« Je vous remercie à tous d’être venus si rapidement cet après-midi. Je sais que vous avez un emploi du temps chargé, mais comme vous pouvez le deviner… J’ai considéré votre offre. »
C’est dans une confortable salle de la station Agrabah que se tiennent attablés avec moi Carla Zarrogona, Carlos Pasdemont, Juan-Lucas Belmarton et Marcel Panini. Des serveurs nous apportent quelques gâteaux et du thé, avant de sortir pour nous laisser discuter au calme, à l’abri des regards indiscrets. Carla maintient un sourire forcé, tandis que les trois hommes semblent attendre la suite des évènements. Carlos a son air habituel, c’est-à-dire méfiant et la mine boudeuse.
« L’occasion que j’attendais s’est présentée à moi, et je pense pouvoir vous proposer un marché en lien avec ce que vous m’aviez… Suggéré lors de notre dernière rencontre.
- Cela augure quelque chose de bon, j’en suis certaine.
- Vous devinez très bien, Madame Zarrogona. »
Je marque une pause, buvant une gorgée de thé pour m’hydrater la gorge.
« La Shin-Ra m’a confié l’usufruit de ses biens, et un transfert de personnel, à la Costa del Sol. Vous savez ce que cela veut dire. Etant la gestionnaire des biens, je vais les utiliser dans le cadre d’une nouvelle entité commerciale. »
Je vois que leurs regards expriment désormais un intérêt certain pour mes paroles. Comme des charognards autour de leur proie, ils attendent qu’une faille s’ouvre pour s’y engouffrer. Cela se lit particulièrement chez Marcel Panini, il a les yeux qui pétillent.
« C’est l’occasion rêvée pour vous, investisseurs, de choisir cette nouvelle société en investissant à long terme pour elle. Débarrassée de l’influence de la Shin-Ra, je suis libre de mener à bien nos projets… Cent pour cent Costa del Sol. »
Ce qu’ils ne savent pas, c’est qu’il y a anguille sous roches. Le Président et moi-même, nous connaissons les détails de la proposition. La Shin-Ra ne lâcherait pas tant d’investissements d’un coup sans un plan détaillé en coulisses. Cependant, il est normal pour mes interlocuteurs que cela arrive : je jouis déjà d’une grande influence sur les activités de la compagnie sur ce monde, l’autonomie n’était qu’une question de temps.
« Combien de parts en pourcentage vous seriez prête à nous vendre ? »
Sacré Carlos. Il ne perd pas le nord. Par mesures de sécurité, je ne peux pas laisser les investisseurs avoir une trop grosse part d’actifs, dans la mesure où cela viendrait jouer sur mon statut de directrice-générale de l’entité. Cependant, l’appât doit être suffisamment gros pour qu’ils mordent dedans. L’enjeu est double pour eux : d’un côté se faire de l’argent sur le dos de la Shin-Ra et éviter un monopole commercial, l’autre d’avoir un moyen de pression sur moi pour me contraindre à leurs calendriers au cas où cela serait nécessaire. Autant vous dire que cela ne va pas arriver de si tôt. Abattons les cartes.
« 20%.
- C’est bien trop peu ! »
Belmarton s’insurge.
« N’oubliez pas que c’est moi qui vais tout faire dans cette affaire, je ne vais pas en plus vous donner des parts qui devront être payées en dividendes chaque année.
- Faites un geste ! 20% n’est pas raisonnable. »
Je prévois de leur donner 30%, mais avant je veux voir si je ne peux pas tenter de récupérer de petits bonus.
« Je suis prête à monter à 25%, mais je vais devoir vous demander un geste de votre part également.
- Dites-nous.
- Juan-Lucas, vous avez un emplacement sur la côte, entre les plages et le port de pêche qui est actuellement un vaste terrain vague plein de sable.
- En effet, oui ?
