une réponse ?
— Pas encore.
— Ça ira ?
— Dès que j’aurais coupé mon portable, il n’arrête pas de vibrer depuis tantôt.
— J’imagine… Tu me tiens au courant ?
— Oui. À demain.
D’une nouvelle pression de son pouce, c’était l’icône de rouge vêtu qu’elle pressait pour conclure l’appel et elle accordait ensuite un regard au chat de D.Va. Impatiente de découvrir si la provocation avait eu l’effet escompté sur l’esprit de la streameuse. Dans le cas contraire il lui suffisait d’ajouter une touche d’insolence pour conclure cette soirée.

IrAli17 : Demain ? Tu viens avec ta communauté où tu feras le chemin en solitaire.

Un iris distrait sur l’écran de son portable, un haussement de sourcils se concluant pour une attention particulière aux lattes de son plafond. La rêveuse abandonna la source du conflit à la table de chevet, diffusant une unique promesse avant de disparaître au mate de la surface.

— Vous avez été banni de façon permanente de ce canal de discussion
Amorphe au creux de son lit, l’adolescente s’étirait lentement en orchestrant à cette gymnastique. Pieds et mains en dehors de l’encadrement de bois, elle terminait en se recroquevillant et plongeant son regard au duveteux d’un coussin. Si calme. Caresse d’un songe, elle amenait sa main et frottait le haut de sa nuque dans la certitude d’une nuit loin des tracas de l’adoration d’une garce.

Un nouvel éclat, l’illusion d’une lumière éclairant la pièce sous le couvert d’une vibration.

Grognant, se retournant, tendant un bras en quête de silence. Irelia agrippa son téléphone et le portait à son oreille en omettant d’ouvrir ses paupières.

— C’est foutu.
— Après ton entrée en scène, rien d’étonnant.
— Désolé ?
Yukiiro s’exaspérait de l’autre côté de la ligne, l’adolescente l’imaginait sans mal au rythme de la saturation.

— Écoute…
L’envie de bien faire, le besoin de s’y rattacher, un acte symbolique pour celui-ci.

— Mon vaisseau décolle un peu avant seize heures, tu peux demander à ton frère pour prendre son hoverboard. Avec un peu de chance, nous aurons le temps de nous rendre à sa permanence et revenir.
— Tu ferais ça ?
— Oui.
Détachant ce mot dans un soupir, elle s’affaissait sur elle-même en le prononçant avant d’ouvrir de nouveau ses paupières. Deux iris divergents, fixant le creux de sa main en l’attente d’une réaction.

— Cool ! Demain, j’viens te chercher à midi, soit prête.
Les tonalités se suivaient alors, l’une à l’autre, jusqu’à ce l’écran redevienne mate. Une douce amertume, guidé par la lassitude, se glissait sur les traits de l’adolescente. Épuisée, elle déposait son téléphone sur sa table de chevet et reprenait sa position. Lentement, elle guidait l’une de ses mains à ses tresses et enroulait l’un de ses doigts dans ceux-ci. Orchestrant ainsi le ballet silencieux, ses iris se baladaient jusqu’à l’encadrement de sa fenêtre à la recherche de l’astre nacré. Au creux de sa paume, l’encre noire dessinait son jumeau. Dans l’empressement naissant, elle tournait et se retournait au creux de son lit.

Une dernière nuit, prisonnière de ses pensées. la Danseuse ne pouvait imaginer mieux.