• L'avantage d'être d'être un consul était sans nul doute qu'être au courant de certaines choses devenait plus aisé. Que ce soit au Jardin Radieux ou même à la Terre des Dragons, le peintre obtenait des informations plus détaillées que s'il n'avait jamais rencontré Genesis. Mais comme dans toute chose, les avantages seuls n'existent pas, il y aura toujours en contrepartie des défauts souvent non négligeables. Ukiyo ne pouvait pas agir aussi facilement qu'avant sur les mondes de ce groupe, si son double-jeu venait à être découvert, il risquait très gros. Même dans la mesure où il s'en sortirait indemne, il règnerait très certainement un mauvais climat. Pas celui dû à une guerre mais une ambiance menant à renforcer les suspicions. Le Songe avait un visage connu et il ne fallait pas que la situation s'aggrave, autant pour lui que pour ses amis. Seulement, une mauvaise nouvelle le poussa à agir très vite. Il décida alors de partir pour ce monde aux montagnes enneigées et était accompagné d'une hyène. Bien sûr, personne n'était au courant de son voyage à la Terre des Lions, encore moins que cet animal le suivait. Il n'était pas fou au point de l'amener dans les quartiers du Consulat mais cette hyène pouvait être un bon avantage. Comme chaque fois où il devait se rendre dans un lieu ou seules ses affaires personnelles rentraient en compte, il prit soin de masquer son visage. Presque à chaque fois que cela se produisait, il choisissait un accoutrement différent et un masque singulier. Cette fois-ci il opta pour des vêtements serrés, beaucoup moins amples que ceux avec lesquels on le voit d'ordinaire et surtout très clairs, presque blancs. Le masque lui était la représentation de la divinité Horus. En somme, quelque chose qui n'avait absolument rien en commun avec Amaterasu. Ukiyo avait eu un autre compagnon lors de son départ de la Terre des Lions qui lui, n'avait pas été dissimulé comme la hyène mais il ne faisait pas partie de ce voyage.

    Ukiyo était arrivé dans ce monde mais loin de là où il devait se rendre. Il était sur les sentiers, encore bien loin de la neige mais c'était un prérequis s'il voulait réussir avec brio ses envies. Il savait que dans cette journée, il allait avoir de la compagnie, un événement le lui prouvait. À l'origine, ce n'était pas au peintre de venir ici, ce n'était pas parce qu'il n'était pas qualifié mais comme dit récemment, c'était une des terres convoitée par le Consulat. Personne ne devait le voir agir sournoisement dans cette région. Donc Mirage était venue ici régler cette affaire et depuis, elle n'avait donné aucun signe de vie, elle était comme disparue. Elle était soit enlevée, soit morte. L'hypothèse qu'elle se soit enfuie était une aberration totale, ce n'était pas comme renier son groupe, non, lorsque l'on est un Songe, c'est bien plus que ça. Le peintre des rêves lui avait pourtant tout expliqué, tout ce qu'elle devait faire comportait de grands risques. Il lui avait même indiqué l'emplacement de quelques hommes qui allaient sous doute s'en prendre à elle si jamais elle était repérée. Inutile d'aller voir de ses propres yeux, c'était un échec sinon Mirage serait encore présente aux côtés des autres. Mais il fallait quand même y aller et vite, elle était peut-être en danger.

    Ukiyo se hâtait d'arpenter les sentier accompagné de la hyène avant d'arriver tout près d'un village. Il y avait de la neige comme en chaque saison ici, l'altitude faisait qu'un grand froid y régnait. La toute dernière fois que le songe était venu, il avait rencontré Genesis et avait ainsi réussi à intégrer le Consulat. Qu'elle rencontre allait-il faire aujourd'hui ? Nul ne peut le prévoir à l'avance. Benzaï la hyène semblait tout excité, il n'arrêtait pas de sentir tout ce qui l'entourait. C'était sans doute la première fois qu'il voyait de la neige, ce n'était pas quelque chose de très courant ici. Pourtant, ce n'était pas ça qui qui le rendait dans cette état, d'après lui, il y avait beaucoup d'hommes dans les environs. Mais quand Ukiyo regardait en direction du village, il n'y avait personne. Ce qui était logique, le Consulat avait demandé à ce que personne ne s'y trouve le temps qu'une affaire de génocide soit réglée. Oui, un clan tout entier avait été décimé pour ne laisser qu'un survivant et le Consulat cherchait à retrouver cet individu qui semblait être très dangereux. Il devait être attisé par le feu de la vengeance et cet homme était la cible d'Ukiyo. Il devait en apprendre plus sur lui, ce qu'avait dû faire Mirage avant lui. Mais avant toute chose, il devait se débarrasser des hommes qui cherchaient la même personne.

