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Nous sommes quatorze ans après les évènements de Kingdom Hearts 2. En tant d’années, les choses ont considérablement changé. Les dangers d’hier sont des soucis bénins aujourd’hui, et au fil du temps, les héros ont surgi de là où on ne les attendait pas. Ce sont les membres de la lumière qui combattent jour après jour contre les ténèbres.

Ce n’est plus une quête solitaire qui ne concerne que certains élus. C’est une guerre de factions. Chaque groupe est terré dans son quartier général, se fait des ennemis comme des alliés. Vivre dehors est devenu trop dangereux. Être seul est suicidaire. A vous de choisir.

La guerre est imminente... chaque camp s'organise avec cette même certitude pour la bataille.

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Zombardiers et cervelles moisies

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Il me caresse la tête. Je rougis. Je crois que j’ai émis un petit piaillement de chauve-souris ravie. Je me sens un peu vidée mais je ne savais pas que c’était à ce point. La sensation de la chaleur de ses mains sur mon crâne m’a fait un bien fou ! J’en souris béatement. C’est réconfortant. Je sens la tension dans mes épaules et mon dos disparaitre. Enfin un peu d’amour dans ce monde de trépassé ! Je ressens comme l’effet d’un baume au cœur. J’en ai presque envie de me frotter à sa main avec le dos rond comme un chat. Mais oh ! Je ne suis pas un animal ! Ressaisis-toi Garance !

Bon je me reconcentre ! Ou en est-on ? Une armée de morts-vivants aux trousses. Un gros macchabée recousu qui dort à quelques mètres. Des ruelles miteuses et poussiéreuses digne d’un labyrinthe dans lequel nous nous sommes enfoncées au hasard…
L’enfant pointe une direction… voyons si je me souviens bien, quand nous étions en l’air par là il y avait… ah oui ! Les lumières ! D’accord, d’accord, bon plan, bonne idée. Gentil garçon.
Uh… Le vampire pointe une autre direction en le tenant par le poignet. Voyons par-là, il y a … vers le ciel chargé lourdement de nuage des … euh… trucs qui bougent… Ça se rassemble… Ce sont encore des os… jusqu’ici ça ne m’étonnes même plus… C’est quand même assez gros. Et crochu. Et griffus. Et ailés. Et avec une gueule pleine de flammes jaunes, oranges et bordés d’un bleu très clair et vif…

Donc je suis quasiment exactement sûre que c’est à peu près spécifiquement le moment de PANIQUER ! FUYONS !



Je tire une fois de plus sur la manche du manteau, épouvantée. Un dragon squelettique nous survole dans notre dédale prêt à nous vomir les flammes des enfers sur le crâne. Je saute de toutes mes griffes sur la main du vampire qui retient le poignet de l’enfant. Je ne lui fais toujours pas confiance ! Lâche-le ! Je crois même que je lui ai mordu le pouce… Bon ce n’est pas très orthodoxe mais je m’excuserai plus tard… s’il y a lieu.

Je sens soudain un mouvement. Le corps de l’enfant s’allège. Moi qui suis agrippée sur son bras aussi. Je vois le vampire qui penche également, dans le même mouvement en miroir. J’entends le cliquetis furieux de casseroles qui se répercutent. L’armure a pris les devants et nous a attraper une fois de plus sous le bras, tous les trois. Enfin les deux sous le bras, moi je suis collée comme une broche ou une sangsue. Je ne compte pas sur le poids total. Au final cette armure noire, je l’aime bien. Il a la réactivité d’un aventurier habitué des problèmes de ce genre !

Il nous sauve la vie assurément encore en nous déplaçant des premières vagues de flammes. L’air a gagner en chaleur digne d’une fournaise et les maisons noircissent encore davantage mais bizarrement, elles ne brûlent pas.

BOOM ! Hic ! Je sursaute en lâchant un cri de souris apeurée. L’armure a enfoncé une porte branlante d’un coup de botte en plein élan et nous a jeté à l’intérieur à la hâte. Il va falloir qu’on reparle de ces manières de brutes ! Nous allons bientôt avoir plus de bleus à cause de nos atterrissages forcés que de par les combats que nous menons ou non. En plus il nous hurle dessus ses ordres !

Pas bouger ! Il revient nous chercher après…. Après quoi ? Il compte vraiment nettoyer ce monde de tous ses monstres à lui seul ???! Mais il est complètement fou !




Qu’est-ce que c’est ?!! Je redresse les oreilles et je tourne la tête. J’entends des bruits de frottement dans le fond de la pièce. Mes yeux s’habituent un peu plus à l’obscurité encore plus grande de cette maison autrefois fermées dans lequel nous avons été forcés de prendre abri.




J’ai les poils du dos qui se hérissent. Je ne suis pas si sûre que nous soyons tant en sécurité ici…. Tout ce monde est complètement aliéné et semble être entièrement voué à vouloir nous dévorer !!! Je n’ai qu’une envie c’est de partir. Je n’ai qu’une deuxième envie c’est de partir vite et loin ! L’angoisse commence à me briser les nerfs, je tremble. Je crois distinguer le bruit de quelque chose trainé sur le sol. Je vois plusieurs paires de reflets rouges dans l’obscurité.


Ma baguette ?!! Vite ! Crapaud et poussière de fée ! Où ais-je encore rangée cette baguette ! Je suis prise de panique et je cherche partout sur le manteau, dans ses plis, ses poches, les dentelles de son jabot.




Je dois me protéger. Je dois LE protéger……. Est-ce que je dois aussi protéger le vampire ? Ah ! Là je la vois au sol ! Je me jette dessus avant même de réaliser que pour cela j’ai dû m’éloigner de mes deux camarades et m’approcher des lueurs carmin.


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Il y avait ce truc que tous les dragons faisaient et qui lui foutait la trouille. Cracher du feu oui, ça ça comptait pas. C'était juste avant, ce grognement qu'ils faisaient quand ils allaient te rôtir. C'était bien décidé, tu n'avais plus qu'à courir te cacher en espérant que ça se passerait bien. Manque de bol ça ne se passait jamais trop bien.

L'avantage c'était que celui-là il était déjà m- non, l'autre aussi c'était un genre de liche. Bon. Fallait pas compter sur ça.

Un dragon vivant c'était trop espérer ?

La petite équipe était en sécurité dans un bâtiment, fallait qu'ils soient assez malins pour ne pas en bouger et tout se passerait bien pour eux. Il le leur avait bien dit et espérait qu'au moins un sur trois comprenne. Il pariait sur le petit vampire. Le manteau avait l'air tétanisé et la chauve-souris accrochée à lui comme une tiquet pleine de trouille.

Dans sa tête, la sacro-sainte prière à Etro. Perclus de petits commentaires. Etro toi qui sait, putain aide moi. Toi qui voit, dis à Aub que je l'aime, mais vraiment.

A ce moment il n'y avait quasiment qu'elle dans son esprit, c'était bête, c'était stupide même mais il n'y pouvait rien. Sa réflexion fut, de toutes manières, coupée net par le sol sur lequel il se jeta, à l'abri d'un jet de flammes. Il y avait un laps de temps entre le grognement de la bestiole et les flammes, il l'avait appris à ses dépends d'ailleurs, quelques années plus tôt et il n'était quand même pas peu fier de pouvoir réutiliser cette connaissance à bon escient.

Mais se planquer n'allait pas suffire. Et c'était pas avec un fléau d'arme dans une main et sa tête dans l'autre qu'il allait réussir. Le soldat était parvenu à un certain équilibre, avec sa tête séparée comme ça de son corps. Il se repérait sans trop prendre de temps – sans trop, mais sans en prendre. Il était toujours trop lent et il commençait à avoir vraiment chaud, pas de la manière qui pouvait le rassurer.

S'il fuyait, il abandonnait les trois autres et ça c'était hors de question. Il était venu ici volontairement ergo il ne se défilerait pas, c'était plus simple qu'un code l'honneur, c'était de la logique.

