HRP : ce RP est une suite directe à Bouc Emissaire.
Non Agon ne s’était pas offusqué que l’on parle de prêtre comme d’un « métier ». Après tout, c’était bien la vision qu’il en avait. Un médiateur-psychologue-orateur aussi loin que l’avaient porté ses missions. Il n’avait pas non plus vraiment relevé que l’on puisse remettre en doute l’existence des Eternels. Après tout, ce ne serait pas la première non-croyante qu’il croiserait, bien que la Citadelle soit particulièrement exposée au Culte d’Etro. Vesper, sous le masque d’une simple civile, avait en fait eu bien de la chance.
Néanmoins… question difficile que cette jeune femme lui posait. « Je le prends pas mal non, vous en faites pas. » Comment lui répondre ? — Agon prenait un court instant de réflexion. « Comment vous dire… »
La voix sèche de Villiers le coupa net. « La Foi ne s’ébranle pas à la première épreuve venue. Ou bien ce n’était pas de la Foi. Mais une sorte de croyance, juste là pour se dire que tout ira bien et que si ce n’est pas le cas, on peut rejeter tout le mal subi sur elle. » Son regard, passé sur ses deux protégés, était aussi dur et aiguisé que l’était la lame de son épée.
Il y allait… peut-être fort.
Cette Claire semblait toute fébrile et tremblante depuis qu’ils étaient partis, et s’il y avait une chose que le paladin ne possédait manifestement pas, c’était du tact. Ou de la diplomatie. Il était temps de rattraper tout ça. Agon avisa la réfugiée d’un sourire qui se voulait rassurant.
« Mon camarade est un peu à cran, dit-il en baissant d’un ton. Il faut lui pardonner son ton dur. Je vais essayer vous répondre un peu mieux. »
Ce n’était pas la première fois qu’on le questionnait sur l’objet, ou bien la difficulté, ou non, de son office. Souvent, dans de petits villages de campagne où il n’y avait guère de prêtre pour résider à l’année. Et Agon avait fini par trouver des éléments de réponse qu’il jugeait assez satisfaisants.
En fait, selon les grands spécialistes de la doctrine religieuse, il faisait partie de la mouvance tolérante du culte. Il en était des plus rigides et fanatiques donc, mais lui préférait se représenter un Sanctum à l’image de celle qu’il avait de son entité patronne. La générosité, le pardon, la tolérance.
Claire avait peut-être froissé Villiers. Quelque part, elle sous-entendait que la Foi puisse être bien aisément balayée. Mais aussi loin qu’Agon était concerné, il ne s’en refroidirait pas.
« En vérité, c’est compliqué de vous répondre. Enfin, oui et non. Ce que je peux dire déjà, c’est que ce ne sera pas facile pour moi, oui, mais comme pour tout le monde. On va tous avoir des tâches difficiles. Vous aussi. Alors… — lâcha-t-il tout en soulevant un pan de sa soutane, afin d’éviter de se prendre les pieds dans une racine — je serai présent comme possible.
J’ai bien conscience que les gens du Domaine ne sont pas des enfants qu’on pourrait « cajoler ». Comment dire… dont on sècherait les larmes, et puis tout irait d’un coup mieux. L’une de mes tâches, c’est de les accompagner en veillant à ce que les valeurs de celle que je sers demeurent. Pour moi de la générosité, du courage, de la tolérance. De la compassion aussi.
Aider à se relever, ne pas sombrer, d’un côté. Et puis de l’autre ne pas se redresser porté par la haine, la recherche de la violence.
Croyez-moi. On peut parfois se « remettre » d’une tragédie, mais d’une façon bien plus néfaste qu’autre chose. Pour l’âme s’entend. »
Le prêtre prit le temps de lever le nez vers les branches des arbres au feuillage verdoyant. Le soleil perçait de quelques rayons dorés et chaleureux ces ramées en un spectacle apaisant. C’est un bruit qui avait attiré son attention — et ce n’était au final, rien qu’un écureuil qui s’échinait à rejoindre son abri. Une petite boule de poils rousse aux yeux ronds et brillants, qui s’arrêta un tout petit instant pour observer ces intrus qui composaient l’expédition du Sanctum en quête d’eau. Puis qui repartit aussi vite qu’il était venu. Agon ne l’avait même pas vraiment observé.
Il en avait vu bien trop, de ces gens qui avaient sombré plus qu’ils ne s’étaient remis.
Et il n’y avait souvent rien à y faire. Pas sans déployer des efforts surhumains. Malgré son discours optimiste, il doutait franchement de sa capacité à pouvoir réellement changer les choses.
C’était bien un propre des tragédies.