- Donnez-le-moi. »
Cet emplacement n’a pas de réelle valeur immobilière pour l’instant. Cependant, il serait parfait pour la marina de luxe que je souhaiterai bâtir pour mes très chers touristes. Il faut bien un emplacement pour garer tous ces yachts après tout ! Sans compter la richissime clientèle à bord qui n’attend qu’une chose : consommer.
« C’est d’accord.
- Je vois que nous sommes sur la même longueur d’ondes. » dis-je en souriant chaleureusement.
« Cependant, ça reste trop peu pour moi, Madame Song. »
Carlos Pasdemont est sorti de son silence. Il a les coudes sur la table, me scrutant avec intérêt, le visage peu sympathique recouvert par sa sueur. C’est vrai qu’il fait très chaud aujourd’hui dans les rues de la Costa. Moi-même, je m’évente régulièrement pour éviter de succomber à cette chaleur écrasante depuis que nous avons atterri tôt le matin avec Francis. Heureusement que la salle est climatisée.
« A combien souhaiteriez-vous monter, Monsieur Pasdemont ?
- 30%.
- Qu’est-ce que vous me donner en échange ? »
Il se tait et réfléchi, jetant régulièrement des coups d’œil à Marcel Panini qui le regarde avec insistance. Les deux ont l’air intéressé, la question doit plus être sur la nature de ce qu’ils sont prêts à lâcher pour arriver à atteindre ces fameux 30%. Après quelques instants d’hésitation, Carlos retrouve la parole.
« Je possède plusieurs bâtiments de petite taille dans une rue de la Costa. Ils sont en mauvais état et sont donc inhabités, j’ai jamais eu de quoi les rénover. Si cela vous intéresse, je vous les vends pour trois sous… Comme ça, cela vous fera des emplacements pour les projets de l’entreprise.
- Hum… Cette proposition me semble raisonnable. J’accepte. »
Il hoche la tête, mais ne sourit pas. Il passe sa main dans ses cheveux et se tourne un peu vers les autres, leur laissant la parole.
« Vu qu’il y a 30%, je pense que nous allons faire de la manière suivante : 10% pour moi, 10% pour Monsieur Belmarton et 10% pour Messieurs Pasdemont et Panini qui vont s’associer pour cette affaire, je crois ?
- Tout à fait.
- Cela semble équitable. »
Je bois calmement une nouvelle gorgée de mon thé. Ils ont donc mordu à l’hameçon, c’est parfait : en plus des financements que je vais recevoir de l’usufruit des biens de la Shin-Ra et qui vont couvrir la plupart de nos investissements, des investisseurs privés vont ajouter de l’argent dans l’affaire. Nous avons un potentiel de croissance formidable. Sans compter que le Vaisseau-Mère est toujours là en cas de besoin urgent. Mais ça, personne ne le sait à part moi, Rufus et Stacey... Si elle a compris le dossier.
« Vous avez pensé à un nom ? » demande Juan-Lucas.
« Pas vraiment… Mais vu que nous agissons dans un intérêt commun de prospérité, pourquoi pas « Le Syndicat » ? C’est clair, c’est net, facile à retenir et cela démontre un objectif partagé par plusieurs personnes : vous et moi. »
Une vaste farce. A travers le Syndicat, c’est effectivement une alliance d’intérêts privés… Mais surtout ceux de la Shin-Ra… Et les miens avant tout, bien entendu. Ne jamais oublier qu’en ce bas monde, il faut avant tout se battre pour soi. C’est ce que j’ai appris à mes dépends à Illusiopolis. Être crainte ou dépérir lentement.
« Je n’y vois pas d’inconvénient.
- Moi non plus. Le nom ne choque pas et devrait bien s’intégrer au paysage économique de notre monde.