La vouivre fondit sur son abri, non contente de n'utiliser que ses flammes, elle utilisait aussi une paire de serres acérées pour détruire allègrement ce qui se trouvait entre elle et sa délicieuse proie en conserve. C'était peut-être mieux ainsi car Fabri n'avait pas d'arme à distance et il put enfin commencer à harceler la bestiole de quelques coups francs et sincères de fléau d'arme. Quelques os se brisèrent ; c'était encore mieux que s'il avait eu une épée. Coup de bol, se disait-il. Mais ça pouvait encore durer des heures.

La créature revint à l'attaque, pas assez maligne pour garder ses distances. Fabri s'approcha, sortit de sa planque pour continuer de la mettre en miettes. Mais comme venu de nulle part, ses entrailles commencèrent à bleuir ; elle allait recommencer à cracher du feu. Ce n'était pas pour tout de suite, qu'il la foutrait en miettes.

Qu'à cela ne tienne, il attendrait son heure.


Dernière édition par Fabrizio Valeri le Jeu 16 Mai 2019 - 19:26, édité 1 fois
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Ioan s’approcha d’un pas rapide et léger. Ils n’étaient pas ici chez eux ; ceux qui tenaient cette demeure pour leur n’y laissaient aucun doute. Ils devaient partir ; ce n’était, après tout, pas bien civil de leur part, que d’envahir leur maisonnée.

Le garçon n’avait cependant pas pu se résoudre à attendre que sa petite Dame les rejoigne. Les yeux de leurs hôtes, posés sur elle, lui rappelaient trop la lueur familière de la lanterne sanguine, qu’ils avaient laissé dans leur ancien abri. Ils lui rappelaient trop, bien trop, son plaisir face à la danse macabre du fléau ; son extase, à la vue du sang qui s’écoulait, tombait — reflétait sa lumière. Il ne se sentait guère de laisser la chauve-souris seule. Alors, il s’était approché. Il perçut, parmi les ombres, quelques formes s’animer de gestes silencieux : reculer, d’abord, avant de s’approcher, lentement. Elles lui évoquaient le chat, qui errait près de l’atelier de Maître Patregain, le souffleur de verre auprès de qui il apprenait. C’était un mouvement qu’il l’avait déjà vu adopter, avant qu’il ne croque, de ses petites dents, la main qu’on pouvait bien lui tendre. Il jouait, lui avait-on dit. Etait-ce, alors, que les habitants de cette maison voulaient jouer ? Ioan n’en avait, hélas, pas le temps aujourd’hui — il devait accompagner ses camarades, jusque là où partent les lumières — et quelque chose, dans le regard de ces hôtes, les rendaient bien différents du chat rondelet qu’il avait aimé caresser longuement.

L’enfant s’abaissa, récupérant sa petite Dame d’un geste précis et doux. Son regard parcourut le sol, brièvement : meurtri, et rompu d’entailles profondes. Il ne put retenir une moue désolée. Ioan fit un pas en arrière, revenant aux créatures qui se terraient dans les ombres. Elles bougeaient. Il croyait en voir s’arquer, se cambrer ! Mais surtout, elles le fixaient.

Elles allaient bondir.

Un mouvement de recul. D’incompréhension en incompréhension, chaque rencontre semblait aller pour le pire ! L’enfant ne voyait que leurs yeux : deux orbes sans paupières, éprises d’une flamme éternelle — de colère, de rage. Malgré toute la distance qu’il pouvait ressentir entre lui et ce qui se produisait ici, Ioan sentit sa poitrine se comprimer.

Il entendit — 

— un coup.

Deux.

Trois.

Quatre. Cinq. Six. Sept. Huit. Neuf. Plus !

Il avait promis de la protéger ! Il avait dit qu’il ne pouvait pas laisser quelqu’un faire de mal aux autres. Il sentit l’odeur du houblon. Il se souvenait : l’Homme Puissant, le déterminé.

L’une des créatures s’élança dans leur direction.

Le garçon bascula en arrière, cherchant à l’éviter. Nul ne souffrirait ! Comment ? Il n’avait pas le calme médiateur de son mentor, ni de bouclier, comme l’armure ébène avait su s’en faire un d’une porte.

Il ferma les yeux. Il allait échouer, encore.
Mais rien.

Seul le bruit lourd d’un impact sur le parquet blessé lui parvint. Il devait savoir — alors, il regarda : Ioan observa, surpris, les deux iris brûlants de leur hôte glisser jusqu’au sol, à un mètre de lui.

Le fenêtre terne qui coupait l’enfant de ce monde s’était comme imposée, telle un rempart empêchant aux deux groupes d’entrer en contact. S’élevait, jusqu’au plafond, une épaisse couche de verre bombée — Etait-ce son vieux maître, qui soufflait ses rêves jusque dans ses cauchemars ? Ioan sourit. Avec une telle séparation, personne ne pourrait s’en prendre à un autre. Il se releva rapidement, rejoignant l’homme livide en quelques enjambées. Il percevait, derrière lui, le fracas furieux des créatures sur le verre. Il percevait leur cri aigu. Il ne devait pas se retourner. Il n’avait pu les discerner clairement, ni les saluer comme il se devait. Mais il ne pouvait risquer de nouveaux malentendus, et heurts.

Tout allait vite. Si vite. L’enfant se hâtait. Son camarade ouvrait la porte. Tout se décomposait. Lentement. Si lentement. Ioan entendit le tintement du verre, ses crissements pleureurs comme un râle brisé. Pourquoi avait-il si mal ? Qu’avait manqué le garçon, cette fois encore, que l’on souffre tandis qu’il ne cherchait, en ce monde, que la paix de ceux qu’il croisait ? L’enfant ne pouvait l’ignorer. Il se retourna… et il les vit : les rivières de pleurs qui parcouraient le dôme fissuré — des éclairs, éclatés à même sa surface. Ils s’illuminaient d’amarante, se gorgeaient du sang et des flammes qui brillaient dans les prunelles des créatures rampant sur sa surface lisse. Elles s’y tenaient avec tant de ferveur, tant de persévérance ! Mais ils s’en allaient, allons. L’homme sans reflet, sa petite Dame, lui… Ioan ne savait comment calmer leur colère — et le voile qui le séparait du présent l’empêchait de s’en sentir pleinement désemparé. C’était ainsi, tout simplement. C’était ainsi. Il les voyait. Leurs corps se tordaient. Leurs membres rachitiques, aux articulations désaxées, se prolongeaient en griffes aussi fines et claires que les lames les plus aiguisées. La face écrasée, le crâne dégarni, si ce n’était pour quelques mèches, longues et grasses — le garçon percevait leurs hurlements désespérés, s’échappant de larges gueules, aux crocs puissants et jaunis. Ils partaient. Ils partaient ! Pourquoi partaient-ils ? Devaient-ils partir ?! croyait-il les entendre implorer. Elles criaient, criaient de toutes leurs forces ! Certaines, s’égosillant de plus d’une gorge, bardant leurs corps souples et maigres — d’autres frappant le verre de plus de deux bras, de plus de deux têtes ! Leurs chairs aux teintes cendreuses se déformaient, d’autant de plissures que d’éternités attendues au fond de ce cauchemar. Tout allait vite. Si vite. L’enfant ne les avait observées qu’une seconde ; deux, peut-être. Tout se décomposait. Lentement. Si lentement. Il n’avait pas pu ne pas les regarder. Il n’avait pas pu ne pas marquer chaque visage grotesque, chaque corps déformé, dans son esprit. Il n’avait pas pu ignorer le verre crissant, fissuré et larmoyant.

Son souffle se suspendit. Son corps réagit, avant que son esprit ne saisisse la situation. Ioan précipita sa petite Dame dans les bras de l’homme sans reflet, sans le regarder. Il chercha à le repousser, lui aussi… mais il n’avait pas de force pour l’accompagner.

Il ne parvenait pas à quitter les créatures du regard.

Nul ne souffrirait.

La barrière céda, sanglotant d’autant de larmes que d’éclats.

