Le débarquement fut pour le moins étrange. Le nom de ce monde devait changer, ce n'était pas la cité du Crépuscule, en fait, le lieu n'avait pas changé depuis la dernière fois qu'il était venu, et comme la dernière fois, il avait la même pensé.
Le Hameau des Ténèbres ? Le Cloaque Nocturne ? La Ville Hantée ? Tout un tas d'idées jetées en l'air étaient autant de propositions pour un meilleur nom. Enfin, un nom qui irait mieux.
Il n'y avait pas un oiseau, pas un rayon de soleil. Les habitants allaient d'un point à un autre sans se parler, pour rentrer chez eux, très probablement. Les commerces étaient en grande partie fermés, les bâtiments étaient ternes et la voirie avait vu des jours meilleurs. Cette première impression lugubre n'était pas des meilleures. Fabri n'entendait que le bruit de ses pas alors qu'il arrivait vers le point de rendez-vous. Sur ses gardes, épée à portée, évidemment. Même s'il n'avait pas embarqué son armure au grand complet, il avait pris soin de prendre le nécessaire, c'était-à-dire épée et bouclier, cotte de mailles, cuirasse, le tout simple et sans détails inutiles. Remisé dans un coin, le tout avait été facile à prendre alors que les ordres de mission avaient changé.
Les informations allaient et venaient, de quatre ou cinq tons différents. Les groupes travaillaient ensemble, ainsi leurs yeux ne faisaient qu'un. Il avait été plus que facile de se rendre compte de quelque chose qui aurait pu rester ignoré ; des disparitions. Encore. Pas des mères, mais de ce qui restait. Des enfants. Laissés sans surveillance, errants, sans aide, ils étaient des proies plus que facile. Le petit groupe d'enquête s'était séparé, allant tous dans des direction différentes. Septimus, de ce qu'il savait, partait continuer une autre enquête liée aux événements. Pour le reste, il n'en avait aucune idée. Cela avait été quelque chose d'étrange, de pouvoir parler avec des personnes avec qui il n'aurait eu aucune occasion d'échanger ne serais-ce que quelques mots sans tentative de meurtre. Une Coalisée, un Consul, une journaliste, même, à eux-tous, ils étaient parvenus à solutionner le problème.
L'impression d'avoir accompli quelque chose était grisante, aussi il n'avait pas voulu s'arrêter là et était reparti immédiatement avec le premier vaisseau, attrapant au passage ses affaires et un café. Les horloges digitales était affichées partout, aux murs, sur les écrans, aux annonceurs des gares. Tout pour lui rappeler qu'il était éveillé depuis longtemps déjà, et qu'il avait probablement encore beaucoup à faire.
Il avait pas eu le temps d'en coller une à Heinrich, bordel.
De quel droit ce type osait revenir ? Pourquoi est-ce qu'il n'avait rien trouvé à lui redire ? Il l'avait laissé l'insulter, l'humilier. La prochaine fois qu'il le verrait, il n'y réfléchirait pas à deux fois. La trêve ne s'appliquait pas à des errants de merde. D'ailleurs, 'la trêve s'applique pas aux clochards ', ça aurait été la chose à dire en lui collant son poing dans sa gueule de traître ! Pas de pardons pour les parjures, c'était valable pour tout le monde, peut importe son origine.
Pourquoi n'avait-il pas rejoint un groupe d'ailleurs ? C'était ridicule, il était bien parti pour une raison ? De plus, même si ses capacités étaient probablement suffisantes pour qu'il survive tout ce temps seul au beau milieu du foutoir qu'était la politique interplanétaire -mot récolté vingt minutes plus tôt au dernier bulletin d'information sur un écran lambda du Vaisseau-Mère- il avait quand même quitté le Sanctum pour une raison ! On quitte pas quelque chose pour la seule raison de le quitter, si ? …. Il y avait fort à parier que si, en plus, ça s'était déjà vu, très probablement.
Le lieu où ses alliés du jour se trouvaient, c'était la Gare. Simple, et proche, puisqu'il avait débarqué sur le lieu-même il y avait pas cinq minutes. Il eut le déplaisir de le trouver désert. Un coup d’œil rapide alentours lui annonça que ses coéquipiers n'étaient pas là, peut-être étaient-ils sortis ? La Gare, c'était vague. L'intérieur du bâtiment ne se constituait que de voies d'arrivées et de départ, dont plusieurs étaient condamnées. La pierre, d'une probable belle couleur à l'origine, était grise dans le clair-obscur délibérément moisi du lieu. La Lumière était absente de ce monde.
Il ne put que remarquer la froideur du lieu, toute logique. Le soleil ne tapait même pas derrière les nuages, un miracle que ce monde ne soit pas gelé.
Fabrizio se posta non-loin d'un panneau d'affichage annonçant les prochains départs. - Un pour le Château de la Bête, et l'autre pour un monde qu'il avait déjà oublié. Plus qu'à attendre l'arrivée des autres, si tenté qu'ils n'étaient pas déjà arrivés et le cherchaient à l'heure actuelle. Il soupira, mal à l'aise, le café n'arrangeant rien. Il songea rapidement aux évènements récents, assez nombreux pour meubler le temps, ainsi qu'à sa mission suivante.