    Si le songe avait choisi d'emmener Banzaï c'était exactement pour ce qui venait de se passer. Cet animal pouvait sentir les gens qu'Ukiyo ne pouvait pas voir. Ainsi, il encourait moins de risque jusqu'à ce que cette bête intenable se mit à courir. S'il était partie dans la direction opposée, il n'y aurait pas eu de grands soucis mais il allait directement dans la gueule du loup. Avait-il réfléchis cinq minutes ? Il n'était plus dans sa savane accompagnée de ses congénères par centaine. Non, il n'y avait qu'Ukiyo qui pouvait l'aider mais il n'avait pas ce sens des priorités. En réalité, la seule raison qui le poussait à l'intercepter c'est qu'il en avait besoin pour se mettre toutes les hyènes de son côté. S'il venait à mourir alors le pacte tomberait à l'eau. Le peintre tendit brusquement le bras en avant, les doigts écartés pour stopper net l'animal grâce à son psychisme. Il pu alors le rapprocher de lui tout en lui disant de ne pas recommencer s'il tenait à continuer de vivre.

    Par chance, il n'avait pas eu le temps d'aller plus loin et il n'avait pas fait de bruit non plus. Mais peut-être qu'il avait tout de même été repéré. Banzaï reniflait encore autour de lui indiquant à Ukiyo que les hommes se trouvaient légèrement plus loin que le village. Il avait même été capable de donner approximativement leur nombre, c'est à dire près d'une vingtaine. Pour qu'il y en ait autant d'un coup, c'était certains qu'il ne s'agissait pas de l'élite. Il était même possible qu'ils ne soient pas du Consulat mais de la garde de l'Empereur. Toujours est-il que ce genre d'information allait jusqu'au Jardin Radieux pour éviter toute confusion. La hyène recommença à parler pour décrire les odeurs senties. Tous les hommes avaient une senteur qui définissait en quelque sorte ce monde, ils en étaient imprégnés mais un individu était différent. Comme s'il venait d'ailleurs mais Banzaï disait que l'odeur faiblissait petit à petit. Ukiyo ne voyait derrière ces mots que le visage de Mirage.

    Il s'avança alors, accroupi pour être le moins visible se cachant derrière les bâtiments. Il devait se rendre juste à la sortie du village, là où se trouvait une grotte. Le meilleur moyen de savoir où se trouvaient les hommes embusqués était de les faire sortir de leur cachette. Ukiyo créa des explosifs à l'aide de sa peinture qui à peine fût-ils créés que la mèche s'enflamma. À l'aide de son psychisme il l'envoya vers un endroit qui semblait excellent pour se cacher, à vrai dire le seul, tout en veillant à qu'on ne voit pas d'où proviennent ces bombes. Il y eu un cri et un homme se mit à courir, il avait révélé sa position. L'explosion suivi bien vite et deux personnes furent comme soufflées. Mais il y avait une chose à laquelle le peintre n'avait pas pensé jusqu'à ce qu'il le voit. D'autres hommes étaient partis quand ils sont vu l'un des leur courir. Ils étaient cachés sous un sorte de couverture blanche, couchés sur la neige. Ils étaient donc juste là, à côté mais heureusement que l'explosion fut assez puissante pour qu'ils prennent leurs jambes à leur cou. Mais ils n'étaient pas partis loin, c'était seulement pour éviter d'être blessés. Banzaï se mit à courir en leur direction comme une bête assoiffée, c'était bien une créature stupide mais Ukiyo avait à faire. La hyène avait trahi la position du peintre et les hommes se dirigeaient vers lui. Il se mit à peindre quelque chose qu'il posa sur le sol avant de se cacher derrière un autre bâtiment. Quand un des hommes s'est retrouvé là où était Ukiyo juste avant, une épée fut propulsée d'un coup dans son abdomen sans qu'il ait le temps de réagir. C'était l'avantage d'Ukiyo de pouvoir agir à distance et il n'allait pas lésiner sur les moyens.