L’enfant ne voyait que leurs yeux. Il n’y avait que les flammes, que la colère ; prête à se déverser sur lui, le noyer, le consumer, l’emporter ! Il n’y avait qu’elles…

Et toi, tu pars en cendres.

Ioan chercha à reculer. Tout allait vite. Il tituba. Si vite. Il se sentit partir vers l’arrière, attiré vers le sol par une force à laquelle il ne pouvait résister. Son dos rencontra l’encadrement de la porte, qui chercha en vain à le soutenir. L’une de leurs hôtes, la première, la plus rapide, l’avait atteint. Il ne voyait que ses yeux. Il ne voyait que cela. La gorge du garçon étrangla un gémissement peiné : il parvint à s’arracher au regard de la créature, laissant le sien glisser sur ses lèvres inexistantes, et ses dents aiguisées ; sur la seconde gueule qui entaillait l’une de ses épaules, puis… ses mains. Ses longues mains, aux doigts comme des couteaux, enfoncés dans sa chair invisible.

Le manteau se teint de quelques larmes sanglantes.

Tout se décomposait. Lentement.

Ioan avait mal.

Si… lentement.

Il sentait cette douleur gagner son abdomen. Il ne savait dire si elle était forte, ou non. Il ne l’avait jamais ressentie. Jamais.

Il ne parvint pas à crier. Il ne parvint pas à pleurer. La toile qui était tombée, entre lui et le reste, entre lui et les autres, entre lui et ce monde, brouillait ses sens. Il avait mal — mal comment ? Il ne savait pas. Juste mal. Comme des étincelles ; une chaleur douloureuse. Tout était flou. Et lent. Si lent.

Tes doigts s’effilent. Ta peur se dénoue, et ta peine s’oublie.

Si lointain.

Et pourtant.

Il ressentait, encore, la présence fébrile d’un homme sans reflet, et de sa petite Dame.
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- Je suis maudit ou quoi ?!

Récapitulons : en à peine quelques heures, si ce n'est quelques dizaines de minutes, je m'étais aperçu que j'étais devenu un vampire, j'avais rencontré une armée de morts vivants assoiffés de sang ou de cerveaux ou de... Enfin peu importe, mais ils étaient toujours pas repus. Ensuite, il y avait eu ce gros tas complètement éventré avec son horrible crochet... Une putain de vouivre squelettique cracheuse de flammes menaçant de nous incendier - au sens propre - à chaque instant pendant que nous étions dans la bicoque... Et dans celle-ci, maintenant, une assemblée macabre de monstres difformes vaguement humanoïdes au crâne presque dégarni, un regard écarlate complètement dirigé vers nous ne laissant pas planer le doute sur leurs intentions.

La seule personne vaguement fiable dans le groupe, le chevalier sans tête, avait finalement décidé de partir en mission suicide se confronter à la vouivre. Il me fallait donc absolument en profiter pour quitter les lieux sur le champ. Tant pis pour lui et son piteux instinct de préservation. Le manteau et la chauve souris étaient immobilisés face aux nouveaux assaillants qui continuaient de s'approcher lentement. Les poings fermés et les dents serrées, je décidai de gagner du temps par mes propres moyens. Les yeux fusillant du regard les créatures non vivantes, je levai le bras au ciel. Ensuite, je fermai les yeux, me concentrant, rassemblant le flux de ma magie au niveau de la main et...

Une succession d'éclairs commença à tomber aléatoirement autour de moi et à frapper les terribles créatures. Cela me gagnerait une poignée de secondes supplémentaires. Ensuite, je décidai d'empoigner la manche du manteau rougie par ce qui semblait être du sang pour essayer de le tirer vers moi.

- Faut pas rester ici !

Mon regard s'était fugacement dirigé vers lui puis j'avais commencé à fuir. Je devais un peu le tirer, il semblait avoir un peu du mal à suivre ma vitesse de course, mais je l'y contraignais. C'était tant pour son bien que pour le mien. Si le pire venait à arriver, il me suffirait de les abandonner afin de gagner une poignée de secondes pendant qu'ils servaient de pâture aux ennemis. Je me dirigeais toujours vers la lumière, sans regarder autour, sans un regard en arrière. Elle était mon unique espoir de survie.
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Crapaud et poussière de fées ! Vous allez vous arrêtez oui ! Je me précipite juste devant le nez du vampire. Je suis agitée, remontée, je zigzag devant ses yeux comme un moustique agaçant. Il force le jeune manteau à avancer alors qu’il est évident qu’il est blessé ! Il faut le soigner en priorité !

En plus vous abandonnez l’armure noire ? Après tout ce qu’il a fait pour nous ? C’est hors de question ! Pas bouger, il a dit ! Stop ! Je le force à s’arrêter malgré ma toute petite taille et mes difficultés pour rester en vol sur place. Dès qu’il bouge et essaie de me contourner, je me replace  sous ses mirettes rouges peu rassurantes.




Même s’il ne me comprend pas, je dois l’empêcher d’avancer davantage. Et si l’armure gagne son combat titanesque malgré tout et reviens nous chercher ? Il ne nous trouvera pas ! Pire, il se fera attaquer par les monstres informes aux yeux rouges ! Je sais bien que je parais changer d’avis rapidement, j’ai aussi peur d’eux que des monstres autour de nous mais tout de même, l’armure a tout fait pour nous protéger… maladroitement, brutalement, mais toute cette histoire est tellement ahurissante, il a peut être tout aussi peur que nous, il a peut-être simplement perdu ses moyens également, non ?

De toute façon, ma priorité à l’heure actuelle est de soigner les morsures de mon ami de tissu ! Il m’a sauvé de ces horribles déformés et s’est fait agressé ! Vu ce monde, pour le peu que leur morsures soit empoisonnée ou purulentes, je ne serais pas étonnés ! Il faut absolument le traité immédiatement avant qu’il ne soit trop tard….. Et si … et si … il se transformait ? Comme dans ces histoires de loup-garou contaminé par une morsure les soirs de pleine lune ! Ah ! Non Je dois faire quelque chose et vite ! Mais est-ce que ces choses ne nous ont pas suivies ?

Je regarde rapidement dans toutes les directions, mais je ne peux pas perdre de vue le vampire qui pourrait reprendre sa route sans m’écouter, et je dois garder un œil sur l’enfant et sa santé aussi, je dois également trouver une solution ! Il a été méchamment mordue par ces choses, trop pour mes petits sorts de soins.


Ah mais arrêtez ! Je me laisse tomber de quelques centimètres pour éviter la main énervée de notre nouveau guide. Ouf je lutte pour reprendre un peu de stabilité dans mon vol et je le regarde en fronçant fort mes sourcils broussailleux de chauve-souris. Je vais finir par devoir le mordre s’il continue. Une oreille ce serait simple et il ne pourrait pas trop m’en empêcher.





Non, je dois m’efforcer de rester correcte et agréable et bienveillante…. Mais parfois c’est difficile ! Je me repositionne bien devant ses yeux et je lui fais signe de me suivre. Il pensera peut-être que je connais l’endroit et que je veux les guider vers les lumières… Je suis tellement honteuse de devoir lui mentir, en quelque sorte, même si ce n’est pas vraiment le cas. C’est lui qui va comprendre de travers, non ? Je ne suis pas si responsable que ça, non ?

En tout cas, je mène le groupe réduite à travers les ruelles, en essayant … de fuir les cris inhumains des bestioles horribles aux yeux rouges… le bruit métalliques des combats de l’armure contre la wyverne, sans pour autant nous en éloigner de trop… C’est une ville après tout, on va bien trouver un jardin quelque part ! Par ma bonne étoile, pitié, juste un tout petit jardin de rien du tout ! Je prie très fort tout en surveillant que le vampire et le manteau ne me fausse pas compagnie à un détour.