- Pas mieux. »
Pas d’opposition, j’aime ça. Bien sûr, des négociations avec une certaine résistance sont toujours plus palpitantes pour moi vu qu’elles stimulent mon esprit. Cependant, la décision du Président étant tombée à un moment où je ne m’y attendais pas, je dois effectuer les tâches superficielles au plus vite : ces quatre individus ne me sont pas indispensables. Je préfère seulement les avoir dans ma poche avec cette histoire d’investissements plutôt que de les avoir contre moi entrain de comploter pour faire tomber ma compagnie, Shin-Ra ou pas.
Les contrats sont rédigés sur-le-champ par mes soins. Bien que bref et abrupts, c’est une promesse de tenir ses engagements avant tout. Nous faisons circuler les différents papiers et après un petit moment, tout est fait.
« Notre service administratif vous contactera donc pour les prochaines étapes plus officielles. En attendant, je vais m’éclipser pour m’occuper de la mise en place de nos effectifs pour que tout fonctionne comme à l’accoutumée dans les installations de la Costa del Sol. »
Les personnages me saluent, plus ou moins amicalement selon leurs personnalités et je sors en prenant l’une des portes du personnel. Je me rends désormais vers le cœur des bureaux de l’hôtel où Chantal m’attend pour faire le point sur le personnel et les changements à effectuer d’urgences dans le monde pour appliquer le plan le plus vite possible. Je longe les différents couloirs menant à notre lieu de rencontre. Je croise des membres du personnel qui me saluent chaleureusement pour certains, d’autres plus discrètement. Je n’y fais pas spécialement attention, ils ont choisi de rester, il va falloir assumer ce choix. L’efficacité avant tout, l’efficacité.
« Ah ! Vous voilà Madame la Directrice ! » dit Chantal, toute contente, accompagnée d’Yiran, la jeune recrue.
Je me demande pourquoi Chantal semble m’apprécier autant… Je peux comprendre que je puisse plaire à ceux qui aiment la discipline, m’enfin… Bref, ce n’est pas le moment de se poser ce genre de questions.
« Pour le logo, Chantal. On a eu des propositions du service marketing ?
- Mais bien sûr, voyez plutôt. »
Elle ouvre un classeur avec différentes images présentant des signes sensés représenter notre organisation nouvellement formée suite à l’accord de notre maison-mère préférée. Certaines sont beaucoup trop farfelues : une licorne ? Mais qui a eu cette idée ? Celui-ci est un peu plus intéressant : un « S » stylisé jaune avec en fond des couleurs chaudes rappelant la Costa. C’est mieux, mais ce n’est clairement pas celui que je vais choisir. Alors que les pages se tournent et que les images s’enchaînent, je m’arrête sur l’une des propositions qui me plaît de par sa sobriété mais également son élégance.
« Qui a fait ce logo ? » dis-je à Chantal, semblant satisfaite que j’ai choisi celui-ci.
Elle me répond avec un agréable sourire, presque fière d’elle :
« C’est mon petit garçon. Il travaille au service marketing de la Costa et il a entendu dire auprès de votre pilote que votre symbole dans votre monde natal, c’était une fleur jaune. »
Sacré Francis. Même ivre, il arrive à m’être utile indirectement. Même la petite Yiran semble apprécier elle aussi ce modèle.
« C’est parfait : ce lotus stylisé doré sur un fond noir me convient. La fleur rappelle mes origines, et en même temps sa couleur représente un certain luxe. Le fond noir accentue notre sérieux et notre pragmatisme dans nos affaires. C’est très bien. Il a quel âge votre « garçon » ?
- Vingt-trois ans !
- Ah oui… Hé bien, vous le féliciterez de ma part. »
Le logo, fait. Maintenant le point sur le personnel et l’organisation.
« On garde les équipes en place. Les chefs de groupe qui ont décidé de quitter leurs postes pour être rapatriés dans d’autres zones de la Shin-Ra doivent être remplacés par leurs adjoints. Et on remonte la hiérarchie au fur et à mesure, sauf cas de manque de compétences flagrants.
- Très bien. Je vais notifier nos différents départements.