    Il y avait peut de vent, le village était coincé entre de versant de montagne. Il était alors facile d'entendre les pas d'un homme sur la neige craquante. Six hommes, peut-être plus se trouvaient juste de l'autre côté du bâtiment. Ukiyo chargea en lui son énergie mais avant il donna un coup de pinceau sur le mur ce qui eut pour effet de le fissurer. Ensuite, il n'eût qu'à relâcher toute cette énergie qu'il dispersa en direction de ce même mur au travers de la paume de ses mains. Le mur se brisa et les pierres propulsées éclatèrent le mur d'en face et la structure s'écroula sur les hommes. Suite à ça, un silence affreux avant qu'un cri de douleur ne se fasse entendre. Ukiyo tenta de regarder discrètement, la hyène mordait un des hommes et un second allait abattre la bête. Le peintre souleva une épaisse couche de neige pour que celle-ci recouvre les ennemis laissant l'animal libre. Ils n'étaient pas mord, la neige fondait vite à leur contact malgré que l'altitude donne une température très basse. Pour la première fois depuis son départ de ce qui semblait être un foyer lors de son enfance, Ukiyo se laissa débordé par les sentiments. Il se mit à courir sachant qu'il ne devait y avoir personne d'autre, il trancha le coup d'un des deux survivants avec la magie de son pinceau. Pour finir, il se mit au dessus du dernier homme qui était couché à terre, essayant de se défaire de la neige qui semblait possédée. Le peintre se mit à genoux, prenant de ses mains fermes la tête du soldat. Une voix colérique s'échappa comme jamais il n'avait été possible d'entendre de la bouche de songe.

    -Dis-moi où elle est !

    Oui, il prenait très à coeur la disparition de Mirage, peut-être que certains diront qu'il en fait trop. Mais est-ce que cela avait-il vraiment de l'importance à cet instant ? S'attaquer aux songes étaient quelque chose qu'Ukiyo ne pouvait pas laisser passer. Après toute cette histoire, il irait voir si le Consulat y était vraiment mêlé ou non, si tel était le cas, alors tout pourrait changer. Mais les plans bien élaborés sont les meilleurs et pour ça, il faut du temps.

    -Qui ça ?

    La voix du soldat était pleine de peur, il avait l'air sincère mais le peintre n'y croyait pas un instant. La respiration du consul s'accélérait, son coeur battait comme les tambours qu'on entend dans les marches militaires. Il savait qu'il n'était pas très puissant mais pourtant, il utilisa ses mains. Pas pour utiliser son pinceau mais bien pour cogner du poing sur un visage effrayé. Il se faisait mal, autant parce qu'il ne savait pas se battre de cette manière que par le froid. Mais c'était surtout parce qu'on fond de lui, il ne se reconnaissait pas. Il avait toujours été plus subtil que ça alors se laisser envahir par des instincts primaires était un véritable choc. Il en faisait plus attention à rien, même plus à la réponse qu'il attendait et il continua ainsi jusqu'à qu'il n'en puisse pas. Il ignorait s'il l'avait tué, il ne réalisait absolument rien. Il s'éloigna du corps comme si c'était le peste pour tomber en arrière. Il resta allongé sur le dos, les yeux rivés sur les nuages. Le temps passait et passait encore sans que rien ne se passe. Ukiyo fini par reprendre ses esprit restant fébrile comme une feuille. Il se releva, balayant la neige sur ses vêtements, replaçant correctement son masque d'Horus. Il regarda l'homme qu'il venait de frapper, sa main était tendue vers la grotte. C'était peut-être là que se trouvait celle qu'il cherchait, de toute façon c'est là qu'il devait se rendre. Il n'hésita pas à rentrer, ne prêtant plus la moindre attention aux risques qu'il pouvait encourir. C'était un long couloir de roche où il faisait sombre et en peu de temps, il arriva à un cul de sac.

    Il y avait un corps sur le sol, posé comme un vulgaire sac, sans le moindre respect. Le peintre reconnu tout de suite la dépouille qui gisait malheureusement devant lui mais étant encore sous le choc, il restait comme impassible. Il n'en avait pas encore pris conscience mais il venait de perdre une amie. Il se concentrait plutôt sur ce qu'était censée faire Mirage en ce lieu. Se renseigner sur l'homme ayant résisté au génocide. Il y avait une tablette abîmée, impossible à déchiffrer à cause des ravages du temps. Ukiyo passa son pinceau sur la pierre, lui rendant son éclat d'antan. Des mots étaient maintenant lisibles. Mais il n'y avait rien de véritablement intéressant? Cela ressemblait plus à une ligne de conduite de ce dit clan, les Uchiwa. Tant de dégât pour si peu de résultat. C'est à ce moment que la dure réalité rattrapa le songe, il couru alors vers le corps inanimé de Mirage mais il n'y avait rien à faire. S'il pouvait réparer les objets, il ne pouvait rendre la vie. Il se résolu à la porter, bien que ce soit difficile. Quelque larmes coulèrent derrière son masque et il se dirigea vers la sortie. La hyène attendait à l'entrée de la grotte et tout deux reprirent la route jusqu'au vaisseau. Cette marche était ce qui remplaçait une partie des funérailles, ce moment où le cercueil partait de l'église pour aller au cimetière. Le vaisseau se mit en route, le cortège continuait pour une destination que seuls Ukiyo et les autres songes pouvaient connaître.