Et là ! Je vois un buisson rouge d’aubépine en fleur ! Parfait ! Je me précipite à toute allure de vol vers ses branches tordues pleines d’épines et de fleurs rouges sang ! Il est plus terrifiant que celui du Pays Imaginaire mais je sais que là-bas les inféermières utilisent les fleurs pour apaiser les douleurs !

Et en parlant de douleurs, ils ont dû entendre un doux froissement suivi d’un choc net et d’un râle. Je me suis tellement précipité que je n’ai pas réfléchis à mon atterrissage dans cet accoutrement. Je me suis emmêlé les griffes des pieds sur la branche et j’ai percuté une branche qui m’a heureusement arrêté. Sans compter les griffures des épines que je n’ai pas pu esquiver. Je suis tombée en agrippant autant de pétales que je pouvais entre mes griffes. Je ressors en boitillant au pied du buisson et je me dirige vers un bouquet de feuilles d’orties ! Elles seront parfaites pour envelopper les pétales et en plus elles sont revitalisantes tellement elles ont de minéraux en elles. C’est parfait ! Si ce n’est que je me pique malgré mes poils de fourrure.

J’ai mal mais ce n’est rien ! C’est pour soigner le jeune innocent blessé ! J’emballe rapidement les pétales dans les feuilles, je ferme bien et … Je me concentre pour enrober le tout d’une pâte de chocolat. Ca va aider à faire glisser la médecine ! Parce que, bon, c’est peut-être un peu amer comme ça sans traitement faudrait pas qu’il le rejette et il va falloir attendre que ça lui fasse effet alors autant rendre ça bon, puis il n’y a rien de mieux que le sucre pour le moral.

Je prends le bonbon de chocolat entre mes griffes de pieds. Dis comme ça, ça ne fait pas très hygiénique… Mais j’ai besoin de mes mains pour battre des ailes ! Je volète jusque son visage… présumé, car invisible et je tente de lui mettre le bonbon dans la bouche. Bon je tâtonne un peu, j’ai du mal à trouver ses lèvres et je lui mets du chocolat un peu partout au visage… Ah ! Ça y est ! Je crois que j’ai trouvé !

Maintenant il va falloir réussir à retourner vers l’armure noire par le bon chemin……… et ………… On est où déjà ?

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Fabri détestait les dragons.

Il les avait admirés, quand il était petit et qu'ils étaient au centre de tous les contes. Pauvres créatures incomprises, finissant invariablement au bout de la lance du saint le plus proche. Ce ne fut qu'avec le temps – et surtout l'expérience, qu'il comprit qu'elles y finissaient le plus souvent à juste titre. Sales bêtes qu'elles étaient.

Il pondérait cette réflexion sous un amas de ruines, des tuiles, du bois, de la cendre plein les yeux, le nez et la bouche. Sa tête trainait au sol, les cheveux tenus dans sa main. Pas besoin d'y voir clair pour se rendre compte que sa planque n'avait pas tenu. Son armure lui avait probablement évité le plus dur de l’éboulement. Il faisait le mort histoire d'avoir quelques secondes à lui pour réfléchir. Une stratégie des plus nobles héritée d'une longue lignée de chevaliers – aussi se rassurait-il.

Se dégager lui prit quelques secondes supplémentaires. Il quitta la petite place sans demander son reste, par le dédale de rues qui l'entourait. Il ne planchait qu'à y revenir, bien sûr. L'idée de quitter le combat sans buter cette bestiole lui retournait l'estomac. Se soustraire à son regard plus réapparaître par un tout autre côté de la place afin de la frapper dans le dos se révéla une tactique plus que parfaite car la créature s'y laissa prendre deux fois. La première parce que cette tactique était inattendue. La deuxième par chance – la troisième ? Fabri se débarrassa bien vite de son bouclier rougeoyant et battit en retraite dans un coin de ruelle.

S'il avait réchappé de peu à l'écrasement et enterrement forcé, la créature n'y survivrait pas, elle qui n'avait que quelques os et de la vieille peau pourrie pour se protéger. En utilisant sa force – peut-être son feu, contre elle, il avait une chance. Mais comment ? Fabrizio se demandait ça tout en se jetant derrière un mur afin d'éviter que la créature ne le rôtisse. Il était parvenu à se dégager à grand-peine, mais n'avait pas pu se soustraire à la vigilance de la bestiole. Ou à son envie de tuer, ça revenait au même.

Le souffle court, il était plaqué contre le mur, écoutant la vouivre qui se rapprochait. Il changea de cachette deux fois encore afin d'être sûr de ne pas se faire carboniser. Fuir, lui ? Il en était sidéré, seulement il n'avait pas les mots l'exprimer. Pas que quelqu'un l'entende cela dit.

Il tremblait, sans pouvoir s'arrêter. Mais si seulement il n'y avait que ça. Il savait qu'il n'avait rien de grave – pour l'instant. La douleur qu'il ressentait ne venait pas de là mais simplement de lui-même. Les plaies de l'attaque du dragon avaient cicatrisé depuis longtemps mais c'était comme si elles étaient encore rouges du souffle de la créature.
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Le goût du chocolat sur sa langue l’égarait. Il ne faisait pas chaud, ici, et Ioan n’avait nul monstre réconfortant à trouver. Il se sentait lourd, pourtant. Aussi lourd qu’il l’avait été, sur une plage lointaine. L’enfant croyait sentir sur sa peau la fraîcheur de la mer, rapportée par le vent en embruns salvateurs. Il frissonnait. Ses doigts s’enfoncèrent dans la terre humide sur laquelle il avait chu, sa tête vacillante reposant contre un muret moelleux. Quelques picotements pressés assaillirent ses lèvres, et il déglutit machinalement, manquant l’étouffement avant de parvenir à avaler la friandise que l’on avait si diligemment faite pour lui.

Il ne faisait pas chaud ici. Si. Il faisait chaud. Son abdomen le lui soufflait en plaintes lancinantes. Il avait chaud.
Et froid.

Ioan expira fébrilement, les yeux clos. L’étoffe du manteau se soulevait et s’affaissait avec une régularité difficilement perceptible. Le garçon entendait quelques piaillements, quelques froissements — des mots sans ordre et aux tonalités changeantes. Il s’éveillerait, bientôt. Il s’endormait, sans nul doute. Les paupières lourdes, il cherchait à attraper, du bout des oreilles, quelque parole ou mélodie. Comme ce monde aurait aimé les chants de Belle et d’Alice, pensait-il. Peut-être les feuilles de ses arbres, toutes sèches qu’elles furent, auraient frémis d’autre chose que d’inquiétude. Peut-être que tous se seraient arrêtés ; auraient écouté. Il n’y aurait alors eu ni âme en peine, ni créatures contrites, ni crachats enflammés. L’enfant sentait presque le parfum des cendres affluer en remous fugaces.

Ses pieds se balançaient depuis un ponton du Mont aux Lanternes, les yeux rivés sur les eaux sombres en contrebas, et dont il ne savait évaluer la profondeur. Il ne pouvait qu’en observer le mouvement lent et perpétuel, révélé par la seule lueur d’une lanterne rougeoyante, qu’il tenait à ses côtés. La Lune ne pleurait pas, ce soir. Ioan ne la voyait, ni ne l’entendait. Elle lui manquait. Non pas qu’il voulut la voir attristée ; simplement, sa clarté lui était apaisante. Il sentit la brise — il avait chaud, pourtant. Ou froid, peut-être. Il ne savait pas. Il était fatigué. Lourd. S’endormir, se laisser tomber. S’éveiller, éventuellement. Il avait les mains moites. La main. La droite. Il entrouvrit les yeux.

N’avait-il pas été un bien piètre porteur pour ce manteau ? Il était si beau tantôt…
Désormais il était sale ; humide, poussiéreux, terreux, rougi par endroits. Pourquoi y avait-il ramené la main ? Il avait abîmé la dentelle si délicate qui ornait son poignet, l’avait teinte d’une couleur qui ne la complimentait guère.