« Enfin, bref, s’entendit-il souffler en revenant à son interlocutrice, peu aisé, mais aussi… ou peut-être surtout parce qu’extrêmement difficile et douloureux pour… « ces gens », comme vous di — … disons pour tous. » — après tout, elle en faisait elle aussi partie, même si elle semblait se considérer hors du groupe. Il l’examinait rapidement du regard, jusqu’ici encore un peu ailleurs. Veiller à ne pas l’avoir plus retournée que Villiers. Il sourit, mais de façade. Quelque chose dans ce qu’il avait dit, dans cet échange, le dérangeait un peu. Sans qu’il sache quoi. Sûrement son discours bien trop positif par rapport à sa pensée, il s’en convainquait. « Pour ce qui est de la Foi, reprit-il, je crois qu’elle vient ensuite. Il faut déjà voir et croire en ce qu’Etro incarne, pour voir et croire en elle. Et puis j’aime me dire qu’elle préfère un monde où ses valeurs sont en chacun, qu’un monde où on s’attache à tout prix à ce qu’on vénère son nom. » Villiers leur jetait des regards de temps à autres, tendant l’oreille à ce qu’ils pouvaient se dire. Sans nul doute, il grincerait des dents à entendre les propos de l’homme de foi. Heureusement, peut-être, ce ne semblait pas être le cas.
« Nous nous arrêtons ici. » — encore caché par quelques fourrés, l’un des étangs clairs de la forêt s’apprêtait à se dévoiler à eux. Ses oiseaux chantants, son eau calme, sa brise légère. Au loin, une petite file de canards qui profitait de cet espace de quiétude infinie et éternelle. Agon avisa Claire avec un léger haussement d’épaule qu’il n’avait su contenir. « Il faut croire que même cette forêt trouve que ma réponse prend des tournants bien trop philosophiques. » — il esquissa un sourire tandis que le petit groupe d’intrus progressait jusqu’aux berges.
Remplir les gourdes, ou encore le petit gobelet, ne prit pas bien longtemps. Villiers avait insisté pour que le prêtre et la civile restent en retrait, couverts par la végétation, pendant qu’il s’exposait en allant chercher l’eau. Quelques aller-retour qui furent l’occasion de brefs échanges.
« — Quand avez-vous perdu trace des membres de votre famille ? Villiers est plutôt bien au courant concernant l’évacuation, il saura peut-être vous aider à les retrouver plus facilement.
- De quel quartier venez-vous ? Ce sera un début. »
Non Agon ne s’était pas offusqué que l’on parle de prêtre comme d’un « métier ». Après tout, c’était bien la vision qu’il en avait. Un médiateur-psychologue-orateur aussi loin que l’avaient porté ses missions. Il n’avait pas non plus vraiment relevé que l’on puisse remettre en doute l’existence des Eternels. Après tout, ce ne serait pas la première non-croyante qu’il croiserait, bien que la Citadelle soit particulièrement exposée au Culte d’Etro. Vesper, sous le masque d’une simple civile, avait en fait eu bien de la chance.
Néanmoins… question difficile que cette jeune femme lui posait. « Je le prends pas mal non, vous en faites pas. » Comment lui répondre ? — Agon prenait un court instant de réflexion. « Comment vous dire… »
La voix sèche de Villiers le coupa net. « La Foi ne s’ébranle pas à la première épreuve venue. Ou bien ce n’était pas de la Foi. Mais une sorte de croyance, juste là pour se dire que tout ira bien et que si ce n’est pas le cas, on peut rejeter tout le mal subi sur elle. » Son regard, passé sur ses deux protégés, était aussi dur et aiguisé que l’était la lame de son épée.
Il y allait… peut-être fort.
Cette Claire semblait toute fébrile et tremblante depuis qu’ils étaient partis, et s’il y avait une chose que le paladin ne possédait manifestement pas, c’était du tact. Ou de la diplomatie. Il était temps de rattraper tout ça. Agon avisa la réfugiée d’un sourire qui se voulait rassurant.
« Mon camarade est un peu à cran, dit-il en baissant d’un ton. Il faut lui pardonner son ton dur. Je vais essayer vous répondre un peu mieux. »
Ce n’était pas la première fois qu’on le questionnait sur l’objet, ou bien la difficulté, ou non, de son office. Souvent, dans de petits villages de campagne où il n’y avait guère de prêtre pour résider à l’année. Et Agon avait fini par trouver des éléments de réponse qu’il jugeait assez satisfaisants.
En fait, selon les grands spécialistes de la doctrine religieuse, il faisait partie de la mouvance tolérante du culte. Il en était des plus rigides et fanatiques donc, mais lui préférait se représenter un Sanctum à l’image de celle qu’il avait de son entité patronne. La générosité, le pardon, la tolérance.
