- Ce n’était pas dans ses principes. Non, jamais elle ne s’occupait de la diplomatie et quoi qu’en dise le moins pacifique des hommes, quoi qu’en dise Nirid… Elle n’était pas faite du tout pour parlementer. On peut lui reconnaître qu’elle s’exprime bien lorsqu’elle menace un homme ou encore quand elle le met aux arrêts… Dans ces moments, un charisme peut presque parler à sa place !
Pourtant, c’est elle qui avait choisi d’aller parlementer avec les indiens pour qu’ils aident la lumière à surveiller leur propre monde… Elle l’avait choisi mais sous sa propre contrainte ! Elle avait entendu parler de troubles à la Fourmilière, ce monde que l’on disait capable de transformer chaque visiteur en insecte... et non ! Elle avait tout fait pour arriver à temps auprès du Maître Yen Sid pour justement lui proposer ses services pour un plan organisé de contrôle des mondes… Très organisé même, si bien qu’elle se voyait déjà sécuriser une zone ! Sauf que… Manqué.
C’était pénible.
Là, dans le pays imaginaire, les yeux scrutant les tipis des indiens, elle s’avançait jusqu’à un groupe d’hommes où trônait fièrement un énorme indien qui était le chef. Elle s’arrêta devant l’attroupement, s’inclina très respectueusement et engagea la conversation le plus agréablement possible.
« Êtes-vous le chef de la tribu ? »
Il acquiesça violemment… Un « oui » très fier et certain.
« J’ai été envoyé ici par la lumière pour parlementer avec vous et voir s’il serait possible que nous unissions nos efforts pour surveiller ce monde qui est… Sujet à troubles… »
Non… Il ne l’écoutait déjà plus, ses mains étaient plongées dans une coupe en bois de fruits… et il parlait à son voisin en marmonnant sèchement. Il n’essayait même pas de faire semblant de lui prêter de l’attention… Et cela vexa terriblement la commandante… Elle avait un grade, une fierté et une réputation mais tout cela ne comptait visiblement pas pour lui.
« Monsieur le chef ? »
« Oui ? »
Il la regardait avec ses yeux sévères et ce « oui ? » l’énerva d’avantage… Elle aurait préféré qu’il continue à l’ignorer plutôt qu’il prouve qu’il n’avait absolument rien écouté et cela se ressentit dans sa voix, plus impatiente.
« Nous pourrions unir nos efforts pour surveiller le Pays imaginaire. »
A cet instant, il leva une main pour l’interrompre.
« Pourquoi viens-tu me parler, squaw ? »
Elle écarquilla les yeux aussitôt, incrédule. Comment osait-il ? Qu’avait-il pour se croire si supérieur à une guerrière de la lumière ?! Il n’était pas fichu de soulever son ventre gras pour aider les autres habitants de son propre monde…
Elle tourna les talons avant de commettre une bêtise et s’en alla…
…
Au fond, elle n’avait pas besoin de parlementer… Il suffirait peut-être de se jouer de leurs traditions pour impressionner suffisamment et réclamer d’eux tout ce qu’elle voulait. Elle n’aurait même pas besoin d’échanger des paroles avec ce crétin incapable !
Et ainsi convaincue par sa propre idée, elle se faufila dans le camp, la soirée battant son plein, toute la tribu dansant autour du feu de joie… Et même si elle n’avait que de très maigres connaissances en la matière, elle avait entendu parler comme d’une fable… de la danse de la pluie.
Et à part elle, qui était capable d’accomplir cet exploit ?
Les nuages grouillèrent alors dans le ciel tandis que le drapeau blanc dans sa main droite devenait doucement sombre… Et chacun obéissant à l’autre, l’étendard et le ciel liés par un lien puissant… La pluie n’allait pas tarder à arriver.
Ravness laissa son drapeau planté dans la terre et lévita aussitôt, s’élevant entre les danseurs qui devenaient spectateurs… Ses pieds s’éloignaient du sol tandis qu’au paroxysme de sa concentration, la garde maintenait son pouvoir psychique en tendant ses mains au-dessus d’elle.
Tournant encore et encore autour des flammes, la pluie tomba alors… Assez brusquement mais sans que cela soit trop puissant. Et après cinq minutes à se pavaner entre tous ces crédules ébahis… Elle arrêta sa ronde mais restant à un bon mètre du sol, elle s’adressa à l’assemblée d’une voix claire.
« Vos dieux m’ont chargée d’une mission, mes amis ! Veiller à ce que les terres de vos ancêtres vivent à jamais dans la prospérité… Mais cela, je ne puis le faire seule… »
Tous la regardaient avec une curiosité palpable…
« Apportez-moi votre aide pour cette quête et ensemble, nous… Aahh !
Elle émit un cri strident tandis qu’une énorme main puissante l’attira au sol et la ramena à sa petite taille. Toute sa concentration fut brisée et en un clin d’œil, le ciel redevenait nocturne. Une énorme femme la tenait par le poignet et lui cria presque :
« Les squaws ne dansent pas ! Les squaws préparent à manger ! »
Et de ses deux mains grasses, elle la souleva et la laissa tomber entre trois poulets à déplumer…
C’était ridicule, elle était ridicule… Elle n’y arrivait pas. Maître Yen Sid aurait du se rappeler que les femmes n’ont aucun pouvoir avec ces gens-là !
Les seuls hommes à avoir amadoué les indiens, à sa connaissance… C’était les cowboys. Pas de chance, elle était tout sauf une cowgirl…
D’ailleurs la seule cowgirl qu’elle connaissait, c’était Oakley.
Et tout en déplumant les poulets (essayer de s’enfuir aurait été trop dangereux, avec la femme du chef qui rôdait)… Elle envisagea l’idée d’un point de vue « mercenaire ». Après tout, seul une mercenaire comme Oakley aurait pu lui dire comment elle devait agir.
Alors… Pensons comme elle !
Il y avait de grandes chances pour que la réaction d’Oakley soit « On les y force »… Et par la puissance de feu, suffisamment les affaiblir pour qu’ils n’aient plus le choix. Oui, une vraie stratégie de cowboys…
Sinon, Oakley ferait probablement comme tous les cowboys avec les indiens… Elle marchanderait et leur offrirait… Des fusils !
Sauf que c’était absolument amoral. Ce n’était pas aux indiens de se battre, ils devaient juste surveiller.
Et dans le passé, la dernière chose que les cowboys ont faite… Cela pouvait-il être… ?
Le lendemain après-midi, un voyage à Londres… Une centaine de munnies dépensé et elle était là, dans le village, tirant un chariot recouvert d’un drap. Et ce même voile attira toute la curiosité des hommes, si bien que nulle femme ne put lui reprocher de troubler encore la fête. La main de la commandante agrippa le drap et le tira brusquement, dévoilant le trésor…
« Squaw, dis-nous ce que c’est ? »
« Oh, vous ne savez pas, chef ? Et bien goûtez, goûtez… »
Et se servant un bol de ce mystérieux tonneau à l’odeur… forte… Il le but noblement, la tête haute avant d’avaler douloureusement et d’étouffer une expiration.
« C’est… de la boisson de feu ! »
« Absolument ! Ca réchauffe, ça donne des forces… Il ne faut juste pas en boire trop et encore moins en donner aux enfants ! »
« Que veux-tu en échange ?! »
« … Que pour une fois, vous m’écoutiez. »
Et elle serait contente de se débarrasser de ces tonneaux… Elle détestait l’alcool.