Ioan laissa retomber son bras le long de son corps, avec une lourdeur qu’il ne se reconnut pas. Il avait moins mal qu’auparavant. Il le savait, bien qu’il n’aurait su dire à quel point il avait pu souffrir, ou non. C’était une sensation qu’il n’avait pas eue jusqu’alors — mais elle s’effritait. La chaleur tenace qui avait saisi son ventre s’éreintait au fil des minutes… tout comme lui.

Dis-moi, bougeras-tu ? demandait-il à son corps. Mais ses jambes se faisaient sourdes, et lorsqu’il voulut se redresser, sa peine lui revint en braises, soudainement excitées par le remous d’un tisonnier invisible. Il ne força pas.

L’esprit de l’enfant se perdait entre les sons, connus et inconnus, dont il avait perdu le fil. Une comptine légère et lointaine, qui l’invitait au sommeil. Le sol l’y encourageait, lui aussi. D’ordinaire si dur, si immuable, il se faisait un matelas agréable. Le muret sur lequel sa tête était posée ne lui avait pas, pour sa part, rappelé le peu de confort de ses aspérités marquées. Le vent ne lui portait aucun cri, pour l’heure.

C’était à croire, se souffla-t-il, que ce monde voulait le voir demeurer ici. Ou était-ce que sa fatigue lui faisait payer les jours où il ne l’avait pas écoutée ?

Beld bordait négligemment son lit. L’homme de velours viendrait demain. Il devait se reposer.

Demain, peut-être.

Mais aujourd’hui… il avait fait une promesse.

Il y avait une belle Petite Dame, un homme livide au reflet embarrassé, et un orchestre grandiose et cliquetant ; ils devaient rejoindre les lumières.
Les étoiles, au-dessus du lac.

Il rouvrit les yeux, une fois de plus.
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En position assise, les bras croisés et la tête enfouie dans ceux-ci, les yeux clos, je tentais de reprendre une respiration normale. La peur n'avait jamais été aussi présente que ce jour, comme en témoignait mon cœur qui battait la chamade. L'enfant m'avait ralenti, cette foutue chauve-souris m'avait gênée jusqu'à ce que je la suive et voilà maintenant que nous nous étions éloignés de la lumière salvatrice ! Je soufflais du nez d'agacement, mais surtout d'impatience : combien de temps comptait-elle me retenir ici ? Rester était stupide. Qu'est-ce qui nous disait que l'autre suicidaire n'était pas déjà mort ? Et puis, ces monstres finiraient bien par nous rattraper ! Je rouvris les paupières. Le manteau demeurait immobile, tout comme la chauve souris.

- C'en est trop !

D'un bond, je me mis debout. A peine avais-je fais quelque pas vers la lumière que la bête nocturne s'était plantée en plein dans mon champ de vision pour me gêner. Mon bras tenta de la balayer, en vain. Elle commençait à m'agacer cette saleté ! Quelques exclamations de fureur plus tard, me voilà de retour au point de départ, à tenter de garder contenance de nouveau. Je réfléchis à la situation, à un moyen de la contraindre à m'obéir... Ou de l'éliminer. Mais comment ? Sa couleur la rendait difficile à voir, sa taille faisait d'elle une cible difficile. Mon regard se tourna vers le manteau. Elle l'avait protégé, s'était même donner tout ce mal afin de soigner sa... Blessure ? Ou du moins ce qui y ressemblait, comme en témoignait la rougeur sur l'un des pans de celui-ci.

Je me mis de nouveau debout. Un pas. Ma poigne se referma sur ma cape. Deux pas. Le tissu se déchira. Trois pas. Celui-ci voleta jusqu'à l'importune. Quatre pas. Un sourire carnassier se dessina sur mon visage. Un dernier. Mon bras se referma autour de lui, pieu à la main, contre le vêtement. Mon attention resta focalisée sur la gêneuse, déjà débarrassée de son fardeau. Tout avait prouvé jusqu'ici qu'elle était plus qu'une simple chauve-souris.

- Toi ! Tu vas te diriger vers la lumière, avec nous. Sinon...

La pointe de l'arme s'appuya, sans perforer l'otage. Ma main livide trembla. Un instant, mon regard se posa sur l'objet que je tenais, puis revint à elle. Je devais m'ôter la pensée à cet étrange, mais excitant spectacle de ce vêtement étendu au sol, ses plis souillés et déchirés... Tenté de passer directement à l'acte, la petite chose subit mon pire regard, celui qu'avait subi ma première proie.

- Je n'hésiterai pas à le trouer ou à le cramer. Au moindre geste imprudent, je le mets en pièces.
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Shriiiik! Je lâche un cri strident sous la stupéfaction. J’en perd mes moyens et ma coordination. Je chute après m’être débarrassé du bout de tissu.




Je retombe au sol, tremblante, les ailes et les oreilles rabattues en arrière de crainte. Qu’est-ce que je dois faire ???! QU’EST-CE QUE JE DOIS FAIRE ??!! Je le vois dans ses yeux, il est on ne peut plus sérieux. A la moindre erreur de ma part, il lui fera du mal ! Pourquoi ?! Nous ne lui avons rien fait ! Nous ne nous connaissons même pas !

Le pauvre manteau est encore bien incapable de bouger, encore moins de se défendre. Je m’angoisse, j’ai les larmes de chauve-souris qui montent. Je tremble comme une feuille sur un arbre mort en plein vent glaciale de ce monde. J’ose à peine faire un pas de peur qu’il soit mal interprété.
Pourtant il me presse pour les guider vers ce qui a sembler être notre seul salut depuis le début. LA lumière. Je ne vois pas d’autre choix pour protéger l’enfant invisible que de faire ce qu’il demande. Une fois là bas, que va-t-il nous faire ? Que fera-t-il à d’autres ? À cette lumière ? Je n’ai jamais été préparé à ce genre de situation ! Oh on nous a bien prévenu de la méchanceté de certaines personnes, de la cruauté même notamment des pirates…. Mais je suis sensé faire quoi moi maintenant ? Je ne peux pas simplement fuir, je suis sure qu’il ferait réellement du mal au manteau avant de l’abandonner !

Je ne peux pas… Je ne peux pas l’abandonner, risquer des représailles par ma faute…
Je hoquette en pleurant mais je réussis à m’envoler doucement vers les toits. Je surveille que cet odieux personnage puisse toujours m’avoir en vue pour ne pas risquer un malentendu. Je m’élève comme je le peu au dessus des toits biscornus et sombre comme la nuit et...


KROOAAA !

 SHRIIIK! Je sursaute et volète plus vite pour m’écraser sur un des toits, le cœur battant la chamade. Un horrible corbeau miteux noir comme le ciel s’est envolé sur mon passage….



J’ai cru que j’allais me faire gober ! Heureusement pour moi, en tant que chauve-souris je suis bien plus gro…. Bien moins appétissante ! Ouh que j’ai eu la frousse. Je déteste ce monde ! Je le hais, je le hais, je le hais ! J’ai trop peur… dès qu’il y a un truc qui se passe, ça surgit de nulle part avec une allure effrayante !
Je me traîne jusque le bord du toit pour montrer au méchant vampire que je suis toujours là. Ce n’était pas ma faute !

Je dois reprendre mon vol pour m’élever un peu plus encore, je surveille partout alentour. Je guette les oiseaux, les chauve-souris, les gargouilles, les monstres, les diablotins, les dragons et que sais-je encore !

Je vois facilement au loin la lumière prétendument salvatrice. Son contraste avec le reste de ce monde plongé dans l’obscurité ferait même pâlir cette gigantesque lune jaune pâle et glauque au sourire malsain qui semble nous juger.
j’entends un cri et des flammes également. Je vois la liche qui détruit le cœur de la ville. Je vois plus loin l’armure noire ! Enfin ! Qui… effectue une stratégie étrange d’évitement à reculons…
Je soupire, rassurée. Enfin… Pas que le monstre soit toujours en vie et à ravager les environs hein ! Mais que le soldat soit en vie… enfin si on peut qualifier ainsi quelqu’un dont la tête n’est plus rattacher à son corps. Et surtout il a l’air d’abandonner le combat ! Je ne devrais pas m’en réjouir, je le sais bien mais … Je préférerai qu’il soit avec nous. Lui saurait surement comment assommer le méchant vampire qui tient des menaces contre le pauvre manteau.