Claire avait peut-être froissé Villiers. Quelque part, elle sous-entendait que la Foi puisse être bien aisément balayée. Mais aussi loin qu’Agon était concerné, il ne s’en refroidirait pas.
« En vérité, c’est compliqué de vous répondre. Enfin, oui et non. Ce que je peux dire déjà, c’est que ce ne sera pas facile pour moi, oui, mais comme pour tout le monde. On va tous avoir des tâches difficiles. Vous aussi. Alors… — lâcha-t-il tout en soulevant un pan de sa soutane, afin d’éviter de se prendre les pieds dans une racine — je serai présent comme possible.
J’ai bien conscience que les gens du Domaine ne sont pas des enfants qu’on pourrait « cajoler ». Comment dire… dont on sècherait les larmes, et puis tout irait d’un coup mieux. L’une de mes tâches, c’est de les accompagner en veillant à ce que les valeurs de celle que je sers demeurent. Pour moi de la générosité, du courage, de la tolérance. De la compassion aussi.
Aider à se relever, ne pas sombrer, d’un côté. Et puis de l’autre ne pas se redresser porté par la haine, la recherche de la violence.
Croyez-moi. On peut parfois se « remettre » d’une tragédie, mais d’une façon bien plus néfaste qu’autre chose. Pour l’âme s’entend. »
Le prêtre prit le temps de lever le nez vers les branches des arbres au feuillage verdoyant. Le soleil perçait de quelques rayons dorés et chaleureux ces ramées en un spectacle apaisant. C’est un bruit qui avait attiré son attention — et ce n’était au final, rien qu’un écureuil qui s’échinait à rejoindre son abri. Une petite boule de poils rousse aux yeux ronds et brillants, qui s’arrêta un tout petit instant pour observer ces intrus qui composaient l’expédition du Sanctum en quête d’eau. Puis qui repartit aussi vite qu’il était venu. Agon ne l’avait même pas vraiment observé.
Il en avait vu bien trop, de ces gens qui avaient sombré plus qu’ils ne s’étaient remis.
Et il n’y avait souvent rien à y faire. Pas sans déployer des efforts surhumains. Malgré son discours optimiste, il doutait franchement de sa capacité à pouvoir réellement changer les choses.
C’était bien un propre des tragédies.
« Enfin, bref, s’entendit-il souffler en revenant à son interlocutrice, peu aisé, mais aussi… ou peut-être surtout parce qu’extrêmement difficile et douloureux pour… « ces gens », comme vous di — … disons pour tous. » — après tout, elle en faisait elle aussi partie, même si elle semblait se considérer hors du groupe. Il l’examinait rapidement du regard, jusqu’ici encore un peu ailleurs. Veiller à ne pas l’avoir plus retournée que Villiers. Il sourit, mais de façade. Quelque chose dans ce qu’il avait dit, dans cet échange, le dérangeait un peu. Sans qu’il sache quoi. Sûrement son discours bien trop positif par rapport à sa pensée, il s’en convainquait. « Pour ce qui est de la Foi, reprit-il, je crois qu’elle vient ensuite. Il faut déjà voir et croire en ce qu’Etro incarne, pour voir et croire en elle. Et puis j’aime me dire qu’elle préfère un monde où ses valeurs sont en chacun, qu’un monde où on s’attache à tout prix à ce qu’on vénère son nom. » Villiers leur jetait des regards de temps à autres, tendant l’oreille à ce qu’ils pouvaient se dire. Sans nul doute, il grincerait des dents à entendre les propos de l’homme de foi. Heureusement, peut-être, ce ne semblait pas être le cas.
« Nous nous arrêtons ici. » — encore caché par quelques fourrés, l’un des étangs clairs de la forêt s’apprêtait à se dévoiler à eux. Ses oiseaux chantants, son eau calme, sa brise légère. Au loin, une petite file de canards qui profitait de cet espace de quiétude infinie et éternelle. Agon avisa Claire avec un léger haussement d’épaule qu’il n’avait su contenir. « Il faut croire que même cette forêt trouve que ma réponse prend des tournants bien trop philosophiques. » — il esquissa un sourire tandis que le petit groupe d’intrus progressait jusqu’aux berges.
Remplir les gourdes, ou encore le petit gobelet, ne prit pas bien longtemps. Villiers avait insisté pour que le prêtre et la civile restent en retrait, couverts par la végétation, pendant qu’il s’exposait en allant chercher l’eau. Quelques aller-retour qui furent l’occasion de brefs échanges.
« — Quand avez-vous perdu trace des membres de votre famille ? Villiers est plutôt bien au courant concernant l’évacuation, il saura peut-être vous aider à les retrouver plus facilement.
- De quel quartier venez-vous ? Ce sera un début. »