J’pense que, et depuis longtemps, j’ai jamais eu autant d’mal à trouver l’sommeil. Alors que plus tôt dans la journée, j’me suis fait péter l’bide avec un tonnelet de bière complet.
Eh, j’ai p’tet abusé en parlant de ça.
Enfin, c’pas ça l’problème. Il y a déjà la migraine qui pointe et la langue qui s’retrouve aussi pâteuse qu’une préparation de brioche. C’est ni la première et encore moins l’dernière.
Non, là ? La journée avec Aqua et Fabrizi vient d’ce terminer et j’vais pas avoir le courage de vous en faire le débriefing. Il n’y a qu’un truc qu’il faut en retenir. C’est que, moi, j’peux plus continuer à vivre ma vie. Pas dans l’sens où j’dois y mettre fin ! Loin de là. Plutôt que, j’peux plus être le bon voisin qui accepter de chasser les taupes qui commence à faire des trous de l’autre côté de la haie. Ouais, ça n’veut rien dire. Plutôt que, j’peux pas continuer à faire semblant de rien et vivre avec des oeillères.
J’crois que c’est mon plus grand défaut, avec l’alcoolisme, c’est d’attendre que l’souci soit devant mes yeux pour chercher à y remédier.
Aqua vient d’me l’dire, Fabrizio vient d’me le prouver, j’suis plus un simple Maître Brasseur qui vit aux rythmes des saisons et de ses récoltes. Aujourd’hui ? J’suis un porteur de la keyblade ! Et comme chaque titre, il y a sont lots de responsabilité qui l’accompagne. De plus, j’suis presque persuadé qu’il n’y avait aucun chapitre sur l’idée de rester au fond d’une cave en attendant que l’histoire se passe. Il n’y avait d’ailleurs aucunes mentions à l’alcool. Donc, autant dire que mon activité principale risquait de passer au second plan.
Dans l’hypothèse où j’me casse pas de cet endroit en courant aussi vite que possible.
Bref, j’me retourne encore dans mon lit pour fixer l’plafond. Il est pas mal ce manoir. Même si j’arrive pas à m’y endormir.
— Bon, bon… Bon…
Si j’arrive pas à m’endormir, autant me lever. Hop, on quitte la couverture et on s’balade dans la pièce.
Où j’devrais dire ma pièce. Fabrizio à la sienne à côté et Aqua doit avoir une chambre à elle plus loin. Aussi simple que ça. Nous avons quitté la montagne et nous avons eu droit à une chambre rien qu’à nous. Il n’y a que mon balluchon pour l’instant, mais j’suis persuadé que cet endroit me ressemblera dans un avenir proche. Un mois ou deux, le temps d’emmener des affaires. Il y a quand même un lit, un bureau et une bibliothèque remplie de vieux livres. Surement un cadeau de mon maître ! Sauf que là, j’ai pas envie de lire. La réponse que j’recherche ne dois pas trainer ici.
Bref, qu’est-ce que j’vais bien pouvoir y faire.
Mes fesses se posent sur la chaise et j’fixe l’bureau en face de moi et j’me pose la question.
Qu’est-ce que j’vais décider de faire ?
Des années durant, j’ai vécu au chaud dans ma brasserie au Consulat. Certes, j’ai eu mes moments de gloire en défendant la veuve et l’orphelin, mais ça n’a jamais été très loin. Pendant que la Coalition Noire avançait ? Moi ? C’était l’année de la cuvée spéciale du Consulat, disponible uniquement au Jardin Radieux. Autant vous avouez qu’à l’heure actuelle, j’me demande si mon titre est mérité. Fabrizio ? Lui, il a combattu et il a surement défendu plus de personne dans sa vie que moi dans la mienne. Alors que j’suis quasiment l’doyen du manoir ! Maître Aqua ? Autant vous dire que c’est la fine fleur, l’ingrédient de choix ou encore la perle qui a défendu la plupart des mondes.
Ouais, c’est un peu moi l’canard boiteux d’la maison.
Même si j’le laisse pas transparaître devant le maître, ça m’ronge. Ici ? J’me sens pas à ma place, j’ai l’impression d’être faux. Même si j’sais que, s’il y a un souci, j’serais là. Est-ce que j’peux continuer comme ça ? Non. j’peux pas rester dans l’ombre et j’sais bien que c’est en restant au Consulat que ça va s’améliorer.
C’est sale de faire ça, mais tant que j’ai les idées claires, j’vais le faire.
Une plume, du papier et une bougie pour écrire correctement. Maintenant ? On s’occupe de la lettre de démission.
À mes amis consuls.
Combien d’années ? Bientôt six ans que j’étais avec vous, au jour le jour, à vivre au Jardin Radieux et à vivre de ma passion. Aujourd’hui encore, je me rappel de mes premiers pas et de la découverte de la ville.
Grâce au Consulat ? J’estime qu’il s’agit du plus bel endroit du Consulat.
Enfin, vous me connaissez tous et j’pense bien connaître quelques uns d’entre-vous. Des années durants, des années à brasser ma bière et à aider le Consulat. Pourquoi est-ce que j’dis aider ? Pendant des années, j’ai été avec vous et j’faisais avancer le groupe de tout mon coeur. Il me serait impossible de faire tenir sur ce papier tout ce que j’ai vécu avec… grâce à vous. Oui, c’était ma plus belle aventure.
Cependant, d’autres aventures m’attendent et je ne pourrais continuer celles-ci avec le Consulat.
Pour cela, j’annonce ma démission en tant qu’ambassadeur du Moulin Rouge et que consul de la brasserie. Ce n’est pas de bon coeur que j’annonce cela, sauf qu’il le faut. Il me sera impossible de concilier cette nouvelle vie avec mes obligations de consul.
Voilà, ce n’est pas facile à faire. Pourtant, c’est comme ça ! J’espère réellement que vous ne m’en voudrez pas trop. Cependant, soyez tranquille, les filles du Moulin Rouge peuvent faire tourner la machine et vous aurez quelques réserves de boissons à ma brasserie.
Attention juste à tout fermer et à bien nettoyer entre chaque utilisation à l’exception des futs en chêne.
Mon dernier cadeau reste mon livre de recette, vous le trouverez à la brasserie sous le matelas de mon lit et il y a tout ce que j’ai jamais fait pour le Consulat de consigné à l’intérieur. Les Cités Dorés regorgent de gens talentueux, vous trouverez sans mal une personne pour me remplacer.
Dans l’espoir de vous revoir dans notre futur, au revoir.
Chen Stormstout, ex-Maître Brasseur du Consulat.
Ainsi, la vie du Maître Brasseur du Consulat se conclut. En attendant, j’espère que j’vais pas m’faire traquer par mon ancien patron ou les autres. Aujourd’hui, j’peux me plonger à fond dans mon rôle de porteur de la keyblade. Vivement d’savoir ce que l’avenir me réserve aux côtés d’Aqua.