J’essaie.
Je n’arrive pas à attirer son attention de signes trop discrets, mais je ne veux pas que l’affreux se doute de quelque chose.
J’essaie, en priant pour que ça fonctionne.
Je regarde sa trajectoire dans les ruelles épileptiques de se labyrinthe de bicoques, j’estime l’endroit où il pourrait se retrouver sur notre route vers la lumière, je tente de mémoriser le chemin pour nous sortir de là.

Droite. Droite. Gauche après les volets qui claquent, deuxième à droite puis tout droit vers le cimetière...
J’entends qu’il s’impatiente en bas. Je redescends. Je n’ai pas à me forcer pour lui montrer une bouille timide et effrayé. Je lui fait signe, docile, pour qu’il me suive sur la bonne voie, comme il me l’a exigé.
Et je prie la Bonne étoile très très très fort pour que l’on retombe sur notre armure noire sans tête… enfin si, avec sa tête mais pas au bon endroit.

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Putain de monde. Putain d'armure. Putain de drag- non, vouivre.

Bref.

La bestiole était aussi monstrueuse que décatie mais pourtant, elle tenait bon et il y avait de la vie en elle. Une vie maléfique venue d'outre-tombe mais une vie quand même, de l'énergie et une sacrée envie de le bouffer lui qui commençait à flancher.

Un genou à terre derrière son pan de mur, le Templier réfléchissait. Il avait essayer le frontal, ça ne marchait pas. C'était comme quand on lui avait appris le latin- le frontal (et les coups de bâton par la même) ça ne marchait pas avec les êtres obstinés. Un moyen détourné, alors ? Il fallait qu'il la joue un peu plus discrète, et c'était pas avec cette armure rivée à son corps qu'il allait faire quoi que ce soit de silencieux.

Un coup d’œil discret (facile, il n'avait qu'à tourner sa tête, au bout de ses bras, comme un mirador) pour voir où était la bestiole, bon, ça allait. Elle rôdait en bouffant un truc crade quelques arpents plus loin. Elle lui rappelait la fois où il avait passé une après-midi à convaincre le palefrenier du Domaine de garder un chameau dans ses écuries parce que la créature, récemment échouée en sa possession par un troc forcé avec un marchand véreux, n'avait aucune place où aller. L'animal avait mis la tête dans un seau d'épluchures de patates. Impossible de l'en sortir -

Fabri se figea. Ses lèvres esquissèrent une prière silencieuse alors que son visage s'illuminait. Pourquoi n'y avait-il pas pensé plus tôt ?

Son fléau d'arme dans une main et sa tête dans l'autre, il se leva tranquillement. Silencieusement. Prenant son temps. Il avait d'abord pris un long regard devant lui avant de retourner sa tête à cent quatre-vingt degrés afin de pouvoir constamment voir derrière-lui, comme une chouette de métal. C'était probablement dégueulasse à voir mais si son plan tenait la route, songeait-il en longeant la place et en entrant dans un bâtiment, le jeu en valait la chandelle.

Remise de tête à l'endroit. Un étroit couloir laminé de chaux l’oppressait désormais et continuait en un couloir sombre ou un exigu escalier. Ce fut ce dernier qu'il prit, son but étant de gagner de la hauteur. Il pouvait toujours entendre au dehors, le bruit peu ragoûtant de la vouivre qui faisait ses dents contre un chariot. Aussi avait-il vérifié en glissant sa tête par un trou dans le mur. Il allait regretter cette possibilité une fois cette dernière rattachée à son corps.

Si elle se rattacherait – éventuellement.

Loin de s'apitoyer sur son sort, le Templier continua con chemin jusqu'à arriver à un étage, une rangée de fenêtres longeant la place. Le verre avait disparu depuis longtemps et les volets n'étaient qu'un amas de bois vermoulu d'une couleur indéfinissable – mais qui penchait vers le gris-marron teinte vomi.

Le bois céda sous l'impact de Fabri qui s'était jeté depuis la fenêtre sur le dos de la vouivre.

Un hurlement, deux, entremêlés dans un mouvement saccadé. La liche donnait de furieux coups de queue et de se débattait pendant que l'amure noire faisait passer la chaîne de son fléau dans sa mâchoire béante et venait la croiser sous son cou, tenait fermement les rênes improvisées. Sa tête ? Fermement tenue dans sa main droite en même temps que le manche du fléau. La créature fit un tonneau, une embardée qui fit se lever poussière et pans de murs. Fabri tint bon.

Il tira d'un coups sec et l'animal prit son envol en rugissant. Son aile allait frapper le rebord d'un toit puis, prenait petit à petit de la hauteur, put battre de concert avec sa consœur et la créature gagner en stabilité. Un chevalier sans tête qui chevauchait un dragon putréfié. Personne n'allait le croire.

Plus qu'à retrouver les autres. Quelques coups d'aile allaient le mener à destination.

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Droite.

Les pieds de Ioan raclèrent contre le sol et il crut chuter. Seule la poigne ferme d’une créature dont il n’était plus sûr de discerner la forme le maintenait en marche. Elle se rappelait à lui régulièrement, à tel point que le garçon comptait ses râles énervés comme s’ils étaient un métronome assidu. Il sentait sa main serrée sur lui. Il avait même, un instant, perçu le pieu dont la pointe menaçait les boutons du pauvre manteau dont il était vêtu. Pauvre, pauvre manteau. Il n’avait rien mérité de tout ceci. La culpabilité pesait au garçon. Il aurait dû être plus attentif — plus prudent, plus soigneux. Sa vue se troublait d’un nouveau voile, qui glissa sur ses joues.

Il s’occuperait de ce manteau. Il panserait ses effilures et ses éraflures. Lorsqu'ils auraient atteint les lumières.

Il avait fait une promesse.

Ioan s’agrippa au bras qui le soutenait d’une main, tentant, tant bien que mal, de garder l’équilibre.

Droite.

De l’autre, il tenait son ventre. Quelques éclats de douleur — diffuse — lui parvenaient encore. Son corps réagissait sans l’écouter. Sa main souillait la dentelle à son poignet une fois de plus, aveugle quant à son état déjà misérable. Il ne savait que faire sinon s’excuser.

Silencieusement — il n’était pas retourné chercher sa voix, et elle n'avait pas retrouvé son chemin seule.

Parfois, l’enfant entendait le battement d’ailes hâtif de sa petite dame ; parfois, il percevait un grondement lointain, puissant, profond. Si profond que la maisonnée devant laquelle ils passèrent en tremblait, laissant ses volets claquer d’inquiétude. Il percevait les pavés sur lesquels il avançait et titubait.

Pour tout ce qu’il entendait, sentait ou discernait, pourtant, Ioan ne voyait plus les lumières. Peut-être étaient-ce les bâtisses, les nuages, ou sa tête si lourde qui les lui cachaient. Tout était sombre. Tout était froid. Même les rues, désespérées, se resserraient autour d’eux en d’étouffants goulets. Qu’avaient fait les maisons de leurs cheminées ? Qu’avaient-elles fait de leurs bougies et de leurs chandeliers ? Quelqu’un les leur avait-il dérobé ? C’était là un bien mauvais tour.

L’homme sans reflet le redressa une nouvelle fois ; quelques aiguilles vinrent se planter dans son estomac, sans qu’il parvienne à gémir. Pourquoi ce pieu, tiens ? Il s’interrogeait, enfin — ou… se l’était-il demandé plus tôt ? Est-ce que cela avait une importance ?

Ioan sourit avec douceur, fatigué. Il l’avait aperçue du coin de l’œil.

Une lumière chaude, radieuse, accompagnée d’une fanfare grondante.
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Merde.