- Il faut par ailleurs indiquer aux employés qu’il y aura prochainement une élection du représentant du personnel au conseil d’administration. C’est bon pour leur productivité de se croire écouter.
- Parfait Madame !
- Est-ce que nous pouvons nous en sortir en termes d’effectifs pour faire tourner nos établissements à 100% ?
- Normalement oui, la plupart du personnel civil a choisi de rester à la Costa del Sol : malgré le fait que vous preniez la main totalement. La qualité de vie y est tellement agréable comparée à certains autres mondes. Parcontre je crois qu’il y a eu un peu plus de problèmes du côté du Lieutenant Harch. La plupart des membres de la sécurité sont restés, mais certains officiers issus du SOLDAT ont préféré rejoindre le Vaisseau-Mère dans l’attente d’une nouvelle affectation.
- Très bien, je verrai cela directement avec le Lieutenant Harch.
- Par ailleurs, la sécurité de l’astroport Shin-Ra n’est en rien compromise vu qu’elle est directement assurée par des soldats de la Shin-Ra.
- Parfait Chantal. Tout se déroule comme nous le voulions. »
Le Lieutenant Harch. Je suis surprise qu’il n’ait pas quitté le navire, vu qu’il n’appréciait pas vraiment ce monde, trop ensoleillé comparé au vide des Routes Stellaires. Une proposition de réaffectation aurait dû le faire partir, et pourtant il a choisi de rester à la tête des forces de l’ordre de la Costa del Sol. Je vais devoir creuser la question avec lui pour comprendre son choix.
Bon, au moins les premiers dossiers ont été réglés rapidement. Maintenant passons aux autres, un peu moins urgents mais qui doivent être discutés pour éviter que Chantal envoie quarante notifications à tous les services : on va tout envoyer en même temps.
« Chantal, je veux donc que le logo que j’ai choisi remplace tous ceux de la Shin-Ra dans les installations correspondantes. Cela fait partie de l’accord avec la compagnie. Je veux un processus propre, éthique et responsable. N’oubliez pas.
- Oui Madame. Pendant que nous en sommes là… J’aimerais venir sur un point de détail dans le cadre des effectifs.
- Je vous écoute.
- Les pertes que nous avons dans le personnel civil sont relativement concentrées dans le domaine de la construction. Pour l’instant, cela ne perturbe pas la date de livraisons des prochains hôtels, presque achevés. Cependant, il faudra considérer le point dans le futur pour les grands travaux suivants.
- Hum. C’est en effet un point noir à analyser. Nous nous en occuperons ne temps voulu si vous le voulez bien. »
Il va falloir que je trouve des ouvriers moi maintenant. Des heures de travail dans la joie et la bonne humeur se profilent à l’horizon. En espérant qu’elles n’arrivent pas trop tôt, il ne faut pas abuser des bonnes choses.
« Amenez-moi les derniers papiers que je dois signer, s’il vous plaît Chantal.
- Tout de suite Madame. »
Elle sort de mon bureau un instant, le temps d’aller attraper les documents d’importance attendant d’être officialisés. Je reste pensive à mon bureau. Mine de rien, c’est une grosse opération commerciale qui est entrain de se dérouler et nous allons avoir besoin de rester particulièrement vigilants pour que le plan se conduise comme prévu. Il va falloir que je sois efficace. Même si en soi, il s’agit de continuer mon travail de base… Avec une liberté beaucoup plus grande.
« Voilà Madame Song ! Les derniers papiers, prêts à être signés.
- Merci Chantal. Je vais les relire avant d’apposer ma signature dessus. Pendant ce temps, appelez-moi Francis et dites-lui de m’attendre à l’arrière avec une voiturette pour aller rendre visite au Lieutenant Harch d’ici une demi-heure.
- Parfait Madame ! »
Il n’y a plus qu’à relire ces quinze pages et les signer avant d’aller voir ce fameux homme inquiétant mais avec qui je pense avoir une certaine longueur d’ondes.
