- Mission simple, il n'allait pas dire le contraire. Aller vérifier si les sbires de Maléfiques étaient toujours là... Non pas qu'ils y soient bienvenus, enfin, ils étaient chez eux mais.... Enfin, voir s'ils étaient toujours là, point. Rien de bien difficile à priori. Mais ça pouvait toujours se compliquer d'un autre côté, on avait que trop vu des armées entières marcher sur une ville avec la foi et ne jamais revenir. Si ça paraissait trop simple bah, c'était louche. Mais là ça paraissait différent, tout semblait si calme que Fabrizio ne pensait même pas qu'une tuile pourrait lui tomber sur le coin de la gueule. Ça lui paraissait improbable. Et ce n'était pas la première fois que ses craintes étaient endormies aussi facilement. Il avait failli retarder la mission, et avait voulu paresser toute la matinée, ne rien foutre, tout ça... Y aller vers midi quasiment. Mais là ça aurait été lui même qui se serait retombé sur le poil, carrément. C'était pas son genre quoi, merde !
Pour tout dire, les environs avaient deux airs bien distincts selon qui les regardait. La forêt pleine de brume calme et opaque étouffait les sentiments de craintes. Pendant un moment, un très court instant l'archevêque pensait que la mission se serait passé sans grand mal. La vue de ces bois calmes et endormis l'avait plongé dans une belle léthargie. Dommage pour lui, car en quittant le bois pour la terre stérile environnant le château de Maléfique, là, il s'était parfaitement réveillé. Tout semblait toujours aussi endormi, infiniment. On lui avait dit que ce monde avait été longtemps endormi, il y avait tout de suite cru. C'était un grand changement, comparé à Paris qui ne dormait que rarement. Au début il n'avait pas aimé l'ambiance douce et mélancolique. Il l'avait même détestée. Elle avait son penchant de glauque et de noirceur. La mélancolie, c'était quand on s'arrêtait et qu'on posait les yeux là où on était, là on on était passé et où on allait. La mélancolie s'était s'enterrer dans le sol pour faire l'autruche et ne plus avancer. Juste pleurer sur le chemin parcouru et avoir peur du lendemain. Oui, il avait pensé qu'il aurait pu être en ce moment à le Cité des Rêves à couler des jours tranquilles et heureux. Mais il n'en avait pas été ainsi. Cela ne servait à rien de pleurer, ça ne ferait ni revivre les morts, ni... rien. Il avait dérivé jusqu'à penser à ça. C'était dire...
Mais bientôt un trait net coupa ses réflexions plus ou moins joyeuses. La foret laissa place à un terrain vague. Vague et déraisonnablement froid et noir. Le sol était un mélange malhabile de terre dur et craquelée et se sable, se la poussière, comme de la cendre. Rien ne poussait hormis des buissons d'épines. Aucun doute, aucune vie ici ne pouvait rester ni grandir en restant pure. Quelque chose qui vivait ne pouvait rester saine d'esprit de cet endroit en l'ayant fréquenté si souvent. En fait, ce monde avait ça d'effrayant et de mélancolique, qu'à l'instar il était noir et mort.
Le jeune homme se dirigea sans hésiter sur le ponton de roche qui le séparait encore du château. Il n'avait aucune envie d'y aller, mais ça c'était encore hors de question que de fuir. L'esprit s'habituait aux possibilités, c'est pourquoi on s'imagine ne jamais pouvoir tenir plus par exemple, quand on lâche quelque chose de lourd. Tout particulièrement quand on nous a dit de la tenir un certain laps de temps. Si Angeal lui avait dit que cette mission aurait pu être optionnelle, il se serait dit qu'il serait de bon ton de fuir comme un lumineux qui voit arriver les commandants coalisés.... Pas qu'il ait une basse opinion des combattants de la Lumière, il les estimait, c'était pour l'expression. Mais c'était vrai : il se disait clairement qu'il n'avait aucune raison de fuir, et il ne voulait pas laisser une mission comme ça en plan. Elle semblait toute facile, il ne fallait jamais avoir peur sans raison non ? … Haha, elle est bonne celle-la.
Tout était désert, pour le moment. Il ne voulait pas s'attarder mais il n'y avait vraiment pas un cochon ici. Étrange, pourtant lors de sa dernière venue ici, il y en avait plein, des escouades.... Il s'en souvenait, les épines des ronciers étaient vraiment des outils pour améliorer la mémoire... Enfin, c'était étrange. Pas un souffle de vent même n'effleurait les pierres ébréchées de la muraille, le ciel chargé ne déversait aucune pluie. Tout semblait millénaire. Tout semblait purement inutilisé et inutilisable. Pourtant... pourtant il lui semblait bien avoir entendu un bruit, à l'instant !
Il tourna instinctivement la tête et porta la main à la garde de son épée. Nooon, il n'y avait rien ici, absolument rien ! Bizarre, il y croyait subitement de moins en moins...
« Qui est là !? » demanda-t-il, à qui voulait l'entendre.
Il se retourna, toujours rien.... décidément, ce château lui foutait la trouille...