Si proches du but... Et pourtant. Une violente bourrasque dont le sifflement fit vibrer mes tympans me contraignit à me couvrir le visage de mon bras, cessant de menacer le manteau par la même occasion. Ma poigne se referma toutefois, plus ferme encore qu'auparavant. L'otage s'était montré si particulièrement irritant et peu coopératif, de par son pas trainant et sa mollesse relative qu'il m'avait fallu le motiver à de multiples reprises, le tirant brutalement, sans le ménager de mes interjections contrariées. La vouivre avait fendu l'air et s'était posée en plantant lourdement ses griffes squelettiques dans le sol, pulvérisant les pavés sous leur poids.

Pourtant sur terre, le monstre ne sembla pas moins dominant pour autant. Impérieuse, la bête planta ses orbites vides dans mon regard. Il n'y avait que le néant de sa non vie et la puissance à l'état brut. Elle entrouvrit sa gueule puis rugit avec vigueur, brisant le verre des quelques bâtisses proches. Tout semblait si mauvais. De cette haleine pestilentielle à toute cette situation stupide. Mon emprise sur le bagage se relâcha. Je n'aurais jamais dû m'en encombrer si longtemps. Le pieu lui-même chut dans un bruit métallique. Mes jambes devinrent soudainement comme flasques, puis mon postérieur rejoignit lourdement l'arme. Au diable ce monde, ses horreurs à chaque coin de rue et ses ténèbres éternelles.

Fuir.

C'était la seule option viable. Je me saisis de nouveau du pieu puis, m'aidant de mes bras pour me relever, tournant totalement le dos à la créature, j'envisageai une retraite... Mais me ravisai. Où que j'aille, il y aurait une horde de zombies ou un éventré pour me trouver. Il n'y aurait pas de salut. Pas de lumière sans franchir l'obstacle. Le temps de tourner le coin de l’œil, je compris mon erreur. La créature avait sa gueule grande ouverte.

Elle s'apprêtait à déchaîner sur nous les flammes de l'enfer.
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Ah ! Un truc viens de tomber au sol devant nous ! C’est la vouivre ! Je n’ai même pas le temps de me demander si elle va nous manger ou si elle a manger l’armoire noire déjà. Son souffle ou celui de ses ailes m’ont projeté en arrière. Me voilà qui tourneboule dans l’air, complètement déboussolée, à essayer de battre des membranes pour retrouver mon équilibre.

Heureusement que j’ai l’habitude de voler, je sais malgré tout repérer le côté ciel du côté sol instinctivement. Mais en attendant, j’ai reculé super loin avec mon poil plume. Je finis par atterrir à peu près quelque part sur du pavé sans trop me faire mal.

Je vais pouvoir souffler un peu. Par contre…. Je suis toute seule. Je ne sais pas trop par où étaient les autres. Le gentil manteau et le méchant vampire sont désormais seuls… Et perdu. Je ne me serait pas reposé longtemps. J’ai peur pour l’enfant invisible. Il est encore faible, il est encore blessé ! Et l’autre ne semble pas vouloir le ménager !

Et puis , il y a la vouivre ! Si elle est là, où est l’armure noire ! Je comptais sur lui moi ! Pour nous protéger de l’autre fou avec son pieu ! Oh attendez… Il n’est tout de même pas… Pourvu qu’il ne soit que blessé et inconscient… Voilà, maintenant je culpabilise. Je suis si égoïste ! J’aurais dû m’inquiéter pour lui avant tout !

Je me sens tellement mal… et fatiguée… Je commence à renifler pour éviter les sanglots de monter. Je suis décidément une bien piètre marraine. Comment je peux faire seule, dans cet accoutrement pour sauver le gentil manteau ? Perdue dans cet horrible endroit rempli de monstres.

Un vent glacial rugit dans la ruelle où j’ai atterri. Je m’enroule de mes membranes pour me réchauffer en fermant les yeux si fort. Si seulement ce pouvait n’être qu’un cauchemar… LE vent semble forcir. Il râle, lugubrement, avec tellement de voix différentes.

. . .

Attendez…

J’ouvre un œil en dressant l’oreille. Pourquoi y a plusieurs voix ? J’entends des frottements aussi… Lents, lourds.
Oh non… nononononononon !
Les revoilà ! Je commence à en voir dépasser un coin de mur. Les zombies ont mis le temps mais ils nous ont rattrapés ! C’est ma faute ! Avec tout les tours et détours pour retrouver l’armure noire, on a pas du tout avancé vers la lumière !

La lumière, d’ailleurs, tiens ! Il y a un éclair bleu acétylène qui illumine l’arrière du bâtiment à ma gauche ! Une flamme, celle de la vouivre surement. Enfin je l’espère. Je n’ai jamais été aussi content de la trouver celle là ! Bon pas elle directement mais ça veut dire que les autres sont par là bas !

Je dois les prévenir. Je bats des membranes, je retrouve mes forces. Pas le choix, il en va de ma survie !… Oui la leur aussi rho. Ok on y va. Je retourne auprès du gentil manteau et du méchant vampire. Et il y a la vouivre bien sur. Elle… Elle a l’air de lutter bizarrement. Elle bouge la tête de côté de droite à gauche, la bouche grande ouverte…

Oh ! Je vois mieux quand elle est de profil. Une chaîne lui gêne la mâchoire. Bien solide. Tant mieux. Et à l’autre bout, qui tire pour l’empêcher de cracher ses flammes sur les deux jeunes le cul par terre, il y a une armure sans tête. Enfin si… Il a une tête, mais pas au bon endroit. Il la porte à la main.



Oh mais c’est la notre ! Il n’est pas mort !
Youpi !!!
Je tourne sur moi même de joie ! Enfin une bonne nouvelle ! Il n’est pas mort malgré l’attaque de la vouivre. Mieux encore, il l’a apprivoisé !

Shriiii ! J’esquive le vol d’une pierre lorsque la queue squelettique du dragon décomposé viens explosé une maison. Bon… Peut être pas si apprivoisée… La lutte semble continuer. Moi qui voulais me jeter sur la tête de l’armure noire pour lui faire un câlin, tellement j’étais heureuse de le revoir.

Ah ! Le vampire a l’air d’avoir lâcher le manteau ! c’est le moment ! Je me précipite dans ses manches. Je piaille, je tire sur le tissu, il faut qu’il se relève et s’éloigne de l’autre monstre… De la vouivre aussi d’ailleurs.

Et puis il faut que je leur parle des zombies en approche ! Je fais comment moi ? Je tente des signes en pointant de mon aile vers la ruelle d’où je suis sortie. Tout en volant, ce n’est pas évident. Puis je tente de mimer leurs bras ballants ou crochu devant eux en râlant comme un mort vivant.
Quand je vous dis que ce n’est pas évident en se maintenant en vol !

Ah je sais ! Je vais écrire au sol avec ma poussière de fée le mot ZOMBIE…. Avec un S et plein de point d’exclamations !!!



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« Montez ! Y'a plus le temps de s'amuser !! » leur hurla-t-il depuis le dos de la vouivre.

Devant l'incompréhension générale, il tenta de s'approcher de la fine équipe. Rien à faire ; le manteau, presque invisible dans l'obscurité, était éloigné, la petite chauve-souris, il n'arrivait simplement pas à la voir. Le vampire était proche – mais sidéré.

Fabri comprit très rapidement que ça n'allait pas être possible.

De la petite chauve-souris, il ne voyait rien, mais un petit nuage étincelant lui montrait la voie, littéralement. Pas de flèche, pas de sort qui transformerait quelque chose en machin rose bonbon. Juste le simple mot « zombie », ah, non, « zombieS !!! » avec un gros S.

S'envoler à dos de vouivre serait trop compliqué. Mais elle était encore là ; autant s'en servir. Fabri s'éloigna en tirant sur la chaîne attachée à la créature. Avec un grognement, l'animal s'éleva dans l'air, lentement, par mouvements saccadés. Il avait une meilleure vue sur l'ensemble de la situation et pouvait voir les fameux zombies. Pareils à une vague désordonnée, ils apparaissaient depuis un coin de rue. Le Templier dirigea la vouivre droit sur eux et, dans un torrent de feu et de chair, les deux masses se rencontrèrent dans un bruit infernal, une odeur de chair à la fois putréfiée et brûlée ainsi qu'au capharnaüm de bouts de membres.