C’est dans une confortable salle de la station Agrabah que se tiennent attablés avec moi Carla Zarrogona, Carlos Pasdemont, Juan-Lucas Belmarton et Marcel Panini. Des serveurs nous apportent quelques gâteaux et du thé, avant de sortir pour nous laisser discuter au calme, à l’abri des regards indiscrets. Carla maintient un sourire forcé, tandis que les trois hommes semblent attendre la suite des évènements. Carlos a son air habituel, c’est-à-dire méfiant et la mine boudeuse.
« L’occasion que j’attendais s’est présentée à moi, et je pense pouvoir vous proposer un marché en lien avec ce que vous m’aviez… Suggéré lors de notre dernière rencontre.
- Cela augure quelque chose de bon, j’en suis certaine.
- Vous devinez très bien, Madame Zarrogona. »
Je marque une pause, buvant une gorgée de thé pour m’hydrater la gorge.
« La Shin-Ra m’a confié l’usufruit de ses biens, et un transfert de personnel, à la Costa del Sol. Vous savez ce que cela veut dire. Etant la gestionnaire des biens, je vais les utiliser dans le cadre d’une nouvelle entité commerciale. »
Je vois que leurs regards expriment désormais un intérêt certain pour mes paroles. Comme des charognards autour de leur proie, ils attendent qu’une faille s’ouvre pour s’y engouffrer. Cela se lit particulièrement chez Marcel Panini, il a les yeux qui pétillent.
« C’est l’occasion rêvée pour vous, investisseurs, de choisir cette nouvelle société en investissant à long terme pour elle. Débarrassée de l’influence de la Shin-Ra, je suis libre de mener à bien nos projets… Cent pour cent Costa del Sol. »
Ce qu’ils ne savent pas, c’est qu’il y a anguille sous roches. Le Président et moi-même, nous connaissons les détails de la proposition. La Shin-Ra ne lâcherait pas tant d’investissements d’un coup sans un plan détaillé en coulisses. Cependant, il est normal pour mes interlocuteurs que cela arrive : je jouis déjà d’une grande influence sur les activités de la compagnie sur ce monde, l’autonomie n’était qu’une question de temps.
« Combien de parts en pourcentage vous seriez prête à nous vendre ? »
Sacré Carlos. Il ne perd pas le nord. Par mesures de sécurité, je ne peux pas laisser les investisseurs avoir une trop grosse part d’actifs, dans la mesure où cela viendrait jouer sur mon statut de directrice-générale de l’entité. Cependant, l’appât doit être suffisamment gros pour qu’ils mordent dedans. L’enjeu est double pour eux : d’un côté se faire de l’argent sur le dos de la Shin-Ra et éviter un monopole commercial, l’autre d’avoir un moyen de pression sur moi pour me contraindre à leurs calendriers au cas où cela serait nécessaire. Autant vous dire que cela ne va pas arriver de si tôt. Abattons les cartes.
« 20%.
- C’est bien trop peu ! »
Belmarton s’insurge.
« N’oubliez pas que c’est moi qui vais tout faire dans cette affaire, je ne vais pas en plus vous donner des parts qui devront être payées en dividendes chaque année.
- Faites un geste ! 20% n’est pas raisonnable. »
Je prévois de leur donner 30%, mais avant je veux voir si je ne peux pas tenter de récupérer de petits bonus.
« Je suis prête à monter à 25%, mais je vais devoir vous demander un geste de votre part également.
- Dites-nous.
- Juan-Lucas, vous avez un emplacement sur la côte, entre les plages et le port de pêche qui est actuellement un vaste terrain vague plein de sable.
- En effet, oui ?
- Donnez-le-moi. »
Cet emplacement n’a pas de réelle valeur immobilière pour l’instant. Cependant, il serait parfait pour la marina de luxe que je souhaiterai bâtir pour mes très chers touristes. Il faut bien un emplacement pour garer tous ces yachts après tout ! Sans compter la richissime clientèle à bord qui n’attend qu’une chose : consommer.
« C’est d’accord.
- Je vois que nous sommes sur la même longueur d’ondes. » dis-je en souriant chaleureusement.
« Cependant, ça reste trop peu pour moi, Madame Song. »
Carlos Pasdemont est sorti de son silence. Il a les coudes sur la table, me scrutant avec intérêt, le visage peu sympathique recouvert par sa sueur. C’est vrai qu’il fait très chaud aujourd’hui dans les rues de la Costa. Moi-même, je m’évente régulièrement pour éviter de succomber à cette chaleur écrasante depuis que nous avons atterri tôt le matin avec Francis. Heureusement que la salle est climatisée.
« A combien souhaiteriez-vous monter, Monsieur Pasdemont ?
- 30%.
- Qu’est-ce que vous me donner en échange ? »
Il se tait et réfléchi, jetant régulièrement des coups d’œil à Marcel Panini qui le regarde avec insistance. Les deux ont l’air intéressé, la question doit plus être sur la nature de ce qu’ils sont prêts à lâcher pour arriver à atteindre ces fameux 30%. Après quelques instants d’hésitation, Carlos retrouve la parole.
« Je possède plusieurs bâtiments de petite taille dans une rue de la Costa. Ils sont en mauvais état et sont donc inhabités, j’ai jamais eu de quoi les rénover. Si cela vous intéresse, je vous les vends pour trois sous… Comme ça, cela vous fera des emplacements pour les projets de l’entreprise.
- Hum… Cette proposition me semble raisonnable. J’accepte. »
Il hoche la tête, mais ne sourit pas. Il passe sa main dans ses cheveux et se tourne un peu vers les autres, leur laissant la parole.
« Vu qu’il y a 30%, je pense que nous allons faire de la manière suivante : 10% pour moi, 10% pour Monsieur Belmarton et 10% pour Messieurs Pasdemont et Panini qui vont s’associer pour cette affaire, je crois ?
- Tout à fait.
- Cela semble équitable. »
Je bois calmement une nouvelle gorgée de mon thé. Ils ont donc mordu à l’hameçon, c’est parfait : en plus des financements que je vais recevoir de l’usufruit des biens de la Shin-Ra et qui vont couvrir la plupart de nos investissements, des investisseurs privés vont ajouter de l’argent dans l’affaire. Nous avons un potentiel de croissance formidable. Sans compter que le Vaisseau-Mère est toujours là en cas de besoin urgent. Mais ça, personne ne le sait à part moi, Rufus et Stacey... Si elle a compris le dossier.
« Vous avez pensé à un nom ? » demande Juan-Lucas.
« Pas vraiment… Mais vu que nous agissons dans un intérêt commun de prospérité, pourquoi pas « Le Syndicat » ? C’est clair, c’est net, facile à retenir et cela démontre un objectif partagé par plusieurs personnes : vous et moi. »
Une vaste farce. A travers le Syndicat, c’est effectivement une alliance d’intérêts privés… Mais surtout ceux de la Shin-Ra… Et les miens avant tout, bien entendu. Ne jamais oublier qu’en ce bas monde, il faut avant tout se battre pour soi. C’est ce que j’ai appris à mes dépends à Illusiopolis. Être crainte ou dépérir lentement.
« Je n’y vois pas d’inconvénient.
- Moi non plus. Le nom ne choque pas et devrait bien s’intégrer au paysage économique de notre monde.
- Pas mieux. »
Pas d’opposition, j’aime ça. Bien sûr, des négociations avec une certaine résistance sont toujours plus palpitantes pour moi vu qu’elles stimulent mon esprit. Cependant, la décision du Président étant tombée à un moment où je ne m’y attendais pas, je dois effectuer les tâches superficielles au plus vite : ces quatre individus ne me sont pas indispensables. Je préfère seulement les avoir dans ma poche avec cette histoire d’investissements plutôt que de les avoir contre moi entrain de comploter pour faire tomber ma compagnie, Shin-Ra ou pas.