Fabri, qui avait sauté quelques secondes avant l'impact, se retrouvait désarmé et s'éloignait tant bien que mal de la scène du massacre. A la foi sonné et choqué par l'état de la vouivre – une aile arrachée et elle continuait de vouloir cracher du feu, il se dirigeait vers le bout de la rue qui n'était pas écroulé et submergé par des morts vivants.

Un mur, un autre ; pas simple de se diriger alors que ses yeux étaient fixés à sa tête qui elle, n'était pas fixée à son corps. Elle était obstinément tournée vers l'arrière alors qu'il tentait de s'éloigner, le ralentissant. Il ferma les yeux, le bleu des flammes du cadavre de dragon comme imprimé au fond de ses rétines. Une main contre le mur, le suivant comme un fil d’Ariane décrépit, il rejoignit les autres – du moins, il allait dans la direction où il les avait vus pour la dernière fois.

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Là. Ioan attrapait le gantelet de l’armure ! Sans se faire attendre, grincements métalliques et soubresauts animèrent l’orchestre cliquetant. Il remuait et gesticulait, comme s’il avait craint ce qui était venu le trouver. Entre « ah ! » et grommellements, il posait mille questions auxquelles le garçon n’arrivait pas à donner sens. Celui-ci ne savait trop comment s’y prendre. Ses bras hésitaient, ses jambes tiraillaient ! Fort heureusement, la Petite Dame qui l’avait guidé depuis le point d’envol de la créature de chair jusqu’ici s’en allait voleter à la face de leur sauveur flamboyant. Il la reconnaîtrait, sûrement.

Comment s’y méprendre ?

Bien que la belle armure parut s’apaiser à la vue de la chauve-souris, elle n’avait pu retenir un dernier sursaut surpris : Ioan se laissait tomber pour éviter, de justesse, un mauvais coup de coudière désorientée. Il se sentait enfin capable de marcher à un rythme constant ! Il aurait été dommage de se trouver si vite étourdit… Profitant d’un flottement bienvenu, l’enfant se faufilait entre les pièces de métal sombre et replaçait la tête du cavalier sans monture dans le sens de sa marche. Enfin, il paraissait reprendre contenance. L’enfant voulut lui sourire — ce que nul ne saurait jamais — content. Celui qui fut le maître des airs irradiait quelque chose de nouveau. Quelque chose de curieux. Quelque chose d’inspirant, sur lequel le garçon n’arrivait pas à mettre de nom. Mais cela viendrait, se disait-il avant de se relever rapidement, l’esprit tranquille.

Pourtant la rue, prompte à le reprendre dans cet élan d’accalmie, lui parut se retourner. Une seconde, et les maisons se compressèrent derrière les murets de leurs jardins morts ; et les buissons sans fleurs frissonnèrent. Les autres ne semblaient pas le remarquer. Non. Ils ne le voyaient pas. Instinctivement, l’enfant ramenait la main à son ventre. Il n’avait plus mal, presque. Il ne lui restait qu’une impression nauséeuse, et, par moments, la sensation fascinante que le monde bougeait de lui-même ; que le coin de son œil emportait les toitures, et jetait les pavés au ciel.

Seule la Lune demeurait : grande, et immuable.

Le garçon restait un court instant à apprécier sa propre confusion. Un élément lui échappait, glissait et gouttait au bout de ses oreilles.

Ce qui aurait pu être un long moment fut rapidement interrompu par le battement d’ailes pressant d’une Petite Dame que l’on avait trop fait attendre. Il fallait reprendre la route. Il fallait rejoindre les lumières. Il l’avait promis. Il irait. Ioan suivrait le chemin qu’elle traçait : un pas, deux, trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf, plus — un frisson le parcourut. L’homme au timide reflet les suivait-il ?

Oui, sûrement, peut-être, il le pensait. N’avait-il pas vu le revers rouge de sa cape si douce, au détour d’une ruelle ?
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J'avais pas vraiment trop compris ce qui s'était produit. Le feu s'apprêtait à quitter la gueule de la vouivre. Ma vie - aussi courte fut-elle - avait eu le temps de défiler dix fois, sans que rien ne se produise finalement. Quelque chose l'en avait empêché. D'ailleurs... Où est-ce qu'elle était passée ? La vouivre avait finalement repris son envol, sans s'occuper de ses proies. La chauve-souris avait disparue dieu sait où. Et le bagage... L'otage, pardon... Même lui s'éloignait, suivant la direction de la vouivre. Après tout ce que j'avais fait, ils m'avaient sauvé la vie et ils... Ils m'avaient tous laissé en plan !

Alors effectivement, oui, j'avais fini par les suivre.

J'aurais tout simplement pu aller vers la lumière, chercher un moyen de quitter ce monde sordide aussi vite que possible mais... Non, j'avais préféré les rejoindre. Parce qu'ils semblaient mieux connaître les lieux. Puisque l'otage pouvait encore me servir de diversion... Peut-être aussi car je leurs devais la vie. En fait non, sûrement pas pour cette raison. Pour autant, je ne marchais pas à leurs côtés. Je m'étais dissimulé dans les ombres, proche, les suivais. Je scrutais, inspectais chaque recoin, restais en alerte.

Halloween... La pleine lune... La nuit... Le silence... La peur.

Je marchais sans un bruit, dissimulant le pieu métallique que j'avais évidemment ramassé, prêt à sauver ma vie face à une énième de ces monstruosités. Dans un de ces mauvais films d'horreurs, j'aurais sûrement été la première victime. Séparé du reste du groupe, seul, vulnérable. Quelque chose surgirait par derrière, me surprendrait. Il y aurait un hurlement et...

Un bruit.

Je pivotais immédiatement, envoyant immédiatement mon pied dans... Le vide. Aucune créature ne sembla se manifester. Qu'est-ce que ça pouvait être ? Était-ce simplement le fruit de mon imagination ? Un soupir de soulagement, puis je repris la marche, me rapprochant presque inconsciemment du groupe, cette fois à découvert. Parce que l'espoir, la lumière, je l'espérais du moins, salutaire approchait enfin. Contre toute attente, il n'y avait encore aucune victime à déplorer dans cette fine équipe. Le vampire, la chauve-souris, le cavalier sans tête et le manteau...

Ensemble, nous arrivions enfin à destination.
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Nos héros étaient parvenus à s'en sortir. Ils faisaient les frais des affres d'une nuit d'Halloween mémorable. Le corps d'une vouivre gisait inerte après avoir percuté les corps putréfiés. Pourtant, certains se relevaient et l'armée poursuivait son avancée lente et leurs râles sonnait comme le glas d'une mort que le groupe avait frôlé à de multiples reprises.

Cependant, ensemble, nos quatre aventuriers avaient atteint leur destination. Serait-elle source d'espoir ou de désespoir ? Nous le saurons bientôt. Le concessionnaire Shinra s'étendait devant eux. Tout comme le reste de ce monde, celui-ci semblait désert... à l'exception d'une unique lumière qui perçait au travers des ténèbres permanentes de ce monde. Elle était leur unique chance dans cette soirée à glacer le sang.

Soudain, celle-ci sembla se brouiller, se dissiper. Leurs yeux commençaient-ils à s'adapter à sa présence ? Non, pas tout à fait. On pouvait distinguer la vague forme d'un véhicule. Mais le décor lui-même commençait à se faire plus confus. Tout disparaissait. Les râles des zombies et le vrombissement vraisemblable d'un moteur de vaisseau se faisait si lointain. Bientôt, il n'y eut plus aucune trace de la ville d'Halloween et le groupe fut abruptement séparé.

Car de cette nuit de terreur, ils pouvaient enfin s'éveiller.
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