Les contrats sont rédigés sur-le-champ par mes soins. Bien que bref et abrupts, c’est une promesse de tenir ses engagements avant tout. Nous faisons circuler les différents papiers et après un petit moment, tout est fait.
« Notre service administratif vous contactera donc pour les prochaines étapes plus officielles. En attendant, je vais m’éclipser pour m’occuper de la mise en place de nos effectifs pour que tout fonctionne comme à l’accoutumée dans les installations de la Costa del Sol. »
Les personnages me saluent, plus ou moins amicalement selon leurs personnalités et je sors en prenant l’une des portes du personnel. Je me rends désormais vers le cœur des bureaux de l’hôtel où Chantal m’attend pour faire le point sur le personnel et les changements à effectuer d’urgences dans le monde pour appliquer le plan le plus vite possible. Je longe les différents couloirs menant à notre lieu de rencontre. Je croise des membres du personnel qui me saluent chaleureusement pour certains, d’autres plus discrètement. Je n’y fais pas spécialement attention, ils ont choisi de rester, il va falloir assumer ce choix. L’efficacité avant tout, l’efficacité.
« Ah ! Vous voilà Madame la Directrice ! » dit Chantal, toute contente, accompagnée d’Yiran, la jeune recrue.
Je me demande pourquoi Chantal semble m’apprécier autant… Je peux comprendre que je puisse plaire à ceux qui aiment la discipline, m’enfin… Bref, ce n’est pas le moment de se poser ce genre de questions.
« Pour le logo, Chantal. On a eu des propositions du service marketing ?
- Mais bien sûr, voyez plutôt. »
Elle ouvre un classeur avec différentes images présentant des signes sensés représenter notre organisation nouvellement formée suite à l’accord de notre maison-mère préférée. Certaines sont beaucoup trop farfelues : une licorne ? Mais qui a eu cette idée ? Celui-ci est un peu plus intéressant : un « S » stylisé jaune avec en fond des couleurs chaudes rappelant la Costa. C’est mieux, mais ce n’est clairement pas celui que je vais choisir. Alors que les pages se tournent et que les images s’enchaînent, je m’arrête sur l’une des propositions qui me plaît de par sa sobriété mais également son élégance.
« Qui a fait ce logo ? » dis-je à Chantal, semblant satisfaite que j’ai choisi celui-ci.
Elle me répond avec un agréable sourire, presque fière d’elle :
« C’est mon petit garçon. Il travaille au service marketing de la Costa et il a entendu dire auprès de votre pilote que votre symbole dans votre monde natal, c’était une fleur jaune. »
Sacré Francis. Même ivre, il arrive à m’être utile indirectement. Même la petite Yiran semble apprécier elle aussi ce modèle.
« C’est parfait : ce lotus stylisé doré sur un fond noir me convient. La fleur rappelle mes origines, et en même temps sa couleur représente un certain luxe. Le fond noir accentue notre sérieux et notre pragmatisme dans nos affaires. C’est très bien. Il a quel âge votre « garçon » ?
- Vingt-trois ans !
- Ah oui… Hé bien, vous le féliciterez de ma part. »
Le logo, fait. Maintenant le point sur le personnel et l’organisation.
« On garde les équipes en place. Les chefs de groupe qui ont décidé de quitter leurs postes pour être rapatriés dans d’autres zones de la Shin-Ra doivent être remplacés par leurs adjoints. Et on remonte la hiérarchie au fur et à mesure, sauf cas de manque de compétences flagrants.
- Très bien. Je vais notifier nos différents départements.
- Il faut par ailleurs indiquer aux employés qu’il y aura prochainement une élection du représentant du personnel au conseil d’administration. C’est bon pour leur productivité de se croire écouter.
- Parfait Madame !
- Est-ce que nous pouvons nous en sortir en termes d’effectifs pour faire tourner nos établissements à 100% ?
- Normalement oui, la plupart du personnel civil a choisi de rester à la Costa del Sol : malgré le fait que vous preniez la main totalement. La qualité de vie y est tellement agréable comparée à certains autres mondes. Parcontre je crois qu’il y a eu un peu plus de problèmes du côté du Lieutenant Harch. La plupart des membres de la sécurité sont restés, mais certains officiers issus du SOLDAT ont préféré rejoindre le Vaisseau-Mère dans l’attente d’une nouvelle affectation.
- Très bien, je verrai cela directement avec le Lieutenant Harch.
- Par ailleurs, la sécurité de l’astroport Shin-Ra n’est en rien compromise vu qu’elle est directement assurée par des soldats de la Shin-Ra.
- Parfait Chantal. Tout se déroule comme nous le voulions. »
Le Lieutenant Harch. Je suis surprise qu’il n’ait pas quitté le navire, vu qu’il n’appréciait pas vraiment ce monde, trop ensoleillé comparé au vide des Routes Stellaires. Une proposition de réaffectation aurait dû le faire partir, et pourtant il a choisi de rester à la tête des forces de l’ordre de la Costa del Sol. Je vais devoir creuser la question avec lui pour comprendre son choix.
Bon, au moins les premiers dossiers ont été réglés rapidement. Maintenant passons aux autres, un peu moins urgents mais qui doivent être discutés pour éviter que Chantal envoie quarante notifications à tous les services : on va tout envoyer en même temps.
« Chantal, je veux donc que le logo que j’ai choisi remplace tous ceux de la Shin-Ra dans les installations correspondantes. Cela fait partie de l’accord avec la compagnie. Je veux un processus propre, éthique et responsable. N’oubliez pas.
- Oui Madame. Pendant que nous en sommes là… J’aimerais venir sur un point de détail dans le cadre des effectifs.
- Je vous écoute.
- Les pertes que nous avons dans le personnel civil sont relativement concentrées dans le domaine de la construction. Pour l’instant, cela ne perturbe pas la date de livraisons des prochains hôtels, presque achevés. Cependant, il faudra considérer le point dans le futur pour les grands travaux suivants.
- Hum. C’est en effet un point noir à analyser. Nous nous en occuperons ne temps voulu si vous le voulez bien. »
Il va falloir que je trouve des ouvriers moi maintenant. Des heures de travail dans la joie et la bonne humeur se profilent à l’horizon. En espérant qu’elles n’arrivent pas trop tôt, il ne faut pas abuser des bonnes choses.
« Amenez-moi les derniers papiers que je dois signer, s’il vous plaît Chantal.
- Tout de suite Madame. »
Elle sort de mon bureau un instant, le temps d’aller attraper les documents d’importance attendant d’être officialisés. Je reste pensive à mon bureau. Mine de rien, c’est une grosse opération commerciale qui est entrain de se dérouler et nous allons avoir besoin de rester particulièrement vigilants pour que le plan se conduise comme prévu. Il va falloir que je sois efficace. Même si en soi, il s’agit de continuer mon travail de base… Avec une liberté beaucoup plus grande.
« Voilà Madame Song ! Les derniers papiers, prêts à être signés.
- Merci Chantal. Je vais les relire avant d’apposer ma signature dessus. Pendant ce temps, appelez-moi Francis et dites-lui de m’attendre à l’arrière avec une voiturette pour aller rendre visite au Lieutenant Harch d’ici une demi-heure.
- Parfait Madame ! »
Il n’y a plus qu’à relire ces quinze pages et les signer avant d’aller voir ce fameux homme inquiétant mais avec qui je pense avoir une certaine longueur d’ondes.